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Anne Fulda reçoit Pauline Clavière pour son livre «Wunderland» dans #HDLivres 

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00:00Bienvenue à l'Heure des Livres, Pauline Clavière, vous êtes journaliste, vous êtes romancière
00:07également, vous avez déjà publié Laissez-nous la nuit, Les paradis gagnés, entre autres,
00:11et vous venez de publier Wunderland chez Albain Michel, un titre énigmatique, et un livre dans
00:18lequel vous vous mêlez enquête et roman. Roman et enquête, c'est un peu votre patte.
00:22C'est vrai, ça commence à le devenir en tout cas.
00:25Alors c'est un roman qui se déroule dans un petit village du Cantal, une région où vous alliez
00:32enfant, dont est originaire votre mère, qui est d'ailleurs un personnage du livre, puisqu'elle
00:40vous accompagne dans ce périple. Cette région, le Cantal, elle a un rôle en fait, c'est presque
00:46comme un personnage à part entière de votre livre. Elle imprime effectivement le Cantal,
00:53cette région imprime un peu de son identité, le livre.
00:57Je pense que cette histoire, elle est née là-bas parce que justement cette région a façonné les
01:04gens qui y vivent, et ceux à Meaux en particulier, puisque c'est là que se passe l'histoire,
01:07d'une certaine manière. C'est un mode de fonctionnement, on est à l'été 77,
01:11encore assez moyen âgeux, on vit au rythme des bêtes, au rythme des fermes, du travail de la
01:16ferme. Et quand ces deux Allemandes débarquent, c'est carrément un choc, comme un choc dans le
01:22temps en fait, une vraie déflagration, parce qu'elles amènent avec elles la modernité et beaucoup
01:27d'autres choses. Mais je pense que c'est spécifique quand même à cette région.
01:31Alors d'ailleurs, vous l'expliquez, pourquoi vous décidez d'emmener votre mère dans le périple,
01:39on le comprend après, votre mère, Lili, qui est elle aussi un sacré personnage.
01:43Ah oui, parce que c'est elle qui m'a mise dans cette galère. C'est-à-dire que, pour situer un
01:47petit peu, l'histoire c'est elle qui a été la première à me la raconter, l'histoire de ces
01:51deux Allemandes qui débarquent quand elle est encore jeune dans ce village, un genre de fête
01:56nationale, et qui vont en fait obséder, à partir de ce moment-là, les villageois. Ils vont avoir
02:01de cesse que de savoir qui elles sont, pourquoi elles ont débarqué là, pourquoi là plutôt qu'ailleurs,
02:05à une époque où les hippies se rendent sur le Larzac. Et donc elle me dit, mais c'est bizarre. Et
02:10cette légende, elle me l'a raconté toute mon enfance. Et il se trouve que l'été dernier, donc je vais
02:14avec elle en vacances, et que je tombe sur une des maisons de ces deux Allemandes, juste à côté de
02:19moi, après une soirée un peu animée. Je me dis, mais c'est pas vrai, elles sont là, et donc toutes
02:24les légendes qu'on m'a racontées, je pourrais avoir des réponses. Et c'est là qu'est venue l'idée de
02:27l'enquête. Oui, parce qu'elles débarquent, enfin elles arrivent lors de ce 14 juillet, mais elles
02:33s'installent quoi, elles font un atelier. Elles ne font pas que passer. Vous écrivez à un moment,
02:37elles venaient de loin pour débarquer nulle part. Alors effectivement, c'est là qu'on voit
02:43qu'il y a des régions comme ça, qui sont marquées par le passé, par l'histoire. Il y a
02:50énormément de fantasmes, de suspicions autour d'elles. On parle de l'Allemande qui habite
02:58à la dernière maison du Hameau. Vous écrivez à un moment, elle fut, au retour, la touriste, la petite,
03:02l'étrangère, la boche, la gamine de la colline, la fille du nazi, la hippie, la fille des bulles, la
03:06terroriste, l'artiste, la dévergondée, la droguée, la pute, la folle, la mère indigne, la vieille
03:12livrogne, la sorcière. C'est fou. En fait, c'est la peur de l'inconnu, de l'étranger, c'est ça aussi.
03:17La peur des femmes aussi, des femmes. La sorcière. C'est ça. Je dis que sorcière, c'est une façon
03:22de qualifier les femmes qu'on ne sait pas comment qualifier, qui échappe à peu près à tous les
03:26rôles que la société tolère pour les femmes. Elles sortent vraiment des sentiers battus. Elles
03:32sont tout simplement elles-mêmes. Elles ne remplissent pas de mission pour la société à
03:35proprement parler. Et ça, personne ne comprend pourquoi, qui elles sont. Et tout le monde n'a
03:40de cesse de vouloir percer ce mystère à tout prix. Et c'est vrai qu'on passe par toutes les
03:44rumeurs possibles et inimaginables. Votre bordel. Et alors, au-delà, ce qu'il y a, c'est quand même
03:50cette crainte, ce regard sur l'étranger, sur ce qui est différent. C'est ça aussi le...
03:56C'est ça. Une grosse partie du roman tient à ça aussi. En effet, c'est-à-dire que elles sont
04:02allemandes. Il y a encore dans ces campagnes françaises des relents anti-Bosch, à ce moment-là
04:07de notre histoire. Mon grand-père, parmi lesquels, a été fait prisonnier pour le STO, a servi pour le
04:13STO, donc a servi en Allemagne. Et à partir de ça, se sont noués des amitiés qui sont absolument
04:18indicibles. On ne devait pas être amis avec l'ennemi. On n'était pas amis encore moins avec
04:22des nazis. Aujourd'hui encore, c'est une partie très sombre de l'histoire franco-allemande. Et tous
04:28ces soubassements, tout ce qui s'est passé entre ces gens-là qui, malgré tout, ont vécu ensemble.
04:34Et je crois, parfois se sont aimés, ont noué des amitiés. J'avais envie de l'explorer parce que ça
04:39me paraissait une partie tue de mon histoire familiale et de notre histoire à tous.
04:43Oui, on voit effectivement votre grand-père qui apparaît. On ne dévoilera pas tout. On laissera
04:49le lecteur découvrir. Mais c'est vrai que c'est intéressant de voir qu'il y a des clichés qui
04:56demeurent à l'heure de ce qui est officiellement la réconciliation franco-allemande et de l'Europe.
05:02En tout cas, c'est à lire. Ça s'appelle « Vienne d'Orlande » et c'est paru chez Albin Michel.
05:07Merci beaucoup Pauline Clavier. Merci beaucoup Elphilda. Merci à vous.

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