• l’année dernière
Le monde n'en finit plus de craquer. Alors que la guerre en Ukraine s'enlise, de nouveaux terrains déstabilisés s'ouvrent à nos portes. Le Pakistan, doté d'un arsenal nucléaire, connaît d'importantes révoltes populaires depuis l'arrestation de l'ancien premier ministre, Imran Khan, par l'armée pour des accusations présumées de corruption. Plus proche de nous encore, la Turquie retient son souffle à l'approche de son élection présidentielle, qui s'annonce ardue pour le président sortant Recep Tayyip Erdogan. L'issue du scrutin, quelle qu'elle soit, devrait avoir d'importantes conséquences sur l'Europe et notre pays, notamment en ce qui concerne les questions migratoires et diplomatiques.

Dans ce jeu mondial, les Etats-Unis tiennent encore fermement les rênes malgré le recul évident de leur monnaie, le dollar. Washington plie mais la fin de l'hégémonie américaine est encore loin d'être consommée, malgré une apparente vacance du pouvoir avec la figure chancelante de Joe Biden. Le poids des institutions américaines, le droit externalisé des États-Unis et leur capacité de déstabilisation à l'échelle planétaire sont autant d'éléments qui leur confèrent encore un rôle capital que l'Europe est incapable de contrecarrer, voire même de contourner.

L'Union européenne, où la France est dominée par l'Allemagne, est peu à peu devenue une colonie américaine avec un euro fragile, et la voix de Paris s'est progressivement éteinte. Sa diplomatie et sa politique de non-alignement ne sont plus, son tissu industriel et sa puissance agricole ont été savamment démantelés, et elle accuse un lourd retard dans les nouvelles technologies de pointe. Pour aggraver son déclin, la démographie est écrasée par une baisse de la natalité intérieure et une immigration incontrôlée et imposée.

Comment la France et l'Europe peuvent-elles encore relever la tête ? Est-il encore temps ? D'où viendra le courage d'affronter un nouveau destin ?

Alain Juillet, diplômé de HEC, de l'IHEDN et de Stanford, a dirigé les services de renseignement de la DGSE en plus d'avoir mené une carrière importante dans le secteur privé. Alain Juillet est également l'un des pionniers de l'intelligence économique en France, un secteur qui l'a amené à conseiller différents premiers ministres entre 2003 et 2009, tels que Jean-Pierre Raffarin, Dominique de Villepin et François Fillon. Dans cette vidéo, il aborde les points chauds du monde et leurs conséquences avec un regard à la fois géostratégique et économique. Du Pakistan à la Turquie, de Pékin à Moscou en passant par New Delhi, Washington, Bruxelles, Berlin et Paris, Alain Juillet présente les défis des bouleversements mondiaux en cours et alerte sur notre devoir de s'en saisir.

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Transcription
00:00 [Générique]
00:20 Bonjour à tous, je suis ravie de vous retrouver pour passer ce nouveau numéro du samedi politique en votre compagnie.
00:26 Et au programme cette semaine, nous allons creuser les sillons que nous avons déjà découverts.
00:30 Alors que l'hégémonie américaine faiblit, que la croissance de la Chine saute aux yeux,
00:34 que la guerre en Ukraine s'enquiste progressivement et que bien d'autres crises s'annoncent.
00:39 On peut penser au Pakistan et à ses interrogations autour de l'élection turque.
00:44 Eh bien, des questions subsistent.
00:47 Que va devenir l'Union européenne ? Qu'en sera-t-il de la France ?
00:51 C'est ce que nous allons voir tout de suite.
00:52 Mais comme chaque semaine, je compte sur vous et uniquement sur vous pour le succès de cette émission.
00:57 Aussi, n'oubliez pas de la partager, de commenter, de faire des suggestions.
01:01 Je réponds à vos commentaires toutes les semaines.
01:04 Et puis bien sûr, cliquez sur le pouce en l'air.
01:05 C'est très simple, mais c'est crucial pour améliorer le référencement.
01:09 Allez, c'est parti, au boulot.
01:11 [Générique]
01:21 Bonjour Alain Juvier.
01:22 Bonjour.
01:23 Merci beaucoup d'être à nouveau à nos côtés Alain Juvier.
01:25 Pour vous présenter, vous êtes diplômé d'HEC de l'IHEDN de Stanford.
01:30 Vous avez été officier dans les commandos parachutistes du SDEC, l'ancêtre de la DGSE.
01:36 Plus tard, vous avez dirigé le renseignement de la DGSE.
01:39 Vous affichez également une grande carrière dans le secteur privé.
01:42 Et vous êtes le père de l'intelligence économique en France.
01:45 Vous avez d'ailleurs…
01:46 Un des pères.
01:47 Un des pères, allez.
01:49 Au diable le lavaris.
01:50 Et vous avez conseillé notamment le Premier ministre français,
01:54 les premiers ministres, devrais-je dire, entre 2003 et 2009,
01:57 c'est-à-dire les périodes qui correspondent à Jean-Pierre Raffarin,
01:59 Dominique de Villepin et François Fillon.
02:02 Tout à fait.
02:03 Je rappelle également la petite page de publicité,
02:05 comme la dernière fois, qu'on peut très régulièrement vous retrouver
02:08 sur votre propre chaîne YouTube Alain Juvier, Openbox TV.
02:12 C'est très facile d'accès.
02:14 Vous proposez des émissions de géopolitique et de géostratégie.
02:18 J'ai tout bon.
02:19 Merci.
02:20 Alors, pour commencer Alain Juvier,
02:21 la dernière fois que vous êtes venu nous voir,
02:23 on a fait un panorama.
02:25 C'était au mois de février,
02:26 on parlait de la guerre en Ukraine qui fêtait son premier anniversaire.
02:30 L'Europe hivernale était frappée par une crise énergétique,
02:32 une explosion des prix, une inflation aussi.
02:35 Et la Chine voyait sa place petit à petit grandir,
02:38 aussi bien sur le terrain diplomatique que sur le terrain économique,
02:42 tandis que le dollar reculait peu à peu.
02:44 Alors aujourd'hui, malgré un silence quasi assourdissant,
02:48 j'allais dire, pour faire un oxymore dans les médias,
02:50 des nouvelles crises pour avoir d'autres influences
02:52 sur nos territoires aussi bien européens que français.
02:55 Et pour commencer, j'aimerais qu'on s'attarde rapidement
02:58 sur la question du Pakistan.
03:00 Il y a quelques jours, l'ancien Premier ministre,
03:03 Iran Khan, a été arrêté dans des conditions assez suspectes.
03:07 Je vous propose qu'on regarde une petite vidéo de récapitulation
03:11 et puis tout de suite, on revient.
03:13 (Cris de la foule)
03:24 (Bruit de la rue)
03:28 (Cris de la foule)
03:37 (Bruit de la rue)
03:41 (Propos en kurdish)
04:09 [Générique]
04:15 Alors on l'a vu, cet ancien Premier ministre,
04:17 Imran Khan, bénéficie d'un énorme soutien populaire.
04:20 On voit d'ailleurs que son arrestation a mis le feu aux poudres dans le pays.
04:23 Quelle est votre analyse de cette situation ?
04:26 – Bon, d'abord, il ne faut pas oublier que le Pakistan
04:29 est un pays extrêmement violent.
04:31 Il ne faut pas l'oublier parce que nous, on ne le voit pas d'ici,
04:35 bien sûr, sauf quand il y a des événements de ce genre.
04:37 Mais c'est un pays très violent et très dur.
04:41 Ce n'est pas le premier ministre ou le président qu'ils arrêtent
04:45 et ce n'est pas le dernier qui risque d'être tué.
04:47 C'est malheureux, il y en a eu d'autres avant.
04:50 – Alors là, la Cour suprême a toutefois invalidé son arrestation.
04:52 – Alors justement, j'allais vous dire, la bonne nouvelle
04:54 par rapport à ce qui vient de se passer,
04:56 c'est que la Cour suprême a décidé hier que l'arrestation était illégale.
05:00 Donc, a priori, mais encore il faut se méfier,
05:03 mais enfin, a priori, ils devraient le libérer
05:05 puisque la Cour suprême dit qu'il n'y avait pas de raison de l'arrêter.
05:09 Ce qui montre bien que c'est une manipulation de l'information.
05:12 On l'a accusée, on l'a chargée de corruption, on l'a accusée de corruption.
05:16 Et il y a probablement une partie, petite partie qui est vraie,
05:21 mais certainement pas tout ce qu'on a raconté
05:23 puisque la Cour dit non, il n'y a pas de motifs de l'arrêter.
05:26 Donc, je pense que c'est une affaire qui est typiquement pakistanaise, je dirais,
05:31 sur le plan de la violence et de l'arrestation de hauts dignitaires,
05:35 je dirais, du système.
05:38 Le rôle de l'armée qu'on a vu dans votre passage, dans votre présentation,
05:44 le rôle de l'armée est toujours essentiel dans ce pays.
05:46 La Pakistan, la police, l'armée et les services d'ailleurs,
05:51 les services de renseignement, les ISIS, comme on dit ICS,
05:55 sont très importants et ont un rôle permanent sur l'ensemble de la population.
06:01 Alors maintenant, je crois quand même que là, la réaction populaire est tellement forte
06:06 que je ne vois pas le gouvernement pouvoir continuer.
06:09 Ils vont chercher une échappatoire.
06:11 – Alors vous expliquez que c'est une affaire du Pakistan, on va dire,
06:17 pour autant on a quand même du mal à penser qu'il n'y a pas d'interaction étrangère
06:21 et d'intervention étrangère, dans la mesure où on l'oublie,
06:25 mais le Pakistan a un arsenal nucléaire.
06:27 – Ah ben attends, il y a plusieurs choses.
06:28 Il ne faut pas oublier que le Pakistan est proche des Chinois,
06:32 il est proche des Chinois et par contre il est en permanence en guerre,
06:37 sur la frontière du Cachemire, ils sont en guerre permanente,
06:41 petite guerre certes, mais guerre quand même, avec les Indiens.
06:44 Et que la relation avec les Indiens est très mauvaise et il ne faut pas oublier,
06:47 nous Français, il ne faut pas qu'on oublie,
06:49 c'est qu'on avait vendu des sous-marins pour se battre aux Pakistanais
06:55 et après on a vendu des sous-marins aux Indiens,
06:58 en sachant parfaitement qu'ils étaient tous les deux opposés.
07:01 – Très américain comme stratégie.
07:03 – Oui, c'est une méthode américaine sur laquelle on peut se poser
07:06 un certain nombre de questions, entre autres.
07:11 Vous avez l'opposition indo, il y a une opposition larvée
07:16 entre l'Inde et la Chine permanente,
07:18 parce que ce sont deux pays de très grande puissance,
07:21 l'Inde est en train de monter en puissance à toute vitesse
07:24 pour derrière la Chine, c'est clair,
07:26 elle sera la deuxième puissance mondiale en 2050,
07:29 quand la Chine sera la première,
07:31 d'après maintenant toutes les prévisions qu'on peut faire, sérieuses.
07:35 On voit bien, ils sont à la fois en lutte, en même temps c'est l'Asie,
07:40 et ils veulent se différencier du reste du monde,
07:44 donc on est effectivement dans une zone
07:46 qui devient de plus en plus complexe et de plus en plus troublée.
07:49 Et le Pakistan est un endroit où il y a des troubles régulièrement.
07:52 Mais n'oubliez pas qu'à côté du Pakistan, il y a aussi l'Afghanistan,
07:55 et pendant très longtemps, pendant toute la période qu'on a connue,
07:59 c'est le Pakistan qui aidait les talibans,
08:02 qui aidait les opposants aux armées européennes et occidentales, et américaines.
08:07 – Et alors si on regarde ce conflit intérieur au Pakistan,
08:13 au regard des influences étrangères, qu'est-ce qu'on pourrait en dire ?
08:16 Est-ce qu'on peut penser que des pressions ont été faites
08:19 sur le gouvernement actuel pour procéder à cette arrestation ?
08:22 Est-ce qu'au contraire, on a vu beaucoup de révolutions de couleur,
08:25 comme on les appelle publiquement un peu dans des pays tels que même le Liban,
08:29 est-ce qu'il y a une influence sur cette question ?
08:32 – Je pense que le fait que ce soit l'armée qui a arrêté Imran Khan,
08:39 montre qu'effectivement c'est un conflit interne entre les militaires
08:43 qui veulent contrôler le pouvoir, et Imran Khan,
08:46 enfin ce que représente Imran Khan qui est plutôt le côté populaire,
08:50 c'est-à-dire une fois de plus c'est l'armée qui veut maintenir son contrôle
08:54 par rapport à une population qui fait émerger des leaders.
08:58 Donc c'est très clair, alors que derrière, comme vous l'avez dit,
09:01 il y a certainement des appuis extérieurs dans les deux côtés,
09:05 pour encourager ce qui se passe, mais sur le fond,
09:09 c'est un conflit assez classique dans cette zone du monde,
09:12 et au Pakistan en particulier, entre le pouvoir militaire et, je dirais, les civils,
09:18 puisqu'il faut faire attention aussi.
09:20 – Est-ce que l'Union Européenne, l'Europe plus exactement,
09:24 doit s'inquiéter de ce conflit intérieur au Pakistan ?
09:27 Il peut y avoir des conséquences négligeables pour elle ?
09:30 – Alors, bien sûr qu'il faut s'inquiéter de ça, parce que c'est,
09:34 si vous voulez, il faut bien reconnaître que nous avons aujourd'hui
09:37 le centre du monde économique, et en définitive,
09:41 et même plus qu'économique, mais d'une certaine manière politique également,
09:45 c'est l'Asie.
09:46 Donc on ne peut pas se désintéresser de quelque chose qui se passe en Asie,
09:49 entre un pays qui, comme vous l'avez rappelé, est une puissance nucléaire,
09:54 et pas une petite puissance nucléaire, parce que c'est le professeur
10:00 qui a mis au point la bombe nucléaire au Pakistan,
10:04 qui a essayé de la mettre au point en Libye, avec les Libyens,
10:08 qui l'a mise au point en Corée,
10:10 enfin, on voit que dans la dissémination, et en Iran,
10:13 il y a eu aussi une inspiration,
10:15 on voit que dans la dissémination nucléaire dans le monde,
10:17 les Pakistanais ont été au cœur du problème pendant 30 ans.
10:22 Donc si vous voulez, oui, le Pakistan, il faut y faire très attention,
10:26 et puis c'est un pays à la fois très pauvre et très violent,
10:29 et on est toujours à la merci d'une explosion, c'est clair.
10:34 – On sait aussi qu'un gazoduc avait été construit,
10:37 qui passait en Inde, en Chine, par le Pakistan,
10:39 est-ce que ça peut avoir une incidence aussi sur ces importations ?
10:42 – Alors je pense que le problème des gazoducs, si vous voulez,
10:44 est en train de… alors pour le Pakistan, c'est moins important qu'avant,
10:49 enfin, son importance est moindre qu'avant,
10:52 parce que depuis le début de la guerre en Ukraine,
10:55 il y a plusieurs phénomènes qui viennent de se passer,
10:57 d'une part les Russes, ayant décidé de basculer la production,
11:01 compte tenu des mesures et des sanctions européennes,
11:04 ont basculé la vente de leur gaz et de leur pétrole,
11:08 et construisent à toute vitesse actuellement,
11:10 mais pas à toute vitesse,
11:12 des pipelines en direction de la Chine et de l'Inde,
11:17 il ne faut pas l'oublier, parce qu'ils approvisionnent les deux,
11:20 et donc ça c'est une première chose,
11:22 on a d'autre part l'accord avec l'Iran,
11:24 qui est également très important,
11:26 parce que l'Iran est en train de mettre,
11:28 ils sont en train de construire un pipe qui va aller de l'Iran à la Chine,
11:31 en passant par l'Afghanistan,
11:33 entre parenthèses, les talibans ne disent rien,
11:36 alors que sur la Chine, parce que le pipeline va leur rapporter de l'argent et des royalties,
11:43 mais ils oublient qu'à côté du côté chinois,
11:45 ça va passer par la zone Ouïghour,
11:47 mais là l'intérêt financier fait oublier tout le reste,
11:52 c'est intéressant de regarder quand même,
11:54 mais on voit bien que la Chine est en train de sécuriser des approvisionnements,
11:58 autrement que maritime, pour elle c'est vital,
12:02 les Indiens aussi, si vous voulez,
12:06 et du coup le Pakistan qui avait au départ une importance,
12:09 parce que c'était par là que passait en particulier l'invitaillement vers l'Inde,
12:12 va devenir beaucoup moins important,
12:13 parce que la plus grande partie viendra du Nord.
12:16 – Alors on va faire un petit écart,
12:18 on va parler à présent de la Turquie, si vous le voulez bien,
12:21 premier tour de l'élection présidentielle ce week-end,
12:25 pour la première fois, récepte à Hyperde Gaulle,
12:27 le président sortant est dans une position plus compliquée,
12:30 il va devoir affronter, en plus un opposant vient de se désister
12:33 pour faire monter le camp qu'il affronte,
12:35 au moins six candidats se sont coalisés face à récepte à Hyperde Gaulle,
12:40 le candidat s'appelle Kemal Kiliç Daroglu,
12:43 j'ai travaillé mon turc avant de venir,
12:45 – Oui, c'est ce que je vois.
12:47 – Selon vous, déjà, quelles sont les chances d'Hyperde Gaulle
12:51 de se maintenir au pouvoir ?
12:53 Pensez-vous qu'il en est fini de son ère de domination de la Turquie ?
12:58 Et surtout, quelles conséquences pour nous, Européens ?
13:02 – Ce qui se passe en Turquie est très important, effectivement,
13:08 parce que Erdogan, qui est le dernier représentant des frères musulmans
13:13 parmi les grands dirigeants,
13:15 alors qu'il le soit ou qu'il soit proche, peu importe,
13:18 c'est la dernière tendance frère musulman
13:20 qu'on a parmi les grands dirigeants arabes,
13:23 donc il était avec huit points de retard,
13:28 et puis il semble que peu à peu il ait rattrapé une partie de son retard
13:32 dans la campagne, mais pour le moment, d'après tous les sondages,
13:37 il est derrière, d'une part,
13:40 d'autre part, pendant très longtemps,
13:43 il a joué l'éliminatement de l'opposition en face de lui,
13:48 sans compter, ça rappelle un peu la France,
13:49 on voit certains partis avec cinq, six candidats,
13:51 évidemment, c'est la garantie d'une mort certaine.
13:54 Donc là, il a joué cet éparpillement,
13:59 or les autres, très intelligemment, ont compris la manœuvre
14:03 et se regroupent, comme vous venez de le dire,
14:05 et donc, ça veut dire qu'il a véritablement un bloc en face de lui.
14:09 Alors, qu'est-ce qui va se passer ?
14:12 Il y a trois options, si vous voulez.
14:14 Il y a les opposants qui rêvent d'avoir plus de 51% au premier tour,
14:19 plus de 50% au premier tour, et donc d'être élus,
14:21 ça c'est le rêve de l'opposition.
14:23 Ce n'est pas exclu, théoriquement, on va y venir.
14:27 La deuxième, c'est effectivement qu'on se retrouve avec, au premier tour,
14:33 je dirais, les deux très proches l'un de l'autre,
14:39 avec en dessous des 50%, bien sûr, s'il n'y a pas eu une élection,
14:42 mais proche de ça, et bon.
14:44 Et puis, dans ce cas-là, comme d'ailleurs,
14:49 comme pour l'élection en général, la question, c'est de savoir
14:52 si Erdogan ne va pas fausser les élections pour gagner.
14:57 La vraie question, elle est là.
14:59 Est-ce qu'Erdogan est prêt à accepter une défaite démocratique ?
15:02 – Ça veut dire que la victoire d'Erdogan sera forcément suspecte ?
15:04 – Ah oui, bien entendu.
15:06 Ah non, mais, puisque aujourd'hui, il est en dessous de l'autre,
15:12 qui est effectivement…
15:13 – Ce ne serait pas la première fois que les sondages se trompent.
15:15 – Ah oui, mais là, quand même, là, non, mais là,
15:17 je pense que là, on n'est pas chez nous, là.
15:19 En Turquie, il y a quand même une bonne partie de la population
15:23 qui est de moins en moins d'accord avec Erdogan et ce qu'il pratique.
15:26 Mais c'est vrai que, quand on voit la campagne qu'il a faite,
15:29 elle est très intéressante, parce qu'il a ciblé toutes les catégories
15:34 qui n'étaient pas contentes pour leur faire des cadeaux,
15:37 et ça a payé, puisqu'il est remonté.
15:40 Mais enfin, s'il est élu, il faudra quand même vérifier
15:42 s'il n'y a pas eu trop de combines.
15:44 Moi, je me suis dit, ce ne serait pas le premier à être élu avec des combines,
15:49 mais par contre, c'est vrai que le résultat final, si c'est lui,
15:55 bon, ben, il va se sentir relancé pour un certain nombre d'années
16:00 et poursuivre sa politique, qui est quand même une politique très particulière,
16:06 parce qu'il est à la fois avec nous et contre nous, dans tous les domaines.
16:10 – Est-ce qu'il n'est pas tout simplement avec la Turquie ?
16:13 – Oui, mais justement, j'allais vous dire, il est avec les Chinois,
16:16 avec les Russes, avec les Euroméens, avec tout le monde.
16:18 En définitive, c'est l'Empire turc, il veut reconstituer l'Empire ottoman.
16:24 La logique d'Erdogan, c'est l'Empire ottoman, c'est clair.
16:29 On l'a vu en Libye, quand il est allé là-bas,
16:31 on l'a vu sur les problèmes de zones pétrolières à côté de Chypre,
16:34 partout, à chaque fois, ce concept, c'est l'Empire ottoman.
16:39 Or, s'il réussit à passer, il va avoir un énorme problème dans les années à venir,
16:47 c'est le problème de l'Alliance qui est en train de se développer
16:49 à une vitesse incroyable entre l'Arabie saoudite et l'Iran.
16:54 Parce que là, on a deux puissances…
16:57 – Qui se sont approchées d'ailleurs sous l'égide de la Chine.
17:00 – Exactement, sous l'égide de la Chine, ça semble aller très très loin,
17:04 puisqu'il y a même des bruits aujourd'hui sur le nucléaire,
17:07 vous savez que l'Iran est proche de la bombe,
17:11 mais de l'autre côté, les Saoudiens en rêvaient.
17:15 On leur avait dit "pas de problème, il y a le parapluie américain".
17:17 Comme ils ne veulent plus entendre parler du parapluie américain,
17:21 il semble bien qu'il y ait des discussions entre les Iraniens et les Saoudiens
17:24 pour faire des échanges.
17:26 Donc c'est-à-dire, en réalité, le Proche-Orient, aujourd'hui,
17:30 est en train d'être bouleversé par, justement, cet accord Iran-Arabie saoudite
17:37 fait sous la médiation des Chinois,
17:42 plus les accords qui ont été passés au niveau régional depuis quelques temps,
17:47 y compris les accords d'Abraham pour les Américains.
17:52 Tout ça est en train de rebasculer, de changer complètement le Moyen-Orient
17:56 en une zone économique très puissante et qui se pilote elle-même.
18:01 Et juste à côté, vous avez le partisan de l'Empire Ottoman,
18:05 qui évidemment aura beaucoup de mal à s'intégrer là-dedans.
18:09 Donc on va avoir, forcément, il y aura de fortes tensions,
18:13 si c'est Erdogan, entre le Moyen-Orient et Erdogan.
18:17 Il a bien compris, quand il a fait un rapprochement avec Bachar,
18:20 quand il a vu que la Ligue arabe se rapprochait de Bachar,
18:25 réintégrait la Syrie et recevait Bachar,
18:28 parce que Bachar est maintenant, ça y est, il est redevenu une personne normale,
18:32 et là, du coup, on a vu Erdogan aller aussi négocier avec Bachar en disant
18:37 "Bon, c'est vrai qu'on vous ennuie depuis pas mal de temps dans le Nord
18:40 et dans la région d'Erbine, mais on va trouver des solutions."
18:44 Donc tout est en train de bouger là-dedans.
18:46 Et c'est sûr qu'Erdogan est un point essentiel, parce qu'il va dans ce sens-là.
18:51 Par contre, si c'était le remplaçant, qui est beaucoup plus pro-occidental,
18:55 alors on va retrouver, bien sûr, une Turquie beaucoup plus favorable.
18:59 Mais je pense qu'à ce moment-là…
19:01 – Ce serait un coup pour les États-Unis, quelque part,
19:03 s'ils reprendraient pied dans cette région, alors qu'ils viennent de perdre pied
19:06 – Ah bon, pour les États-Unis, qui ont des bases en Turquie très importantes,
19:09 hein, Insiliq, c'est la plus grosse base de la région, avec celle qui est au Qatar.
19:14 Pour les Américains, c'est du pain béni,
19:18 donc c'est évident que les Américains sont en train de pousser l'opposition,
19:22 ça, il n'y a pas de doute là-dessus.
19:25 Bon, nous, les Européens, l'autre, le candidat opposant,
19:31 est plus intéressant pour nous parce qu'il sera plus proche de nous,
19:34 de notre vision du monde, voilà.
19:36 – Alors, si je peux me permettre, il sera plus proche des États-Unis,
19:38 mais est-ce qu'il sera plus proche de nous, Européens ?
19:41 – Oui, parce que je pense qu'on sera obligé…
19:43 il sera, et nous serons obligés de négocier, si vous voulez, d'autant plus…
19:46 Les Turcs ont maintenant… il y a beaucoup de Turcs qui vivent en Europe.
19:49 – Surtout en Allemagne ?
19:50 – En partie, exactement, j'allais vous dire,
19:51 en Allemagne, avec la politique de Wanna Merkel,
19:53 les conséquences de la politique de Wanna Merkel,
19:56 donc on sera obligé de négocier avec eux et de faire des gestes,
19:59 parce qu'évidemment, si c'est le candidat d'opposition,
20:02 il va dire "écoutez, maintenant que c'est un candidat sérieux
20:05 qui a été élu, il faut m'aider pour m'en sortir et gagner véritablement".
20:10 Donc, on fera des efforts envers la Turquie pour l'aider à éliminer,
20:15 je dirais, les souvenirs de l'époque Erdogan.
20:18 Si c'est Erdogan, ce sera le contraire.
20:21 – Quelles sont les relations avec la Turquie d'Erdogan et la Russie ?
20:26 – Ah, elles sont bonnes, elles sont très bonnes,
20:28 parce qu'Erdogan a eu l'intelligence, il a très bien joué,
20:31 il faut dire, Erdogan a très bien joué.
20:35 Quand vous regardez ce qui se passe depuis plusieurs années,
20:38 le grand gagnant en Europe, et en Europe et dans cette partie du monde,
20:43 le grand gagnant c'est la Turquie.
20:44 Il a bénéficié, toutes les sanctions européennes envers la Russie
20:48 ont bénéficié à la Turquie.
20:50 C'est extraordinaire.
20:51 Ils ont, au point de vue agricole, on ne le dit pas assez en France,
20:54 mais au point de vue agricole, ce que nous n'envoyons plus à la Russie
20:57 a été remplacé par des expéditions depuis la Turquie.
21:01 Dans l'affaire du blé, vous avez vu que les Turcs se sont mis en médiateur
21:06 pour recevoir les cargos contrôlés, les cargos chargés de blé venant d'Ukraine,
21:12 pour vérifier qu'il n'y avait pas de l'armement dedans,
21:14 dans un sens ou dans l'autre,
21:15 de vérifier qu'il n'y avait pas d'armement ou autre chose dedans,
21:18 et que c'était vraiment du blé.
21:19 Et il s'est mis en médiateur.
21:22 D'autre part, le détroit du Bosphore, aujourd'hui,
21:24 est un détroit que les militaires ne peuvent pas passer,
21:28 ne peuvent pas franchir le détroit du Bosphore,
21:31 enfin, il y a certaines conditions,
21:33 un peu certains le peuvent, pas d'autres.
21:35 Bon, et là aussi, qui est le garant de tout ça ?
21:38 C'est Erdogan. Donc il a une position très importante.
21:41 Et il est bien avec les Russes, très bien,
21:44 il l'a montré, on le sait.
21:45 Bon, il est bien aussi avec les Chinois, il est bien avec tout le monde.
21:49 Et avec les Américains, il a tenu tête,
21:52 et si vous avez vu, c'est très intéressant ce qui s'est passé récemment aussi,
21:56 quand, il a des S-400,
22:00 vous savez, les meilleurs missiles anti-avions de chasse actuels,
22:05 qui sont des missiles russes, les S-400.
22:08 Bon, les Américains lui ont dit, comme par hasard,
22:11 il faut donner vos S-400 à l'armée ukrainienne,
22:15 puisque c'est du matériel russe.
22:17 Il a répondu, il n'en est pas question.
22:20 Ils ont dit, mais ça pourrait passer par nous, évidemment.
22:23 – C'est pas bon du tout.
22:24 – Erdogan, il n'a pas intérêt à donner un S-400 aux États-Unis,
22:28 parce que là, les Russes réagiraient…
22:29 – C'est encore pire que l'Ukraine, bien sûr.
22:31 – Donc, on voit, il tient tête.
22:34 C'est le premier à tenir tête aux États-Unis, vraiment de cette manière-là.
22:38 – Mais alors, si je peux me permettre, Alain Julliet,
22:40 il y a quand même quelque chose,
22:42 dans vos explications qui me semblent extrêmement paradoxales,
22:44 c'est que finalement, si on vous suit,
22:47 Erdogan a passé son temps au pouvoir à défendre les intérêts de la Turquie,
22:51 une forme de neutralité, des capacités à négocier avec tout le monde,
22:53 et vous m'expliquez pour autant qu'aujourd'hui,
22:55 la population turque serait lassée de lui.
22:58 – Oui, parce que cette politique internationale de reconstitution,
23:04 entre guillemets, de la puissance ottomane,
23:08 s'est accompagnée au niveau interne d'une inflation
23:11 et de difficultés économiques majeures.
23:12 – Oui, mais ça, c'est les répercussions de l'extérieur
23:15 qui fait pression sur l'intérieur.
23:16 – Oui, mais parce que dans beaucoup de domaines, si vous voulez,
23:19 ça ne marchait pas.
23:20 Je disais, il exporte de l'agriculture, oui, ça a relancé l'agriculture,
23:25 par exemple, quand il a pu faire des exportations vers la Russie,
23:29 mais ce n'est pas suffisant, si vous voulez,
23:31 aussi bien au niveau industriel et dans tous les domaines.
23:33 Il y a eu, quand on regarde l'évolution économique de la Turquie
23:36 sur ces dix dernières années, le moins qu'on puisse dire,
23:39 c'est qu'elle n'a pas été bonne, globalement.
23:42 Je crois qu'il a bien réussi au niveau international, à sa manière,
23:45 moi je ne reprouve pas la politique d'Erdogan,
23:48 mais il a très bien joué pour défendre ses intérêts au niveau international,
23:52 par contre, au niveau économique, je pense que le bilan de son régime
23:56 jusqu'à maintenant est plutôt négatif.
23:58 – Est-ce qu'on ne va pas tout simplement lui faire payer le séisme récent ?
24:01 – Alors, entre autres, c'est clair.
24:04 Regardez dans l'histoire du séisme,
24:07 qu'est-ce qu'on a reproché à Erdogan ?
24:09 Ça a été d'une part la construction,
24:11 il avait favorisé les promoteurs immobiliers
24:14 qui ont construit des immeubles qui n'étaient pas solides,
24:17 donc il avait gagné de l'argent exagérément sur la solidité des immeubles,
24:21 et les gens l'ont constaté parce que les immeubles se sont effondrés.
24:25 Bon, c'était effectivement un choix politique qu'il avait fait,
24:28 il avait favorisé la promotion immobilière,
24:31 enfin les sociétés immobilières,
24:34 mais sans vérifier qu'il y avait peut-être des profits abusifs pour certains.
24:39 Donc, et là on dit "oui mais c'est de la corruption,
24:41 c'est parce qu'il y avait… ", bon, toujours les mêmes histoires.
24:44 – Bien sûr.
24:46 Alors Alain Julli, on a évoqué déjà l'ombre des États-Unis
24:48 au travers des deux théâtres dont on vient de parler,
24:51 à savoir le Pakistan et la Turquie.
24:53 Allons plus en avant à Washington,
24:56 on a évoqué l'autre fois le recul du dollar,
24:58 cette fameuse dé-dollarisation, la montée de la grande puissance du Yuan,
25:02 notamment dans les échanges commerciaux, et tout particulièrement énergétique.
25:06 Et on parle, on l'a évoqué aussi la semaine dernière
25:09 avec l'émission avec Philippe Béchade, de la chute de l'hégémonie américaine.
25:14 Est-ce qu'on n'est pas un peu en train de vivre nos rêves,
25:18 c'est-à-dire de croire que cette hégémonie américaine est révolue,
25:21 alors qu'en réalité les Américains aujourd'hui
25:24 ont acquis une telle force et une telle puissance sur le globe
25:28 qu'ils sont, comme on dit pour les banques,
25:30 "too big, too fail", trop importants pour s'effondrer ?
25:33 – Oui.
25:34 Je crois qu'il faut être très prudent.
25:35 Quand les gens effectivement vous disent…
25:38 c'est comme la dé-dollarisation, il faut être sérieux.
25:41 C'est indiscutable, mais ça se fera dans le temps.
25:45 Il ne faut pas imaginer qu'en 3 ans, 5 ans,
25:49 le dollar ne fera plus la référence mondiale, c'est absurde.
25:53 Ce qui est certain aujourd'hui, par exemple sur la dé-dollarisation,
25:55 c'est que les pays, les BRICS en particulier,
25:58 donc les pays en développement fort, qui regroupent,
26:03 vous savez comme vous savez…
26:04 – Brésil, Russie, Inde, Chine.
26:05 – Brésil, la Russie, l'Inde, la Chine et l'Afrique du Sud,
26:07 mais qui vont avoir d'autres pays qui vont arriver
26:10 puisque l'Arabie Saoudite veut rentrer,
26:12 parce que l'Indonésie veut y aller,
26:14 l'Algérie veut y aller, l'Argentine veut y aller,
26:16 enfin il va y avoir, ça va gonfler, ça va augmenter.
26:19 Bon, les BRICS, eux, ont compris que tant qu'ils seraient
26:24 sous la coupe du dollar et des organisations internationales
26:28 telles qu'elles fonctionnent aujourd'hui,
26:30 ils seraient pénalisés,
26:32 ils seraient des citoyens de seconde zone, si vous voulez.
26:34 Donc ils ont besoin,
26:35 donc ils sont en train de monter tout un système économique,
26:38 progressivement, pour remplacer le système actuel.
26:41 Alors, le dollar, on le remplace par les échanges payés en luan et autres,
26:47 mais vous avez plein de choses aussi qui se passent autour,
26:51 dans les accords internationaux, sur les problèmes de l'OMC,
26:54 sur les problèmes même des Nations Unies.
26:56 Donc il y a un bouleversement qui est en train de se faire,
27:00 mais ça va se faire en 20 ans, ça ne peut pas se faire en 20 jours.
27:04 – Mais à l'arrivée, l'aboutissement de ce processus,
27:06 on peine à penser qu'il n'y aura plus de dollar,
27:09 en réalité ce sera un rééquilibrage.
27:10 – Regardez, aujourd'hui, on a,
27:13 je vois le G7 qui s'est réuni récemment,
27:15 qui dit "nous, on impose, on veut imposer au monde".
27:19 En réalité, économiquement parlant, quand on regarde le G7 et les BRICS,
27:23 on s'aperçoit que c'est les BRICS qui sont plus importants
27:27 en pourcentage du PIB mondial que le G7 actuellement.
27:33 Alors vous dites "mais attends, alors donc c'est eux les plus puissants".
27:37 Ah oui, mais c'est vrai sur le plan économique,
27:39 mais par contre sur le plan militaire,
27:42 les Américains à eux tous seuls représentent,
27:44 je dirais presque 50% du budget,
27:47 ils représentent 777 milliards de dollars pour la défense,
27:51 quand le deuxième, le chinois, fait 220, 215, 220, donc 3 fois plus.
27:57 Les Américains, 3 fois plus que les Chinois,
27:59 et nous, on est de nos 40 ou 45 milliards, vous voyez, on en est.
28:04 Et les Russes, entre parenthèses,
28:06 ils font 10% du budget américain, en gros, 10% du budget américain de la défense.
28:11 Donc on voit bien que la puissance de la défense américaine est colossale
28:15 et restera colossale parce que c'est là-dessus qu'il compte pour tenir.
28:19 Il ne faut pas oublier que les Américains, depuis 1945,
28:22 ont fait directement et indirectement plus de 50 guerres.
28:26 C'est le peuple le plus belliciste du monde.
28:29 – Combien sur leur sol ?
28:30 – Ah ben, il y en a eu un qui a commencé,
28:32 c'était quand ils ont eu la mauvaise surprise,
28:34 des tours qui sont tombées à New York.
28:38 Mais sinon, c'est toujours à l'extérieur.
28:40 Ils ont été touchés à Pearl Harbor par les Japonais,
28:44 et la réponse a été très violente.
28:46 Et ils ont été touchés sur les tours à Washington par Al-Qaïda,
28:50 et vous avez vu la réponse qu'on a eue en Afghanistan et ailleurs.
28:53 Donc, mais, ils ont en permanence…
28:56 – Sachez que les principaux accusés dans les attentats du World Trade Center
29:01 sont saoudiens.
29:02 – Ah oui, mais bien entendu.
29:03 – Ils n'étaient absolument pas afghans.
29:04 – Ah non, mais ils n'étaient pas afghans du tout.
29:06 – Irakiens d'ailleurs.
29:07 – Mais les Américains n'allaient pas attaquer l'Arabie Saoudite,
29:11 alors que Bin Laden était saoudien d'origine,
29:14 que la plupart des financements venaient d'Arabie Saoudite,
29:18 par des grandes familles essentiellement d'Arabie Saoudite.
29:21 Mais ils n'allaient pas faire parce que l'Arabie Saoudite,
29:23 c'était le pétrole, et que le pétrole c'est du business.
29:26 Donc on a tapé sur l'Afghanistan, il n'y avait pas de problème,
29:29 on ne risquait pas grand-chose.
29:30 – Il n'y avait pas de problème, ça ne s'est pas très bien passé.
29:32 – Oui, mais parce qu'on ne sait pas faire ce type de guerre.
29:35 Malheureusement, vous savez, l'Afghanistan,
29:38 quand on veut résumer l'Afghanistan,
29:40 si vous connaissez l'Afghanistan, même encore aujourd'hui,
29:43 l'Afghanistan c'est la France au 17ème siècle,
29:48 au point de vue des comportements.
29:50 Chez nous aussi, on a brûlé les sorcières jusqu'en 1750, en France.
29:56 Quand on hurle contre la lapidation des malheureuses là-bas,
30:02 il faut se souvenir que nous on brûlait les sorcières
30:05 il y a quand même 300 ans.
30:07 C'est un pays qui est, par rapport à nous, très en retard.
30:14 Donc évidemment, quand vous dites à un pays qui est en retard,
30:18 et que vous leur dites "grâce à nous, brutalement,
30:20 vous allez passer à la démocratie à l'occidental
30:23 telle qu'elle est pratiquée en l'an 2000", ça ne peut pas marcher.
30:27 – Surtout quand la démocratie occidentale de l'an 2000 ne marche pas non plus.
30:30 – Je suis d'accord aussi avec vous.
30:34 Mais c'est vrai, on ne peut pas imposer à des gens
30:36 qui sont dans un stade de culture et d'expérience et d'histoire,
30:40 vous ne pouvez pas l'imposer,
30:41 il y a quelque chose qui est totalement différent.
30:43 C'est ça, l'erreur elle est venue de là.
30:45 À partir de ce moment-là, on ne pouvait pas gagner.
30:48 – Et la situation était un peu différente,
30:50 mais en Irak, on ne peut pas dire non plus
30:51 qu'il y avait un lien direct avec la question des attentats.
30:54 – Ah mais par contre l'Irak c'était pour les Américains,
30:58 ça c'est très clair,
30:59 c'est qu'à l'époque ils s'inquiétaient des problèmes saoudiens
31:02 parce qu'ils avaient peur que le régime saoudien soit renversé
31:07 par une population qui trouvait quand même
31:08 que les princes en prenaient trop par rapport au reste.
31:12 Et ils se sont dit "il faut protéger, il faut qu'on ait un porte-avions pétrolier".
31:17 Si on n'a plus l'Arabie saoudite,
31:19 quelle est la zone dans laquelle on pourrait créer un porte-avions pétrolier
31:22 comme celui que nous avons en Arabie saoudite ?
31:24 C'était l'Irak.
31:25 Alors ils ont attaqué l'Irak uniquement pour le pétrole.
31:29 D'ailleurs, entre parenthèses, aujourd'hui, c'est amusant ça de voir,
31:33 en Syrie, la production pétrolière syrienne aujourd'hui,
31:39 elle est au manki des compagnies pétrolières américaines.
31:43 D'Erezor, toute la zone d'Erezor,
31:45 ce sont des compagnies pétrolières américaines.
31:48 Et elles continuent à être là.
31:49 Les forces spéciales américaines protègent cette zone,
31:53 non pas contre ISIS, contre les djihadistes,
31:59 mais elles empêchent les troupes syriennes
32:03 de venir occuper ce terrain qui appartient à la Syrie
32:06 parce que là, on exploite du pétrole pour les compagnies américaines.
32:10 – Je vais poser une question candide,
32:11 mais comment la souveraineté syrienne tolère ça ?
32:14 – C'est qu'elle n'a pas les moyens,
32:16 avec ce qu'ils ont comme moyens militaires,
32:18 ils n'ont pas les moyens de se poser à l'Amérique.
32:20 – On peut penser à Guantanamo, à Cuba, c'est pareil.
32:22 – C'est pareil.
32:23 – Comment cela peut perdurer dans un affrontement direct comme ça ?
32:26 – C'est bien pour ça, je vous disais,
32:28 on voit aujourd'hui que l'hégémonie américaine,
32:31 elle va encore durer un certain temps,
32:33 mais on voit qu'il y a des endroits où peu à peu ça bouge
32:36 parce qu'à un moment, même des gens qui sont,
32:39 je dirais, pro-américains disent,
32:41 "là on est en train de dépasser les limites du supportable", c'est sûr.
32:46 Parce qu'on ne peut pas à la fois prêcher chez les autres,
32:51 si vous voulez, quelque chose.
32:52 Moi, quand je vois par exemple, avec les affaires de Poutine,
32:59 on dit "Poutine est un criminel parce qu'il a attaqué,
33:01 donc on va le passer en cour suprême,
33:04 peu importe, en cour de justice,
33:07 parce qu'il a fait la guerre en Ukraine,
33:09 et la guerre en Irak, on l'a faite comment ?
33:11 On n'a pas demandé l'autorisation de l'ONU
33:13 quand les Américains ont attaqué l'Irak.
33:15 Au contraire, les Français ont dit "il ne faut pas" et tout,
33:18 ils ont fait des guerres, ils n'étaient pas autorisés à les faire,
33:22 ils les ont faites quand même.
33:23 C'est exactement la même chose, donc ils devront aussi traduire.
33:26 Vous allez traduire, vous, le Président Bush ou le Président Clinton
33:30 ou le Président Biden devant… bien sûr que non.
33:34 Donc on voit bien que tout ça, ce n'est pas très sérieux,
33:37 en réalité, le fond du problème, c'est qu'il y a une hégémonie américaine
33:42 qui, avec raison, de leur point de vue,
33:44 on ne peut pas donner tort aux Américains
33:45 de vouloir continuer à être les leaders mondiaux,
33:48 il faut quand même être raisonnable.
33:49 Ils l'ont été depuis 200 ans, depuis 120 ans,
33:53 ils l'ont eu ça depuis 120 ans, ils ont envie de continuer,
33:55 on ne va pas leur reprocher, c'est normal de leur part.
33:58 Et sur quoi ils peuvent s'appuyer ?
34:00 Puisque sur le plan économique, ils sont en train de se faire dépasser,
34:03 dans tous les domaines, dans la recherche actuellement,
34:05 dans les dépôts de brevets dans le monde, l'année dernière,
34:10 il n'y a eu que 4 domaines de recherche
34:14 dans lesquels les brevets américains étaient plus nombreux
34:16 que les brevets chinois, dans tous les autres, 24 autres.
34:21 Il y avait, d'après les statistiques publiées,
34:24 dans 24 autres, c'est les Chinois qui déposent le plus de brevets.
34:27 Donc ça veut dire que, sur le plan de la recherche,
34:29 de l'innovation et de l'économie,
34:31 les Chinois sont en train de prendre le leadership.
34:33 Donc comment font les Américains la puissance militaire,
34:37 avec tous les risques que ça représente d'ailleurs,
34:39 la puissance militaire, et d'un autre côté aussi,
34:42 certains domaines qu'ils veulent garder sous contrôle,
34:45 comme par exemple le numérique, c'est clair.
34:47 Donc ils pensent pouvoir s'en sortir avec ça.
34:50 Et c'est tout ce qui va, dans le futur,
34:52 c'est sur ces points-là que les conflits vont se faire,
34:56 mais c'est très intéressant.
34:58 – Je fais une parenthèse, on a parlé tout à l'heure
34:59 de démocratie occidentale,
35:00 aujourd'hui je vais avoir une question provocante, provocatrice,
35:03 volontairement, qui dirige les États-Unis aujourd'hui à l'1 juillet ?
35:07 – Ah, ça c'est une bonne question, c'est indiscutablement…
35:12 Le problème des Américains, si vous voulez,
35:14 c'est qu'on n'en parle pas suffisamment d'ailleurs,
35:17 ou on ne le regarde pas nous,
35:18 c'est que les élections américaines sont devenues excessivement coûteuses,
35:23 et que pour pouvoir réussir aux États-Unis,
35:26 il faut être milliardaire, mais multimilliardaire,
35:29 et là on met son argent, on risque son argent,
35:33 ou alors on va demander à des gens de vous aider,
35:36 mais ce n'est pas comme en France où c'est limité à des petites sommes,
35:39 c'est des sommes considérables, avec en contrepartie évidemment
35:42 que celui qui paye beaucoup, il a un moyen de pression sur vous,
35:45 parce qu'il vous dit "dites, moi je t'ai payé à ta campagne,
35:47 mais en contrepartie tu vas me faire ce que je te demande".
35:50 Donc en définitive, les présidents américains sont l'otage, à part si…
35:55 – Ils se mettent dans les mains.
35:56 – Oui, ils n'ont pas le choix, ils sont dans les mains de gens,
36:00 alors c'est intéressant de voir à ce moment-là qui sont ces gens-là,
36:03 et on voit qu'il y a des lobbies,
36:07 il y a des groupes de pression multiples et variés,
36:10 et que selon les cas, on voit bien que c'est eux qui influencent ou qui décident.
36:14 – Des fonds de pension ?
36:16 – Les fonds de pension, oui bien sûr,
36:18 mais aussi les grandes sociétés américaines.
36:21 – Comment vous voyez ?
36:22 – Regardez en Ukraine, je vous prends l'Ukraine,
36:23 parce que bon, pour sortir du monde des problèmes militaires et autres,
36:26 mais en Ukraine, on ne le dit pas assez,
36:28 mais une bonne partie des terres agricoles productrices de blé en Ukraine
36:33 ont été achetées par trois compagnies américaines,
36:35 Kerguel, Dupont de Nemours et une troisième qui va me revenir, Monsanto.
36:40 – Monsanto, oui.
36:41 – Monsanto, bon, ils ont pu acheter ça,
36:44 ça veut dire que dans l'affaire de l'Ukraine,
36:47 la partie blé, production de blé, les américains sont directement concernés
36:51 puisque trois de leurs grands groupes affrodisent du blé en Ukraine.
36:57 Et ils l'ont fait en achetant des terres contre l'avis des paysans
37:00 qui ont protesté au Parlement ukrainien
37:02 et c'est Zelensky qui a imposé l'achat par les américains.
37:05 – Et on comprend pourquoi.
37:06 – Voilà, vous avez tout ça, c'est pour ça qu'il faut regarder sous des cartes,
37:10 parce que sinon, si on regarde uniquement ce qui passe,
37:13 c'est l'écume de la mer, c'est ni les vagues, ni la mer elle-même.
37:19 – Vous évoquiez, il y a quelques instants, Alain Juillet,
37:22 cette volonté pour les États-Unis de conserver la main mise
37:24 sur la question du numérique.
37:26 – Oui.
37:27 – On avait évoqué cette question de l'extraterritorialité du droit américain
37:32 qui est presque consubstantielle d'ailleurs à la dédollarisation
37:35 puisque à force de toujours prendre plus de pouvoir
37:37 et de laisser planer un danger pour tous les interlocuteurs
37:41 qui échangeaient en dollars fatalement, ça crée des réticences.
37:45 Je vous propose d'écouter Alain Juillet,
37:46 quelqu'un que vous connaissez bien de fait,
37:49 puisque vous avez travaillé à ses côtés, François Fillon,
37:51 il était auditionné à la commission d'enquête parlementaire
37:54 sur les ingérences étrangères,
37:55 tout le monde l'attendait évidemment sur la Russie,
37:57 on a évoqué son point sur la question des écoutes de la NSA,
38:02 qui écoutait tout particulièrement la France et l'Allemagne,
38:06 mais j'aimerais qu'on écoute un autre extrait qui a été peu évoqué
38:09 et qui pourtant, me semble-t-il, est très intéressant.
38:12 C'est tout à fait inacceptable qu'un pays, fût-il notre meilleur allié,
38:17 se permette de sanctionner, de mettre sous contrôle,
38:21 de mettre sous monitoring des entreprises
38:24 qui ne sont pas des entreprises qui dépendent de sa souveraineté.
38:28 J'ai cherché tous les moyens de lutter contre cette affaire,
38:34 alors il y a un premier qui consisterait à ce que les Européens se fâchent
38:37 et fassent un bras de fer avec les États-Unis sur ce sujet,
38:41 sauf que ce n'est pas possible, puisque une grande partie des Européens
38:44 ne feront jamais de bras de fer avec les Américains.
38:47 Ensuite, il y avait une deuxième formule qui est celle que j'avais retenue,
38:51 mais qui je reconnais un peu ambitieuse, voire utopique,
38:55 qui était de faire de l'euro une monnaie internationale.
38:57 Quand j'ai été présenter à M. Schaubleu mon projet
39:01 de faire de l'euro une monnaie internationale,
39:04 il m'a dit "tu as parfaitement raison, mais on ne le fera jamais".
39:08 Et il m'a dit "on ne le fera jamais parce que les Américains assurent notre sécurité,
39:11 nous défendent".
39:12 Quand j'ai interrogé les dirigeants de la BNP en leur disant
39:15 "mais pourquoi est-ce que vous avez libellé en dollars
39:19 des transactions avec le Soudan ?
39:21 Vous auriez très bien pu les libeller en euros".
39:25 Et à ce moment-là, ils m'ont dit "non, mais si on libelle des transactions en euros,
39:28 nous aurons immédiatement des mesures de rétorsion aux États-Unis,
39:31 et comme on est une banque mondiale et internationale,
39:34 on ne peut pas se permettre d'avoir une hostilité américaine à notre égard".
39:40 Les mesures contre Airbus,
39:44 on peut toujours dire qu'il y a telle ou telle raison
39:47 qui ont poussé l'administration américaine à s'en prendre à Airbus,
39:50 mais enfin, on remarque que c'est quand même toujours
39:55 à un moment où il y a une compétition entre une grande entreprise américaine
39:58 et une grande entreprise européenne, et où comme par hasard,
40:01 c'est l'entreprise européenne qui se prend les sanctions,
40:05 les accusations de corruption, etc.
40:08 On ne peut pas ne pas penser qu'il y a dans la démarche américaine
40:15 pas seulement une volonté de rigueur et d'éthique,
40:22 mais qu'il y a une volonté de favoriser
40:25 les entreprises américaines et l'économie américaine.
40:29 Et puis d'une façon générale, c'est tout à fait insupportable
40:32 de penser que des pays européens sont pieds et poings liés devant cette situation.
40:38 C'est justement ce que vient de dire François Fillon,
40:49 c'est justement la raison qui fait que les pays Libriques et les autres
40:53 sont en train d'évoluer.
40:54 Parce que l'exonéralisation du droit américain, par exemple,
41:00 met en fureur la plupart des pays du monde parce que c'est proprement scandaleux.
41:05 C'est l'impérialisme absolu.
41:07 Donc à partir de ce moment-là, il y a des pays,
41:09 nous en Europe, ce qu'a dit François Fillon,
41:12 les Européens ont bien entendu, pour des raisons multiples et internes à l'Europe,
41:18 on ne fera jamais rien contre les Américains.
41:20 Alors par contre, les pays du reste du monde,
41:24 eux disent "maintenant ça suffit".
41:25 Et on voit que c'est en train de se passer.
41:28 Mais quand on entend François Fillon qui dit "je vais voir l'Allemagne,
41:31 je propose qu'on ait enfin un contrepoids pour jouer un peu dans le même jeu,
41:35 dans la même cour que les Américains",
41:37 mais l'Allemagne me dit "ouh là là, non, non, surtout pas,
41:39 les États-Unis assurent notre sécurité".
41:42 Ah oui, non, mais ça c'est l'histoire de l'Allemagne.
41:44 Nous avons vécu sur un mythe depuis très longtemps,
41:47 on a vécu sur un mythe qui était le mythe du coup Franco-Allemand.
41:51 Le mythe du coup Franco-Allemand ne tient pas,
41:53 n'a jamais tenu, il a été au départ,
41:56 quand l'Allemagne était plus faible que la France,
41:59 c'est-à-dire en gros jusqu'à l'arrivée du président Mitterrand.
42:02 Quand l'Allemagne avait un déficit,
42:03 et nous on n'avait pas de déficit économique en France, en 80-81.
42:08 Bon, jusque-là, c'est nous qui étions les leaders
42:11 et on suivait un peu la tradition gaullienne.
42:13 Donc on avait une vision assez claire d'une certaine indépendance de l'Europe.
42:17 Bon, c'est vrai qu'ensuite, ça a dérivé à toute vitesse,
42:21 et avec une illusion qui était le couple Franco-Allemand,
42:24 où on a vu à la fin, les dernières années,
42:27 où on nous parlait de défense européenne,
42:29 alors qu'Angela Merkel elle-même disait
42:32 la défense de l'Europe doit être assurée par l'OTAN.
42:35 Nous on fait des énergies avec la Russie,
42:38 on fait l'économique avec la Chine,
42:40 et pour la défense c'est l'OTAN, donc les Américains.
42:43 Alors que nous on était en train de dire "mais non, la défense elle est européenne".
42:46 Alors du coup, dans ce mythe,
42:50 on a signé plein d'accords d'alliances pour la recherche et le développement
42:54 de matériel militaire commun avec les Allemands.
42:57 Je vous signale que sur les cinq,
42:59 moi je me souviens j'avais fait le compte il y a trois ans,
43:02 sur deux ans pardon,
43:03 sur les cinq grands projets qu'on avait signés avec les Allemands,
43:06 il n'y en a plus qu'un seul,
43:07 tous ont été annulés par les Allemands en nous mettant en difficulté.
43:11 Ils ont acheté du matériel américain, donc ils nous ont vraiment fait du mal.
43:14 Et le dernier, c'est l'avion de chasse, c'est le futur avion de chasse, le SCAF,
43:19 ou le moins qu'on puisse dire,
43:20 c'est qu'on ne va pas arriver au bout si j'en crois d'assaut.
43:24 Donc voilà, au zéro là, on est d'une naïveté confondante d'un certain côté,
43:30 alors que, c'est ce que dit ici François Fillon, il faut être réaliste.
43:34 – Mais là le discours de François Fillon il n'est pas naïf,
43:35 il est au contraire extrêmement réaliste.
43:36 – Non mais là il est très réaliste.
43:38 – Mais c'est parce qu'il n'est plus au pouvoir.
43:39 – Mais à l'époque où il était au Premier ministre,
43:41 vous ne l'auriez pas entendu dire ça.
43:43 – Non mais qu'il le dise c'est une chose, mais est-ce qu'il le pensait ?
43:46 Est-ce qu'il avait compris ?
43:48 – Je pense que tous les hommes politiques sérieux, de tous bords,
43:55 ont progressivement compris la pression permanente
43:59 que nous avions de notre allié américain
44:02 qui considérait que nous étions des vassals.
44:05 La réalité elle est là.
44:08 Nous, on s'est toujours vu parler d'égal à égal,
44:12 bien sûr avec des différences de taille, mais égal à égal,
44:15 alors que la conception américaine des relations avec les Européens,
44:18 c'est de suzerains à vassals.
44:20 Alors il y a des gens qui le trouvent très bien,
44:22 qui l'acceptent en disant "mais dans le fond c'est fantastique
44:25 parce que justement il nous assure la sécurité".
44:27 Vous savez, quand on vous donne le pain et le vin,
44:31 vous dites "bon en le fond c'est pas si mal,
44:32 tout n'est pas parfait mais c'est pas si mal".
44:35 Et puis il y en a d'autres qui disent "non mais enfin c'est insupportable
44:37 parce que c'est notre liberté, c'est notre indépendance,
44:39 notre souveraineté qui est en cause".
44:41 – Et puis surtout il faudrait revenir sur cette question,
44:43 ils assurent notre sécurité, à quel moment ?
44:44 Quelle est la dernière fois que les Américains
44:46 ont assuré la sécurité de l'Europe ?
44:48 – Ah ben c'était au moment du débarquement en 1944.
44:51 – Oui, que les Russes avaient bien aidé au Parlement ?
44:53 – Ah ben les Russes ont fait la plus grosse partie.
44:57 – 25 millions de morts du côté soviétique.
44:59 – Exactement, 15 millions de morts d'un côté,
45:01 de l'autre côté on n'est pas un million,
45:03 donc c'est loin de là même, donc c'est quand même pas la même chose.
45:07 – À l'un juillet on a évoqué un peu ce grand échiquier mondial,
45:12 pour reprendre Brzezinski,
45:13 aujourd'hui si on fait le point sur la situation de la France,
45:16 si on parle de la diplomatie, on voit que la Chine a gagné du terrain,
45:20 la France qui avait sa voix sur les questions arabes l'a perdue,
45:26 sur l'industrie, entre l'extraterritorialité du droit américain,
45:31 entre disons-le franchement la trahison parfois des élites,
45:35 entre les normes environnementales sur lesquelles Emmanuel Macron
45:38 souhaite désormais revenir, on ne sait pas exactement depuis quand,
45:41 pourquoi et dans quel cadre, entre cette défense que vous avez évoquée
45:46 qui s'est effondrée, entre l'agriculture qui a pâti des sanctions
45:50 contre la Russie, de la politique agricole commune
45:53 et donc encore de l'Union européenne,
45:56 entre les nouvelles technologies qui sont parties
45:59 plutôt sur le continent chinois et sa démographie dont on n'a pas parlé,
46:04 qui est vieillissante et compensée essentiellement
46:08 par une immigration extra-européenne, que peut-on…
46:12 – Non choisi.
46:13 – Non choisi, enfin ça dépend par qui,
46:16 que peut-on encore faire pour se défendre et pour espérer recouvrer
46:22 un tantinet j'allais dire de puissance ?
46:26 – Ma première réponse je vais dire du courage,
46:32 c'est-à-dire que si vous voulez du courage mais aussi une vision à long terme.
46:39 Vous savez quand vous regardez la France de 58,
46:42 évidemment c'était il y a très longtemps de tout ça,
46:45 mais quand en 58 le général de Gaulle a pris le pouvoir,
46:49 on changeait de Premier ministre tous les 3 mois,
46:52 la France économiquement était au 4ème dessous, plus rien n'a marché,
46:56 c'était catastrophique, l'inflation et tout, rien n'a marché.
46:59 Bon, il a pris le pouvoir, un an et demi après la France était repartie.
47:05 Et quand on voit ce qui s'est passé après lui d'ailleurs,
47:07 avec le président Pompidou et le président Giscard d'Estaing, les 3,
47:11 on a vu des hommes qui avaient une vision de la France et du monde à long terme,
47:18 et qui lançaient des grands projets.
47:20 – Pas forcément la bonne.
47:21 – Ah non mais je n'ai pas dit ça, mais je dis,
47:23 il a visé des grands projets et ces grands projets,
47:26 dans le fond ça mobilisait les gens.
47:28 Vous savez, pour que les gens se mobilisent,
47:29 il faut qu'ils croient en quelque chose, il faut qu'ils espèrent.
47:32 L'espérance ne vient que lorsqu'on a un but.
47:36 Or aujourd'hui, on vit dans l'instant, dans le court terme,
47:40 on surréagit à tout, on promet à tour de bras,
47:44 mais il n'y a aucune vision à long terme.
47:46 Dites-moi les objectifs de la France aujourd'hui à 10 ans ou à 15 ans,
47:49 il n'y en a pas.
47:51 – Sers.
47:51 – Oui.
47:52 – Si, sur la limite des gaz à effet de serre.
47:58 – Oui, alors écoutez, je vais peut-être mettre les pieds dans le plat,
48:01 parce que je sais que ce sont des choses qu'il faut faire attention,
48:05 mais sérieusement, est-ce que vous savez que depuis que les Allemands
48:09 ont réouvert les centrales à charbon pour remplacer ce qui manquait,
48:14 le nucléaire et le gaz, puisqu'ils n'ont plus de gaz,
48:17 enfin ils souffrent d'un manque de gaz,
48:19 est-ce que vous savez que le taux de pollution en Europe a monté ?
48:23 – Ce n'est pas surprenant.
48:24 – Hein ? Ce n'est pas surprenant ?
48:26 Pourquoi personne n'en parle ?
48:31 Pourquoi personne ne dit que l'Allemagne, avec ses centrales à charbon,
48:34 est en train de nous polluer tout le nord et l'est de la France ?
48:36 – Alors même qu'elle nous a fait fermer, fait cela…
48:38 – Et nous, on nous menace, et nos ONG sont capables de porter plainte
48:42 au tribunal, à la cour, en disant "c'est scandaleux,
48:45 la France ne fait pas assez d'efforts".
48:47 Mais de qui se moque-t-on ?
48:50 Et c'est là où on voit qu'il faut du courage,
48:51 il faut des chefs d'État et des hommes politiques,
48:54 il n'y a pas que les chefs d'État, il faut des hommes politiques
48:57 qui ont une vision et qui tapent le poing sur la table en disant
49:00 "voilà ce qu'on va faire et voilà comment on va le faire"
49:02 et puis "alignez-vous derrière".
49:03 – Mais alors justement, du courage pour faire quoi l'un juillet ?
49:05 Est-ce que typiquement, faut-il sortir de l'Union Européenne aujourd'hui ?
49:07 D'une Union Européenne qui, on l'a vu tout au long de cette émission,
49:10 a quand même de nombreuses failles.
49:11 – Ah oui, c'est clair.
49:13 Mais l'Union Européenne, il faut regarder l'Union Européenne,
49:16 quand elle a été créée, c'était un petit groupe de pays
49:19 qui s'est très proches les uns des autres,
49:21 parce qu'on avait la même culture, la même histoire,
49:23 on partageait beaucoup de choses ensemble,
49:26 entre l'Italie, la France, la Belgique, l'Allemagne,
49:29 bon, même si on s'est tapé dessus, ou l'Espagne,
49:32 on s'est tapé dessus, mais on était très proches.
49:34 Bon, on se comprenait, on se parlait, on se voyait, bon très bien.
49:38 Le… qu'est-ce qui s'est passé ?
49:41 On est passé d'une Europe à 12, 14,
49:43 on est passé d'une Europe à 28, 29, bientôt 30 et autres.
49:47 Bon, à l'évidence, et on le voit aujourd'hui dans les votes,
49:52 dans les discussions, il y a des différences culturelles,
49:55 historiques, sociales, économiques, fondamentales,
49:58 entre les différents types de pays, et ça se comprend.
50:02 – L'élargissement ne nous joue pas en notre faveur.
50:04 – Bien sûr que non.
50:05 Donc, on a plusieurs présidents, dont le président actuel,
50:09 d'ailleurs à un moment avait évoqué, comme d'autres avant lui,
50:12 quand on regarde tout ça, on se dit, mais est-ce que dans le fond,
50:16 il ne faut pas revenir un peu à l'idée initiale,
50:19 mais comme on a créé une fédération de presque une trentaine de pays,
50:23 est-ce qu'il ne faut pas au moins revenir à un noyau central
50:26 qui lui serait beaucoup plus uni, et qui ferait sa politique à eux,
50:30 enfin la politique de ce petit groupe ?
50:32 Donc une Europe à deux vitesses, si vous voulez.
50:35 – Donc ne pas démanteler l'Europe qui ne fonctionne pas pour conserver un peu…
50:38 – Conserver grâce à des avantages, parce que ça représente certains avantages,
50:41 mais d'un autre côté, avoir un petit groupe où là,
50:44 on est solidaires et on se comprend, seulement le problème,
50:47 c'est qu'aujourd'hui, même ce petit groupe, il n'existe plus,
50:50 puisque l'Allemagne et la France sont complètement séparés.
50:54 Donc en définitive, aujourd'hui, il y a le bloc,
50:57 ce que les gens du Nord de l'Europe appellent le Club Med,
51:00 la France, l'Espagne, la Grèce, l'Italie, le Portugal,
51:04 ceux-là, on peut même sans doute ajouter la Belgique,
51:07 ceux-là, on peut encore faire quelque chose avec eux,
51:10 mais l'Allemagne, elle a déjà choisi,
51:12 l'Allemagne, elle travaille avec les pays du Nord,
51:15 et les pays du Nord, ils sont carrément contre nous.
51:17 La Pologne, on les comprend, d'ailleurs, moi, si j'étais Polonais,
51:20 que j'avais été trahi par la France, trahi par l'Angleterre,
51:23 trahi par tout le monde, traversé par les Allemands
51:28 et occupé par les Russes, par les Soviétiques,
51:31 avec le régime soviétique de 1945 à 1990, pendant 50 ans,
51:37 autant vous dire que moi, je serai effectivement anti-Russe, anti-soviétique,
51:41 ça se comprend, mais aussi, je n'aimerais pas les pays russes,
51:44 ceux qui n'aiment pas, parce qu'ils ne nous aiment pas,
51:47 et ils sont complètement en dehors de nous, et pire encore,
51:49 ce sont les meilleurs alliés de l'Amérique en Europe,
51:51 aujourd'hui, ils ont remplacé les Anglais.
51:54 – Qui développent de manière absolument incroyable, d'ailleurs, la défense.
51:58 – Mais oui, et ils vont devenir la première armée,
52:00 si ça continue comme ça, la première armée d'Europe,
52:03 bon, ils font leur politique, et moi, je trouve ça très bien,
52:07 je serais Polonais, je trouverais formidable la politique polonaise,
52:11 le problème, c'est que moi, je suis Français,
52:13 et je m'aperçois que là-dedans, je laisse des plumes tous les jours,
52:16 et je ne me défends pas, donc il va bien falloir à un moment dire "stop",
52:21 il y a des choses qu'on peut faire, mais des choses qu'on ne peut pas faire.
52:24 – Mais alors, en conclusion, Alain Julliet, on a vu une Turquie
52:28 avec un président, Erdogan, qui défend les intérêts de la Turquie,
52:33 on a vu une Allemagne qui défend les intérêts allemands
52:38 et les intérêts américains, quand ils s'y combattent…
52:39 – Oui, mais quand ils ont assassiné, maintenant ça sort, enfin,
52:42 enfin, les gens le racontent, mais quand les ONG allemandes,
52:46 appuyées par des financements venus d'ailleurs,
52:50 ont saboté le nucléaire français, c'était dans l'intérêt de l'Allemagne,
52:54 donc c'est clair, ils jouent leur politique.
52:58 – Mais alors, finalement, dans toute cette équation…
52:59 – Quand l'Allemagne tue l'industrie de défense française
53:01 avec les mesures qu'ils préconisent et ce qu'ils font,
53:04 avec les retours de contrats et les tentatives faites au Parlement européen
53:08 pour bloquer les exportations de matériel de défense français,
53:12 on ne peut pas dire qu'ils sont avec nous.
53:14 Donc oui, chacun doit défendre ses intérêts.
53:17 – Mais comment vous expliquer qu'on a une, je l'ai dit,
53:20 une Turquie qui défend les intérêts turcs,
53:22 une Allemagne qui défend les intérêts allemands,
53:24 un Chinois, évidemment, une Chine qui défend, bien entendu, les intérêts chinois,
53:29 la Russie, je crois qu'on n'en a pas beaucoup parlé aujourd'hui,
53:32 mais qui défend les intérêts russes,
53:33 des États-Unis qui défendent les intérêts américains,
53:37 et alors dans tout ça, il y a un petit pays…
53:39 – Et je vous citerai, et vous citez tout le monde,
53:40 citez le fameux Lula aussi, hein,
53:42 – Bien sûr, le Brésil qui a cité, bien sûr.
53:44 – Le Brésil dont on disait "Ah, formidable, Lula, il remplace Bolsonaro,
53:47 ce homme d'extrême droite, bon, ça va être formidable,
53:50 vous allez voir, c'est le grand ami",
53:52 et qui vous dit "moi je suis pro-russe et pro-chinois,
53:55 et puis il est temps que vous arrêtiez vos bêtises en Europe avec la guerre".
53:58 – Calmez, bien sûr.
54:00 Mais alors dans tout ça, il y a un pays qui s'appelle la France,
54:03 et dont les dirigeants défendent les intérêts français,
54:06 ça ne passe pas par eux.
54:07 Alors quel est le problème ?
54:08 Comment vous expliquez ça ?
54:09 Parce que j'entends les lobbies écologistes pour le nucléaire,
54:12 j'entends les ONG, j'entends…
54:14 – Oui mais c'est…
54:15 – Non mais est-ce que finalement le problème,
54:16 ce n'est pas qu'on importe des dirigeants pour les mettre à la tête de la France ?
54:20 – Vous savez, j'ai eu l'occasion d'écrire il y a quelque temps,
54:22 pour un club, j'avais écrit un article sur le fait de la nécessité
54:27 d'avoir des hommes d'État.
54:30 Parce que dans l'histoire de France, il y a toujours eu,
54:33 heureusement d'ailleurs, il y a toujours eu des hommes, ou des femmes,
54:37 qui avaient au cœur l'intérêt de la France,
54:40 mais l'intérêt de la souveraineté française
54:41 en ne pas se laisser marcher sur les pieds.
54:44 Quand vous abandonnez la France au profit d'autres choses,
54:47 pour des raisons que je respecte, moi je comprends très bien,
54:50 je comprends très bien qu'on peut être européen,
54:52 et après tout j'admets très bien, moi je suis un libéral, je suis un démocrate,
54:55 j'admets que quelqu'un me dise,
54:56 moi je considère que l'Europe c'est mieux que la France,
54:59 il faut dissoudre la France dans l'Europe.
55:01 Moi je veux bien, mais dissoudre la France dans l'Europe,
55:03 ça veut dire non pas seulement qu'on n'existera plus,
55:06 mais ça veut dire qu'on sera sous la domination des Allemands ou des Polonais.
55:11 Et là, moi je ne suis pas d'accord, pour moi, ce n'est pas possible.
55:15 – Soit dit en passant, ils ne sont pas non plus capables
55:17 de défendre les intérêts de l'Union Européenne.
55:18 – Mais ils ne défendront pas non plus, mais comme ils sont plus puissants que nous,
55:21 et qu'ils sont plus énergiques que nous, c'est quand même nous qui prendrons les coups.
55:25 Non, je crois qu'il est temps de faire une vraie réflexion de fond,
55:29 d'ailleurs moi je crois que c'est ça le fond actuel du problème politique en France,
55:32 en sens global.
55:34 Le vrai problème actuel, c'est de faire une véritable analyse,
55:37 ce que nous sommes réellement, et non pas dans les belles paroles et les trucs,
55:41 mais ce que nous sommes devenus réellement, ce qui se passe dans le monde,
55:46 donc nous, dans notre environnement mondial,
55:49 et comment on peut faire pour tirer notre épingle du jeu.
55:52 Et on voit bien que tirer notre épingle du jeu,
55:54 ça veut dire assumer un certain nombre de choses.
55:57 Je parlais de la défense tout à l'heure,
55:59 il est évident qu'avec la pression américaine,
56:01 l'Europe est une Europe de la défense complètement américaine,
56:04 qui achète du matériel américain.
56:06 Donc nous, si on veut continuer une industrie de défense,
56:08 il faut vendre à qui ?
56:10 Ce n'est pas aux Européens, ils n'achèteront pas.
56:12 Il faut vendre au pays du tiers monde, au pays en émergence, aux BRICS.
56:17 Et là, on peut faire un vrai marché avec les BRICS.
56:19 Alors pourquoi ne pas discuter avec les BRICS,
56:21 et dire "ben nous, faire ce qu'a fait Erdogan en définitive".
56:24 Quand Erdogan, il joue tous les côtés,
56:26 la France, elle peut aussi dire "ben moi je vais jouer dans certains domaines".
56:29 Alors on va vous dire "ah oui, mais l'Europe,
56:32 moi ce que je constate, c'est quand un pays d'Europe a le courage de dire,
56:35 le chef d'un pays d'Europe a le courage de dire "ah l'Europe,
56:38 vos histoires, je m'en fous, je ne les applique pas,
56:40 regardez les Polonais, regardez d'autres,
56:42 ben qu'est-ce qui se passe ? L'Europe se couche".
56:45 Donc...
56:46 – Donc, il faut faire coucher l'Europe.
56:48 – Il faut tenir tête.
56:50 – Merci infiniment Alain Juillet d'être revenu chez nous,
56:53 c'était encore une fois un plaisir, comme d'habitude.
56:55 Merci à tous de nous avoir suivis, j'espère que ça vous a plu.
56:58 Je compte sur vous, je vous l'ai dit au début de cette émission,
57:00 pour partager cette émission, pour la commenter,
57:03 faites des suggestions aussi, peut-être d'invités,
57:05 de thèmes que nous n'avons pas encore abordés dans cette saison.
57:08 Et puis surtout pensez, si ce n'est pas fait,
57:09 à cliquer sur le pouce en l'air, ça améliore le référencement.
57:12 Et donc, la diffusion.
57:13 Merci à tous de nous avoir suivis,
57:16 on se retrouve la semaine prochaine, en attendant, portez-vous bien.
57:19 [Musique]

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