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Anne Fulda reçoit Léa Chauvel-Lévy pour son livre «Une demande folle» dans #HDLivres

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Transcription
00:00 -Bienvenue à l'heure des livres, Léa Chauvel-Lévy.
00:02 Vous êtes directrice artistique pour un groupe de luxe,
00:05 vous êtes également commissaire d'exposition indépendante
00:07 et vous publiez aujourd'hui votre deuxième roman
00:10 qui s'appelle "Une demande folle", un livre qui est publié chez La Tess,
00:13 un joli roman qui est intense, émouvant,
00:16 et un livre qui est écrit un peu comme une quête,
00:18 qui traite finalement d'une question assez éternelle,
00:21 la différence entre...
00:22 et la façon dont sont entremêlées les liens du sang et ceux de l'amour.
00:26 La narratrice, qui a 28 ans, mère d'un petit garçon,
00:29 se voit déstabilisée par la demande assez baroque de son père,
00:32 qui souhaite qu'elle l'accompagne pour aller en Suisse
00:34 pour faire un test génétique pour vérifier sa paternité.
00:38 C'est une demande vertigineuse,
00:40 c'est une demande folle qui, si vous voulez,
00:45 qui fait tomber l'héroïne en dépression.
00:49 C'est vraiment un livre sur la quête de rationnel
00:51 après cette demande qui est une déflagration dans la vie de Anna,
00:55 donc qui, effectivement, à 28 ans, doit aller en Suisse.
00:58 Elle ne se pose même pas la question de savoir pourquoi elle va en Suisse.
01:01 Son père lui dit...
01:04 "Voilà, je doute, je ne sais pas.
01:06 Ta mère m'a dit que j'étais peut-être pas le géniteur.
01:09 Je veux que la science me rassure sur ce point-là."
01:13 Et elle y va, tête baissée, c'est ce que j'écris, à un moment donné,
01:16 docile, je dis "exfiltrée sous cap".
01:20 Et donc, Anna et son père vont en Suisse, là où c'est légal,
01:25 parce qu'en France, c'est très compliqué.
01:26 C'est une démarche judiciaire, une action en justice.
01:29 Et c'est un juge aux affaires familiales qui est saisi par un avocat
01:33 qui ordonne ou non un test de paternité.
01:36 Et le père, en France, a jusqu'aux 5 ans de l'enfance
01:38 s'il l'élève pour l'effectuer.
01:40 Donc, à la fin, on se rend compte que moi, en tout cas,
01:43 puisque c'est quand même une inspiration autobiographique,
01:45 je n'aurais pas pu le faire en France.
01:48 - Que vous ne cachez pas.
01:49 Alors, vous écrivez, enfin, elle...
01:52 "Il m'a fait tant de peine à se demander si je lui appartenais génétiquement.
01:56 C'est presque vulgaire, cette question-là.
01:57 Cela convoque la propriété.
01:59 Suis-je à lui ? Faites de lui ?"
02:00 En fait, cette demande, ce que vous décrivez très, très bien,
02:03 c'est en fait, l'adulte devient une petite fille blessée
02:07 qui a perdu tous ses repères.
02:09 - Oui, et je pense que si Anna s'effondre,
02:11 c'est parce qu'elle fait une fausse équivalence entre
02:13 "Si je ne suis pas ton géniteur, je ne t'aime plus."
02:16 Voilà, cette fausse équivalence fait que...
02:18 - Et lui, il ne l'aime plus.
02:20 - Oui, et lui ne l'aime plus.
02:22 Absolument, vous avez raison.
02:24 Et si le lien se défait,
02:27 s'il faut reconstruire ailleurs avec un autre père,
02:30 enfin, il y a une espèce de perte de sens.
02:32 Et on dit souvent que le père montre le chemin.
02:36 C'est directionnel.
02:37 Il y a une perte de sens aussi dans l'espace.
02:40 À un moment donné, Anna tombe sur elle-même.
02:44 Elle n'arrive plus à lire les panneaux d'affichage
02:46 quand elle rentre de Suisse après le test de paternité
02:49 parce qu'elle ne sait plus où aller.
02:50 Elle ne sait plus.
02:52 Il y a une espèce, je parle, d'hémorragie du sens.
02:54 - Oui, oui.
02:56 Donc, à l'origine semellesse, vous disiez "un doute",
02:59 une phrase que la mère, votre mère, a prononcée,
03:02 qui a avoué au père,
03:05 je ne sais pas qui est le père classique du genre,
03:09 qui renvoie à cette image toujours de "la mère est certaine".
03:13 - Le père incertain. - Le père toujours incertain.
03:16 Alors, évidemment, cela interroge sur la part de ce qui est biologique
03:19 et de ce qui ne l'est pas dans des liens
03:22 entre des parents, entre un père et une fille.
03:26 - Oui, oui, mais moi, ce que j'essaie de dire,
03:28 c'est qu'il faut désinvestir le facteur génétique
03:30 parce qu'il me semble qu'un père...
03:32 Mais oui, un père, c'est autre chose que des gamètes mâles.
03:35 Un père, c'est celui qui éduque, qui transmet.
03:37 Pour moi, c'est un lien qui se fait dans tout autre chose
03:41 que dans une histoire d'ADN.
03:45 En tout cas, moi, mon père, je ne me suis jamais posé la question
03:47 de savoir si c'était mon père.
03:49 Et ce livre, il naît de cette espèce de colère
03:52 qu'Anna et que moi, j'ai traversée,
03:55 parce que c'est un cri, ce livre,
03:57 de vouloir vérifier par la science qu'il y avait bien amour,
04:02 alors que pour moi, le lien immancessible,
04:05 c'est l'amour inconditionnel. - Bien sûr.
04:07 - Qu'importe la science.
04:08 - Et alors, Anna cherche du sens aussi.
04:09 On en a rencontré un avocat, un sociologue, un prêtre.
04:15 C'est assez intéressant.
04:16 Elle cherche à retrouver du sens, justement,
04:18 ce sens que son père ne lui donne plus.
04:19 Elle cherche à le retrouver ailleurs.
04:20 - Oui, cette quête de rationnel, en fait,
04:22 elle cherche des alliés de raison.
04:24 Elle les appelle comme ça.
04:25 Et donc, il y a un sociologue, un prêtre, un avocat,
04:29 un juge aux affaires familiales, une ancienne garde des sceaux,
04:33 parce qu'il y a quand même beaucoup la question judiciaire.
04:37 Et puis, je me suis rendue compte dans mes recherches
04:40 que la sociologie et le...
04:43 Enfin, en tout cas, le sociologue et le prêtre
04:45 étaient tout à fait d'accord sur le fait qu'un père,
04:47 c'est celui qui choisit d'être père et qui,
04:49 parce qu'il ne porte pas l'enfant, puisqu'il n'enfante pas,
04:53 doit adopter quasiment l'enfant.
04:56 On décide d'être père.
04:58 - Oui. Alors, on ne donnera pas la réponse du test.
05:01 On laisse le livre.
05:02 Mais finalement, on se rend compte que tout cela,
05:05 ce n'est pas ce qui est important.
05:07 - Ah mais non, la seule chose qui est importante,
05:09 c'est, en tout cas, là, je parle à titre personnel,
05:12 c'est ce que me lègue mon père.
05:14 Et c'est plutôt une réflexion sur le monde.
05:17 C'est plutôt une façon de se positionner.
05:19 C'est un point de vue.
05:21 Moi, je parle souvent de lui en disant que c'est un primo intellectuel.
05:25 Moi, il m'a tout donné.
05:26 Je préfère parler de philosophie, etc., que de gamètes.
05:31 - En tout cas, c'est un joli livre.
05:33 C'est à lire. Ça s'appelle "Une demande folle".
05:35 C'est paru chez Lattesse.
05:37 Merci beaucoup, Léa Chauvel.
05:39 - Merci à vous.
05:40 (Générique)
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05:45 [SILENCE]

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