• il y a 7 mois
Anne Fulda reçoit Fabrice Midal pour son livre «La théorie du bourgeon»dans #HDLivres

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Transcription
00:00 Bienvenue à l'heure des livres, Fabrice Midal.
00:02 Alors, on vous connaît, vous êtes philosophe, vous avez déjà écrit de nombreux essais.
00:07 Et là, vous venez de publier un livre sorti à votre tenue,
00:11 La théorie du bourgeon, une philosophie anti-découragement,
00:14 un livre qui est paru chez Flammarion,
00:16 un livre qui se veut, sans être de la psychologie positive, pas du tout,
00:21 un antidote un petit peu à la sinistrose ambiante dans le climat actuel,
00:25 qui est effectivement, qui s'apparente un peu à une espèce de burn-out généralisé.
00:29 Avoir une attitude qui évite deux écueils essentiels,
00:36 celui de la tyrannie de la positivité et celui du capitalisme psychique.
00:40 Alors, expliquez-nous.
00:42 J'essaie de montrer qu'il faut refaire alliance avec la vie, qu'on est vivant,
00:46 que c'est extraordinaire qu'on soit vivant, mais qu'on l'oublie,
00:49 parce qu'on veut tellement être pris par des injonctions d'être parfait, d'être performant.
00:54 Donc, les deux erreurs, c'est qu'il faut toujours être positif,
00:57 ça, ça ne marche pas parce qu'on est ému, on est bouleversé, on est touché,
01:01 on vit tous des hauts et des bas.
01:04 Et c'est pour ça que la métaphore du bourgeon me semblait juste,
01:07 parce qu'un bourgeon, de temps en temps, c'est l'hiver, de temps en temps, c'est la nuit,
01:10 de temps en temps, c'est le jour, il grandit à sa mesure.
01:13 Et donc, je trouvais que c'était une bonne métaphore d'être vivant,
01:16 et que parfois, on voudrait agir comme si on était des robots.
01:20 Et au fond, mon livre, c'est "Si vous voulez ne pas être découragé,
01:22 acceptez d'être des êtres humains".
01:24 Et ça, c'est la tyrannie de la positivité, et ce que j'appelle le capitalisme psychique,
01:28 c'est s'instrumentaliser soi-même pour avoir le meilleur rendement,
01:34 pour se gérer, alors là, vraiment, comme si on était une sorte de capital
01:37 qui est une déshumanisation très profonde.
01:40 Et en tant que philosophe, ça m'intéresse de voir pourquoi notre temps est marqué
01:43 par des nouvelles maladies, comme le burnout, le stress, la charge mentale,
01:48 qui sont des maladies où on s'instrumentalise tellement
01:51 qu'on se coupe de la vie, qu'on s'en veut de nos erreurs,
01:54 qu'on s'en veut d'être humain.
01:56 Et donc, c'est un livre un peu pour retrouver du courage,
01:58 mais aussi pour se déculpabiliser.
02:00 - Oui, parce que votre troisième voie, c'est en fait retrouver une espèce d'élan vital.
02:05 - C'est ça.
02:06 - Cet élan vital, est-ce que tout le monde a la capacité de le retrouver ?
02:09 - Ah oui, cet élan vital, il est là partout.
02:14 Et dans mon livre, j'ai même interrogé des psychiatres
02:17 qui travaillent avec des gens qui sont très malades
02:19 pour confronter ma théorie sur le terrain.
02:22 Et des gens qui sont même en grande souffrance,
02:24 ils ont cet élan vital.
02:26 Et le vrai travail, c'est comment les remettre en rapport à cela
02:29 avec ce paradoxe absolument central, c'est que la vie, ça ne se contrôle pas.
02:34 Ça s'écoute, ça se guérit, ça s'apaise, ça se respecte.
02:38 Et trop souvent, on voudrait la contrôler.
02:40 Donc les gens voudraient contrôler.
02:42 Mais vous ne pouvez pas contrôler votre peur,
02:44 vous ne pouvez pas contrôler votre chagrin,
02:46 vous ne pouvez pas contrôler votre colère.
02:48 Donc on peut les écouter, les transformer, les apaiser.
02:51 Et donc c'est ce mouvement-là que j'essaye de repenser,
02:55 de repenser cet élan vital, ce renouveau avec la vie.
02:59 Et c'est un peu frappant parce que beaucoup des grands philosophes
03:01 de la fin du 19e et du 20e, Nietzsche, Bergson,
03:04 ont beaucoup insisté en disant "Attention, nous sommes en train d'oublier la vie.
03:08 Nous sommes en train d'entrer dans une société de déshumanisation."
03:11 Et je trouve que de les relire un siècle plus tard,
03:14 c'est extrêmement frappant
03:16 parce que dans nos vies tous les jours,
03:18 c'est comme si on était en faute d'êtres humains.
03:20 Et c'est vraiment trop dommage parce que c'est merveilleux d'être des êtres humains.
03:23 - Alors, être humain, donc ça veut dire accepter ses peines, ses peurs, ses craintes.
03:29 Il y a une anecdote que vous racontez,
03:31 c'est celle du petit garçon qui se fait mal, qui a très peur.
03:36 Et en fait, ce que vous prenez, c'est non pas de nier sa douleur,
03:41 mais c'est de le divertir, au français latin, de détourner de sa douleur.
03:45 - Oui, ce que j'appelle le petit chat.
03:47 Donc dans mon livre, il y a tout un rapport à la philosophie,
03:50 mais des fois on apprend des choses.
03:52 J'allais au jardin... - Et c'est Montaigne aussi, ce que vous dites.
03:55 - Voilà, j'allais au jardin et j'ai vu un petit garçon qui tombait.
03:57 Et je regarde, il regarde sa maman,
03:59 et là il y a une fraction de seconde, on se dit "mais il va pleurer".
04:02 Et la mère, avec une sorte de génie, elle dit "regarde, il y a un petit chat".
04:06 Et au lieu de pleurer, parce qu'il n'est pas si mal,
04:08 il regarde le petit chat, il était tout content.
04:10 Et je me suis dit "ah oui, ça m'a évidemment fait penser à ce que disait Montaigne
04:13 que la meilleure manière de travailler avec nos difficultés,
04:16 c'est la diversion, qui n'est pas la fuite,
04:18 mais qui est éviter le ressassement de nos problèmes".
04:21 Au lieu de ressasser sans arrêt nos problèmes,
04:24 qu'est-ce qu'on peut faire comme diversion ?
04:26 Quel est le petit chat dans nos propres vies ?
04:29 Et alors il y a plein de manières.
04:31 On peut aller se promener, quand on est pris par des tas de choses,
04:34 on peut aller faire de la natation, on peut lire un livre.
04:36 Il y a plein de manières qu'on peut faire diversion
04:38 pour éviter de se retrouver engoncé.
04:41 Parce que ce qui se passe, c'est qu'à des moments,
04:44 la vie se fige. On est figé.
04:47 On a eu mal, on a été blessé et on se fige.
04:50 Quand on se fige, comment on fait pour redevenir vivant ?
04:53 Donc au fond, la théorie du bourgeon, c'est essayer de comprendre
04:55 qu'est-ce qui fait que je me suis figé,
04:58 souvent en voulant bien faire,
05:00 et qu'est-ce que je peux faire pour défiger, retrouver le mouvement.
05:03 Je donne plein d'approches, mais c'est sûr que la diversion
05:07 est une manière extraordinaire de sortir du figement
05:10 alors qu'on a l'impression que c'est le truc le plus idiot.
05:13 - Est-ce que la diversion, c'est une manière de retrouver
05:15 ce que vous appelez l'enfant intérieur, l'enfance qui est en nous ?
05:18 - Oui, il y a un enfant en nous, qui est plein de vie,
05:21 et aussi qui a été blessé.
05:24 Et sans doute, il faut apprendre à parler à cet enfant,
05:27 lui dire qu'on est là pour lui, pouvoir l'apaiser,
05:30 pour retrouver cette sorte de vie, de joie, d'innocence.
05:34 Parce que l'enfant, il joue, il ne se pose pas de questions,
05:36 il entre dans la vie.
05:38 Et je crois qu'on peut retrouver cette enfance,
05:41 et le livre a ceci d'un peu de particulier,
05:43 il y a plein d'exercices pratiques, il y a ces petits moments
05:46 un peu de philosophie, mais il y a plein de moments...
05:48 Je raconte un peu mon propre chemin, mais il y a plein d'exercices.
05:50 - Et voilà ce que j'allais dire, j'allais terminer là-dessus,
05:52 que vous prouvez que vous-même, vous appliquez
05:55 vos "recettes philosophiques".
05:58 - Oui, c'est-à-dire que le livre est né aussi de ma propre découverte,
06:01 de comment moi, j'étais complètement coincé, figé,
06:04 pensant que ma vie, elle devait être uniquement dans une direction.
06:07 J'étais coincé, je ne voyais vraiment pas comment faire.
06:10 Et au fond, quand on est coincé et figé dans ses idées,
06:13 c'est comme si la vie nous tendait la main et on ne la voyait pas.
06:15 Et on croit qu'on est coincé, mais c'est juste qu'on ne voit pas
06:18 qu'il y a plein d'autres choses autour de nous qui peuvent nous aider.
06:21 - En tout cas, c'est à lire, c'est de saison,
06:24 mais en fait non, c'est aussi intemporel.
06:26 Ça s'appelle "La théorie du bourgeon, une philosophie anti-découragement".
06:29 Merci beaucoup Fabrice Midal. - Merci.
06:31 (Générique)
06:36 [SILENCE]

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