Hommage à Dominique Bernard : un an après, quelles conséquences pour les écoles ?

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Céline Géraud, accompagnée de la rédaction d’Europe 1, propose chaque midi un point complet sur l’actualité suivi de débats entre invités et auditeurs.
Retrouvez "Europe 1 13h" sur : http://www.europe1.fr/emissions/europe-1-midi3

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Transcription
00:00Avec Céline Giraud sur Europe 1 et à 13h20, Céline, c'est l'heure d'accueillir le chroniqueur du jour,
00:07le journaliste Yvan Ayoufoll et le chroniqueur politique Olivier Dartigreul.
00:11Bonjour messieurs, bienvenue à bord.
00:13Merci, bonjour.
00:14Ravie de vous retrouver pour cette nouvelle semaine.
00:16Évidemment, l'école rend aujourd'hui hommage, on vient d'en parler dans le journal,
00:20à Samuel Paty et Dominique Bernard, deux professeurs assassinés par des terroristes islamistes.
00:25Et pour Europe 1, Louis Salé s'est rendu ce matin au lycée Camille C.
00:28C'est dans le 15e arrondissement pour assister à cet hommage.
00:31Face aux élèves de 4e, silencieux dans leur classe,
00:34le maire Philippe Goujon introduit l'hommage à Samuel Paty et Dominique Bernard.
00:38C'est la raison pour laquelle j'ai voulu être présent dans une classe de cet établissement,
00:42afin que vous deveniez, vous aussi, des citoyens éclairés,
00:46faire embarrage à tout ce qui peut être l'ignorance, la terreur et les mauvaises pensées.
00:52Puis la sonnerie retentit et tout l'établissement se fige.
00:57Jean-François Jobart enseigne l'histoire géo à ses élèves avec lesquels il a préparé la minute de silence.
01:02J'ai expliqué en fin de compte rapidement ce qui s'était passé.
01:07On a essayé d'échanger sur ces questions de respect, de laïcité, de débat et d'expression.
01:12On commémore quelque chose et on avance aussi.
01:15Entre eux aussi, collégiens, lycéens, on discute.
01:18Victoria est en seconde dans ce même établissement.
01:20Là, je pense qu'aujourd'hui, on va pouvoir en parler.
01:22En plus, j'ai une amie qui a été assez traumatisée par ça,
01:25parce qu'elle avait peur que ça arrive ici, dans son établissement.
01:28Il y a des caméras qui ont été installées.
01:29En vrai, ça nous rassure un peu plus, mais on se dit qu'il y a toujours cette part de risque.
01:33On se dit que ça peut nous arriver aussi à nous.
01:35La question de la sécurité à l'intérieur de l'école inquiète de plus en plus les familles.
01:39La ministre de l'Éducation a indiqué que plus de 400 établissements ont été sécurisés ces derniers mois.
01:45Louis Salé, la spécialiste éducation à Europe 1.
01:47Olivier Dartigolle, un an après Dominique Bernard, quatre ans après Samuel Paty.
01:51Qu'est-ce qui a changé, vraiment ?
01:52Ce qui n'a pas changé, c'est que l'école reste une cible pour l'islamisme,
01:58qui nous teste via cet espace, qui normalement devrait être sanctuarisé.
02:03Que très certainement, l'institution est plus prompte à réagir.
02:10Il semblerait, on l'a vu sur des récentes affaires.
02:14Par les tourcoings ?
02:16Oui, il semblerait aussi que les enseignants soient davantage protégés juridiquement, tant mieux.
02:24Mais ça reste un combat de tous les jours et on le sait bien aujourd'hui,
02:28cela sera facile dans certains établissements, beaucoup moins dans d'autres.
02:32Il faudra faire un point, un bilan de cette journée-là.
02:36Mais c'est un combat qui est encore là, qu'il faut mener.
02:43Yvon Riouf, oui ?
02:44Moi je suis moins optimiste que vous, je ne suis pas sûr que depuis 4 ans,
02:48c'est-à-dire depuis la décapitation de Samuel Paty, beaucoup de choses aient changé.
02:53J'en veux pour preuve qu'il y a toujours une réticence,
02:55y compris de la part de la ministre de l'éducation à désigner qui est l'ennemi.
02:59J'entends la ministre de l'éducation nous dire que c'est la laïcité qui est attaquée.
03:04Non, ce n'est pas la laïcité qui est attaquée, c'est l'islam qui attaque la France.
03:09Et si on n'ose pas désigner quel est cet islam radical, cet islam politique,
03:13nous passons à côté du sujet.
03:14Hier, lors des hommages à Dominique Bernard,
03:18le mot d'islamisme n'a pas été prononcé une seule fois.
03:21Des gerbes ont été déposées par le maire et par quiconque.
03:26Des gerbes de roses blanches ont été déposées devant une plaque
03:30qui rend hommage aux victimes du terrorisme, sans préciser quel terrorisme.
03:35Est-ce que c'est le terrorisme basque, le terrorisme catalan, le terrorisme breton ?
03:39Donc, il y a toujours une peur de la part qui a envahi le discours public,
03:45qui parle de séparatisme plutôt que de parler d'affrontement de l'islam conquérant,
03:49qui parle de laïcité plutôt que de dire que c'est effectivement ce même islam djihadiste qui nous menace.
03:55Et tant que les autorités publiques n'oseront pas désigner ceux qui tuent,
04:00ceux qui veulent nous tuer, ceux qui tuent des professeurs, singulièrement des professeurs,
04:03mais pas que, souvenons-nous de 2015, dans ce cas-là, la République reculera encore.
04:08Et vous avez raison, parce que la ministre de l'éducation a annoncé que la laïcité était menacée,
04:12et elle a annoncé qu'elle allait former plus de professeurs, c'est une demande du terrain à la laïcité.
04:17Non, mais je suis en désaccord avec... Heureusement que nous menons un combat pour une République laïque,
04:24puisque c'est bien de ça dont l'islamisme ne veut pas...
04:28Oui, il faut les nommer, mais dans cet exercice qui consiste à nommer les choses,
04:34certes, il faut parler de l'islamisme,
04:37certes, il faut parler de cet obscurantisme-là,
04:40mais l'une de nos réponses est en effet un projet laïc.
04:44Le projet laïc a toute sa place, simplement il faut cesser avec l'euphémisation qui consiste à ne pas désigner qui nous déteste.
04:49On a Baptiste qui a souhaité réagir, qui nous a appelé au 01-80-20-39-21, bonjour Baptiste.
04:55Et bonjour Céline, bonjour à tous.
04:56Merci d'être avec nous, alors je précise que vous êtes prof de physique-chimie en collège,
05:00alors est-ce que cette minute de silence a eu lieu dans votre établissement ce matin ?
05:04Oui, elle a eu lieu ce matin dans l'établissement, c'était de 11h à midi.
05:09Et puis on nous a demandé de faire une minute au moment qui nous semblait le plus opportun
05:16et de parler si nécessaire un peu de ce qui s'était passé avec les élèves.
05:23Et est-ce que cette minute était obligatoire ou alors sur la base du volontariat, puisqu'il semblerait que ce soit ça la règle cette fois-ci ?
05:30Là où je suis, tout le monde l'a fait.
05:33Donc il n'y a pas eu d'exception, tout le monde l'a fait.
05:37On a eu un message comme quoi la minute avait lieu entre 11h et midi, au moment où vous le souhaitez, mais tout le monde l'a fait.
05:45Et pour vous l'école est en danger ?
05:47Oui, l'école est en danger et je rejoins quand même un de vos chroniqueurs qui à l'instant disait qu'il y a eu des changements en an.
05:56Moi je les vois quand même sur le terrain dans la mesure où on a vraiment une administration qui commence à se rendre compte qu'il y a des problèmes
06:05et on est de plus en plus soutenu quand il y a ce genre d'incidents et je trouve que c'est une bonne chose.
06:10Après ça reste encore un combat du quotidien.
06:12Et à quelle menace vous vous sentez exposé vous Baptiste ?
06:15C'est vraiment des atteintes sur la laïcité.
06:19Là j'ai changé de poste comparé à l'année dernière.
06:22Je suis dans un quartier de Paris où il y en a moins, mais comparé à l'année dernière où j'étais dans une cité sensible du nord de Paris,
06:32on avait vraiment des atteintes quasi quotidiennes sur des personnes qui essayaient de rentrer avec le voile,
06:37qui essayaient d'avoir des discours un peu haineux sur une certaine catégorie de personnes, ce genre de choses.
06:43Donc c'était quoi ? Des signes religieux ? Contestations de l'enseignement ?
06:47Plus de signes religieux, beaucoup plus de signes religieux.
06:50Et c'était quoi les discours haineux que vous évoquez ? C'était de l'antisémitisme ?
06:54Il y avait un peu de ça et puis il y avait aussi...
06:58Mais pourquoi on enseigne par exemple telle ou telle chose sur le programme d'Histoire Géo ?
07:05Quelle chose par exemple ?
07:07Allez-y, tranquillement.
07:10Les histoires de civilisation.
07:14Vous savez, en cinquième, il y a les trois religions monothéistes et il y en a certaines qui sont un peu critiquées.
07:25Donc là vous parlez de la religion juive, clairement.
07:29Il n'y avait pas que celle-là, oui.
07:32La religion chrétienne aussi a été contestée ?
07:35De temps en temps.
07:37On sent que vous avez du mal à mettre des mots sur tout ça, c'est compliqué pour vous ?
07:41Oui, c'est un peu compliqué de mettre des mots parce que je ne veux pas dire qu'on essaye de faire au mieux.
07:51Et je pense qu'il y a toujours moyen de s'en sortir mais il faut qu'on soit soutenus.
07:56Et c'est des choses qui arrivent et il faut vraiment qu'on se sente soutenus.
08:00Merci beaucoup Baptiste. Le message est passé, c'était très intéressant ce témoignage du terrain.
08:04Yves-Henri Aufol, une réaction ?
08:06La gêne que l'on sent chez notre interlocuteur vient du fait que le mot laïcité lui-même est devenu un mot creux.
08:13On ne sait pas de quoi l'on parle quand on parle de laïcité.
08:15Est-ce une laïcité positive qui inclurait toutes les religions dans leur libre expression ?
08:19Ou est-ce une laïcité à la française qui exigerait précisément qu'il y ait un devoir d'indifférenciation ?
08:26C'est pour ça que je pense que la laïcité n'est pas le bon sujet.
08:30Et d'autre part, il faut également s'accorder de savoir jusqu'où peuvent aller les accommodements raisonnables dans ces cas de professeurs qui ont...
08:36D'enseignement, on l'a entendu, la vraie complexité d'enseigner en 10 secondes...
08:39Voilà, ça devient très compliqué pour eux, donc là aussi il faut poser des limites à ces accommodements raisonnables qui peuvent donner lieu en fait à des flattrides.
08:46Olivier rapidement, en 10 secondes.
08:48Réaffirmer la laïcité à la française, 35 ans après Creil, mais surtout 20 ans après la loi de 2004 qui est un bijou.
08:55Donc le fait de respecter scrupuleusement la loi de 2004 et faire en sorte qu'il faut rattraper du terrain, que de moins en moins de profs s'autocensurent.
09:04Mais c'est compliqué pour eux dans de nombreux endroits.
09:0613h29, on reste ensemble dans quelques instants. On va parler à Didier Migaud qui menace de quitter le gouvernement si le coup de rabot de 500 millions d'euros prévu pour le budget de la justice n'est pas remis en cause.
09:14A tout de suite.
09:1501 80 20 39 21, le numéro pour réagir avec Céline Giraud sur Europe 1.

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