Au lendemain de l'attaque du fourgon pénitentiaire qui a coûté la vie a au moins deux policiers dans l'Eure, écoutez l'interview du ministre de l'Intérieur, qui s'exprime aussi sur les émeutes en Nouvelle-Calédonie et la sécurité autour des Jeux Olympiques.
Regardez L'invité de RTL avec Amandine Bégot du 15 mai 2024
Regardez L'invité de RTL avec Amandine Bégot du 15 mai 2024
Category
🗞
NewsTranscription
00:00 *Générique*
00:04 RTL, il est 7h41, Amandine Bégaud, vous recevez le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin.
00:08 - Bonjour Monsieur le Ministre. - Bonjour.
00:09 - Et merci beaucoup d'être avec nous en studio ce matin, l'actualité est extrêmement chargée.
00:14 On va parler de la Nouvelle-Calédonie dans un instant, de cette attaque aussi sur ce fourgon pénitentiaire hier.
00:21 Deux agents pénitentiaires ont été tués, trois autres grièvement blessés.
00:26 Le pronostic vital était engagé hier soir encore pour l'un d'entre eux, est-ce que vous avez de leurs nouvelles ce matin ?
00:31 - Non, je n'ai pas plus de nouvelles que ça. Je sais que tout le monde est extrêmement choqué.
00:36 Au ministre de l'Intérieur, nous sommes choqués par la violence de cette attaque.
00:42 D'abord, dire effectivement nos condoléances à ses familles, à ses pères de famille qui vivaient dans le Canada,
00:47 ce qui faisait leur travail, qui servaient la République. Nous avons mis beaucoup de moyens pour retrouver non seulement la personne qui s'est évadée,
00:58 qui est un criminel, mais pour retrouver le gang qui l'a libérée dans des conditions ignobles.
01:06 Et je peux vous dire qu'à la fois les moyens de police et de gendarmerie, mais des moyens de coopération internationale
01:12 et de police judiciaire ont été mis à l'ordre du Président de la République sans précédent.
01:16 - Beaucoup de moyens, ça veut dire combien de personnes mobilisées aujourd'hui ?
01:19 - Je ne vais pas rentrer trop dans le détail, mais hier, pour vous donner une idée, il n'y avait plus de 450 policiers et gendarmes
01:23 pour le département de l'Eure qui faisaient le travail de recherche. Désormais, il y a énormément de traces judiciaires
01:30 qui vont nous permettre de faire ce travail d'identification. Et je l'espère dans les jours qui viennent,
01:38 pouvoir non seulement réinterpeller la personne qui était dans ce fourgon, mais qui devait répondre à ses actes devant la justice,
01:44 mais évidemment du gang de meurtriers qui l'accompagnaient.
01:46 - Ce gang, on sait combien il y a de personnes ? 4 ? 5 ?
01:49 - Non, je ne suis pas en mesure de le dire. Comme les vidéos que les gens voient sur Internet,
01:52 je ne suis pas obligé de vous donner toutes les informations que nous avons.
01:54 Ce qui est certain, c'est qu'il est extrêmement violent pour une personne qui certes était un délinquant criminel
02:00 qui était soupçonné d'avoir commandité un meurtre dans le cas du narco-banditisme à Marseille,
02:04 avec d'autres joyeusetés dans son CV de délinquant.
02:08 Mais moi, je veux aussi le constater qu'il n'était pas le plus gros délinquant que nous connaissions.
02:12 Il était dans une maison d'arrêt de province, il répondait devant un juge d'instruction de ses actes précédents.
02:21 Mais la violence, la tuerie, les moyens disproportionnés mis en place pour pouvoir libérer cette personne
02:28 ne correspond sans doute pas aux plus grands délinquants que nous ayons dans nos prisons.
02:34 Et je pense que ce qu'il faut dénoncer, c'est la barbarie avec laquelle
02:37 ces personnes se sont pris à ses parts de famille, à ses agents d'administration pénitentiaire, de sang-froid.
02:45 Et ce qui est intéressant de souligner, c'est que non seulement quand on les interpellera,
02:49 il faudra faire aussi le procès de cette sauvagerie qui touche notre société
02:53 et qui vient tuer des parts de famille pour quelqu'un qui devait simplement répondre
02:57 à ses actes devant la justice et qui avait été condamné quelques mois avant.
03:00 Un mot encore de ce gang, comme vous l'appelez.
03:04 L'enquête bien sûr est en cours et vous ne pouvez pas tout nous dire
03:08 et les auditeurs qui nous écoutent le comprennent évidemment, mais est-ce qu'ils ont été identifiés ?
03:13 Vous savez qui sont ces hommes ?
03:14 Je ne peux pas répondre à cette question.
03:15 Ce que je peux vous dire, c'est qu'on y met des moyens considérables, que nous avançons beaucoup.
03:22 Que nous devons comprendre que le narco-banditisme, ce n'est pas simplement pour les films
03:28 où on s'échange quelques dizaines de millions d'euros et qu'on part ensuite dans un pays étranger quelques mois
03:33 et on revient heureux et applaudi par sa famille ou sa communauté ou son quartier.
03:40 Le narco-banditisme qui touche le monde entier, on le voit avec nos amis néerlandais ou belges par exemple,
03:46 c'est désormais des possibilités pour des gangs criminels et encore en France,
03:49 ils sont moins développés que les autres.
03:51 C'est pour vous dire le danger qui existe ailleurs et qui peut nous toucher
03:55 pour assassiner des hommes politiques, des avocats, des journalistes, des juges,
03:59 faire de la corruption de fonctionnaires et utiliser l'immense masse de cet argent sale
04:03 que nous faisons vivre en fumant un joint, en prenant un rail de coke,
04:07 avec des commanditaires de meurtres qui parfois ne sont même pas partie de ces groupes criminels-là.
04:13 - Mais ce qu'on voit dans les films, aujourd'hui, c'est ce qui se passe en vrai dans la vraie vie.
04:16 - Mais c'est pire dans la vraie vie.
04:18 C'est pire dans la vraie vie parce qu'il n'y a pas de romantisme dans le trafic,
04:22 il n'y a que des meurtres, des massacres, des enfants de 14-15 ans qu'on torture dans des caves
04:27 parce qu'ils ne veulent pas faire le gai pour le chouffe, pour lutter contre la police,
04:32 en utilisant le fait que les mineurs sont moins condamnés que les autres.
04:35 - C'est un terrible aveu d'échec ça, monsieur le ministre, un échec collectif, disait hier François-Xavier Bélami.
04:39 - Oui, mais je pense que c'est un aveu d'échec mondial, français bien évidemment, mais mondial.
04:43 La première cause de mortalité aux Etats-Unis, c'est le fentanyl.
04:46 C'est une drogue de synthèse qui, aujourd'hui, pour un cent est produit,
04:50 et pour un dollar, vous la consommez, et c'est la première cause de mortalité du plus grand pays au monde.
04:54 - Mais comment les Etats, comment les gouvernements n'ont pas pu agir ?
04:58 - Non, mais ils agissent, et nous faisons énormément d'efforts pour limiter la capacité de la pieuvre à grandir.
05:04 Et encore en France, nous sommes parmi les législations les plus dures contre les trafiquants de stupéfiants.
05:10 Simplement, il y a dans la société, il n'y a que moins de 10% de consommateurs de drogue en France,
05:15 ce n'est pas énorme non plus, mais ces moins de 10% de consommateurs font naître une telle masse d'argent
05:20 que désormais, il y a de la recherche et développement pour faire des laboratoires,
05:23 notamment de drogue de synthèse, ce qu'on vit aujourd'hui aux Etats-Unis,
05:28 qui touche notre jeunesse, drogue de synthèse, elle explose par exemple,
05:31 il y a la baisse du produit, pourquoi ? Parce qu'en Afghanistan, nous sommes partis collectivement avec les Américains,
05:37 et du coup la première production pour un Etat terroriste, pour avoir de l'argent, c'est de la drogue, c'est de l'héroïne...
05:43 - Mais comment on lutte contre ça ? On a l'impression d'être complètement impuissants !
05:46 Il y a ces opérations PlaceNet par exemple...
05:49 - Non mais c'est très important de diminuer les points de deal,
05:52 de faire comme on l'a fait hier encore à Nice, 30 interpellations, d'arrêter des grands trafiquants internationaux.
05:57 - Mais ça ne suffit pas !
05:58 - Non mais ce qu'il faut comprendre c'est que la drogue c'est la consommation de la société.
06:02 Les trafiquants ne vendent qu'un produit que des gens achètent.
06:05 On ne peut pas à la fois, c'est ce que je vais vous dire en quelques instants,
06:09 pleurer les veuves et les orphelins sur le péage de l'heure, et continuer à fumer son joint.
06:15 Ce n'est pas possible.
06:16 Ça s'appelle la schizophrénie et chacun est responsable.
06:19 Toutes les sociétés occidentales sont touchées par cela,
06:21 le narco-dont-banditisme tue,
06:24 tue énormément, bien plus que le terrorisme,
06:27 même si le terrorisme c'est évidemment une priorité pour chacun des états,
06:29 mais tue bien plus que le terrorisme.
06:31 Et ce qui s'est passé au péage de l'heure,
06:34 c'est désormais, j'espère pour que tout le monde le comprenne,
06:37 j'ai parlé moi-même d'ensauvagement quand j'étais ministre de l'Intérieur,
06:39 j'étais très critiqué pour ça.
06:40 La violence désinhibée pour des personnes qui prennent tous les risques,
06:45 ils ne sont pas très âgés souvent,
06:47 ils ne sont parfois même pas dans le trafic de drogue,
06:49 parce qu'ils ont une commande d'un trafiquant de drogue pour libérer un voyou.
06:54 Et bien cette violence désinhibée où on tire la cash ni cof sur des pères de famille,
06:58 elle peut comprendre qu'elle a une source, c'est la consommation de drogue.
07:01 - Tous ceux qui consomment sont responsables de la mort de ces deux agents pénitentiaires.
07:05 - Ils participent à la violence extrême,
07:09 extrême, autour du trafic de drogue.
07:11 Rien n'est récréatif dans la drogue, tout est mortel.
07:13 - Encore un mot Gérald Darmanin,
07:15 de ce détenu qui a donc été, qui s'est évadé.
07:19 Pourquoi n'était-il pas escorté par des forces de police ou par des gendarmes ?
07:23 On nous dit qu'il était particulièrement surveillé,
07:25 qu'il avait visiblement tenté de s'évader en suivant les barreaux de sa cellule deux jours auparavant.
07:30 Est-ce qu'il n'y a pas une faille là-dedans ?
07:32 - Écoutez, il sera toujours évidemment le temps de faire les enquêtes
07:35 au ministère de la Justice et au ministère de l'Intérieur.
07:37 Je pense que c'est le moment du deuil.
07:38 De ce que j'en comprends, il n'y a pas eu de demande d'escorte policière.
07:42 L'acte qui était fait était un acte quotidien.
07:45 Quelqu'un qui quittait sa prison, encore une fois,
07:49 la maison de l'arrêt des Vreux, c'est pas la plus grande prison française,
07:52 c'était pas un quartier de haute sécurité, j'ai lu des bêtises.
07:55 Donc c'était pas le cas, la justice ne l'avait pas considérée,
07:58 comme moi je vous le dis, comme étant l'ennemi public numéro un.
08:01 Ce n'était pas l'ennemi public numéro un, il allait à Rouen,
08:03 voir un juge sur les instructions,
08:05 il revenait dans un fourgon blindé avec plusieurs personnes
08:08 d'administration pénitentiaire qui sont de grande qualité.
08:11 Donc c'est un acte quotidien, des choses comme ça,
08:13 il s'en passe des centaines par jour.
08:15 Donc il n'était pas particulièrement suivi,
08:18 de ce que j'en sais, je ne suis plus ministre de la justice,
08:20 par l'administration pénitentiaire, il était protégé par des fonctionnaires armés,
08:23 et ceux-là ont été abattus comme des chiens,
08:25 par des criminels qu'on va retrouver et qu'on fera condamner.
08:28 Et j'espère que ce sera aussi le procès
08:31 de la criminalité et de la violence autour de la drogue.
08:33 - Retrouver, vous l'espérez, vous nous le disiez en quelques jours.
08:36 - Mais la police gagne toujours, madame.
08:38 En République française, et c'est vrai, je peux le témoigner
08:40 depuis quatre ans que je suis ministre de l'Intérieur,
08:41 elle gagne toujours, elle met parfois du temps, c'est vrai,
08:43 mais elle gagne toujours, on retrouvera ces personnes,
08:45 ils termineront leur vie, je l'espère, derrière les barreaux.
08:47 - Autre dossier, Gérald Darmanin, sur lequel vous êtes en première ligne,
08:50 c'est la Nouvelle-Calédonie, trois jours d'émeutes,
08:53 et on a appris ce matin qu'une personne avait été tuée par balle,
08:56 est-ce que vous avez des informations sur les circonstances de ce décès ?
08:59 - Bon, d'abord je vais adresser mes condoléances à la famille de cette personne,
09:03 je ne connais pas son identité,
09:05 ça s'est passé manifestement, voilà, quelques dizaines de minutes,
09:07 à Nouméa, où il n'est pas le même fuseau horaire.
09:10 J'ai eu M. le Haut-Commissaire au téléphone,
09:12 manifestement, ce n'est pas un tir de policiers ou de gendarmes,
09:15 des forces de l'ordre qui ont tué cette personne,
09:19 donc dans des circonstances que nous ne connaissons pas,
09:22 dans une zone industrielle, une personne a été retrouvée décédée,
09:26 manifestement par balle.
09:27 - Qui a voulu se défendre, dit le Haut-Commissaire,
09:29 qui est l'équivalent du Crédit de l'État ?
09:30 - Il vient de faire une conférence de presse,
09:32 je pense que ce qui est important de dire, non seulement,
09:34 c'est qu'évidemment, il faut que le calme revienne absolument,
09:36 il y a des centaines de blessés en Nouvelle-Calédonie,
09:39 des dizaines de maisons, d'entreprises qui sont brûlées, incendiées,
09:46 on envoie le GIG depuis trois jours désormais pour faire des sauvetages.
09:48 - Et on entendait un témoin nous raconter, qui vit à Nouméa,
09:51 que ça tirait partout, que tout le monde avait des armes à feu.
09:53 Sonia Bakhez, qui est l'ancienne secrétaire d'État,
09:56 demande, réclame l'état d'urgence,
09:58 elle est présidente de la province sud.
10:00 L'état d'urgence, c'est ça la solution ?
10:01 - Il faut d'abord peut-être, puisqu'il y a beaucoup de policiers et de gendarmes
10:04 qui sont actuellement en Nouvelle-Calédonie, ou qui arrivent,
10:07 puisqu'il y a 48 heures, j'ai décidé l'envoi, non seulement de 14 cadrans de gendarmerie mobile,
10:10 mais d'renfort du GIGN et du RAID,
10:12 il faut désormais que nous respections le couvre-feu qu'il y a à Nouméa.
10:16 - Il va être remaintenu ?
10:17 - Oui, il sera maintenu par le haut-commissaire.
10:19 Je sais qu'un appel au camp sera fait dans les minutes qui viennent
10:21 par des responsables politiques, notamment indépendantistes.
10:25 C'est heureux, il faudrait qu'il soit fait,
10:27 parce que la violence en démocratie n'est jamais une bonne manière de s'exprimer.
10:32 Aujourd'hui, il y a un mort dans des circonstances qui nous appartiendront à préciser,
10:35 il y a aussi plusieurs blessés,
10:36 il y a aussi une centaine de policiers de gendarmes blessés,
10:39 dont on a évacué des familles avec des enfants, des bébés,
10:41 alors qu'on attaquait à la hache leurs casernes de gendarmerie,
10:46 ou en retirait dessus à balles réelles.
10:48 Je regrette profondément que dans le débat parlementaire que l'on ait eu,
10:52 la France Insoumise, notamment, mais pas que,
10:55 n'ait pas eu un mot pour les forces de l'ordre, qui faisait quoi ?
10:57 Respecter, respecter le vote démocratique des canadiens,
11:01 qui par trois fois ont voulu rester français,
11:03 et respecter le débat parlementaire pour que quelqu'un,
11:05 il faut bien comprendre ce qu'on fait,
11:07 qui est en Nouvelle-Calédonie, né en Nouvelle-Calédonie,
11:09 de parents calédoniens, puisse voter à des élections locales.
11:12 C'est pas la révolution.
11:13 - Il n'aurait pas fallu reporter ce projet de réforme ?
11:16 C'est ce que demandait une partie de la gauche.
11:17 - On ne reporte pas la démocratie.
11:19 Qu'est-ce que je peux dire aux citoyens calédoniens,
11:21 lorsqu'on leur dit qu'ils ne peuvent pas voter pour des élections locales,
11:24 alors qu'ils sont calédoniens, nés de parents calédoniens ?
11:26 En revanche, évidemment, la main est toujours tendue,
11:28 et nous avons invité à la main du président de la République,
11:30 tous les leaders indépendantistes et indépendantistes,
11:32 à venir nous voir à Paris pour un accord de paix.