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Mardi 13 juin 2023, BE SMART reçoit Benjamin Louvet (Directeur de la Gestion Matières Premières, Ofi Invest Asset Management)

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00:00 Donc Benjamin, gérant matières premières, Office Asset Management.
00:09 Invest Asset Management.
00:10 Office Invest Asset Management.
00:12 Depuis la fusion, AEMA a acheté Aviva Investors France l'année dernière et on a fusionné
00:17 les deux sociétés de gestion pour devenir Office Invest AM.
00:19 J'étais passé au travers de…
00:21 Cet événement !
00:23 C'est bien que je vienne te voir.
00:25 Oui mais toi t'es le fou.
00:27 Cinquième Asset Manager français.
00:28 C'était le Johnny Hallyday du truc.
00:30 Toi tu dépasses ça.
00:31 Tu es ta propre marque.
00:33 Alors en fait, on va voir, je vais évidemment citer les échos et c'est ce titre que j'avais
00:40 trouvé formidable.
00:41 Pour une diplomatie minérale de l'Europe.
00:44 Qu'est-ce que ça veut dire une diplomatie minérale de l'Europe Benjamin ? Commençons
00:49 avec ça.
00:50 On va repartir du point de départ Stéphane.
00:52 On est aujourd'hui engagé dans une transition, dans une course contre la montre.
00:56 On doit changer la façon dont on produit l'énergie.
00:59 Et les gens sont en train de réaliser progressivement que changer notre système énergétique veut
01:04 dire qu'on va passer des énergies fossiles aux énergies renouvelables principalement
01:08 et qu'on ne fait pas malheureusement d'électricité avec du vent ou avec du soleil.
01:11 On fait de l'électricité avec un transformateur qui convertit l'énergie du vent ou du soleil
01:14 en électricité.
01:15 Et ce transformateur, il a une existence physique.
01:17 Il faut le fabriquer.
01:18 Et il est essentiellement composé de métaux.
01:20 Ce que je suis en train d'expliquer c'est que faire la transition énergétique c'est
01:23 transformer notre dépendance aux énergies fossiles en une dépendance aux métaux.
01:27 Quelques exemples.
01:28 Dans une éolienne vous avez entre 950 kilos et 5 tonnes de cuivre en fonction de la taille
01:32 de l'éolienne.
01:33 Dans une voiture électrique vous avez 4 fois plus de cuivre que dans une voiture thermique
01:36 classique pour l'ensemble des câblages, pour le réseau de batterie, etc.
01:39 Et donc il faut se préparer à tout ça et on n'est pas prêt.
01:42 5 tonnes de cuivre ? Dans les plus grosses éoliennes, oui.
01:45 Pour l'alternateur.
01:46 Je ne savais pas la mesure.
01:49 Ça nous amène à la situation.
01:51 Au large j'imagine c'est les grandes éoliennes offshore.
01:54 Les plus grosses.
01:55 Ce qui nous amène à une situation incroyable où le CNRS publie une étude et nous explique
02:01 que dans les 30 années qui viennent on va devoir extraire autant de métaux de la croûte
02:05 terrestre que depuis le début de l'histoire de l'humanité.
02:07 Voilà le challenge auquel on est confronté et on n'est pas prêt.
02:10 On n'est pas prêt parce que les métaux étaient considérés comme un bien de consommation
02:15 normal, facile à obtenir.
02:17 Et là on parle de quantités qui sont juste astronomiques.
02:20 Je vais te donner juste un exemple sur le nickel.
02:23 Le nickel est un métal qui est indispensable pour fabriquer les batteries, aujourd'hui
02:25 les plus performantes, qu'on appelle les batteries nickel-manganese-cobalt qui donnent
02:28 la plus grande autonomie.
02:29 Aujourd'hui dans le monde on produit à peu près 3 millions de tonnes de nickel.
02:32 Mais là-dessus on produit 1 million de tonnes de nickel de qualité batterie.
02:35 Très pur, le nickel qu'on appelle de classe 1.
02:37 1 million de tonnes.
02:38 La commission européenne dit rien que pour le secteur de l'automobile électrique,
02:42 en 2040, il nous faudra 2 600 000 tonnes de ce nickel de qualité batterie par an.
02:47 Donc on est en face d'un changement d'échelle absolument considérable.
02:52 Dernier chiffre pour bien comprendre de quoi on parle.
02:54 Aujourd'hui dans le monde, selon l'Agence internationale de l'énergie, il y a 220
02:57 mines de cuivre.
02:58 Si on prend la taille moyenne de ces mines, l'Agence internationale de l'énergie dit
03:02 pour répondre à nos besoins en cuivre dans les décennies à venir, il faut ouvrir 80
03:06 mines de cuivre supplémentaires.
03:08 Problème, ce que j'appelle la tragédie des horizons, pour reprendre l'expression
03:12 de Marc Carnet, c'est qu'aujourd'hui en moyenne dans le monde, selon la même
03:15 Agence internationale de l'énergie, il faut 16 ans pour ouvrir une mine.
03:18 Et donc l'Agence dit, si on veut avoir le cuivre en temps et en heure, il faut que
03:22 l'ensemble de ces projets soient actés d'ici 2025.
03:26 Et pour l'instant, il n'y a quasiment pas de projets qui sont en cours d'étude.
03:30 Donc on est vraiment au devant d'un bouleversement qui risque de nous amener à des pénuries
03:34 sur ces métaux.
03:35 Philippe Chalmin en a parlé dans son rapport Cyclope récemment, qui peuvent être terribles.
03:39 On parle d'un écart entre l'offre et la demande de plusieurs millions de tonnes sur
03:43 le cuivre à horizon 2030.
03:45 2030, c'est demain.
03:46 À une autre échelle, j'étais… alors je réfléchis en t'écoutant, et c'est
03:49 cette question-là quand même qui me…
03:51 Qui me taraude.
03:55 Oui, oui, oui, mais qui me taraude, mais ça va au-delà.
03:57 En fait, j'avais le mot taraud, tarabus, mais ça va au-delà, qui est un peu obsédante.
04:02 J'étais avec… hier, je te raconte, j'étais avec des boîtes qui font de l'installation
04:08 aujourd'hui de photovoltaïques locales, et notamment photovoltaïques sur site pour
04:13 l'autoconsommation, et tout, qui commencent à intéresser énormément les entreprises,
04:16 l'industrie, enfin bref, et qui est une situation assez rationnelle, on va le dire
04:22 comme ça, à l'ensemble des défis qui nous sont posés.
04:24 Et les gars disaient, mais c'est étonnant, tout est là, on a tout, et pourtant ça bloque.
04:29 Et pourtant, personne ne dit, ben ok, allons-y, je signe le chèque.
04:35 Et pour tes mines de cuivre, c'est pareil.
04:37 Le patron de Nexens, tiens, qui reviendra nous voir d'ailleurs, me dit, il y a deux
04:41 ans, le cuivre, on n'y est pas, voilà, point à la ligne.
04:45 On le sait.
04:46 Mais oui, mais enfin, c'est facile d'aller lever des capitaux pour un rendement qui
04:52 est d'ores et déjà garanti.
04:54 C'est ça que je ne comprends pas.
04:55 Oui et non.
04:56 Quand tu regardes ce qui se passe, par exemple, au niveau des énergies renouvelables, quand
05:00 tu regardes, aujourd'hui, on a un vrai problème de marge, de rentabilité de ces activités.
05:04 Shell et BP ont annoncé que si la rentabilité de ces activités ne s'améliorait pas, ils
05:08 reviendraient en arrière sur leur programme de développement des renouvelables.
05:10 Donc on a un problème de rentabilité d'une part.
05:13 Dans le domaine du cuivre, c'est exactement la même chose.
05:16 Actuellement, le marché des matières premières, c'est un marché de spot.
05:19 C'est un marché d'équilibre à un instant T entre l'offre et la demande.
05:22 Je vais prendre un exemple simple.
05:23 Quand tu vas au marché le dimanche matin, ce qui t'intéresse, ce n'est pas de savoir
05:25 s'il y aura des tomates dans six mois, c'est de savoir s'il y a des tomates ce matin.
05:28 Donc le prix, en ce moment, baisse parce que la Chine tardare des marées, qu'on craint
05:32 une récession en Europe et aux États-Unis.
05:34 Donc on a un prix qui baisse.
05:35 Et donc, les groupes miniers, ils ne veulent pas investir.
05:39 Ils attendent de voir le prix monter.
05:41 Donc on va devoir voir le prix monter pour déclencher cet investissement.
05:45 Pourquoi le prix des matières premières monte ? Parce qu'on a un déséquilibre.
05:47 Et donc, il faut créer une des deux choses suivantes.
05:49 Le prix monte, ça détruit de la demande parce que ça devient inabordable.
05:53 Dans le cas précis des métaux, ça n'arrivera pas puisque les besoins sont incompressibles.
05:59 C'est la transition énergétique.
06:01 Mais non, tu viens de m'expliquer qu'ils ne sont pas incompressibles puisque Shell et BP te disent
06:04 "si je ne trouve pas de rentabilité, je reviens en arrière".
06:06 Mais non, mais simplement...
06:07 C'est l'explication que j'attendais moi, Benjamin.
06:09 Que dit Shell et BP ? Ils disent "il nous faut plus de rentabilité, donc il faut que les prix montent".
06:13 C'est aussi simple que ça.
06:14 Donc la deuxième solution, c'est la demande, on n'arrivera pas à la contrainte parce qu'on doit faire cette transition énergétique.
06:19 Deuxième solution, inciter à la production.
06:21 Benjamin, on doit faire cette transition énergétique.
06:23 Moi, je vais me tourner vers les deux gros marchés qui décideront, les Etats-Unis et la Chine.
06:28 Est-ce que tu entends un signe clair de la part des Etats-Unis ?
06:32 Oui, tu entends un signe clair en termes industriels, en termes emplois, en termes investissements, en termes exports.
06:37 Mais le parallèle qui est forcément pour que tu trouves de la rentabilité,
06:40 un arrêt massif et sans retour de l'ensemble des énergies fossiles, ça je ne l'entends pas.
06:46 Non, on ne l'entend pas, mais d'un autre côté, si on regarde la Chine...
06:48 Donc, qu'il soit la nouvelle usine du monde pour le renouvelable, ça leur aura très bien, mais ça ne veut pas dire que tu envoies un signal mondial.
06:54 Tu prends le problème à l'envers. On ne peut pas arrêter l'investissement, et c'est bien tout le problème aujourd'hui, dans les énergies fossiles,
07:01 tant qu'on n'a pas les solutions de remplacement en place.
07:04 Et donc la Chine, qu'est-ce qu'ils font ? Aujourd'hui, une éolienne et un panneau solaire sur deux installés dans le monde sont installés en Chine.
07:10 La Chine développe massivement son réseau électrique, ce que d'autres pays ne font pas.
07:14 Aujourd'hui, aux États-Unis, il faut cinq ans pour raccorder un projet photovoltaïque au réseau.
07:20 Donc, ça veut dire... Alors, ce que tu me dis là, c'est passionnant.
07:25 Mais ce que tu me dis là sur la Chine, ça veut dire que... Et la Chine n'est pas productrice de cuivre ?
07:30 Non, pas majoritairement. Elle en raffine énormément.
07:33 Alors, on va y aller sur le raffinage. C'est passionnant ce que tu expliques sur le raffinage.
07:35 Mais ça veut dire que la demande est là, et donc que les groupes miniers, à ce moment-là, ils devraient investir.
07:40 Mais le prix n'est pas là.
07:41 Le prix n'est pas là. Et donc, il va falloir que le prix monte. Alors, la question, c'est...
07:44 Chaque bout se tient et rien ne bouge, quoi. C'est ça qui est un peu fou.
07:47 Le seul élément qui peut déclencher une entreprise qui a un objectif de rentabilité, c'est sa marge.
07:54 Et donc, il faut que le prix monte. La question qu'on peut se poser, c'est de combien faut que le prix monte.
07:58 Et là, je ne vais pas donner ma réponse parce que, moi, j'interviens sur ces marchés, donc je suis forcément un peu partial.
08:03 Je vais donner le point de vue du FMI, le Fonds Monétaire International, qui a fait une étude sur le sujet.
08:07 En octobre 2021, ils ont publié une étude où ils ont essayé d'imaginer comment on pourrait évoluer, de modéliser l'évolution du prix de 4 métaux.
08:13 Alors, oui, il faut que le prix monte. En bout de chaîne, le prix final, c'est le prix du mégawatt-heure électrique, quand même.
08:18 C'est ça, le sujet. On est d'accord.
08:20 Oui, mais il faut aussi que le prix des matériaux de base monte pour que les groupes miniers acceptent de monter.
08:25 Et ça fera monter le prix du mégawatt-heure, forcément.
08:27 Le FMI a étudié 4 métaux qu'ils appellent les métaux électriques, qui sont les métaux nécessaires pour la voiture électrique.
08:33 C'est le lithium, le cobalt, le nickel et le cuivre.
08:36 La conclusion de ce rapport, écrite noir sur blanc, c'est qu'à horizon 2040, et quand on regarde l'étude, en fait, c'est plutôt à horizon 2030 pour l'essentiel de la hausse,
08:43 le prix du lithium, du cobalt et du nickel devraient progresser de, je cite, "quelques centaines de pourcents", et le prix du cuivre de 60%.
08:50 Et ils ajoutent, attention, ces estimations sont conservatrices. Si on se trompe, la hausse pourrait être plus importante que ça.
08:56 Voilà de quoi on parle aujourd'hui. Et on ne s'est pas préparé. D'autres pays, en plus, se sont préparés. C'est l'autre problème qu'on a.
09:02 Et qu'un pays comme la Chine s'est énormément préparé aujourd'hui.
09:05 Mais tu ne comprends pas que ça ne déclenche pas des investissements massifs sur le secteur ?
09:08 Tout ce que tu viens de nous décrire, je ne comprends pas que ça ne déclenche pas des investissements massifs sur le secteur.
09:13 Les investissements massifs...
09:15 Tu devrais être noyé sous le pognon.
09:18 Les investissements massifs ne peuvent se déclencher que pour deux raisons.
09:24 La première, c'est une décision stratégique et politique, et donc à ce moment-là, de l'argent public.
09:29 On est en train d'y réfléchir, tu l'évoquais, il y a un fonds de place qui est en train de se développer.
09:34 Et la deuxième chose, c'est la rentabilité des entreprises.
09:36 Et aujourd'hui, cette rentabilité dans les métaux industriels, elle n'est pas encore suffisamment assurée
09:41 pour que des groupes miniers dans le cuivre, dans le zinc, dans l'aluminium, dans la bauxite, aillent chercher des ressources
09:50 toujours plus compliquées à aller chercher parce que plus profondes, parce que moins concentrées,
09:54 et donc plus coûteuses en énergie, plus coûteuses en main d'oeuvre.
09:57 Et donc on a besoin de prix plus élevés.
09:59 Notre fonds souverain, enfin notre fonds souverain, c'est pas un fonds souverain d'ailleurs.
10:02 C'est pas un fonds souverain.
10:03 C'est pas un fonds souverain.
10:04 Fonds privé auquel l'État va participer.
10:06 Oui, tout à fait, qui a été confié à Infravia, une société qu'on connaît bien, Chauffy Invest AM,
10:10 puisqu'elle a commencé Chauffy Invest AM, oui, effectivement.
10:12 Donc société sérieuse, compétente.
10:14 Oui, qui gère 10 milliards dans les infrastructures.
10:16 Et donc qui va faire un peu, pour en revenir là, un peu de diplomatie minérale.
10:19 Ils vont aller sécuriser les stocks, finalement.
10:21 Alors, il y a plusieurs objectifs dans ce fonds.
10:25 On s'intéresse à l'ensemble de la chaîne.
10:27 Donc il faut s'occuper de la production minière.
10:30 Donc soit investir dans des mines ou dans des projets miniers intéressants,
10:33 soit prendre des participations dans les mines en échange de ce qu'on appelle des contrats d'off-take,
10:37 donc des certitudes d'approvisionnement.
10:39 Absolument.
10:40 Pourquoi pas constituer des stocks stratégiques ?
10:42 C'est arrivé dans l'histoire.
10:43 On a eu des stocks stratégiques de métaux, notamment aux États-Unis.
10:46 Il y avait des contrats de troc qui étaient prévus.
10:47 Puis ça a été abandonné.
10:48 Mais c'était plutôt des contrats stratégiques, plutôt pour les aspects militaires,
10:52 dans le cadre de l'opposition avec la Russie, à l'époque des deux grands blocs.
10:56 Il y a également la partie raffinage, qui est extrêmement importante,
11:00 et qui aujourd'hui, d'ailleurs, est la plus importante.
11:02 D'ailleurs, les Américains, Pete Buttigieg en a parlé il n'y a pas longtemps,
11:05 se focalisent aujourd'hui davantage sur la partie raffinage que sur la partie production minière.
11:10 Parce que la production minière, finalement, elle est assez réforme.
11:12 Voilà, tu dis que c'est ça le vrai point de contrôle de la Chine, c'est le raffinage.
11:15 Aujourd'hui, la Chine a mis en place une infrastructure au niveau du raffinage qui est juste incroyable.
11:20 C'est-à-dire qu'aujourd'hui, la Chine ne produit quasiment pas de lithium,
11:22 mais une très grosse partie du lithium arrive en Chine pour être raffinée en Chine avant de repartir.
11:29 Ils contrôlent entre 30 et 70% du raffinage de la plupart des métaux indispensables à la transition énergétique.
11:35 Ça, ça met moins de temps quand même, ou pas, c'est une question que je te pose.
11:39 Vous voulez un cycle de raffinage par rapport à l'ouverture d'une mine ?
11:44 Ça met 3 ans à 5 ans, c'est quand même des process industriels.
11:47 C'est quand même des process industriels.
11:49 Mais il faut s'en occuper aujourd'hui.
11:50 Et puis, dernière étape, le recyclage, qui pour moi est une étape qui est peut-être un peu moins importante
11:55 du point de vue de ce fonds stratégique.
11:57 Rappelons-le comme ça, puisque ce n'est pas un fonds souverain.
12:00 Parce que le raffinage, à partir du moment où il deviendra rentable, n'aura aucun problème à trouver des fonds.
12:06 Et en plus, pour moi, le problème est vraiment d'assurer la période de transition
12:11 du passage des énergies fossiles aux énergies renouvelables.
12:15 Et cette période, c'est les 10 à 15 prochaines années.
12:18 Dans cette période-là, en fait, le raffinage ne va pas beaucoup nous aider.
12:21 Parce que le raffinage est déjà développé.
12:22 Par exemple, dans le cuivre, on a un taux de recyclage aujourd'hui, je crois, qui avoisine les 50%.
12:27 Et on aura du mal à aller bien au-dessus, parce qu'il y a des durées d'immobilisation qui sont longues.
12:31 Par contre, d'ici une quinzaine d'années, on aura les premières générations d'éoliennes, de panneaux solaires,
12:34 qui arriveront en fin de vie, qu'on pourra recycler pour arriver à ce qu'on appelle un peu des mines urbaines,
12:39 c'est-à-dire des métaux qu'on n'aura plus besoin d'aller chercher sous la terre.
12:41 Là où il faut se concentrer, c'est vraiment le raffinage.
12:43 Oui, mais tu as diplomatie minérale, donc l'idée, c'est urgence à signer des accords solides.
12:48 Exactement.
12:49 Avec des pays producteurs.
12:51 Geoffroy Routbézieux donnait une interview à l'Opinion, je crois que c'était hier.
12:58 C'était à l'occasion de la rencontre des entrepreneurs francophones.
13:02 Il disait "Force est de constater qu'on nous attend plus sur l'ensemble des mines, en tout cas que l'Afrique ne nous attend plus",
13:09 alors que le Bureau de recherche géologique et minière avait une connaissance très fine du sous-sol africain.
13:17 On a perdu énormément d'influence là-dessus.
13:19 Tu ne le dis pas, pour toi c'est à l'échelle européenne, à l'échelle nationale ?
13:22 Parce que les annonces d'Emmanuel Macron, ça qui est un peu surpris, elles sont à l'échelle nationale quand même.
13:26 Alors c'est ça qui est un peu décevant, mais ça s'explique.
13:30 On a pris conscience de ce problème en Europe un peu avant les autres.
13:34 Et donc on avait un peu d'avance.
13:35 Les Allemands sont en train d'y réfléchir, mais à un moment la France a dit "on ne peut plus attendre".
13:38 Il faut qu'on y aille, et donc on a lancé notre fonds.
13:40 Moi ce que j'espère c'est qu'il y aura une initiative européenne et qu'on consolidera pour faire un fonds stratégique au niveau européen,
13:47 pour avoir beaucoup plus de poids.
13:48 Aujourd'hui on parle quand même d'un fonds où l'Etat mettrait 500 millions et Infravia espère passer l'ensemble du fonds à 2 milliards.
13:54 2 milliards pour sécuriser l'ensemble des ressources minières, ça reste quand même relativement faible.
13:59 Donc il va falloir qu'on entraîne les autres pays.
14:02 Il faudrait faire x10 ou x100 ?
14:03 Il faudrait entraîner les autres pays avec nous.
14:04 Disons que déjà x10, ça permettrait de commencer à faire des choses intéressantes.
14:07 Mais l'enjeu il est x100 à t'entendre.
14:10 L'enjeu il n'est peut-être pas à x100, mais x20, x30.
14:14 Il faut changer d'échelle.
14:17 On parle d'investissements qui sont très lourds.
14:19 Donc tout ça pour dire qu'évidemment il faudrait faire un contrat au niveau européen.
14:24 Et tu le dis, les pays africains ne nous ont pas attendu, les pays sud-américains non plus.
14:29 Pourquoi ?
14:30 Simplement parce que la Chine a pris conscience de ce problème bien avant nous.
14:33 Alors ils ont eu beaucoup de chance quelque part.
14:35 Il y a deux facteurs pour moi qui expliquent ça.
14:37 Le premier, c'est qu'au début des années 2000, la Chine voit l'émergence de son économie de façon très poussée.
14:43 Et donc l'émergence d'une classe moyenne d'à peu près 300 millions d'habitants.
14:46 Excuse du peu quasiment la population européenne.
14:48 Et donc là se posent des problèmes d'infrastructures, d'immobilier, de biens de consommation.
14:52 La Chine se dit "Mais mince, on a besoin de métaux pour tout ça. Il faut qu'on sécurise tout ça."
14:55 Et donc ils commencent à prendre des participations dans des sociétés en Afrique, dans des sociétés en Amérique du Sud.
15:01 Ils leur proposent des contrats d'off-tech, ils leur proposent de construire des infrastructures en échange de prises de participation dans des compagnies nationales.
15:08 Et donc comme ça ils ont sécurisé une grosse partie de la production métallique.
15:14 La deuxième chance qu'ils ont eu à mon avis, et ça c'est une appréciation personnelle,
15:19 c'est que quand tu regardes le gouvernement chinois, la quasi-totalité du gouvernement chinois est de formation ingénieure.
15:25 En France le dernier président ingénieur c'était Valéry Giscard d'Estaing.
15:28 Alors ça peut paraître un détail, et je ne dis pas qu'être technocrate ce n'est pas bien,
15:31 mais la façon dont tu règles un problème quand tu es technocrate ou quand tu es ingénieur ce n'est pas la même.
15:35 Et donc aujourd'hui on a pris beaucoup de retard par rapport...
15:37 Le dernier qui a vraiment parlé de mine c'est Arnaud Montebourg.
15:39 Oui, tout à fait.
15:40 Qui ne me semble pas ingénieur d'ailleurs, mais comme quoi.
15:43 Mais qui sur les problèmes d'industrie effectivement aussi s'est beaucoup battu sur l'histoire d'Alcatel,
15:47 a été assez présent il faut le dire.
15:49 Bon, mais comment dire, l'épisode russe, enfin je comprends ton sujet de diplomatie minérale,
15:57 l'épisode russe ne te rassure pas sur la garantie finalement d'un contrat aussi solide soit-il.
16:05 Qu'est-ce qu'il faut penser ?
16:07 Alors c'est Imerys qui a lancé un projet d'extraction de lithium en France.
16:14 Oui, dans l'allier.
16:15 Curieusement qu'il n'y a pas encore de ZAD autour du truc.
16:19 La raison simple Stéphane, c'est que c'est déjà une mine.
16:22 Oui, ils sont capables de trouver.
16:25 Oui, mais c'est une mine de Kaolin et donc en fait les gens de la région sont plutôt contents,
16:28 ça va faire de l'emploi en plus, ils ont déjà une mine.
16:30 Imerys dit on va mettre en place des mesures pour qu'il n'y ait pas trop de poussière,
16:34 pour que le raffinage se fasse plus loin, avec des systèmes de tuyaux pour envoyer les minerais,
16:39 pour ne pas avoir trop de poussière.
16:40 Mais ma question c'est, il y a un potentiel en Europe ?
16:42 Oui, il y a un potentiel en Europe.
16:43 Pour extraire un certain nombre de ces tuyaux.
16:44 Il faut qu'on retrouve nous aussi une forme d'appétit pour l'extraction mineure.
16:48 Il y a eu du lithium qui a été trouvé en Serbie, il y a eu du lithium qui a été trouvé au Portugal.
16:51 En Serbie, ils ont écarté le truc, c'est Riotinto qui voulait ouvrir en Serbie, ils ont été mis dehors.
16:55 Pour des raisons d'acceptabilité sociale.
16:56 Exactement.
16:57 Aujourd'hui, le seul secteur d'activité qui a une image plus négative que le pétrole, c'est le secteur minier.
17:04 Il faut sortir de l'inconscient collectif cette image de la mine façon germinale.
17:10 Aujourd'hui, il y a eu énormément de progrès, on sait faire des mines plus propres,
17:13 il y a des mines aujourd'hui où on opère avec des camions électriques,
17:16 il y a des mines qui opèrent avec de l'électricité renouvelable.
17:20 Ça se fait, donc on peut nettement...
17:22 Oui, mais Benjamin, il ne faut pas non plus raconter d'histoire, c'est-à-dire que c'est forcément sale à un moment.
17:28 Stéphane, deux choses là-dessus.
17:29 La première, l'activité humaine consiste à faire un trou dans la terre pour prendre des matières, les transformer et faire autre chose.
17:35 Donc si on ne veut plus rien polluer, il faut arrêter l'activité humaine.
17:38 Bon, ce n'est pas ce qu'on veut faire.
17:39 Deuxième chose, beaucoup plus pragmatique.
17:42 Aujourd'hui, on est à l'heure des choix.
17:44 D'un côté, on a les énergies fossiles qui représentent encore 82% de l'énergie primaire qu'on consomme dans le monde.
17:51 Pour mémoire, dans les années 70, c'était 86%.
17:54 Ça n'a pas beaucoup changé.
17:55 C'est top.
17:56 C'est responsable de 70% des émissions de CO2 de la planète.
18:00 La totalité de l'industrie minière, de l'extraction jusqu'à la consommation,
18:06 ce qu'on appelle dans le jargon de l'investissement socialement responsable, le scope 1, 2 et 3, tout compris,
18:13 est responsable de, selon les estimations, entre 11 et 15% des émissions de CO2 de la planète.
18:19 Là-dessus, 70% des émissions sont liées à la production d'acier et 20% à la production d'aluminium.
18:26 C'est-à-dire que tous les autres métaux ensemble sont responsables d'un pour cent des émissions de CO2 de la planète.
18:30 Si notre priorité, c'est le CO2, il n'y a pas photo.
18:33 Après, évidemment, les mines, ça pose d'autres problèmes.
18:35 Des problèmes d'impact sur l'environnement, des problèmes d'impact sur la biodiversité, d'emprise au sol.
18:42 Tout ça, légalement, on peut l'encadrer pour le rendre le plus respectueux possible de ces aspects.
18:47 Il n'y a pas de solution parfaite.
18:49 La seule solution parfaite, c'est d'arrêter d'avoir une activité économique pour ne plus polluer.
18:54 Ce qui est fou, Benjamin, au terme de cette discussion, et toujours passionnant et un petit peu angoissant quand même,
18:59 c'est que sur le papier, toutes les équations sont là et qu'on a le sentiment que rien ne bouge.
19:04 En fait, fondamentalement.
19:06 Ce discours-là, tu le tiens depuis au moins trois ans, mais sans doute même un peu plus.
19:11 Qu'est-ce qui change ?
19:13 L'économie mondiale, c'est un bateau qui navigue à grand air.
19:15 Quand tu tournes la barre, le bateau met un peu de temps à changer de direction.
19:20 On a beaucoup avancé. En Europe, on a passé le net zéro industriel.
19:23 Mais ne me dis pas qu'on a beaucoup avancé quand tu me donnes ce chiffre qu'on est au niveau d'exploitation des hydrocarbures
19:30 qui est quasiment celui des années 70.
19:33 Ne me dis pas qu'on a beaucoup avancé.
19:35 Nos besoins, nos économies ont cru. Et la croissance, c'est de l'énergie.
19:39 La croissance, c'est la transformation.
19:41 La physique dit que l'énergie, c'est la transformation d'un système.
19:45 Donc c'est de l'énergie.
19:46 Donc on a eu des besoins. Aujourd'hui, il faut qu'on change ça.
19:49 Le premier élément qui est nécessaire, c'est une volonté politique.
19:51 Le Critical Raw Materials Act en Europe a dit qu'il faut qu'en 2040, de mémoire,
19:57 10% de notre production de métaux soit faite en Europe et 40% du raffinage soit fait en Europe.
20:04 Maintenant, il y a la volonté politique.
20:05 Il faut mettre deux choses.
20:06 Les moyens pour que les entreprises puissent se mettre en marche.
20:10 Et l'autre élément indispensable, c'est le prix de ces métaux pour inciter les producteurs à produire davantage.
20:17 Et nous, c'est le pari qu'on fait aujourd'hui chez Offi Invest.
20:19 Tout ça est passionnant.
20:22 Benjamin Louvet, qui nous accompagnait pour démarrer cette émission.
20:26 Vous avez un nouveau bouquin à sortir sur ce sujet à la rentrée en septembre.
20:31 On aura très largement l'occasion de se reparler.
20:34 Reparler. On continue Bismarck.

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