Jeudi 15 février 2024, SMART BOURSE reçoit Guillaume Arditti (Fondateur, Belvedere Advisory et chercheur associé à l’Institut Jacques Delors)
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00:10 Et nous enchaînons à présent avec marché à thème. Aujourd'hui le thème qui va nous animer dans Smart Bourse c'est l'analyse du continent africain d'un point de vue économique
00:19 mais aussi évidemment d'un point de vue boursier. Et pour cela nous avons le plaisir de recevoir sur le plateau de Smart Bourse Guillaume Arditi.
00:25 Bonsoir Guillaume Arditi.
00:26 Bonsoir Nicolas.
00:27 Bienvenue sur le plateau de Smart Bourse. Vous êtes le fondateur de Belvedere Advisory et chercheur associé à l'Institut Jacques Delors.
00:32 On va essayer de comprendre un petit peu quelles sont les dynamiques à l'œuvre sur le continent africain d'un point de vue économique
00:38 mais aussi d'un point de vue boursier. On va essayer de comprendre aussi comment les investisseurs européens peuvent se positionner sur ce continent.
00:45 Et puis nous verrons si nous avons le temps peut-être un petit peu de politique aussi là-dedans pour éclairer l'économique.
00:49 Mais tout d'abord 2024 débute pour le continent africain comme pour tous les autres continents.
00:56 Peut-être rapidement une rétrospective de l'année 2023. Est-ce qu'on peut parler d'année dynamique ou d'année difficile plutôt pour le continent africain ?
01:04 Ça a été une année difficile, définitivement difficile. Ça a été une année globalement difficile mais c'est vrai que pour pas mal de marchés africains
01:12 ça l'a été un peu plus que d'autres. En fait on a eu un peu le triptyque toxique, hausse des taux, hausse du dollar, hausse de l'inflation.
01:22 En particulier la hausse de l'inflation sur fond de hausse des matières premières et en particulier des denrées alimentaires.
01:28 Vous savez qu'il y a beaucoup de pays africains qui sont importateurs de denrées alimentaires et donc la crise russo-ukrainienne a eu un impact particulièrement marqué.
01:39 Du coup résultat des économies qui ralentissent, une croissance moins forte, des dévaluations importantes.
01:47 Pense au Naira nigérian, à la livre égyptienne, au shilling kenyan. Et puis dans certains cas ça amène des défauts, en particulier la Zambie et puis le Ghana.
02:00 Donc là dessus un panorama un peu difficile pour 2023 mais tout de suite prendre un peu de recul.
02:10 Oui bien sûr, on est en 2024 déjà.
02:12 On est déjà en 2024 et puis malgré tout quand on regarde la croissance 2023 sur le continent elle est à plus de 3%.
02:18 Nos amis britanniques nous ont annoncé qu'ils étaient rentrés en récession aujourd'hui.
02:23 Toujours remettre un petit peu de perspective dans les chiffres.
02:29 Et puis même en levée de fonds, par exemple moi j'aime bien regarder les levées de fonds sur la tech parce que c'est un secteur dynamique assez agile, un peu plus allant que d'autres.
02:38 Les niveaux de levée de fonds sur 2023 ont diminué mais ceci étant dit restent toujours plus élevés, quasiment deux fois plus élevés que ceux de pré-covid.
02:46 Donc on est quand même sur des tendances qui restent fortes avec une résilience marquée.
02:51 Ça veut dire que les perspectives pour 2024 sont meilleures finalement que ce qu'on a pu voir pour 2023 ?
02:57 Oui absolument, je pense que 2023 on est arrivé sur un point bas.
03:01 Là on peut commencer à vraiment réfléchir à un retour beaucoup plus dynamique.
03:05 Cette année 2023 ça a aussi été l'occasion de faire des réformes de fonds pour des économies qui sont un peu les locomotives du continent.
03:13 En termes de libéralisation des taux de change, d'abandon de subventions en particulier de produits pétroliers.
03:20 Donc des pays comme le Nigeria, comme le Kenya, ont passé vraiment ces points durs et on retrouve des bases plus saines pour repartir.
03:30 D'un point de vue boursier, est-ce que cela s'est vu sur l'année ?
03:35 Est-ce que cette reprise pour 2024 offre éventuellement des opportunités sur certaines places boursières africaines ?
03:42 Ce qui est assez surprenant c'est qu'on voit déjà sur le début de l'année trois émissions, trois eurobondes.
03:47 Il y a eu l'eurobond ivoirien de 1,6 milliard, le béninois de 750 millions de dollars et cette semaine le Kenyan à 1,5 milliard.
03:56 Et là même on a eu des nouveaux de sursouscription qui nous ont surpris.
04:00 Donc là-dessus tout de suite on voit qu'il y a une dynamique qui est en train de se réamorcer,
04:05 qui est peut-être un peu plus forte que ce que personnellement j'anticipais.
04:09 Sur les marchés boursiers on voit que des places comme l'Ego se sont repris 25% depuis le début de l'année.
04:16 Surtout sur la bourse du Caire, sur celle de Nairobi.
04:21 Plus mesuré sur celle de Casa mais on est aussi sur un pays où il y a un effet de drapage qui est un petit peu moindre.
04:28 Donc on reste sur des tendances de fonds solides et positives là-dessus.
04:32 Est-ce que ça offre des points d'entrée, des points d'opportunité pour cette année 2024 du coup Guillaume Arditi ?
04:41 Oui je pense. Ce qui est intéressant actuellement sur les marchés africains c'est que
04:50 qu'est-ce qui va motiver finalement un investisseur à sortir de ses frontières quand on parle d'emerging market ?
04:55 C'est quand même sortir d'une certaine zone de confort.
04:59 D'une certaine compréhension du contexte économique.
05:01 Exactement. Donc on ramène un petit peu d'instabilité dans sa propre analyse.
05:05 Finalement il y a toujours trois fondamentaux. C'est soit on sort de son marché naturel par nécessité.
05:11 On a la crise énergétique en Europe.
05:15 Enie qui signe quelques milliards de dollars d'investissement avec la Libye pour du développement pétrole-gaz.
05:23 Donc ça c'est un premier point. C'est la nécessité. Il faut sortir.
05:26 Il y a l'opportunité. Là il y a Mastercard qui vient de prendre un ticket de 200 millions de dollars dans une FinTech
05:32 de l'opérateur sud-africain MTN. Ce qu'il valorise d'ailleurs du coup à 5 milliards de dollars.
05:38 Donc là c'est l'opportunité qui est saisie.
05:41 Et en fait sur les marchés africains on voit qu'il y a une superposition de la nécessité et de l'opportunité pour les investisseurs européens.
05:50 Donc si on prend un peu de recul, en Europe, quels sont les secteurs essentiels aujourd'hui qui préoccupent les acteurs économiques ?
05:59 On a l'énergie, on vient de le mentionner. Le renouvelable. Le renouvelable ça veut dire la production.
06:06 Donc le prochain défi c'est l'hydrogène vert. L'hydrogène vert aujourd'hui il y a des réflexions sur les plateformes
06:11 pour faire des plateformes de production au Maroc et en Namibie.
06:14 Et donc c'est des thématiques que l'on peut retrouver sur les bourses par exemple marocaines et en Namibie ?
06:19 Alors là probablement on commence plutôt à basculer sur de l'illiquide.
06:23 Donc là on commence vraiment à... il y a toujours un petit peu cette dichotomie sur l'Afrique.
06:29 Est-ce qu'on cherche de la liquidité mais du coup on reprend de la volatilité ?
06:32 Ou est-ce qu'on va plutôt chercher de la stabilité et puis du rendement avec des perspectives un peu stables ?
06:39 Et là on perd en liquidité. On va plutôt sur des actifs illiquides type private equity, private debt.
06:45 Du non-coté quoi.
06:46 Du non-coté, exactement.
06:47 Donc là effectivement on parlait de l'hydrogène vert. Quand on est européen, vous l'avez déjà mentionné,
06:54 il y a la question pourquoi est-ce qu'on sort des frontières ?
06:57 Et ensuite c'est vaste le continent africain. Il y a plusieurs bourses dans différents pays africains.
07:04 Quelles sont les clés d'entrée ? Comment est-ce qu'on regarde un petit peu la manière de se positionner sur cette année 2024 par exemple ?
07:10 Si on en croit ce que vous nous dites et si on adhère à cette idée de rebond ou de retour de la croissance sur cette année à venir ?
07:16 Alors moi ce que je regarderais maintenant sur les pays africains, il y a quand même toujours quelques locomotives.
07:25 Si on regarde actuellement sur les prévisions de croissance au travers du continent,
07:29 on considère qu'il y a à peu près 12 économies sur 20 qui vont faire partie des croissances les plus rapides du globe.
07:35 D'accord.
07:36 Parmi lesquelles on retrouve la Côte d'Ivoire, on retrouve le Rwanda, l'Éthiopie, le Mozambique, la Tanzanie.
07:42 Donc ça c'est la première chose. La deuxième chose c'est qu'il y a toujours cette réflexion liquide versus illiquide.
07:52 D'accord. C'est-à-dire que les gros projets d'infrastructure par exemple, on a parlé de l'hydrogène vert ou autre, on est plus sur de l'illiquide que du liquide ?
07:58 On va être plutôt sur de l'illiquide. Donc aujourd'hui, sortir des investissements un peu classiques liquides,
08:05 ça peut vraiment avoir la peine de se positionner plutôt sur du illiquide.
08:10 Quand on regarde par exemple le private equity global, on a actuellement 1 600 milliards de dollars de poudre sèche.
08:19 D'accord.
08:20 La dette privée sur un encours de 1 500 milliards de dollars, c'est 450 milliards de poudre sèche.
08:25 Donc là-dessus, il va y avoir des réflexions en termes d'arbitrage à faire.
08:29 D'accord.
08:30 À un moment où les taux commencent à être de nouveau, on commence à avoir une perspective quand même de baisse des taux.
08:35 Alors si ce n'est pas dans trois mois, si ce n'est pas dans six mois, si ce n'est pas dans trois mois.
08:38 Il y a tout le questionnement effectivement, mais il y a quand même cette idée que ça arrive un jour.
08:40 On pense quand même que 2024, ça va se produire. Et puis avec une inflation qui commence à revenir, à être sous contrôle.
08:46 Donc nous, on a plutôt tendance à avoir des réflexions sur la partie liquide, en particulier sur la dette privée,
08:53 parce qu'elle est très adaptée aux besoins du marché africain. Et puis de pays où on a des pays comme le Nigeria,
09:01 où on va trouver de la diversification, qui vont aller de l'infrastructure classique jusqu'à la tech.
09:09 Et en passant par les communications satellitaires.
09:12 Là, on parle de les liquides. Si on revient sur le liquide, sur le côté, vous avez mentionné la tech tout à l'heure.
09:18 Est-ce qu'on retrouve par exemple les grandes classes d'actifs ou les grandes thématiques qu'on peut voir, je ne sais pas moi, sur les bourses européennes ?
09:27 Est-ce qu'il y a des thématiques particulières ? Vous avez mentionné la tech. Est-ce qu'il y en a d'autres qui reviennent régulièrement ?
09:32 Ce qui est assez porteur quand même, ça va être aussi tout ce qui s'appuie sur la démographie, tout ce qui est FMCG.
09:40 Donc ça, c'est des thématiques, tout ce qui est lié à la consommation, c'est assez porteur. La santé aussi.
09:48 Et après, sur les principales bourses, on va parler du Stock Exchange, de Johannesburg, Legos, le KR Casa et puis Nairobi.
09:57 Dernière question sur ce sujet, effectivement, investissement en bourse sur le continent africain.
10:04 Est-ce que le politique s'invite dans l'économique et dans le financier ou le boursier cette année, Guillaume Arditi ?
10:11 Alors, vous connaissez ma position. Je pense qu'on ne peut plus, dans le monde actuel, analyser l'économique et le boursier sans prendre en compte le géopolitique.
10:21 Et c'est valable, d'autant plus dans les pays émergents et sur les marchés de croissance en Afrique. Mais on voit aussi que c'est valable en Europe.
10:30 Donc oui, le géopolitique s'invite. Évidemment, on pense tout de suite à ce qui s'est passé l'année dernière avec les coups d'État dans le Sahel.
10:43 On pense au Mali, au Niger, au Burkina Faso. Je pense que ce qui est important pour des investisseurs, c'est de toujours essayer de garder du recul et de ne pas se laisser emporter
10:54 par la déformation du prisme habituel qu'on peut avoir sur l'Afrique. Donc je vous donne deux chiffres. Quand on regarde, par exemple, ces trois pays que j'ai mentionnés,
11:06 la population globale, c'est 80 millions d'habitants. Et le PIB cumulé, il est aux alentours de 50, 60 milliards de dollars. C'est, en termes de population,
11:16 moins qu'un seul pays comme la République démocratique du Congo. Et en termes de PIB, ce n'est pas le PIB de la Côte d'Ivoire. Donc oui, ça a de l'importance.
11:24 Mais en revanche, pour bien analyser les choses, il faut toujours arriver à reprendre du recul et à garder un peu de distance et de sang-froid.
11:31 Analyser l'économique à la lumière du politique, mais le politique ne fait pas l'économique. C'est ce qu'il faut comprendre.
11:37 Merci beaucoup, Guillaume Arditi, de nous avoir accompagné dans Marché à thème, le dernier quart d'heure de Smart Bourse. Je rappelle que vous êtes fondateur
11:45 de Belvedere Advisory, mais aussi chercheur associé à l'Institut Jacques Delors. Merci beaucoup.
11:50 Merci, Nicolas.
11:51 Merci à vous également de nous avoir suivis. Smart Bourse, c'est donc tous les soirs de 17h à 18h en direct sur Bsmart. Vous pouvez donc nous retrouver en replay
12:01 également sur bsmart.fr, sur les réseaux sociaux de Bsmart. Et quant à moi, je vous dis à demain, même heure, donc 17h en direct sur Bsmart.
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