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Nadia Ziane, directrice du département consommation de l'association Familles Rurales, était mardi 14 novembre l'invitée de la matinale de franceinfo. Elle répondait aux questions de Salhia Brakhlia.

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Transcription
00:00 Notez bien cette date à partir du 1er janvier 2024,
00:03 il ne vous sera plus possible de payer vos pâtes, vos œufs, votre riz avec des tickets restaurant dans les supermarchés.
00:09 Seuls les produits directement consommables comme les sandwiches, les plats cuisinés ou les salades préparées resteront éligibles.
00:14 Bonjour Nadia Ziane.
00:15 Bonjour.
00:16 Vous êtes la directrice du département consommation de l'association Familles Rurales.
00:21 En fait c'est tout simplement la fin d'une mesure temporaire adoptée l'année dernière.
00:26 L'idée était de permettre aux salariés de payer une partie de leur course en pleine période d'inflation.
00:31 Là c'est fini, il faut l'accepter ?
00:33 Non il ne faut pas l'accepter d'abord parce que vous l'avez souligné très justement.
00:36 L'idée c'était de permettre de renforcer le pouvoir d'achat des ménages dans une période de crise.
00:42 Or il n'aura échappé à personne que le pouvoir d'achat des consommateurs est encore aujourd'hui très éprouvé.
00:47 Ce n'est pas parce qu'on a une baisse très très sensible des prix de l'alimentation qu'on va crier victoire.
00:52 Et en fait ces tickets restaurants avaient un double avantage.
00:56 Non seulement on pouvait acheter de la matière brute et cuisiner soi-même ces produits,
01:00 donc c'était beaucoup plus sain d'un point de vue de santé publique.
01:04 Et par ailleurs effectivement ils permettaient aux consommateurs de remplir leur panier.
01:08 Et finalement nous ce qui nous pose problème c'est aussi que c'est l'effet mille feuilles.
01:13 On a des entreprises qui gagnent des millions d'euros, qui font des produits excessifs.
01:17 Dans le même temps on a des consommateurs qui peinent à boucler leur fin de mois.
01:21 Et la petite mesure qui leur permettait d'avoir un peu de souffle en fin de mois, on leur retire.
01:27 Donc là ce qu'on dit au gouvernement c'est "souciez-vous des consommateurs".
01:32 C'est aussi des acteurs économiques, c'est-à-dire que plus on grèvera leur pouvoir d'achat,
01:36 moins notre pays se portera bien. Donc c'est un investissement qu'on demande au gouvernement.
01:40 Vous dites "ça coûte encore très cher d'aller faire ses courses, l'inflation alimentaire elle est autour de 8% aujourd'hui,
01:46 on est loin des 12% d'octobre 2022, il faudrait que cette mesure soit prolongée jusqu'à quand ?
01:53 Dans l'idéal il faudrait la pérenniser. Vous avez des mesures expérimentales comme le seuil de revente à perte +10%
02:00 qui oblige la grande distribution à faire des marges d'au moins 10%.
02:04 Ces mesures-là, qui n'ont pas permis, c'était l'origine de la proposition,
02:09 c'était de permettre à nos producteurs de mieux être rémunérés.
02:11 Ça ne l'a pas permis. Par contre ça a grevé le pouvoir d'achat des consommateurs.
02:14 Cette mesure-là non seulement l'a reconduite, mais en plus on l'a étendue à d'autres produits que de l'alimentaire.
02:20 Donc ce qu'on ne comprend pas à famille rurale, c'est pourquoi proroger et étendre des mesures
02:25 qui posent problème pour le pouvoir d'achat des consommateurs,
02:28 et celles-là qui pour une fois permettaient un peu d'oxygène, on y met fin.
02:32 Donc c'est vraiment de l'incompréhension totale et une certaine colère qui commence à monter de la part des consommateurs
02:38 parce qu'ils ne sont très clairement pas considérés par ce gouvernement.
02:41 Mais sur les tickets restaurants précisément, vous entendez aussi les restaurateurs qui disent
02:45 "on a perdu des clients, nous on fait face aussi à l'inflation dans les prix de l'énergie,
02:51 dans les prix alimentaires aussi, il faut nous aider".
02:53 J'ai envie de vous dire que les familles qui aujourd'hui en sont à compter sur leur ticket restaurant
02:58 pour remplir leur caddie, de toute façon elles n'iront pas voir les restaurateurs.
03:01 On parle des classes moyennes supérieures qui peuvent se permettre d'utiliser leur ticket restaurant
03:07 dans des restaurants où s'assoient. Je ne parle pas du fast-food,
03:09 je parle vraiment des restaurateurs. Donc nos restaurateurs, je ne suis pas certaine qu'ils soient impactés
03:14 par la mesure qui touche davantage ces familles qui utilisaient ces tickets restaurants
03:18 comme une bouffée d'oxygène dans leur pouvoir d'achat.
03:22 Vous savez vous quelle est la part des tickets restaurants dans les courses d'une famille rurale ?
03:26 Justement c'est le chiffre qu'on a essayé de retrouver, en tout cas quand on interroge nos familles,
03:31 ce qu'on sait c'est qu'une famille sur deux renonce à certains aliments faute de budget suffisant
03:36 et que ces familles-là utilisaient pour celles qui en bénéficiaient ces tickets,
03:40 encore une fois, pour remplir leur panier de courses. Donc c'est vraiment celle-là.
03:44 Moi j'ai envie de rassurer nos restaurateurs, ceux qui ont les moyens d'aller déjeuner dans nos restaurants,
03:48 il faut les encourager à le faire et ils devraient continuer à le faire,
03:51 ils n'en sont pas à compter sur leur ticket resto pour finir les fins de mois.
03:55 Maintenant ceux de toute façon qui ne seront pas, que les restaurateurs ne capteront pas,
04:00 ceux-là il faut les aider en maintenant cette mesure.
04:02 Vous faisiez une remarque intéressante au début de l'entretien,
04:05 votre critique c'est de dire que si on revient à la réglementation initiale,
04:09 les tickets resto vont inciter à consommer des produits transformés,
04:13 voire ultra transformés et donc à mal manger.
04:15 Bien sûr, et ça c'est pas le sens de l'histoire.
04:18 Le sens de l'histoire c'est d'engager une transition alimentaire,
04:20 toute mesure qui permet de consommer les produits les plus bruts possibles,
04:25 c'est-à-dire les aliments les plus sains pour notre santé, est favorable.
04:28 Et là ce qu'on est en train de dire c'est, vous ne pourrez plus vous préparer votre filet de merlui,
04:33 il faudra acheter une barquette de poissons transformés, ultra transformés,
04:37 qui ne sera pas bonne pour votre santé.
04:39 Donc c'est vraiment tant un mauvais signal sur le point de vue économique,
04:42 que sur le point de vue sanitaire.
04:43 Il y a une mesure qui ne va pas bouger, c'est le plafond de 25 euros,
04:46 lui il va être maintenu, c'est une bonne nouvelle ?
04:48 Tant mieux pour nos restaurateurs, parce que ça, ça va concerner les gens en général,
04:52 ceux qui ont ce niveau-là de ticket restaurant,
04:55 c'est les cadres au sup, qui continueront à fréquenter nos restaurants.
05:00 Et juste un mot rapide sur la question de la dématérialisation des tickets restos d'ici 2026,
05:05 ça pour le coup vous dites bravo ?
05:07 C'est le sens de l'histoire, mais n'oublions pas qu'aujourd'hui encore,
05:10 10 millions de nos concitoyens sont exclus du numérique,
05:12 donc il va falloir accompagner cette transition,
05:15 et deux ans ce n'est pas trop pour y arriver.
05:18 Mais ça va permettre aux salariés notamment de payer le montant juste,
05:21 au centime près, à la caisse.
05:23 Et c'est le sens de l'histoire encore une fois,
05:25 mais ça sous-entend qu'on accompagne les familles.
05:27 Merci beaucoup Nadia Zian d'avoir accepté l'invitation de France Info.
05:30 Je rappelle que vous êtes la directrice du département consommation de l'association Familles Rurales.

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