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Vendredi 22 septembre 2023, ART & MARCHÉ reçoit Christine Cayol, (fondatrice, Prix Yishu Ba)

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Transcription
00:00 Et pour l'interview de la semaine, je reçois en plateau Christine Caillolle qui est fondatrice
00:07 du prix Ishuba, un prix décerné depuis 10 ans à plusieurs artistes d'art contemporain
00:12 chaque année.
00:13 Bonjour Christine, merci d'être avec nous.
00:15 Vous venez de remettre les prix aux lauréats de cette année, Gaspard Billmann, My Leng
00:20 Hoang Thuy et Jonathan Brechignac.
00:22 Est-ce que vous pouvez nous expliquer déjà quels sont les critères, comment vous avez
00:28 sélectionné ces artistes en tant que lauréats ?
00:30 Eh bien, les critères, ils sont toujours un petit peu difficiles à définir.
00:35 Je vais plutôt parler peut-être du jury du comité de sélection.
00:38 Nous nous entourons d'hommes et de femmes qui ont un œil très personnel, très singulier.
00:45 Et si je peux donner un critère, je dirais que ce sont des artistes qui ont un sens poétique.
00:53 Ce sont des artistes qui sont des poètes, que ce soit à travers la vidéo, la photographie,
00:59 etc.
01:00 Ils ont un rapport poétique au monde.
01:01 Et puis, je dirais, du côté chinois, ce sont plutôt des artistes lettrés.
01:07 D'accord.
01:08 On va s'intéresser un peu au prix en lui-même.
01:11 Est-ce que l'objectif, c'est de récompenser une carrière ou alors justement de donner
01:18 l'opportunité aux artistes d'évoluer encore plus dans leur travail ?
01:21 L'objectif, il est très simple.
01:23 C'est de dire et de donner la possibilité à des jeunes artistes qui sont au début
01:28 de carrière de faire un chemin en dehors de leur petit monde qu'on va appeler franco-français
01:35 ou parisien, etc.
01:37 L'objectif, c'est ce que j'appelle le chemin vers l'autre.
01:40 Et ça, c'est assez extraordinaire parce que ce sont des jeunes artistes qui commencent,
01:45 qui sont au début d'un langage.
01:46 Et en allant en résidence en Chine, ils ont l'occasion de confronter leur langage,
01:53 leurs critères, leur manière de faire et de penser à un monde totalement différent.
01:57 Alors ça, vous savez, cette expérience du rapport à l'autre pour un artiste, c'est
02:01 extrêmement précieux.
02:02 Oui, parce que c'est ça.
02:04 Donc, on va préciser, le prix, il crée un pont entre la France et la Chine.
02:09 Et l'objectif, c'est que chaque artiste se tourne vers un autre pays, une autre manière
02:15 de penser.
02:16 Le prix, c'est une résidence.
02:17 La résidence est le prix, le prix, la résidence.
02:20 C'est un peu comme à la Villa Médicis.
02:22 Le prix Shuba, c'est la possibilité pour les lauréats du prix Shuba de partir pendant
02:28 quelques mois en résidence à Pékin.
02:30 Mais ça, ce n'est pas le cas pour tous les prix.
02:33 Donc forcément, ça projette l'artiste dans une professionnalisme, ça le rend encore
02:39 plus attirant parce que du coup, son travail est vraiment ancré.
02:44 Ça le fait bouger.
02:45 Ça fait bouger l'artiste.
02:46 Si je prends l'exemple, par exemple, de Claire Tabouret, elle est arrivée à Pékin en 2012,
02:53 pour la première fois en Chine, et elle a fait, au bout de quelques jours, ses premiers
02:57 autoportraits.
02:58 Donc, c'est intéressant, voyez, qu'être en Chine lui a donné le désir à susciter
03:04 chez elle l'idée de faire un autoportrait par jour.
03:07 Et je me souviens, dans l'exposition qu'on a consacrée à Claire Tabouret, donc au printemps
03:12 2012, il y avait ce mur magnifique d'autoportraits de Claire Tabouret qu'elle n'a cessé après
03:18 d'explorer, après en revenant en France, puis aux Etats-Unis, etc.
03:22 Donc voyez, un prix comme le prix Chuba, à Pékin, est un déclencheur aussi.
03:27 Un déclencheur d'idées et bien sûr aussi de nouveaux chemins picturaux et d'une valorisation
03:35 évidente.
03:36 Oui, parce que justement, Claire Tabouret, c'était une petite dizaine d'années qu'elle
03:41 avait existé.
03:42 Quel retour vous avez après sur l'évolution des artistes une fois la résidence passée,
03:48 etc.
03:49 Une résidence n'est pas une mécanique de valorisation des artistes, mais de fait, ça
03:55 donne de la notoriété et je dirais encore plus de la confiance et de l'assurance aux
04:01 artistes.
04:02 Et vous savez, quand des artistes savent pourquoi ils sont artistes et ce dont ils ont envie
04:07 d'exprimer, leur art devient du coup beaucoup plus sûr, beaucoup plus certain.
04:13 Et après, on regarde et on fait des rencontres.
04:19 La résidence et le prix Chuba permettent aussi des rencontres avec des commissaires
04:25 d'exposition, avec des institutions culturelles, etc.
04:27 Oui, et puis j'imagine que les membres du jury, donc commissaires d'exposition, etc.,
04:32 c'est vraiment des yeux qui sont formés et donc leur regard, c'est presque un aval
04:38 pour les faire rentrer dans le monde des artistes.
04:41 C'est ça.
04:42 C'est-à-dire que nous on dit "I Chuba, c'est devenu maintenant un label".
04:45 Et le label I Chuba, ça veut dire que ce sont des vrais artistes.
04:51 Donc ça veut dire que ce sont des artistes que j'appelle de valeur sûre, dont on sait
04:56 que dans 10 ans, dans 15 ans, dans 20 ans, ils seront toujours sur un chemin de recherche,
05:01 d'exigence et de création.
05:02 Oui, c'est ça.
05:03 Donc vous serez d'accord pour dire qu'un prix, notamment I Chuba, c'est un label,
05:08 une apposition, c'est une valorisation d'un artiste ?
05:11 Je ne sais pas si je dirais une valorisation au sens où vous l'entendez.
05:14 Que ce soit une valorisation au sens d'une reconnaissance et d'un tremplin possible
05:20 pour certains d'entre eux, car ce n'est pas une mécanique automatique, c'est évident.
05:26 Je citais tout à l'heure Claire Tabouret, mais un artiste comme Lionel Sabaté, il
05:33 reçoit le prix Chuba, il est premier lauréat du prix Chuba.
05:36 Et puis qu'est-ce qu'il fait en Chine ? Il va travailler le thé, le thé chinois,
05:40 le thé poire, cette grosse galette de thé fermenté.
05:43 Et il va commencer à faire des sculptures avec ce thé.
05:46 Lui qui a l'habitude de travailler la poussière.
05:48 Vous voyez comment ça décale, mais aussi ça réaffirme l'artiste dans son chemin,
05:54 mais toujours qui est un chemin vers l'autre, et vers l'autre civilisation.
05:57 Et vous conseillerez à tous les collectionneurs de suivre l'évolution des prix ?
06:02 À chaque fois qu'un artiste est choisi par un prix, c'est quand même une valeur sûre ?
06:08 Pour être honnête, je conseille surtout aux collectionneurs de suivre le prix Chuba.
06:13 Et les autres prix, je ne les connais pas tous, donc je me garderais bien de donner des conseils.
06:20 Mais quand je conseille certains artistes d'aller faire des visites d'atelier à des collectionneurs,
06:27 il est évident que l'oréa du prix Chuba, c'est dire qu'il y a des gens,
06:34 des professionnels qui misent et qui ont misé sur ces jeunes artistes.
06:40 Et il y a déjà une forme de reconnaissance.
06:43 Et en plus, il y a une expérience par la confrontation avec la Chine
06:47 qui est forte, qui est féconde, qui est intéressante.
06:50 C'est ça, j'imagine que tous les prix non plus ne se valent pas,
06:52 parce que derrière le vôtre, il y a quand même cette résidence,
06:55 et puis aussi cette mise en lumière à l'international,
06:59 qui j'imagine est fondamentale pour un artiste.
07:02 L'art français est un peu franco-français.
07:05 Et il y a trop peu de rayonnement de ces jeunes talents et de ces grands artistes à l'étranger.
07:13 Et donc, c'est vrai que nous, à Echuba, nous travaillons à ce rayonnement,
07:18 en tout cas en Chine et du coup en Asie,
07:21 parce que quand vous rayonnez en Chine, vous rayonnez en Asie.
07:24 - Et quelle est la réception de ces artistes primés en Chine ?
07:29 Il y a des expositions qui sont organisées.
07:31 C'est une population chinoise, ce ne sont pas des expatriés ?
07:34 - Ce ne sont que des Chinois, des collectionneurs, des amateurs,
07:38 des gens curieux qui se disent,
07:40 mais qu'est-ce que c'est que ces jeunes artistes qui viennent passer deux mois,
07:43 trois mois au cœur de Pékin, créés ?
07:46 Et donc, si vous voulez, le mot que j'utiliserais, c'est "fraîcheur".
07:50 Les collectionneurs chinois et finalement,
07:55 toutes les personnes qui s'intéressent au lauréat du prix Echuba sont curieux.
07:59 Et ils sont curieux de voir justement ce que la confrontation de la civilisation chinoise
08:04 avec un jeune artiste créateur qui arrive parfois pour la première fois en Chine,
08:08 ce que cette confrontation va générer comme nouveau type d'oeuvre,
08:12 nouveau type de langage, nouvelle surprise.
08:15 - Et la Chine, on l'a vu, ça a quand même explosé.
08:18 Les collectionneurs sont extrêmement dynamiques.
08:21 Est-ce que vous savez s'ils sont particulièrement intéressés
08:24 par les artistes primés par Echuba ?
08:26 - Je dirais que ça dépend des collectionneurs.
08:28 Vous savez ce que je vous disais tout à l'heure.
08:29 Le prix Echuba, c'est un prix, je dirais, de valeur sûre.
08:33 Et donc, nous nous faisons très attention à ne pas non plus suivre les fluctuations,
08:39 les hauts et les bas, les goûts qui parfois s'expriment de manière plus ou moins directe
08:46 des collectionneurs chinois.
08:47 Nous sommes en relation avec des musées en Chine, des institutions en Chine
08:52 qui, elles, garantissent une sorte de stabilité à la fois dans le choix des artistes.
08:58 Le marché, il est fluctuant, mais il y a des valeurs sûres.
09:02 Et je pense que ce que les Chinois voient dans le prix Echuba,
09:05 parce que ça fait maintenant plus de 10 ans que nous sommes en Chine,
09:09 à faire ce travail, c'est que nous sommes là, nous continuons de faire ce travail
09:14 et que nous le faisons avec une sorte de loyauté et de fidélité
09:17 à la fois aux artistes et aux pays qui les accueillent,
09:21 je pense qui, du coup, créent une marque qui est un peu la marque Echuba.
09:24 - Oui, c'est intéressant ce que vous dites sur la fluctuation du marché.
09:26 Est-ce que pour vous, un prix, ça se doit de rester fidèle à lui-même
09:30 et peut-être d'être quelque chose de plus stable
09:33 par rapport à un marché qui évolue peut-être beaucoup plus rapidement ?
09:38 - C'est exactement ça.
09:39 Pour moi, un prix, c'est un label de confiance, de qualité et qui mise sur l'avenir.
09:47 - Donc c'est sur le temps long ?
09:48 - Exactement, c'est sur le temps long.
09:50 C'est pour ça que quand je vous parle de Claire Tabouret, de Lionel Sabaté, d'artistes comme ça,
09:54 quand ils sont arrivés et qu'ils ont reçu le prix Echuba,
09:57 c'était vraiment il y a 10 ans, 12 ans.
10:00 Vous voyez, on est à l'émergence de quelque chose.
10:02 Et c'est intéressant aussi de miser sur cette émergence.
10:07 - Merci beaucoup Christine Caillol.
10:08 Je vous rappelle que vous êtes fondatrice du prix Echuba.
10:11 Et c'est la fin de l'émission de l'émission Arrêt Marché.
10:14 Merci beaucoup de nous avoir suivis.
10:16 Et quant à moi, je vous retrouve la semaine prochaine pour un nouveau numéro.
10:19 [Musique]

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