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Vincent Nioré, vice Bâtonnier du Barreau de Paris, répond aux questions de Dimitri Pavlenko. Ensemble, ils s'intéressent au projet de loi d'Orientation de la Justice et plus particulièrement à l'article 3 qui autorise l'activation à distance d'un appareil électronique.
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Vincent Nioré, vice Bâtonnier du Barreau de Paris, répond aux questions de Dimitri Pavlenko. Ensemble, ils s'intéressent au projet de loi d'Orientation de la Justice et plus particulièrement à l'article 3 qui autorise l'activation à distance d'un appareil électronique.
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NewsTranscription
00:00 7h12 sur Europe 1, Dimitri Pavlenko, vous recevez ce matin le vice-bâtonnier du barreau de Paris.
00:06 Oui, bonjour Vincent Nioré.
00:07 Bonjour.
00:08 Bienvenue sur Europe 1, vice-bâtonnier et à ce titre porte-parole du Conseil de l'Ordre des avocats de Paris.
00:12 Un projet de loi d'orientation de la justice arrive très bientôt au Sénat le 6 juin.
00:17 Ce texte est très attendu parce qu'il contient toutes les promesses du garde des Sceaux, Eric Dupond-Moretti,
00:21 pour répondre, je le cite, au délabrement de la justice.
00:25 Mais une mesure vous inquiète dans ce texte, Vincent Nioré, c'est l'article 3
00:30 qui autorise les enquêteurs à recourir à une nouvelle technique qu'on appelle
00:34 l'activation à distance d'un appareil électronique.
00:38 Alors quel est l'enjeu de cette mesure, Vincent Nioré ?
00:40 L'enjeu de cette mesure c'est l'intrusion.
00:42 Il apparaît que la loi, semble-t-il, est mal rédigée.
00:47 L'activation à distance d'un appareil électronique semble concerner...
00:52 Je traduis, c'est localisation d'un téléphone.
00:54 Éventuellement, on pourra écouter les conversations, voir ce qu'il y a dans ce téléphone.
00:59 Voilà ce que la loi prévoit d'offrir comme disposition aux enquêteurs.
01:02 C'est un peu plus que ça, puisque le projet de loi renvoie à l'article 706-96 du code de procédure pénale
01:08 qui concerne notamment la matière de la criminalité organisée,
01:12 et précisément dans cette hypothèse, la sonorisation et la captation d'images.
01:18 Si on parle des textes déjà existants...
01:21 - Ça veut dire poser des micros ou des caméras pour espionner, pour savoir...
01:24 - Actuellement, c'est le droit positif.
01:25 On peut sonoriser un appartement, un lieu privé, pour y recueillir une part de confidentiel
01:31 en matière de criminalité organisée.
01:33 Sonoriser et poser aussi des caméras pour capter des images.
01:37 C'est à la fois le son et l'image.
01:39 Or, le projet de texte renvoie à ce texte-là,
01:43 si bien que l'activation à distance d'un appareil électronique,
01:47 et non pas numérique, électronique, essentiellement le téléphone portable,
01:51 nous renvoie à la fois à la sonorisation, donc l'écoute, et l'image.
01:57 Alors, de quelle manière...
01:59 - Je précise que ce serait réservé aux enquêtes concernant des délits ou crimes punis
02:03 d'au moins 5 ans d'emprisonnement, c'est-à-dire terrorisme ou crime organisé quand même.
02:06 C'est pas pour monsieur, madame, tout le monde.
02:08 - Il y a deux dispositions.
02:09 La première disposition concerne l'activation à distance d'un appareil électronique
02:13 en vue de sa localisation en temps réel.
02:16 - Voilà. Où est le téléphone et donc celui qui est son propriétaire ?
02:19 - Voilà. Alors, à l'insu et sans le consentement du propriétaire du téléphone
02:25 ou de son possesseur, mais là, cette disposition concerne le droit commun,
02:28 la matière criminelle et les délits punis d'une peine d'au moins 5 ans d'emprisonnement.
02:34 - Alors, vous dites...
02:35 - Et après, la criminalité organisée, c'est le deuxième aspect.
02:37 - Alors, vous dites que ce serait une catastrophe, cette disposition,
02:40 mais en quoi ce serait vraiment une catastrophe
02:42 quand on connaît d'abord les difficultés qu'ont les policiers
02:44 à faire aboutir leurs enquêtes et les dangers qu'ils prennent
02:47 pour aller sonoriser une pièce, parce que ça suppose,
02:50 pour aller poser des micros, d'entrer dans la pièce
02:52 avec tous les risques de tomber nez à nez avec celui qu'on voudrait espionner.
02:55 - Oui. Alors, ce qui se passe là, on parle d'activation à distance,
02:58 c'est-à-dire que l'intrusion n'est plus nécessaire.
03:00 On n'a plus besoin d'entrer dans un lieu privé ou un véhicule.
03:04 L'opération se déroule à distance et c'est intéressant.
03:07 C'est une activation à distance. Qu'est-ce que ça signifie ?
03:10 - Accessoirement, je précise que Amazon, par exemple,
03:12 est suspecté de faire la même chose à des fins commerciales,
03:14 de nous écouter à travers nos téléphones.
03:16 - Oui, alors ce sont des moyens techniques qui existent déjà
03:18 et que les législateurs souhaitent intégrer dans le code de procédures pénales.
03:21 Donc, très bien. Mais où nous éprouvons des inquiétudes,
03:25 c'est à deux titres sur la mauvaise rédaction des textes.
03:27 D'abord, il s'agit de toute personne, toute personne,
03:31 on ne parle pas, on ne met pas en place
03:34 l'exigence d'un critère de mise en cause préalable.
03:37 On ne parle pas d'indice antérieur.
03:39 On ne parle pas de raison plausible pesant sur des personnes
03:41 qui seraient susceptibles de voir activer leur téléphone portable à distance.
03:45 Là, c'est toute personne. La loi est imprécise.
03:48 Alors, bien sûr, on va raisonner en matière de criminalité organisée
03:52 comme une évidence, à savoir que l'opération concernera un mis en cause.
03:56 Mais la loi ne le dit pas. La deuxième observation concerne...
03:58 - Vous voulez dire, attendez, juste pour qu'on soit bien clair Vincent Nyoré,
04:01 si on utilise cette technique, par exemple,
04:04 pour identifier un lieu d'arrivage d'une cargaison de drogue, pourquoi pas ?
04:08 Mais si c'est un but d'espionnage style filet dérivant,
04:12 on cherche à collecter de l'information sans trop savoir ce qu'on va chercher,
04:15 Vincent Nyoré, là, vous dites, ça pose un problème.
04:18 Et puis surtout, si ça concerne des professions protégées,
04:20 les avocats, les magistrats, les journalistes, ce genre de choses.
04:22 - Le problème, c'est la restriction.
04:24 Les deux textes, en droit commun ou en criminalité organisée,
04:27 prévoient une restriction. Et le texte, dans un premier temps,
04:30 prévoit une prohibition, une interdiction d'activer à distance
04:33 le téléphone portable des personnes visées à l'article 100-7 du Code de Pressure pénale,
04:37 c'est-à-dire avocat, magistrat, député, sénateur.
04:40 On s'arrête là. Le journaliste n'appartient pas au champ
04:43 de la prohibition d'activation à distance.
04:45 C'est-à-dire que qu'est-ce qui est en cause ?
04:47 C'est le secret des sources, le secret professionnel de l'avocat,
04:50 le secret du délibéré du magistrat et essentiellement le secret médical.
04:53 Pourquoi ? Parce qu'en revanche, le texte poursuit en disant
04:56 s'il apparaît que des données sont collectées,
05:01 donc à l'occasion de l'activation à distance de téléphone portable
05:05 de toute personne se situant dans ces lieux protégés,
05:08 cabinet d'avocat, cabinet d'un magistrat, études de notaire,
05:12 de médecin, de huissier, commissaire de justice,
05:15 de journaliste, local de presse, de communication, de visuel.
05:19 S'il apparaît que ce qui est interdit, c'est la retranscription.
05:23 C'est-à-dire que le principe...
05:25 - Oui, parce qu'il y aura un problème de recevabilité de la preuve dans ce cas-là.
05:27 - Oui, c'est plus que ça. Le principe de la collecte n'est pas interdit.
05:31 Ce que nous voulons, c'est que le législateur écrive
05:34 que le principe même de la collecte d'une donnée
05:37 à partir de l'activation d'un téléphone portable
05:40 soit interdit dans les lieux protégés.
05:42 - Donc pour résumer, Vincent Nurel, ce que vous dites,
05:44 c'est pourquoi pas cette disposition, mais précisons-en les termes
05:48 qui sont trop flous à l'heure actuelle dans le texte qui arrive au Sénat.
05:52 - Bien sûr. Si l'on veut perquisitionner un cabinet d'avocat,
05:54 le texte nous dit aujourd'hui de l'article 56-1 du Code de pressure pénale
05:58 qu'il faut marquer avant des raisons plausibles.
06:00 Si l'on veut placer sur écoute un avocat, il faut marquer contre lui,
06:04 la Chambre criminelle le dit, des indices antérieurs.
06:07 Là, nous n'avons rien. On a une réaction qui est imparfaite, trop générale.
06:11 Il appartient à la Chancellerie de reprendre sa copie.
06:13 - On va suivre évidemment l'évolution de ce débat,
06:15 ce projet de loi sur la justice.
06:17 Ça arrive en tout cas au Sénat, je vous le disais tout à l'heure, le 6 juin.
06:20 Affaire à suivre. Merci d'être venu nous en parler, nous alerter ce matin, Vincent Nurel.
06:24 Je rappelle que vous êtes le vice-bâtonnier de l'Ordre des avocats de Paris.
06:27 Bonne journée à vous.
06:28 - Merci beaucoup.