Avec Macha Méril, comédienne
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NewsTranscription
00:00 Le 10h30 Sud Radio Média, Christine Bouillaud, Gilles Gansman.
00:05 Merci beaucoup pour les infos. Prochain rendez-vous tout à l'heure à 11h.
00:09 Mais d'ici là, Gilles Gansman, bonjour Gilles.
00:11 Bonjour Christine.
00:12 Nous recevons une personnalité, une comédienne, une légende.
00:15 Alors on ne va pas... C'est Masha Merrill.
00:18 Bonjour Masha Merrill.
00:19 Bonjour Christine, bonjour Gilles.
00:21 Merci d'être avec nous aujourd'hui, on est ravis de vous avoir.
00:24 Vous avez un documentaire qui retrace votre vie, si riche, si pleine de rebondissements,
00:32 avec on va dire des touches de poésie, des moments de doute, mais aussi des grands moments de bonheur.
00:40 Un bonheur que vous avez... Vous vous êtes construite forte du poignet.
00:44 Ce qu'il a de bien ce documentaire, je suis vraiment contente de l'avoir fait,
00:48 parce que ce n'est pas le portrait d'une actrice, c'est le portrait d'une époque à travers une actrice.
00:53 Alors coup de bol, une actrice, il y a des images, il y a les films, il y a les photos et tout ça.
00:57 Et que j'ai eu la chance de vivre une époque exceptionnelle.
01:02 Vous savez, il y a une chose qu'on ne choisit pas dans la vie, c'est sa date de naissance.
01:05 Et j'ai vécu à 20 ans, entre 20 et 30 ans, les années les plus, comment dire, fortes d'une vie,
01:13 la nouvelle vague, le nouveau roman, la nouvelle cuisine, 68.
01:19 Tout était possible.
01:20 Tout était possible.
01:21 Vous n'aimeriez pas naître maintenant ?
01:23 Ah si ! C'est-à-dire que...
01:25 Parce que chaque époque peut avoir aussi...
01:27 C'est-à-dire que les grandes époques de créativité ne sont pas nombreuses dans un siècle.
01:31 Et le siècle passé, c'était les années 30, formidables, les années folles, et les années 70.
01:36 Mes années. J'ai eu 20 ans à ce moment-là.
01:39 Ça c'est un truc qu'on ne choisit pas.
01:41 Et maintenant, on n'a pas encore...
01:42 Oui, mais on est dans des années technologiques.
01:43 Moi je suis né dans une année où j'ai découvert le micro-ondes, le téléphone...
01:49 Ce n'est pas pareil, excusez-moi, que le nouveau roman et la nouvelle vague.
01:53 Je ne veux pas vous faire de prêt.
01:54 Non, mais la technologie...
01:55 Non, mais il y a des créateurs technologiques.
01:57 Maintenant, on a l'intelligence artificielle et un nouveau monde complètement différent qui va arriver.
02:02 Intéressant.
02:04 Je ne le verrai pas, mais...
02:05 Ah, ne dites pas ça.
02:06 Si, si, si.
02:07 Je serai centenaire, je vous rassure tout de suite.
02:09 Mais quand même, il n'empêche que...
02:11 Vous êtes persuadée que vous serez centenaire ?
02:13 Je ne suis pas persuadée, mais je suis partie pour quand même.
02:15 83.
02:17 Ah, vous avez 83 ans ?
02:18 Incroyable.
02:19 Ça vous va ? 83, vous vous achetez comme pour faire un...
02:22 Moi je vous donnais 60 ans.
02:24 Non, mais blague à part.
02:26 Oui, moi je savais que vous aviez...
02:27 Non, mais pour nos auditeurs, puisqu'on vous a en vrai dans le studio,
02:30 pour ceux qui nous regardent sur les réseaux,
02:32 vous êtes d'une jeunesse et d'une pêche incroyable.
02:35 Alors vous savez, je n'aime pas ça.
02:36 Je n'aime pas qu'on dise "vous êtes jeune" comme si la jeunesse était une qualité absolument inébranlable.
02:42 Je suis comme les femmes de ma génération.
02:44 Toutes les femmes de ma génération sont comme moi.
02:46 Parce que nous avons fait le monde.
02:49 Nous avons transformé le monde, y compris le féminisme.
02:51 Parce que 68, à mes yeux, c'était un mouvement féministe.
02:55 C'est là que sont apparues les femmes.
02:58 Et les quelques films importants que j'ai faits racontaient ça.
03:01 Que ce soit le film de Godard "Une femme mariée",
03:03 que ce soit tous les films que j'ai faits là, Colette, etc.
03:06 C'était l'avènement des nouvelles femmes.
03:10 Qui étaient...
03:10 Avant, il y avait quelques privilégiées qui avaient des libertés extraordinaires.
03:15 Genre Colette, Simone de Beauvoir, Diane...
03:21 D'autres avant.
03:22 Et à partir de 68, c'était toutes les femmes.
03:26 Ça, c'est un phénomène qui a complètement transformé la société.
03:29 Tout a changé.
03:30 La façon de se parler, la façon de s'habiller, la façon de manger,
03:32 la façon d'élever les enfants, la façon de la famille...
03:35 Tout s'est transformé avec des bonnes choses et des moins bonnes.
03:39 Moi, je dis beaucoup de bonnes choses.
03:40 Mais donc, c'est nous qui l'avons fait.
03:42 Alors, comment voulez-vous qu'en ayant une identité si forte,
03:45 je ne sois pas en forme ?
03:46 Je suis en forme et j'ai encore des trucs à faire.
03:49 - Alors, vous allez retrouver Masha Merrill, la comédienne,
03:51 dans ce documentaire sur ciné classique.
03:55 C'est le 30 mars, première diffusion à 19h55,
03:58 de Christiane Spirot, qui est un très joli film.
04:01 Donc, on y reviendra tout à l'heure.
04:03 Mais si vous le voulez bien, on va faire le zapping de ces dernières heures
04:05 de ce qui s'est passé à la télévision.
04:12 - Des images qui ont tourné en boucle sur toutes les chaînes,
04:14 Masha et Christine.
04:15 Hier, le pont de Baltimore, en quelques secondes,
04:19 s'est effondré comme un château de cartes.
04:21 Julien, un Français vivant sur place, a témoigné sur BFM.
04:25 - On s'est réveillés ce matin, on était choqués, évidemment.
04:27 C'est un pont que des milliers de personnes utilisent ici chaque jour.
04:30 Moi-même, je l'ai utilisé la semaine dernière.
04:32 En fait, des amis à moi l'ont utilisé ce week-end.
04:34 Donc, en fait, ça te touche personnellement,
04:37 puisque ça aurait pu être moi, ça aurait pu être n'importe lequel de mes amis.
04:39 Donc, ça te touche viscéralement.
04:42 - On vous sent encore sous le choc, Julien. Je me trompe ?
04:44 - Oui, ce que je voudrais mettre en avant quand même,
04:48 c'est qu'il y a quand même un esprit de solidarité ici
04:50 qui s'est mis en place immédiatement, un esprit d'entraide,
04:53 qui est beau à voir, en fait.
04:54 On espère tous avoir de bonnes nouvelles assez rapidement
04:58 de ces travailleurs, des travaux publics manquants.
05:01 Mais voilà, c'est vrai que la ville est sous choc.
05:03 J'étais ce week-end, moi, au Fort McHenry pour une balade
05:06 et on voyait au loin, en fait, le pont.
05:09 Il faisait partie vraiment du paysage.
05:11 Et c'est vrai que maintenant, ce ne sera plus le cas.
05:13 - C'est incroyable de voir un paysage auquel on est habitué,
05:16 puis d'un seul coup...
05:17 - Oui, mais c'est fou parce que c'est un pont moderne.
05:19 Celui de Gênes, quand il s'est écroulé, il était vétuste.
05:22 Tandis que celui-là, il n'avait même pas 30 ans
05:25 et il était avec les techniques les plus modernes, légers.
05:28 C'est ça qui est assez émouversant.
05:30 - Il y a une enquête exclusive qui arrivera dans trois semaines sur M6
05:34 sur les vétustes des routes et des ponts aux Etats-Unis.
05:36 - Oh là là !
05:37 Alors après, il y a eu...
05:39 Je me rappelle qu'il y a la même enquête qui a été menée en France
05:41 suite à l'effondrement d'un pont.
05:43 Là aussi, il y a tout un sujet sur la sécurité.
05:46 Je ne veux pas faire peur à qui que ce soit,
05:47 mais ce qui est intéressant aussi dans l'histoire de Baltimore,
05:50 c'est que ça va couper le trafic maritime
05:51 et notamment l'expédition des véhicules qui sont produits.
05:55 C'est un des ports importants.
05:56 - Il y a des grandes usines automobiles.
05:58 - Pas loin, oui.
05:58 - Et pour l'instant, il faut pouvoir nettoyer...
06:00 - Parce que j'étais frappée quand même.
06:01 Un conteneur qui passe...
06:03 C'est quand même un estuaire, c'est une rivière.
06:05 - Oui, absolument.
06:06 - Donc, ils passent des énormes bateaux comme ça sur des rivières.
06:09 On n'est pas sûr que sur les nôtres de rivières,
06:11 on passe des gros trucs comme ça.
06:12 - Il y a quelques ports.
06:13 Il y a cinq ports en France qui sont capables d'accueillir
06:15 des portes-conteneurs de cette taille-là.
06:16 - Dans ces dents d'air, il recevait Alain Bouwer,
06:19 c'est notre ministre de l'Intérieur.
06:21 - Pisse cachée.
06:23 - Avant-hier, il expliquait que la nature des attentats,
06:26 comme le prouve celui en Russie, est en train de changer.
06:29 Écoutez.
06:29 - Il y a trois choses importantes.
06:31 D'abord, on est passé du groupe très structuré,
06:34 15, 20, 30 personnes avec un fort dispositif de soutien
06:38 à des individus.
06:40 On est en train de repasser au petit groupe, 3, 4.
06:44 Ça, c'est un changement.
06:44 C'est-à-dire qu'on est en train de retrouver de la cellule
06:47 et pas seulement de l'individu manipulé.
06:49 Deux, on n'a jamais eu autant d'adolescents interpellés
06:53 par les services d'enseignement pour la préparation
06:55 d'un attentat.
06:55 Pas parce qu'ils pensent éventuellement qu'un jour,
06:58 il faudrait établir le royaume de Dieu sur Terre.
07:01 Et troisièmement, plus de la moitié d'entre eux
07:04 sont totalement inconnus des services.
07:06 S'ils ne se répandaient pas sur Internet, les réseaux sociaux...
07:10 - Et oui, c'est par les réseaux sociaux,
07:12 quand ils se vantent d'un attentat,
07:14 qu'on arrive un peu à retracer,
07:16 et en particulier sur Télégramme aussi.
07:17 Comment vous avez vécu cet attentat ?
07:18 - Le plus frappant, c'est qu'ils se sont des mercenaires.
07:21 Ce ne sont pas des gens habités par la foi et par...
07:24 C'est ça qui est très, très nouveau.
07:27 Ils ont été payés pour ça.
07:29 Je connais un peu ce pays de Tadjikistan
07:30 parce que j'ai un neveu qui a été ambassadeur au Tadjikistan.
07:33 C'est un pays complètement sous l'emprise de la Russie,
07:37 qui est complètement...
07:39 C'est une dictature là aussi.
07:40 Mais il y a évidemment des mouvements islamistes, il y en a.
07:45 Parce qu'ils sont réprimés dans toutes ces républiques musulmanes en Russie.
07:50 Donc il y avait un contentieux quand même,
07:53 dont quand même Poutine aurait pu se méfier davantage.
07:56 Maintenant, d'aller mettre tout sur le dos de l'Ukraine,
07:58 c'est quand même un peu gros.
08:00 C'est franchement...
08:01 Je pense que ça ne va pas marcher auprès de la population russe, je veux dire.
08:05 Vous savez, il se passe des choses quand même en Russie.
08:07 Depuis la mort de Navalny,
08:10 un doute s'est insinué dans la population.
08:13 C'est tout ce que nous espérions.
08:15 C'est-à-dire qu'enfin ils prennent conscience
08:16 d'être totalement sous cette propagande
08:20 un peu grossière, un peu stupide du FSB.
08:24 Le FSB n'est pas ce qu'était le KGB d'avant.
08:26 Le KGB d'avant, c'était l'élite du pays,
08:29 du monde soviétique.
08:30 Le FSB, non, c'est des voyous, c'est des mafieux.
08:33 Tous à la solde de Poutine.
08:35 Donc moi, j'ai l'impression que...
08:37 Je l'ai dit, je voudrais accélérer le temps qu'il ait cuit, Poutine.
08:42 Il n'est peut-être pas cuit tout de suite, tout de suite,
08:43 mais enfin, je le vois en mauvaise position.
08:46 - Mais il y a quoi derrière, ma chatte ?
08:48 - Il y a d'autres, plus jeunes, des technocrates.
08:51 Ne croyez pas qu'il n'y ait pas...
08:52 - Ils arriveront déjà ?
08:53 - Mais bien sûr ! Il y a des gens intelligents en Russie,
08:56 et qui réfléchissent,
08:57 et qui sont, pour la plupart, ils ont fait des études à Harvard.
08:59 - Vous êtes une optimiste sur l'issue de...
09:01 - Mais c'est pas que je suis optimiste,
09:02 moi je suis en contact avec beaucoup de gens,
09:04 et comme je ne suis pas journaliste,
09:05 j'ai des contacts différents des vôtres,
09:07 qui sont les gens de la population.
09:08 Et il y a, évidemment, que ce sont les personnes cultivées,
09:12 instruites, qui sont anti-Poutine et qui sont contre cette guerre.
09:16 Mais ça diffuse, ça commence...
09:18 Et la mort de Navalny, déjà, c'est la première gaffe.
09:20 Parce que Navalny, il était très sympathique.
09:23 Il était aimable, il était beau, il représentait le peuple russe.
09:26 Et donc, la population n'a pas été insensible à la mort de Navalny.
09:30 Et puis maintenant, cette espèce d'obsession
09:34 de mettre tout sur l'au-delà de l'Ukraine,
09:36 c'est un peu too much.
09:36 Je pense que les gens réfléchissent en Russie, maintenant.
09:40 - D'ailleurs, on en parlera vendredi,
09:42 on recevra Anne Nivin qui a écrit un livre...
09:44 - Ah oui, bien sûr !
09:45 Alors, Anne, elle le connaît très très bien,
09:46 mais elle était un petit peu impressionnée
09:49 par tout le mouvement poutinien qui est très fort, évidemment.
09:52 Elle voit des gens à Moscou qui sont totalement aveugles,
09:56 qui ne veulent pas savoir qu'il y a la guerre...
09:58 C'est ça qui est en train de changer.
10:00 Il y a quand même une très grosse fissure.
10:02 Puis vous savez, les dictatures, ça finit toujours.
10:04 Et ça finit toujours quand il y a une gaffe,
10:06 une grosse gaffe faite par les dirigeants.
10:08 Et je crois que la grosse gaffe, il est en train de la commettre, Poutine.
10:11 - Hier, il y avait Éric Cantona,
10:13 qui a présenté son nouvel album dans "C'est à vous".
10:16 Vous allez voir, il est toujours aussi peu prolixe.
10:19 Mais il a quand même expliqué que d'écrire des chansons, pour lui,
10:22 c'était désormais quelque chose de vital
10:24 et qu'il le sauvait de l'hôpital psychiatrique.
10:27 C'était très fort, hier.
10:28 - Vous avez écrit ces textes à l'instinct,
10:32 dans un état qui était à la limite de l'inconscience.
10:34 Ce qui vous fait dire que vous n'avez pas besoin de champignons,
10:36 vous êtes naturellement psychédélique ?
10:38 - Ben non, ce que j'essaye de trouver, c'est une liberté.
10:42 Une liberté, parce que c'est pour ça que je fais ça.
10:44 J'ai l'habitude de dire "Sinon je meurs".
10:48 Et je peux dire aussi "Sinon je finis à l'hôpital psychiatrique".
10:50 Donc mon hôpital psychiatrique, je me le suis créé moi-même.
10:54 Je suis mon propre psychiatre.
10:56 Et si je n'avais pas ça, ça aurait mal tourné, sûrement.
10:59 Je n'aurais peut-être pas eu le courage de me flinguer,
11:02 mais j'aurais fini à un HP, c'est sûr.
11:05 - Et tout à l'heure, on entendra aussi Masha Merrill chanter,
11:09 je vous ai mis une chanson de côté, vous verrez.
11:12 - Alors vous savez, ça vaut pour lui comme ça vaut pour tous les musiciens.
11:15 Parce que la musique, c'est un art supérieur qui est un peu divin,
11:19 qui est un petit peu mystérieux.
11:21 C'est l'abstraction totale.
11:23 Et donc moi, tous les musiciens que je connais,
11:24 que ce soit des musiciens classiques ou des chanteurs,
11:27 ils ont une communication particulière avec ces autres mondes.
11:31 Donc lui, c'est bien sûr plus cruel
11:34 parce qu'il a aussi abusé de certaines substances.
11:38 Mais même ceux qui ne le font pas,
11:40 ils ont une sorte de communication avec le ciel.
11:46 - De la théorie à la pratique,
11:48 je vous propose d'écouter Eric Cantona qui chantait en live dans "C'est à vous".
11:52 * Extrait de "C'est à vous" de Eric Cantona *
12:17 - C'est étonnant.
12:18 - C'est beau.
12:19 Il ressemble à un chanteur russe qui s'appelait Vysotsky.
12:22 Je ne sais pas si vous vous souvenez de lui.
12:24 - Oui, je le connais.
12:25 - Il chantait un peu comme Joe Cocker.
12:26 Ceux qui chantent sans voix et finalement, c'est assez prenant.
12:29 - Oui, moi ça me fait penser aussi aux chanteurs italiens.
12:31 - On reviendra.
12:32 - Ça m'a fait penser à ça.
12:33 - Carmelo Beneo.
12:34 - Je vais le trouver.
12:35 - Pendant la pause, on va retrouver et on va revenir avec notre invité ce matin.
12:46 - Avec sa carrière.
12:47 - Avec cette croix.
12:48 - Je ne sais pas si c'est le temps de tout dire.
12:50 - Non.
12:51 - Mais quand même.
12:52 - Restez avec nous, j'ai un joli extrait de film et j'ai une jolie chanson.
12:55 - Masha Merrill est notre invité ce matin sur Sud Radio.
12:57 A tout de suite.
12:58 * Extrait de "S'il te plaît" de Masha Merrill *
13:08 - Nous recevons Masha Merrill, la comédienne avec ce documentaire sur ciné plus classique.
13:13 Ce sera le 30 mars à 19h55, 20h.
13:17 - Il y a trois diffusions Masha Merrill, qui sont programmées.
13:19 - Oui, le 3 avril il y aura cinq films et le 7 aussi dans l'après-midi avec cinq de
13:24 mes films.
13:25 - Et pourquoi vous avez accepté qu'on revienne sur votre vie ? Pourquoi ce rendez-vous ?
13:30 - Christian Spirou est une amie, j'avais fait un film avec elle et elle m'a dit "tu sais
13:34 si on prend pas, il y a des films sur tout le monde et pas sur toi".
13:37 Je dis "tu sais, je ne suis pas une star".
13:38 Je ne suis pas une star, moi je suis un peu un outsider.
13:41 Et puis elle m'a dit "écoute, je veux prendre un parti pris, c'est que c'est toi qui parles.
13:45 Il n'y aura pas d'intervenant, il n'y aura pas de gens qui viennent dire "ah elle est
13:49 merveilleuse, quelle belle actrice, j'ai tellement aimé travailler avec elle, blablabla".
13:52 Tout ça c'est chiant.
13:53 Et j'ai accepté à cause de ça.
13:55 Je me suis dit "alors là ça va être comme une espèce de rencontre avec les gens qui
13:58 regarderont le film et surtout toutes les images historiques de l'époque que j'ai traversées".
14:03 - Oui, c'est Masha Merrill par Masha Merrill.
14:05 - Oui mais pas que, c'est mon époque par Masha Merrill aussi.
14:09 C'est-à-dire que j'ai vraiment eu cette chance de traverser des choses et que j'ai été
14:12 active aussi, je n'étais pas seulement spectatrice.
14:14 Donc ça, ça m'a plu et je pense vraiment qu'elle a fait un très joli travail.
14:20 Parce qu'elle-même est de ma génération, donc ça l'a concerné.
14:24 Moi je crois beaucoup dans le cinéma, dans l'art en général, qu'il faut participer.
14:30 C'est l'engagement qui compte.
14:31 C'est le fait qu'on veuille que ce soit bien.
14:34 Et donc moi j'ai vraiment mis tout pour que ce film ait un sens.
14:39 - Alors moi j'ai découvert une chose incroyable, c'est que vous avez été assez jeune aux
14:44 Etats-Unis et là vous avez fait l'actor studio.
14:47 Il n'y a pas beaucoup de comédiens français qui ont fait l'actor studio.
14:50 Qu'est-ce que ça a changé de faire l'actor studio ?
14:52 - Alors j'étais au TNP dans le cours de Jean Villard et j'avais comme prof Gérard
14:59 Philippe, Georges Wilson, etc.
15:01 Je rêvais d'aller à l'actor studio et j'ai accepté une proposition d'un grand photographe
15:05 qui m'a proposé d'être son assistante, qui est Richard Arvedon, pour passer un an
15:09 là-bas.
15:10 Et en fait c'était pour aller à l'actor studio.
15:12 J'ai été horriblement déçue.
15:14 C'est ridicule l'actor studio.
15:16 C'était un peu la fin.
15:18 Mais c'était complètement psychanalytique.
15:20 Ils avaient tous leur shrink.
15:21 Le shrink c'est le psy.
15:23 Et donc il y avait une espèce de mélange entre la psychanalyse et le jeu d'acteur que
15:29 personnellement je ne partage pas du tout.
15:31 Alors j'ai vu des choses, des exercices.
15:33 - Faites-moi un pommier.
15:35 - Joan Woodward, elle a fait "private moment".
15:38 Ça veut dire un moment privé c'est que devant les autres élèves, elle devait faire quelque
15:44 chose qu'on ne fait devant personne.
15:45 Alors, massage de la cellulite, pipi, caca, masturbation, tout ça.
15:50 Alors nous on se marrait.
15:51 Moi j'étais à l'étage avec les blacks parce que les étrangers et les blacks n'avaient
15:56 pas le droit de participer aux exercices.
15:57 - On était à l'étage.
15:58 - Oui, on était au balcon.
15:59 Moi j'ai découvert l'Amérique aussi pendant ce moment-là.
16:02 - Les blacks étaient séparés des blancs ?
16:03 - Tout à fait.
16:04 A l'époque, les blacks n'avaient pas le droit de participer.
16:06 Il y avait de très grands acteurs qui sont devenus de grands acteurs par la suite.
16:09 Et on riait parce que c'était...
16:11 Moi je suis pour le mentir vrai.
16:13 C'est-à-dire un acteur doit faire quelque chose de tellement crédible que c'est plus
16:18 vrai que vrai.
16:19 Et en fait c'est pas vrai.
16:21 Si c'est vrai, c'est du documentaire, c'est pas la même chose.
16:24 Et donc ça c'était une de mes expériences.
16:27 Mais aussi j'ai tourné à Hollywood et j'ai trouvé ça aussi ridicule.
16:32 Parce que les studios où tout est réglementé, tout est commandé par les patrons de studio,
16:40 c'était le contraire de la Nouvelle Vague.
16:41 Et moi j'entendais qu'il y avait la Nouvelle Vague qui allait commencer en France.
16:44 Je me suis tirée, je suis rentrée d'urgence en France.
16:47 - Et nous sommes en 1964, vous tournez avec Jean-Luc Godard, donc la Nouvelle Vague.
16:53 Et là vous êtes dans un film où votre mari est pilote d'avion et dès qu'il prend un
16:58 petit avion, vous allez le tromper avec un amant.
17:01 Et il y a cet extrait qui m'a marqué où on vous voit vous habiller petit à petit,
17:09 vous mettez une jartière, vous vous préparez, vous vous apprêtez à aller voir votre amant.
17:13 Et là il n'y a que votre voix.
17:14 Écoutez cet extrait.
17:15 - Bon, maintenant où j'ai mis l'état ?
17:18 - Embrasser, caresser, on resta silencieux.
17:26 C'était l'été.
17:28 Peut-être qu'il a oublié la jalousie.
17:33 Quand est-ce qu'il rentre ?
17:35 Elle est jolie cette robe.
17:38 Moi je vais vous le dire, c'est dangereux.
17:42 Si tu ne m'écoutes pas, la liberté, le plaisir.
17:48 - Est-ce que vous l'avez vu ?
17:50 - Mais quel génie !
17:53 Vous comprenez, en 1964, il a eu cette intuition extraordinaire
17:57 que le monde allait changer par les femmes.
17:59 Et donc cette héroïne que je suis là-dedans, c'est une femme perplexe.
18:04 Une femme qui se pose des questions.
18:06 Et je pense que la conscience, ça commence par le doute.
18:08 Quand on se pose des questions, ça veut dire qu'on est déjà sur le chemin.
18:12 En gros, c'est ça la politique.
18:15 La politique, c'est poser des questions.
18:17 Et donc moi je suis incroyablement reconnaissante de m'avoir choisie comme instrument pour ce film.
18:24 Je suis dans tous les plans.
18:26 Du premier jusqu'au dernier, s'il n'y a pas mon visage, il y a un genou, une main...
18:30 - Mais quand vous dites, Mme Méryl, que vous vous attendiez,
18:33 que vous sentiez que la nouvelle vague allait arriver,
18:35 remettez-nous, nous, dans l'ambiance, parce que finalement on ne connaît pas ça.
18:39 - Oui, peut-être que les jeunes...
18:41 - Mais qu'est-ce qu'on ressentait et comment ça a été vécu,
18:44 à la fois pour les comédiens et les comédiennes comme vous,
18:46 mais par le public aussi.
18:48 - Alors la révolution, c'était que les films n'étaient plus des narratifs tirés du roman,
18:54 ou du théâtre, etc., mais qu'on tournait dans la rue,
18:58 un peu dans les conditions des documentaires,
19:00 et d'ailleurs les grands maîtres de la nouvelle vague,
19:02 c'était Iori Sivens, Jean Rouge, des documentaristes.
19:05 Et aussi Rossellini, qui avait aussi installé le cinéma dans la rue,
19:10 et avec le néo-réalisme italien.
19:12 Et ce qui faisait que, on faisait des films qui coûtaient beaucoup moins cher.
19:15 Ça n'est pas qu'une révolution esthétique,
19:17 c'est aussi une révolution de production.
19:19 Alors ils allaient voir les producteurs, Bromberger, Borga,
19:22 ils leur disaient "pour le prix d'un film, on vous fait trois films".
19:26 Et donc c'est comme ça qu'A bout de souffle a été fait,
19:28 avec deux autres films de Godard.
19:30 Donc c'était très intelligent,
19:32 parce que c'était aussi une façon de donner une offre plus grande.
19:36 Et sur les trois films, il y en avait un qui marchait,
19:38 peut-être les deux autres un peu moins,
19:40 mais donc il y avait une foison de films,
19:42 et qui a donné la parole aussi à des jeunes, à des jeunes cinéastes.
19:44 C'était un cinéma extrêmement jeune.
19:46 On était tous jeunes, les directeurs de la photo,
19:48 le metteur en scène, les acteurs,
19:50 il y avait un vent de jeunesse dans tout ça.
19:52 Nous sortions des années de Gaulle,
19:56 c'est-à-dire un monde un peu vieux, un peu du 19ème siècle.
20:00 Et tout d'un coup, c'est ça qui a été 68,
20:02 ça a été surtout l'avènement de la jeunesse.
20:04 - Mais est-ce qu'on est en train de revenir à l'époque de Gaulle,
20:08 où on referme tout ce qu'on a libéré,
20:12 et tout le travail que vous avez fait de libération ?
20:14 - Alors il y a deux choses, parce que #MeToo c'est quand même quelque chose.
20:17 Ça c'est une trouvaille quand même de jeunes,
20:19 et c'est une trouvaille internationale.
20:21 Ce qui a changé par rapport à nous,
20:23 à un moment de la Nouvelle Vague,
20:24 c'est que maintenant c'est planétaire.
20:26 Et que donc à travers ces réseaux sociaux qui sont planétaires aussi,
20:29 tous les changements sont d'une rapidité extraordinaire.
20:33 Donc le corsetage dont vous parlez, ce n'est pas politique,
20:38 c'est commercial je dirais.
20:41 C'est presque pour inciter les gens à continuer à acheter des choses inutiles.
20:46 Et donc les mouvements aujourd'hui, ils touchent tous les domaines.
20:50 Ils touchent l'écologie, la politique, les mœurs, l'envie de l'art,
20:56 et c'est planétaire.
20:58 Ça c'est quelque chose qu'on n'avait pas prévu.
21:00 En 68 on disait "la communication va propager la démocratie, les bonnes idées, etc."
21:05 Ce qu'on ne pensait pas c'est que ça propagerait aussi un peu la merde.
21:08 - Mais est-ce que vous faites partie des gens qui disent "c'était mieux avant" ?
21:11 - Pas du tout ! Parce que ça m'intéresse beaucoup ce qui se passe maintenant.
21:14 C'est un autre monde, on disait "l'intelligence artificielle va probablement
21:18 créer des nouveaux mondes auxquels on ne s'attend pas du tout."
21:20 On ne peut même pas prévoir comment ça sera.
21:23 Mais moi je crois que l'avenir est toujours intéressant.
21:29 Et qu'il y a un sens à l'histoire.
21:31 Vous dites "je suis optimiste", ce n'est pas que je suis optimiste.
21:33 C'est le monde qui est optimiste.
21:35 Regardez comme on vit mieux qu'avant quand même.
21:37 On souffre moins, on vit plus longtemps, on a guéri beaucoup de maladies.
21:41 Il y a des pays qui étaient dans la misère totale qui grâce à la globalisation
21:45 sont un petit peu moins pauvres.
21:47 Moi je crois qu'il y a une progression et qu'il y a des petits reculs de temps en temps.
21:52 Vous savez, deux pas en avant, trois pas en arrière.
21:54 - Vous ne faites pas partie de ceux qui disent "on va droit dans le mur" sur plein de sujets ?
21:59 - Pas du tout ! C'est formidable ce qui se passe maintenant.
22:02 Je pense en plus que cette communication internationale,
22:04 ça nous ouvre les yeux sur des gens d'autres mondes, d'autres façons de vivre.
22:08 Et je pense que les jeunes sont d'ailleurs très différents des vieux maintenant.
22:13 Je trouve que le gap entre les vieux et les jeunes est de plus en plus grand.
22:16 Et que les jeunes ont raison, ils ont toujours raison.
22:18 - Dans beaucoup d'interviews pour préparer cette émission,
22:21 il y a aussi le jeu de la presse,
22:24 beaucoup de choses ont été reprises sur vos propos sur François Truffaut.
22:27 - Oui, je savais que vous me posiez cette question.
22:30 - Vous ne regrettez pas de parler de quelqu'un qui ne peut plus se défendre
22:33 parce qu'il n'est plus en vie ?
22:35 - Oh écoutez, il a eu une très belle vie, tout bien.
22:38 Personne ne l'a jamais épinglé sur sa façon de traiter les femmes
22:41 et de les collectionner surtout.
22:44 Bon, moi j'en ai un peu marre qu'on le traite comme un hors tout, hors sol, un bon Dieu.
22:50 Non, lui n'est pas que lui.
22:53 Il se trouve qu'avec moi il a été tout à fait incorrect.
22:57 Je ne sais pas pourquoi je n'en parlerai pas.
22:59 Je me dis toujours que ça pourrait être rétroactif, Me Too.
23:02 Et pourquoi est-ce qu'on ne s'attaque qu'aux vivants ?
23:05 On peut aussi aller faire le ménage chez des morts.
23:08 - Il n'y a pas une époque où, je parle d'une époque que vous avez connue à Cannes,
23:12 qui étaient les Starlets, qui étaient ces filles qui rêvaient de faire du cinéma,
23:16 - Elles existent toujours, je vous rassure.
23:18 - Qui se donnaient sur les plages, etc.
23:21 - Les Starlets, il y avait certainement aussi des comédiens.
23:24 - Il n'y avait pas aussi ce pont-là des comédiennes prêtes à tout pour être au cinéma ?
23:29 - Écoutez, je pense que ceux qui ont envie de faire du cinéma,
23:35 savent qu'ils entrent dans un truc très dangereux et très sulfureux.
23:41 C'est une attirance qui est légitime.
23:46 Je pense qu'une fille qui a des capacités particulières,
23:49 qui est jolie, qui est photogénique, etc.,
23:51 ne peut pas ne pas tenter sa chance.
23:54 Les moyens qui existent aujourd'hui sont différents.
23:57 C'est-à-dire qu'on attend plus de professionnalisme.
24:01 Et puis il y a cette nouveauté, c'est la solidarité entre les filles.
24:05 Ça, ça n'existait pas. On était rival.
24:07 - La sororité, la fameuse sororité.
24:08 - La sororité, ça c'est très nouveau et ça me plaît beaucoup
24:10 parce qu'on a toujours dit que les femmes étaient toujours finalement des rivales,
24:15 un peu punaises entre elles, etc.
24:17 Non, ça c'est un des grands changements depuis Me Too.
24:20 D'ailleurs, je vois comment les jeunes fonctionnent,
24:23 ils se refilent les tuyaux, tiens, il y a un casting là,
24:26 la façon d'être comédien n'est plus du tout la même.
24:29 - On parle des femmes de leur envie de tout faire pour faire du cinéma,
24:32 mais on peut mettre les hommes dans le même...
24:34 - Les garçons !
24:36 - Les garçons qui veulent faire du cinéma, il y en a moins quand même.
24:38 - Oui, et puis parce qu'il y a moins de concurrence,
24:40 il y a plus de rôles pour hommes, alors qu'il y a moins de rôles pour les femmes,
24:43 et donc forcément, il y a de la concurrence.
24:45 - Non, mais les femmes, il faut qu'elles soient jolies quand même,
24:46 mais rien à faire, il ne faut pas que ça bêle.
24:47 Donc c'est souvent des mannequins, des filles qui ont des bons physiques.
24:50 - Les critères ne sont pas les mêmes.
24:51 - Il n'y a pas une différence, il y a des filles qui sont jolies,
24:53 des filles qui sont moins, et ça existe dans le cinéma comme ailleurs.
24:57 - Allez, on va faire la pause, et on continue de discuter avec vous,
25:01 avec grand bonheur, on va parler de toute votre actualité aussi,
25:04 de tout ce qui arrive avec vous, Machin Méril, à tout de suite.
25:07 - Le 10h30, Sud Radio Média, Christine Bouillaud, Gilles Anzeman,
25:14 Sud Radio, le supplément média.
25:17 - Toujours en compagnie de Machin Méril, sur Sud Radio,
25:20 on va parler évidemment de ce documentaire que vous pouvez voir à partir du 30 mars,
25:25 le 30 mars, c'est la première diffusion, c'est sur Ciné + Classique,
25:30 il ne faut pas se tromper.
25:31 - C'est ça.
25:32 - Il y a aussi la musique autour de ça, mais avant de parler du prix.
25:35 - C'est du MyKanal aussi.
25:36 - Voilà, MyKanal, le prix Michel Legrand, puisque vous aimez la musique,
25:40 on le sent, on sait que c'est quelque chose qui domine aussi votre univers.
25:44 Je voulais savoir, puisqu'on parlait des femmes tout à l'heure,
25:46 ce que vous pensez de la polémique autour de cette Aya Nakamura
25:50 qui va chanter Edith Piaf aux I.O.
25:53 Est-ce que finalement, ce n'est pas célébrer la musique d'avant,
25:57 la musique d'aujourd'hui, ou est-ce qu'on en fait tout un...
26:01 - Franchement, il n'y a pas de quoi fouetter un chat.
26:05 Elle ne chante pas très bien, mais enfin, il y a des gens qui aiment ça.
26:08 Et puis, Edith Piaf, c'est un monument, pour les étrangers, tout le monde connaît,
26:14 il faut aussi penser à ça.
26:15 Je trouve franchement que cette polémique est un peu ridicule.
26:18 Mais je sais que... Moi, j'ai l'oreille de Michel Legrand,
26:24 et je sais qu'il y avait des chanteuses qui étaient pour lui, impossibles.
26:28 C'est-à-dire qu'il aimait les chanteurs et les chanteuses qui chantent,
26:33 qui ont travaillé, qui ont une voix, et presque une voix, de comédie musicale.
26:41 - Ça veut dire qu'il n'aimait pas Jeanne Berkin ?
26:43 - Ah non, voilà, vous avez mis le doigt dessus, ni lui, ni elle, ni beaucoup d'autres.
26:49 Un jour, je lui ai fait écouter Vincent Delerme.
26:54 Il m'a dit "mais qu'est-ce que c'est ça ? Qu'est-ce que tu me fais écouter ?"
26:57 C'est-à-dire que c'est peut-être une question de génération,
27:01 mais toute cette façon que certains non-chanteurs abordent,
27:06 la façon dont ils abordent la chanson, ça lui le serrait.
27:10 Parce que pour lui, c'était sacré, la chanson, il fallait que ce soient des vrais chanteurs
27:14 qui connaissent les notes et qui soient capables de travailler avec des grands musiciens.
27:19 - Moi, je vais juste revenir un tout petit peu sur le documentaire,
27:22 dans lequel on voit que vous avez rencontré Andy Warhol et Marguerite Duras.
27:27 Qu'est-ce que ça fait de rencontrer des personnes comme ça ?
27:31 Parce qu'au moment où vous rencontrez Andy Warhol, qu'est-ce qu'il se passe pour Macha Merrill ?
27:37 - À l'époque, il était dessinateur pour le journal pour lequel je travaillais, qui était Harper's Bazaar.
27:41 Je travaillais pour Abeddon, et il était un petit dessinateur, il faisait des recettes de cuisine.
27:46 Il n'était pas du tout encore le type célèbre qu'il est devenu.
27:49 Mais on voyait bien qu'il avait beaucoup de talent.
27:51 Mais vous savez, c'est moi qui suis allée au devant de tout ce monde.
27:55 Le monde, il est à disposition, mais ce qu'il faut, c'est aller le chercher.
28:01 Et vous me disiez tout à l'heure que j'ai eu une vie palpitante.
28:04 J'ai eu la vie que je suis allée me chercher.
28:07 Et si je devais donner un conseil à des jeunes aujourd'hui, je leur dirais "Allez-y, prospectez, regardez autour de vous."
28:16 Alors, c'est vrai qu'à mon époque, il y avait une sorte de concentration.
28:20 On se rencontrait à Saint-Germain-des-Prés, tout le monde, les philosophes, les metteurs en scène.
28:25 J'ai connu Edgar Morin, j'ai connu César, Tinguely, ils étaient tous là.
28:29 Et c'était une sorte de lieu, comme un lieu où on se donnait rendez-vous sans se donner rendez-vous.
28:36 Maintenant, c'est un peu plus compliqué.
28:38 Les gens sont un peu sectorisés, et puis il n'y a plus des quartiers de Paris comme ça où on se retrouve.
28:44 Mais chaque génération a des avantages et des inconvénients.
28:48 Maintenant, c'est les réseaux sociaux.
28:50 Moi, je suis perdue sur les réseaux sociaux parce que je ne sens pas le contact aussi direct que j'ai eu moi quand j'étais jeune.
28:56 - Je crois que ce n'est pas une façon aussi de rentrer en contact.
29:00 On sait aussi que les réseaux sociaux ont été inventés pour ça.
29:02 - Oui, mais les gens sont planqués. Ils sont planqués.
29:04 Moi, j'ai besoin de voir un visage en face de moi.
29:07 Et de se déceler.
29:09 Alors déjà, la télévision me plaît davantage parce que justement, je trouve qu'on peut comprendre quelque chose sur un visage.
29:14 Et que la politique passe par la télévision ne me choque pas du tout.
29:17 Parce que je vois si un type ment ou il ne ment pas.
29:20 Et s'il a des vraies convictions ou s'il n'en a pas.
29:23 - On sent que cette question-là de la vérité, de la sincérité, c'est quelque chose, quelle que soit la personnalité,
29:29 c'est quelque chose qui vous tient au tripin.
29:32 - Ah, c'est fondamental.
29:34 Je ne recherche que ça.
29:36 Que des gens qui me disent leur vérité et qui sont sincères.
29:42 Et puis, c'est le seul critère qui nous reste, vous savez.
29:45 On est tellement bombardés de messages qui nous en suclent la cervelle.
29:52 Qui sont très bien foutus.
29:54 La publicité, moi je hais la publicité.
29:56 Parce qu'en plus, elle vient piquer tous les trucs des acteurs.
29:59 Je vois dans les publicités des choses très malignes, très bien faites pour nous, pour nous embobiner.
30:04 Donc, je pense que la recherche de la sincérité, elle n'est plus que jamais d'actualité.
30:09 - Le prix Michel Legrand pour la musique, ça sera le 8 juin 2024.
30:13 Vous allez nous en parler avec un jury incroyable.
30:17 Vous êtes président sur Abrogit Frosset, Denis Podalides.
30:21 - Et Pascal Ferrand qui sera président du jury.
30:24 - Exactement.
30:25 Et moi, j'ai retrouvé une chanson de Michel Legrand, que vous avez chantée, qui s'appelait "Celui-là".
30:30 On vous écoute.
30:31 Celui-là qui portait sur son front
30:37 La moitié de toutes nos chansons
30:43 Celui-là qui ne voulait plus voir
30:49 Le soleil se tacher de son noir
30:56 Celui-là qui n'aurait pas voulu
31:02 Que là-bas d'autres gens se tuent
31:08 Celui-là parce qu'il avait parlé d'aimer
31:14 - C'était qui celui-là ?
31:15 - C'est une chanson de Michel.
31:17 - Ça fait très comédie musicale ça.
31:19 - Qui n'est pas connue.
31:20 Et en fait, il parle de lui.
31:23 - C'est la question que je voulais vous poser.
31:24 - Il parle de cette espèce de mission qu'ont les artistes.
31:28 Qui est christique.
31:30 C'est la même chose que de se prononcer pour le bien des gens.
31:34 Donc, lui, il disait toujours "ma musique, elle doit aider à vivre".
31:39 Et donc, il y a une souffrance réelle des artistes quand ils ne sont pas compris
31:43 ou quand ils ne sont pas suivis ou quand leur message est un peu noyé.
31:49 C'est un peu ça à notre époque aussi, le problème.
31:51 C'est que les très bons, il faut avoir une certaine écoute, une certaine expérience pour les déceler.
31:58 Tellement il y a d'offres, tellement il y a de gens qui parlent, qui chantent, qui dansent, qui font toutes sortes de choses.
32:05 Donc, voilà, c'est une petite perle cette chanson.
32:09 - Elle est belle, cette chanson.
32:10 - Très belle chanson.
32:11 - J'allais parler, chanter.
32:13 - Et alors moi, je voulais vous poser une question que je me suis posée.
32:18 Ça peut peut-être vous déranger comme question.
32:20 Parce qu'en fait, moi, quand j'ai vu Michel Legrand, les comédies musicales, etc.
32:25 et lui, qui était très distingué, très efféminé, j'aurais jamais imaginé.
32:30 - Efféminé ?
32:31 - Oui, je le trouvais efféminé.
32:32 - Il était racé, c'est autre chose.
32:34 Il était distingué, il avait énormément de classe.
32:36 Mais vous savez, les grands artistes, il y a quelque chose de noble qui s'installe de plus en plus.
32:42 Lui, quand il était jeune, il n'était pas du tout comme ça.
32:44 Il était très impétueux, brouillant.
32:46 Et puis en plus, son bâton de chaise à la bouche, il buvait du rhum.
32:50 Il n'était pas forcément classieux.
32:52 Il l'est devenu avec le temps.
32:54 Parce que quand on devient un grand artiste, et qu'on sait qu'on est un grand artiste.
32:58 Parce que même si lui, il n'aimait pas qu'on dise qu'il était un génie,
33:01 il préférait qu'on dise qu'il était un géant, mais pas un génie.
33:04 Parce que génie, c'est mort.
33:06 Tandis que géant, c'est vivant.
33:08 Mais il y a cette chose qui ressort, qui est l'allure.
33:12 Et je pense qu'il savait qu'il était quelqu'un de grand,
33:17 mais il pensait qu'il avait encore tout à faire.
33:19 Et il se lançait dans les dernières années, je regrette,
33:22 il est parti un peu trop tôt, parce qu'il faisait de la musique classique.
33:25 - Oui, encore des concerts.
33:27 - Et il y a surtout, alors ça c'est des choses qu'il a accumulées avec le temps,
33:31 il a tellement écrit, des tas de thèmes pour des chansons que j'ai réunies
33:36 et dont je fais écrire les paroles à des grands écrivains français.
33:39 Et donc j'espère beaucoup qu'on va sortir ça.
33:42 Et quand je lui en ai parlé encore de son vivant, il m'a dit
33:45 "Oh, tu sais, ils ne me connaissent pas".
33:47 Tu parles, tu souviens mon téléphone, que ce soit Eric Emmanuel Schmitt,
33:50 que ce soit Yannick Félès, Tarabangelo, tous ils ont dit qu'ils adoraient Michel Delon.
33:56 - Bien sûr.
33:57 - Et le Théâtre du Capitole, je fais une parenthèse, la Toulousaine,
33:59 qui a repris l'année dernière tout le répertoire de Michel Legrand,
34:02 d'encaisses symphoniques, c'était absolument somptueux.
34:04 Ce prix Michel Legrand justement pour la musique, parlez-nous en,
34:07 M. Emmanuel Thé, le 8 juin.
34:09 - C'est un prix pour aider les compositeurs de musique de films.
34:12 Parce qu'imaginez-vous qu'avec toutes les plateformes, Netflix, Amazon,
34:15 et puis l'intelligence artificielle, ils finissent par ne pas engager des compositeurs,
34:20 parce que ça coûte trop cher, un enregistrement et tout ça.
34:23 Et puis en plus il faut leur laisser les droits en France.
34:26 Les grandes plateformes ne favorisent pas les compositeurs.
34:31 Donc non seulement nous les soutenons, parce que d'un autre côté,
34:34 dans les conservatoires de musique, les jeunes qui font de la musique
34:37 veulent tous faire de la musique à l'image, de la musique pour le film.
34:40 Alors c'est pour ça, et puis en plus il y a des musiques de films extraordinaires.
34:45 C'est de la musique symphonique, de la musique de cinéma.
34:48 Il y a beaucoup de films dont on ne se souvient que de la musique, franchement.
34:51 Alors, de son vivant encore, il était d'accord, non pas qu'on fasse un prix à son nom,
34:57 parce qu'il était trop modeste pour ça, mais nous voulions faire un festival de musique, de film,
35:01 chez lui, là-bas, dans la maison où je vis maintenant, qui est en Deloiret.
35:07 Et il y a des grands prés où on va mettre des chapiteaux et on va organiser ce festival.
35:12 - On arrive au terme de cette interview ? - Non, on a eu le débat.
35:15 - Ah, ok. Donc c'est le 8 juin 2024, moi je peux rester, si vous voulez rester pour les débats.
35:20 - Le festival aussi de la correspondance de Grignan, ça sera du 2 au 6 juillet prochain, c'est la 26e édition.
35:27 C'est très rigolo parce que le thème, ce sont les héros, les grands, et moi j'ai choisi Catherine de Russie,
35:34 sa correspondance avec Voltaire.
35:36 Il se trouve qu'il y a une correspondance immense, très amusante,
35:40 parce que c'était une espèce de flirt entre deux héros.
35:43 Et donc, c'est une lecture bien entendu, mais je me réjouis beaucoup de réunir
35:49 ma Russitude et mon rôle d'actrice.
35:52 - Elle est là, votre Russitude, et on la savoure évidemment. Merci beaucoup, ma chère Meryl.
35:57 - Vous ne pouviez pas ne pas me donner ce petit cadeau.
36:03 - Voilà, ça c'est, comment on appelle ça ?
36:06 - C'est un champion. - Vous avez dit qu'il était toujours là, avec vous tout le temps.
36:10 - Ah oui. D'abord la musique, vous savez, c'est merveilleux, parce qu'à n'importe quel moment, je l'entends.
36:15 Et puis, il m'a laissé des instructions.
36:18 Des trucs à faire.
36:20 - On vous remercie, ma chère Meryl.
36:22 On vous invite absolument à voir ce documentaire sur CINÉ+ classique "Macha" de Christiane Espiraud.
36:28 Ça sera la première diffusion le 30 mars.
36:30 - Après, il y en a plein. - Hein ?
36:32 - Après, il y a plein de gifs. - Oui, mais on va commencer.
36:35 - On commence. - On va commencer, voilà.
36:37 Et rendez-vous pour le prix Michel Legrand, le festival de la correspondance aussi de Grignan.
36:42 Et bon retour aussi à Montréal-du-Gers.
36:44 - À ma terre, ma terre, presque, je l'avais dit.
36:47 - Prédilection d'adoption.
36:50 - Merci infiniment, ma chère Meryl d'être là. - A bientôt.
36:53 - Merci. - Sur Sud Radio, dans un instant, évidemment, on va ouvrir les débats.
36:56 - Et demain, on aura Hume Thomas.
36:58 - Et on va parler de l'actualité du jour. Merci, à bientôt.
37:01 - Merci Christine.
37:02 Parlons vrai ! Sud Radio. Parlons vrai ! Sud Radio. Parlons vrai !