La fusion de Jancovici, Servigne et Stéphant - R.Duterme

  • il y a 7 mois
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Source
Renaud Duterme https://www.youtube.com/watch?v=3P15IaEuAEg
Musique https://www.youtube.com/watch?v=39PVEaSytpo

Réponses au quiz de fin :

/!\ Description à ne pas lire avant d'avoir vu la vidéo entièrement
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Quels domaines sont concernés par les pénuries à venir ?
Énergie, minerai, logistique, alimentation.

Que représentent les énergies fossiles dans le mix énergétique mondiale ?
80%.

Quelle quantité de sable est extraite des fonds marins chaque année ?
6 milliards de tonnes.

#duterme #écologie #pénurie #effondrement #collapse #énergie #alimentation #nourriture #logistique #climat #changement #climatique #blast #interview #extrait #ilnousfautunplan #jancovici #janco #ethiqueettac
Transcription
00:00 C'est ça que vous nous expliquez, vous faites un état des lieux, des pénuries qui
00:11 ont déjà eu lieu ou qui sont encore en cours, des petits "quac" comme vous les
00:15 appelez, mais surtout ce que vous nous décrivez, c'est un futur extrêmement sombre où globalement
00:21 on va être dans un monde où la pénurie sera la norme, où tous nos modes de consommation,
00:27 de vie vont être impactés et vous en dressez un portrait quand même assez précis.
00:31 Alors vous prenez vraiment les domaines un par un et vous expliquez quelles sont les
00:35 pénuries auxquelles nous faisons déjà face et quelles sont les pénuries à venir.
00:40 Le premier domaine auquel vous vous attaquez c'est bien sûr un peu le domaine qui impacte
00:44 tous les autres domaines, c'est le domaine de l'énergie.
00:47 Alors vous ouvrez ce livre avec le projet E-COP de Total Energy en Ouganda et en Tanzanie
00:53 qui a fait énormément parler, ce pipeline géant qui est considéré comme une bombe
00:59 climatique par de nombreuses ONG et associations qui étudient les questions environnementales.
01:04 Aujourd'hui, vous le rappelez, les énergies fossiles constituent encore 80% du mix énergétique
01:10 mondial.
01:11 Cette part va devoir baisser considérablement, premièrement pour des raisons climatiques
01:16 puisqu'on sait que c'est le premier facteur de changement climatique qui détruit les
01:20 conditions d'habitabilité de la planète, mais aussi pour tout simplement, encore une
01:23 fois, des raisons de pénurie puisque nous n'aurons plus accès à ces énergies fossiles
01:28 et nous ne sommes pas prêts à y faire face.
01:30 C'est ça que vous nous expliquez.
01:31 Oui, alors il y a plusieurs choses à dire évidemment sur cette question énergétique.
01:35 Déjà, c'est toujours utile et j'essaie de le rappeler dans le livre, je ne suis pas
01:37 le seul à le faire évidemment, l'importance de l'énergie pour nos sociétés.
01:41 En fait, on oublie souvent que tout ce qu'on fait n'est que sur base d'une énergie
01:45 abondante.
01:46 On parle beaucoup de croissance économique, on parle de consommation de masse, etc.
01:49 Rien de tout ça ne serait possible sans l'accès à une énergie bon marché qui est essentiellement
01:54 fossile.
01:55 Donc, vous l'avez dit, on parle beaucoup de renouvelables, etc.
01:58 Mais on oublie que 80% de notre mix énergétique mondial, et c'est quasiment le cas dans la
02:03 plupart des pays, repose sur des énergies fossiles, le pétrole en particulier, mais
02:07 également aussi le charbon et le gaz.
02:09 Et donc, ces énergies, non seulement elles sont destructrices pour les équilibres climatiques,
02:13 ça on commence à en entendre parler, mais il y a également aussi ce qu'on évoque
02:18 beaucoup moins dans les différents médias, des contraintes physiques et des contraintes
02:21 géologiques qui vont...
02:22 Imposer la sobriété ou la pénurie ?
02:26 Alors, il y a beaucoup de malentendus aussi sur ces questions de raréfaction des ressources.
02:30 On a toujours l'impression qu'un jour, il n'y aura plus de pétrole.
02:32 Souvent, on moque un petit peu les rapports du Club de Rome ou les différents rapports
02:36 sur le pic pétrolier, mais c'est souvent en les interprétant de manière erronée,
02:40 parce que personne n'a jamais dit qu'il n'y aura plus de pétrole, qu'il n'y aura plus
02:42 de gaz, qu'il n'y aura plus de charbon.
02:43 C'est quelque chose qui n'arrivera pas de toute façon.
02:45 Mais ce qui arrive, en particulier pour le pétrole, c'est que nous atteignons le pic
02:49 de la production, c'est-à-dire le pic des réserves, des ressources qui sont accessibles.
02:54 Et c'est vraiment ça qu'il faut comprendre.
02:55 Ce n'est pas la fin d'un pétrole total, c'est la fin d'une certaine accessibilité
03:00 facilité d'accès à un pétrole.
03:02 Et donc, les gisements qui restent maintenant sont les gisements les moins accessibles,
03:06 ce qui implique que ce sont des gisements qui vont être plus compliqués à extraire
03:09 ou dans lesquels le pétrole va être plus compliqué à extraire, ce qui implique des
03:13 coûts environnementaux beaucoup plus importants, ce qui implique un coût financier beaucoup
03:17 plus important, ce qui nécessite un prix du baril qui reste relativement élevé.
03:21 On le voit maintenant, là, pour l'instant, le prix du baril est relativement bas.
03:25 Mais ce qu'on entend par relativement bas, c'est quand même aux alentours de 80 dollars,
03:29 ce qui, il y a quelques années, était quelque chose de considéré comme extrêmement élevé.
03:32 Donc, ce qui risque de se passer, c'est qu'on va voir progressivement que c'est la fin
03:38 du pétrole abondant avec des gisements, vous l'avez dit avec l'exemple de l'Ouganda,
03:42 des gisements qui vont être... on va vraiment essayer d'aller chercher les petites miettes
03:45 qui restent.
03:46 Ça va impliquer des investissements de plus en plus importants pour des gisements de plus
03:49 en plus petits.
03:50 J'aime bien la métaphore empruntée à Jean-Marc Jancovici, qui parle qu'on part
03:56 ça à des chasses aux œufs de Pâques où, au début de la chasse aux œufs de Pâques,
04:00 on retrouve les œufs les moins cachés, les plus abondants, les plus gros, etc.
04:03 Et donc, ça, c'était les gisements de pétroliers du XXe siècle, on va dire.
04:06 Et ceux du XXIe siècle seront plus rares, plus petits, plus compliqués à aller chercher
04:10 et donc nécessiteront plus d'efforts.
04:12 Ce que vous décrivez, c'est vraiment que de toute manière, nous allons subir des changements
04:15 de vie profonds, des pénuries dans absolument toutes les dimensions de la société.
04:20 Et c'est vrai que c'est assez noir comme livre, mais vous, vous qualifiez en tout cas
04:24 ce constat de lucide.
04:27 J'ai voulu commencer avec l'énergie parce que c'est avec ça que vous débutez votre
04:31 livre.
04:32 Vous qualifiez l'énergie comme n'étant pas un élément parmi d'autres dans l'équation
04:34 économique, mais comme la condition sine qua non de toute activité humaine.
04:40 C'est pour ça que c'est vraiment un domaine qui est fondamental.
04:41 Pour ceux qui veulent aller plus loin, évidemment, ils peuvent acheter votre livre et le lire.
04:46 Mais vous évoquez un deuxième domaine qu'on aborde moins dans le débat public et qui,
04:50 pourtant...
04:51 A tort.
04:52 A tort, qui pourtant, effectivement, semble être également au cœur de notre économie.
04:56 C'est en ce qui concerne la matière.
04:58 Alors, je vais donner quelques chiffres que vous citez dans votre livre.
05:01 Selon un rapport de l'ONU, 50 milliards de tonnes de sable gravier sont utilisées chaque
05:07 année, dont environ 6 milliards directement prélevés au sein des fonds marins, avec
05:12 des conséquences dramatiques pour la biodiversité et les ressources halieutiques.
05:16 Alors, pourquoi est-ce qu'on utilise autant de sable ? C'est vrai qu'on ne pense pas
05:18 forcément au sable, encore une fois, dans notre vie de tous les jours.
05:20 Eh bien, pour fabriquer du béton, qui est donc associé à du ciment, dont la production
05:25 est passée de 200 millions de tonnes par an en 1950 à 4,4 milliards de tonnes en 2019.
05:32 Donc là encore, on a une explosion de l'utilisation de la matière.
05:38 Et seulement, la totalité des minerais constituent des stocks limités par la géologie, ne sont
05:43 pas renouvelables.
05:44 Donc là encore, sur les minerais, sur le sable, on va faire face à des pénuries parce
05:48 que la planète n'est pas infinie, on ne peut pas prélever à l'infini.
05:51 Et en plus, pour prélever, on a besoin de pétrole.
05:54 Donc, c'est un peu le serpent qui se mord la queue dans cette histoire.
05:59 Ce que vous expliquez, c'est qu'il va falloir également creuser de plus en plus
06:02 profond et produire de plus en plus de déchets pour de moins en moins de minerais.
06:06 Vous donnez ce chiffre.
06:08 Les nouvelles mines de cuivre contiennent un minerai à 0,5% de concentration contre
06:12 3% dans les années 1930.
06:14 C'est exactement la même logique avec le pétrole.
06:16 C'est-à-dire que plus le temps avance, plus on a extrait de la matière, plus c'est
06:21 compliqué d'aller chercher de la nouvelle matière.
06:23 Pourquoi est-ce qu'on a besoin de minerais ? Pourquoi est-ce qu'on a besoin de matière
06:26 dans notre vie de tous les jours ?
06:28 Quelle place ça occupe dans notre économie ?
06:30 Alors, au risque de me répéter, pour tout.
06:32 C'est-à-dire que tout ce que nous avons...
06:34 Alors, quand on parle, on pense aux minerais, quand on pense aux ressources minérales,
06:37 aux métaux, etc.
06:38 On pense évidemment aux grandes infrastructures, on pense aux véhicules, on pense à tout
06:42 au secteur de la métallurgie, etc.
06:43 Mais en fait, nous avons des minerais dans...
06:45 J'ai des minerais dans mes bijoux, on a des minerais dans son shampoing, on a des minerais
06:50 dans sa peinture, on a des minerais dans absolument tout.
06:53 Et donc, ces minerais sont dans leur totalité des ressources non renouvelables.
06:57 Donc, il va y avoir un certain nombre de contraintes physiques, géologiques qui sont déjà...
07:02 Qui arrivent déjà pour l'instant.
07:04 Et comme vous l'avez dit, vous avez rappelé la teneur dans la plupart des mines qui diminuent,
07:08 où on a de nouveau les premiers gisements, les gisements les plus concentrés qui ont
07:11 été exploités les premiers.
07:12 Et donc, maintenant, restent des gisements qui sont de moins en moins concentrés, de
07:16 plus en plus compliqués.
07:17 Et on a la même logique qu'avec l'énergie, c'est-à-dire des investissements qui vont
07:20 être de plus en plus importants pour des quantités à extraire de plus en plus petites.
07:24 De quel niveau de pénurie on parle dans les prochaines années ?
07:27 Il faut bien se rendre compte que depuis tout à l'heure, c'est vrai qu'on parle beaucoup
07:29 de pénurie, c'est le titre du livre.
07:31 Il faut...
07:32 Diminution des ressources.
07:33 Voilà, en fait, on est dans...
07:34 C'est ça un petit peu le paradoxe et c'est d'ailleurs ça, c'est la raison pour laquelle
07:37 beaucoup de gens, et moi y compris, ont du mal à imaginer cela.
07:41 C'est parce qu'on a...
07:42 Le système tient jusqu'à maintenant.
07:44 On peut dire...
07:45 Alors, je parle vraiment pour les pays occidentaux, enfin on va dire les pays riches.
07:48 La pénurie dans de nombreux pays, c'est déjà une réalité depuis longtemps.
07:51 Mais grosso modo, le système est assez résilient et donc, on pourrait se dire mais en fait,
07:55 voilà, malgré l'épisode Covid, malgré les guerres en Ukraine, etc., le système tient
07:58 bon.
07:59 Il n'y en a pas vraiment assisté à des pénuries durables de biens.
08:02 On a certes des retards d'approvisionnement, on le constate quand même de plus en plus.
08:05 Et donc, on a peut-être la fausse idée de se dire, voilà, il n'y a pas trop de soucis.
08:09 Mais encore une fois, ce qui est important, c'est de voir les choses dans un temps long
08:12 et dans des perspectives qui sont durables, notamment en tenant compte de nouveau de tout.
08:17 On ne parle pas de pénurie qui va arriver dans 400 ans.
08:19 Non, ça c'est certain.
08:20 On est d'accord.
08:21 Je cite un petit peu, j'écris dans le livre que le 20e siècle a été le siècle de l'abondance.
08:27 De nouveau, en tant que géographe, j'insiste toujours pour une partie du monde.
08:30 Ce qui est certain, c'est que le 21e siècle sera celui des limites.
08:33 Et le 21e siècle, ces limites ne vont pas commencer en 2099.
08:38 Elles sont déjà là.
08:39 Pour quiconque s'intéresse à tous ces domaines, on peut les constater.
08:42 Et donc, en fait, toutes ces limites ne peuvent que s'accentuer.
08:47 Et je voulais juste terminer sur un dernier point.
08:49 Ces deux chapitres sur l'énergie et sur les minerais, ils visent aussi également
08:53 à lever un peu le voile sur cette prétendue immatérialité de nos sociétés.
08:57 Nos sociétés riches seraient des sociétés post-industrielles où tout le monde travaille
09:02 dans les bureaux, les industries n'existent plus.
09:04 Et en fait, toute cette société post-industrielle repose in fine sur des réalités physiques,
09:08 notamment le fameux numérique repose sur des câbles sous-marins, sur l'extraction
09:13 de minerais pour fabriquer des appareils, etc.
09:15 Et plus nous allons aller dans ce sens-là, plus l'extraction va devoir se poursuivre.
09:20 Et vous arrivez à un chapitre sur lequel j'aimerais qu'on s'attarde, qui est le
09:23 chapitre que vous intitulez "la conteneurisation du monde", c'est-à-dire que les produits
09:29 que nous consommons parcourent de plus en plus de chemins.
09:32 Et donc, lorsqu'il y a des ruptures dans les chaînes d'approvisionnement, ça touche
09:35 de plus en plus de monde, c'est de plus en plus compliqué.
09:38 Est-ce que vous pouvez revenir un petit peu sur ce concept de conteneurisation du monde ?
09:42 Quel rapport avec les pénuries ? Et comment est-ce que ça impacte là encore
09:45 notre vie quotidienne ? Comment est-ce que ça va l'impacter dans les mois, les années
09:49 qui arrivent ?
09:50 Alors, les deux premiers chapitres, l'énergie et la matière première, ont été basés
09:53 essentiellement d'abord sur la production, le début de la chaîne.
09:56 Mais comme vous l'avez rappelé, tout ce qu'on consomme, ça nécessite différents
10:00 maillons.
10:01 Et souvent, ces biens sont mondialisés, proviennent des quatre coins du monde et sont souvent
10:06 distants de plusieurs dizaines de milliers de kilomètres.
10:08 Et en fait, ça veut dire que tout notre système repose sur un mot qui est assez à la mode
10:13 ces derniers temps, qui est la logistique.
10:14 Et donc, qui consiste en gros à faire acheminer les différentes matières, les différents
10:19 biens entre les différents lieux de production, les usines, les lieux de consommation, les
10:23 supermarchés, etc.
10:24 Et ça, c'est quelque chose qui est rarement évoqué, en fait, si ce n'est quand on a
10:27 des événements majeurs.
10:28 C'est un système qui est basé sur la fluidité en permanence.
10:32 Et donc, on en parle uniquement quand il y a un potentiel blocage.
10:36 On a parlé du blocage dans le canal de Suez, on peut parler des tensions dans la Mer Rouge
10:40 pour l'instant.
10:41 Le Covid, évidemment, a été assez important et pourtant, c'est quelque chose d'assez
10:46 important parce que plus on multiplie les maillons, plus on multiplie la distance entre
10:50 les différents éléments, plus le risque de blocage peut survenir.
10:54 Et notamment, ce système, on appelle ça aussi un système en flux tendu, c'est-à-dire
10:58 en gros, on a progressivement supprimé les stocks qui coûtaient de plus en plus cher
11:02 par des flux permanents.
11:03 Et ça, c'est une logique qu'on voit dans les usines, qu'on voit dans les hôpitaux,
11:07 qu'on voit chez nous, chez soi en général, c'est-à-dire qu'en gros, c'est beaucoup
11:09 plus simple d'aller au supermarché quasiment tous les jours ou plusieurs fois par semaine
11:13 plutôt que de stocker des choses parce que de nouveau, ça nécessite de l'espace, ça
11:17 coûte cher, etc.
11:18 Donc, on est tombé un petit peu dans cette logique d'approvisionnement permanent qui
11:21 est relativement efficace quand tout fonctionne bien.
11:23 On le voit depuis maintenant 20, 30, 40 ans.
11:26 Nous, je veux dire, on est plus ou moins, je pense qu'on est de la même génération,
11:29 on n'a jamais vraiment, on a un niveau de vie qui est ultra confortable.
11:32 Donc, il faut aussi souligner les points positifs.
11:34 Le problème, c'est que ce système ne marche que quand il n'y a pas de perturbations.
11:37 Et de nouveau, on a de plus en plus de...
11:39 - De qu'est-ce que vous faites réellement d'une partie de la population ?
11:41 - Évidemment, évidemment.
11:42 Ce livre est très occidentalocentré pour une raison évidente, c'est que je parle de
11:46 ce que je connais.
11:47 Donc, ça, évidemment, je le repelle plusieurs fois dans le livre.
11:50 Tout ce que j'explique de système de consommation, etc., c'est quelque chose qui est basé sur
11:53 mon vécu personnel et donc le vécu, on va dire, d'une majorité des gens.
11:57 - Surtout auquel nous, on peut s'identifier.
11:59 - Voilà.
12:00 - Et donc, quand on parle de pénurie, on ne parle pas de pénurie au bout du monde, on
12:02 parle de pénurie, clairement, là, en l'occurrence, au public francophone en France.
12:05 - Clairement, si on va dans des bidonvilles de Naïrobi, je veux dire, le contexte est
12:09 complètement différent et ces pénuries, ils l'expérimentent depuis très longtemps.
12:13 Mais pour revenir à ces fameuses chaînes d'approvisionnement, ce qui est inquiétant,
12:17 c'est qu'on voit maintenant de plus en plus de signes qui remettent en cause cet approvisionnement
12:22 et cette fluidité.
12:23 Alors, qu'est-ce qu'on a comme signe ?
12:27 Alors, comme potentiel blocage, on a évidemment des choses qui sont liées au climat.
12:32 On a, par exemple, pour l'instant, un assèchement du canal de Panama et donc qui provoque des
12:36 embouteillages de portes-conteneurs de chaque côté parce que, pour faire traverser les
12:40 bateaux, les écluses ont besoin de plusieurs millions d'eau.
12:43 Ce canal est alimenté par deux lacs qui sont en train de s'assécher sous l'effet du changement
12:48 climatique, sous l'effet de sécheresses successives qui perturbent cet approvisionnement.
12:53 On a eu ça dans les dernières années, notamment avec une baisse du niveau de nombreux fleuves
12:59 européens, commencés par le Rhin, qui sont des artères commerciales et qui, du coup,
13:03 limitent ce transport de marchandises.
13:06 On peut avoir des perturbations de type géopolitique.
13:09 On le voit maintenant avec ce qui se passe en Mer Rouge, où de nombreuses compagnies
13:14 maritimes exigent de leurs bateaux de contourner l'Afrique avec 10-12 jours de trajet supplémentaire
13:22 pour éviter les potentielles attaques.
13:24 À quoi doit-on s'attendre en termes de pénurie alimentaire dans les années à venir en France ?
13:29 Le but ici n'est pas d'être catastrophique et de dire que demain, nous risquons des famines
13:34 ou quoi, j'avoue que je n'en sais rien, ce n'est pas l'idée.
13:36 Mais encore une fois, l'idée est de mettre en lien, comme vous venez de le dire, les
13:39 interdépendances et les vulnérabilités de notre système agroalimentaire.
13:42 On a tendance un petit peu à l'oublier parce que nous, depuis 20, 30, 40, 50, 60 ans, grosso
13:46 modo, on n'a plus faim.
13:47 On ne sait plus c'est quoi d'avoir faim.
13:49 Encore une fois, à part une petite minorité, on a accès à tout.
13:51 Nos supermarchés sont remplis.
13:52 Et de nouveau, on ne se pose jamais la question sur qu'est-ce qui a rendu possible cette
13:55 abondance avec quels travailleurs, quelles conséquences environnementales, sociales,
13:59 d'où ça vient ? Est-ce que c'est quelque chose qui est durable, etc.
14:06 Et donc, on oublie souvent toute une série de choses.
14:08 C'est qu'en fait, maintenant, notre alimentation suit un peu toutes les logiques qu'on a évoquées
14:11 tout à l'heure, c'est-à-dire qu'en gros, notre alimentation, c'est totalement industrialisée.
14:15 Notre approvisionnement alimentaire, c'est également industrialisé.
14:18 Et donc, toutes les conséquences qu'on a évoquées sur l'énergie, les matières
14:20 premières et la logistique, va toucher déjà notre alimentation.
14:24 Rien que les trois premières parties qu'on a évoquées tout à l'heure vont déjà
14:28 influencer grandement notre alimentation.
14:30 Et on l'a déjà vu, par exemple, avec les craintes suite à la guerre en Ukraine, qui
14:34 n'ont pas donné lieu à des pénuries durables, mais en tout cas, qui de nouveau mettent en
14:38 évidence la vulnérabilité de notre approvisionnement, puisqu'on sait que l'Ukraine et la Russie
14:42 sont deux gros producteurs de céréales.
14:44 À cela, on peut évidemment ajouter la donne climatique, qui, on le voit déjà quotidiennement,
14:49 même dans des pays comme la France, la Belgique, imposent à de nombreux agriculteurs de se
14:54 remettre en cause.
14:55 Et de nouveau, un petit peu comme les chauffeurs routiers, on a aussi une dévalorisation du
14:59 monde agricole, où on a un désintérêt complet, où on ne parle jamais des agriculteurs, on
15:03 ne parle jamais de leur quotidien, si ce n'est pour les rendre responsables d'une
15:06 situation à laquelle ils sont principalement victimes, c'est-à-dire qu'on les accuse
15:09 de polluer, d'utiliser des produits chimiques, dans un système où on les a mis en concurrence
15:13 avec l'ensemble du monde, avec l'agro-business, et où on les a contraints, notamment via
15:17 la grande distribution, à fournir des produits avec des prix tout aussi bas.
15:21 Donc on a un petit peu une relation hors sol à notre alimentation, qui implique absolument
15:26 de remettre en cause.
15:28 Et c'est ça aussi que je dis à plusieurs reprises dans le livre, c'est qu'en fait
15:31 c'est notre abondance, notre surabondance, qui risque de provoquer des pénuries.
15:35 Et donc c'est pour ça aussi que ce livre, ce n'est pas non plus un appel à la fin
15:39 du monde, c'est simplement essayer d'évoquer que soit nous allons nous limiter nous-mêmes,
15:43 ce qui implique de transformer notre système agricole et notre système alimentaire également,
15:48 on a parlé de manger moins de viande, c'est clair, ça va être une réalité, ça va
15:51 être un.
15:52 On va devoir manger moins de viande, parce que de nouveau, la viande nécessite des pressions
15:56 sur les terres beaucoup plus importantes, des pressions sur l'eau beaucoup plus importantes,
16:00 dans un contexte où en fait on a toutes ces choses qui viennent à manquer.
16:04 Donc ces pénuries, pour l'instant de nouveau, elles ne se sont pas encore matérialisées,
16:08 elles peuvent toucher de différentes choses.
16:09 On oublie aussi souvent que de nombreux engrais sont à base de minerais, qui de nouveau,
16:14 comme le phosphate, qui sont aussi relativement limités, essentiellement concentrés dans
16:18 un certain nombre de pays.
16:19 Donc bref, de nouveau, au risque de me répéter, mais on voit à travers notre système agroalimentaire
16:25 une interconnection de petits soucis climatiques, géologiques, sociopolitiques, géopolitiques,
16:30 etc., qui risquent de remettre en cause tout ça.
16:32 Et donc c'est ça aussi que j'essaye un petit peu d'avancer dans ce débat, c'est
16:38 d'essayer d'amener justement une approche pluridisciplinaire des choses pour montrer
16:41 qu'en gros, les changements ne pourront être que profonds et pas simplement à la
16:45 marge.
16:46 Si on essaye de résoudre un problème à la marge, au mieux ça ne résout que ce problème-là,
16:52 au pire ça en entretient d'autres et ça nous précipite encore plus dans les problèmes.
16:59 Donc on va devoir nécessairement qu'on s'impose une certaine sobriété, entendue
17:04 comme une certaine réduction volontaire de notre consommation et de poser du coup la
17:10 question de l'utilité sociale de tout ce qu'on consomme, que ce soit au niveau de
17:15 l'alimentation, au niveau de l'énergie, au niveau des biens, etc.
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17:55 Sous-titres réalisés para la communauté d'Amara.org

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