L'écrivaine Camille Kouchner était l'invitée du 9h20 de France Inter, jeudi 17 avril, pour son roman "Immortels" (Seuil).
Retrouvez « L'interview de 9h20 par Léa Salamé » L'interview de 9h20 avec Léa Salamé sur France Inter et sur : https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-interview-de-9h20
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00:00Mathilde Serrel, vous recevez une avocate et écrivaine qui a changé la vie.
00:05Oui, Camille Kouchner, bonjour.
00:07Bonjour.
00:08Changer la vie, ça nous ramène aux années Mitterrand, en France.
00:11Est-ce que vous diriez que vous exercez, comme le suggérait Lionel Jospin en 1995,
00:16un droit d'inventaire sur la génération qui est arrivée au pouvoir dans les années 80 ?
00:22Est-ce que j'exerce un droit d'inventaire ?
00:24Je ne sais pas parce que je passe par le roman, donc j'invente des histoires,
00:27mais j'incarne un peu cet inventaire.
00:30Oui, parce qu'il y a des choses à garder, des choses dont on pourrait se passer.
00:33Camille Kouchner, vous êtes avocate, on le disait aujourd'hui,
00:36vous êtes aussi devenue une voix transformatrice de la littérature contemporaine.
00:40Donc oui, d'une manière, je le dirais, vous changez la vie.
00:44La parution, il y a 4 ans, en 2021, de La Familia Grande est un récit courageux,
00:48poignant sur l'inceste subi par votre frère jumeau, a été non seulement un phénomène littéraire.
00:52On est quoi, à plus de 450 000 exemplaires, non ?
00:55Un peu moins.
00:55Un peu moins, une vingtaine de langues pour les traductions.
00:59Et ça a été un électrochoc dans la société française.
01:01Ça a engendré un débat national, une prise de conscience collective,
01:05la création de la civise, je le rappelais,
01:07la commission indépendante sur la violence sexuelle faite aux enfants,
01:10qui a été prolongée jusqu'en 2026, on l'a appris au début du mois.
01:14Et vous publiez cette fois une fiction, un premier roman,
01:17immortel, aux éditions du Seuil, l'histoire d'une amitié symbiotique
01:21entre une fille et un garçon élevé ensemble dans les années 80,
01:25dans un milieu, allez, intello-bourgeois-libertaire parisien, ça vous dirait ?
01:28Hyper privilégié.
01:29Hyper privilégié.
01:31Et c'est aussi un livre qui est puissant dans l'éveil des consciences,
01:34mais autrement, je dirais, par le ressenti.
01:36Vos personnages s'appellent Ben et K.
01:39Ils naissent à deux mois d'intervalle, leurs mères sont meilleurs amis,
01:42et ils grandissent comme deux inséparables.
01:44Ils apprennent à marcher, parler, nager, écrire, compter ensemble.
01:47On pense à votre jumeau, mais au-delà des clés sur votre parcours personnel,
01:51pourquoi vous vouliez que ces deux personnages ne forment qu'un ?
01:54Qu'ils soient presque la même personne, Camille Kouchner ?
01:57Parce que je me suis beaucoup interrogée sur les filles et les garçons,
02:00depuis la familia grande, j'ai eu plein de récits de femmes,
02:04beaucoup de femmes,
02:05et je me suis dit, c'est vrai, en fait, je suis une fille,
02:08et qu'est-ce qui fait que je suis une fille ?
02:11J'ai en effet cette expérience un peu particulière d'être née avec un garçon,
02:16et donc je pense que j'ai un regard un peu particulier sur les choses,
02:19et j'avais envie de jouer avec ça.
02:20Alors cette histoire, ce n'est pas du tout mon jumeau et moi,
02:22mais en revanche, c'est construire ce lien,
02:26essayer d'interroger ce lien entre les filles et les garçons,
02:28et pourquoi on s'aime tant, et pourquoi parfois on n'arrive pas à se parler.
02:32On écoute le fil rouge de ce roman.
02:35« Bang Bang » de Nancy Sinatra qui ouvre et qui clôture.
03:05aussi, d'une certaine manière, ce livre.
03:07Vous étiez attachée à le faire entendre tout de suite au lecteur.
03:12En tout cas, moi, c'est comme ça que j'entends cette chanson.
03:15C'est un petit garçon et une petite fille,
03:19et les coups de la norme,
03:21les coups, c-o-u-p-s,
03:24ces coups qui reçoivent,
03:26ces injonctions à être une femme,
03:28à devenir un homme,
03:29et qui les séparent,
03:31qui les assemblent,
03:31qui les séparent à nouveau, etc.
03:33Et donc, je trouvais que ça scandait bien tous les mouvements du livre.
03:37En fait, il y a deux métaphores médicales.
03:39Il y en a une première,
03:40c'est que cette cellule qui se divise,
03:42elle est aussi à l'image du cancer,
03:43en fait, qui touche la narratrice.
03:45Elle se réveille à l'hôpital après une opération d'ablation du sein.
03:49Elle est dans les vapeurs de ses souvenirs,
03:50qu'elle tente aussi de retenir.
03:52Elle ne veut pas se réveiller d'heure.
03:53C'est intéressant au départ.
03:55Et puis, il y a une deuxième métaphore médicale,
03:57évidemment, qui est cette expérience,
03:58comment les cellules se divisent
04:01alors qu'elles étaient unies.
04:03Et là, finalement,
04:04vous nous livrez le compte-rendu.
04:05C'est-à-dire, c'est ce que vous avez entendu
04:07depuis la familia grande D,
04:08c'est ce que vous aviez observé,
04:10c'est ce que vous aviez aussi
04:11tenté de saisir de l'enfance
04:13et de ne pas oublier.
04:14Oui, c'est ce que j'ai compris,
04:16surtout parce que moi,
04:16je m'éveille en même temps que les autres
04:19ou peut-être un peu en retard,
04:20j'en sais rien,
04:21mais c'est ce que j'ai compris après.
04:22Ce n'est pas tellement comment elles se divisent,
04:25parce que c'est normal que chacun suive ses chemins,
04:30mais c'est comment elles mutent
04:32et comment elles peuvent se transformer
04:34de manière désagréable pour les uns et pour les autres.
04:38Donc, j'ai essayé de raconter
04:39comment on est fille et garçon
04:43et comment on est construit par l'extérieur,
04:46femme et homme,
04:47et comment parfois cette construction par l'extérieur
04:50à coup de beaucoup de violence,
04:52peut nous coûter ce dialogue ?
04:54Cette amitié fusionnelle aussi,
04:56cette expérience de la mixité,
04:58pour vous, c'est une solution.
05:00Je cite le texte,
05:01nous nous maintenons comme un seul et même être,
05:03ovni de l'identité sexuelle,
05:05enfant bicéphale,
05:06monstre qui vous parle,
05:08indifférent aux projections de nos parents.
05:10Ben était la seule fille que je voulais être,
05:12j'étais le seul garçon
05:13dont il aimait l'incarnation.
05:16Ce rapport à la mixité,
05:17ça protège dans un premier temps
05:19cette fusion entre garçon et fille
05:21et ça devrait finalement se prolonger plus tard,
05:24ces échanges-là, finalement.
05:25Tout à fait, oui.
05:26Et puis ça protège plus tard aussi.
05:28Moi, je pense que j'ai beaucoup lu
05:30après la famille Agrandé,
05:31et notamment Preciado, Butler,
05:34c'est pour ça la référence à monstre qui vous parle.
05:36Judith et Paul B pour les prénoms.
05:37Voilà, voilà.
05:39Et peut-être que quand on a été jumelle
05:41avec un garçon,
05:42c'est quelque chose qui résonne énormément.
05:44Moi, j'interroge ce lien,
05:49je voudrais qu'on le maintienne,
05:50tout en étant ensemble pour refuser
05:53les coups de la norme
05:55et les violences qui sont faites aux femmes,
05:57notamment.
05:58Donc, il y a l'expérience sociale,
06:01et puis il y a aussi la donnée
06:03qui est celle de l'époque.
06:05Vous dites, on n'entend pas beaucoup
06:06les cinquantenaires.
06:07Vous vous parlez des parents,
06:09des parents qui ont grandi avec ça.
06:10On écoute l'hymne.
06:31L'hymne du MLF,
06:33revisité en 2018,
06:34avec entre autres
06:35Pomme, Olivia Ruiz,
06:36Agnès Jaoui,
06:38Sandra Nkake,
06:38Barbara Carlotti.
06:39Les deux enfants de ce livre,
06:41ils apprennent à chanter
06:42Debout, Debout
06:43et le MLF
06:44ensemble dans la voiture.
06:46Mais c'est aussi un théâtre
06:46pour confronter
06:47l'histoire du féminisme.
06:49Ce roman Camille Kouchner
06:50avec peut-être des fausses pistes
06:52qui sont nées
06:53de ce mouvement,
06:55en tout cas,
06:55à travers le personnage de Béa,
06:56la maman de la narratrice
06:57qui estime
06:58qu'il ne faut jamais être infantilisée
07:00et que la meilleure façon
07:01d'être une femme,
07:01c'est d'être un bonhomme.
07:03Oui, alors moi,
07:04j'avais envie de rendre hommage
07:05vraiment au mouvement féministe
07:06des années 70,
07:07dire tout ce que ça m'avait apporté.
07:09Et puis,
07:10j'avais envie que ce livre
07:12soit un peu comme
07:12un passage de témoin,
07:15de relais,
07:16c'est-à-dire que je reçois
07:17tout ce qui a été fait.
07:21Et puis,
07:22j'essaye d'apporter
07:23quelques petits correctifs
07:24et de dire,
07:25voilà,
07:25toute cette révolution
07:26était magnifique.
07:27Elle est venue,
07:28elle s'est accompagnée
07:29avec certaines violences.
07:30Peut-être qu'aujourd'hui,
07:31on peut en parler.
07:31Peut-être que les cinquantenaires,
07:33leur rôle aujourd'hui,
07:35puisque les trentenaires
07:36sont si actifs
07:37et magnifiques.
07:38Très franchement,
07:39moi,
07:39elle m'impressionne beaucoup.
07:41Je trouve que la place
07:42des cinquantenaires,
07:43c'est quand même
07:43de parler un peu là
07:45et de dire,
07:46bon ben voilà,
07:46nous,
07:46on a été un peu pris
07:47en sandwich
07:48entre la génération précédente
07:50et vous,
07:51mais on est là
07:51et on vous accompagne
07:53et on est quand même
07:54assez fiers
07:54de faire ce passage
07:56de témoin.
07:57Au-delà de la prise
07:57en sandwich,
07:58il y a aussi
07:58une prise de conscience
07:59de peut-être une erreur,
08:02un moment,
08:02un mauvais embranchement
08:03qui a conduit
08:04en fait à se haïr
08:05en tant que femme.
08:06C'est ce que ressent
08:07en fait la narratrice
08:09dans les mots de sa mère.
08:10Elle ne lui avoue même pas
08:11d'ailleurs qu'elle a ses règles
08:12le jour où ça lui arrive
08:13parce qu'elle a honte
08:15d'être femme
08:15et elle ne veut même pas
08:17être contaminée
08:18par les autres petites filles
08:19qui sont si filles.
08:20Qu'est-ce que c'est
08:21que ce sentiment
08:22que vous avez essayé
08:22de saisir aussi
08:24et ce qui vient
08:25de vos souvenirs
08:26ou des récits
08:27que vous avez eus
08:27depuis la familia grande D ?
08:28Je pense que ce qui est
08:29très important déjà
08:30c'est de dire
08:32que ce n'est pas une erreur.
08:33Je pense que les femmes
08:34à cette époque-là
08:35ont fait ce qu'elles pouvaient
08:36dans la sphère de liberté
08:38qui leur était laissée.
08:39Donc je ne crois pas
08:40que ce soit une erreur.
08:41Après,
08:42ce dont je voudrais me départir
08:44c'est de cette grammaire
08:45de la domination,
08:46cette grammaire du pouvoir
08:47et c'est vrai
08:49que la compétition
08:50entre les filles,
08:51la compétition
08:51entre les femmes
08:52c'est quelque chose
08:53que j'interroge.
08:55Quand on nous laisse
08:56une sphère d'action
08:57qui est assez restreinte,
08:59on a tendance
08:59à vouloir se rapprocher
09:00du pouvoir
09:01au détriment des autres
09:02et ça je pense
09:03qu'aujourd'hui
09:03les trentenaires
09:04nous montrent bien
09:05alors je dis les trentenaires
09:06disons l'élération
09:07après moi
09:08nous montrent bien
09:09que en fait
09:10la compétition
09:11entre les femmes
09:12c'est toujours
09:12au bénéfice des hommes.
09:14Il faudrait peut-être
09:14abandonner l'idée.
09:15Il y a aussi l'idée
09:16d'une compétition
09:17entre les classes
09:18parce qu'elle se sent
09:19doublement coupable
09:20cette héroïne
09:20à la fois d'être femme
09:21et en plus d'être nantie.
09:23Il y a un héritage idéologique
09:24qui là aussi a fait
09:25des dégâts
09:25Camille Kouchner.
09:26En tout cas
09:27je ne sais pas si
09:27c'est des dégâts
09:28parce que ce n'est pas
09:29le livre du bilan
09:30des dégâts
09:31au contraire
09:31c'est pour ça que je vous dis
09:32c'est le passage
09:33C'est quand même
09:34un règlement du vieux mondain
09:35un règlement de compte
09:36avec le vieux monde
09:37C'est écrit noir sur blanc
09:39Putain de vieux monde !
09:40Exactement
09:41l'idée c'est de passer
09:41à autre chose
09:42Passons à autre chose
09:44Après je pense que
09:46c'est très important
09:48de savoir
09:48d'où on parle
09:49et donc
09:50le personnage de K
09:52dans ce livre
09:53parle d'un endroit
09:55qui est un endroit
09:56très privilégié
09:57qui est une classe bourgeoise
09:58et il faut qu'elle l'assume
09:59mais pour autant
10:00ça ne veut pas dire
10:01qu'elle doit
10:02le faire au détriment
10:03des autres femmes
10:04donc c'est
10:05intersectionnel en fait
10:07il faut savoir
10:08d'où on parle
10:09et quels sont nos privilèges
10:10C'est un peu
10:11nouveau monde
10:12d'une certaine manière
10:13c'est un chantier ouvert
10:14pour vous aussi
10:15la question de la femme
10:16au XXIème siècle
10:17je sais que vous revenez
10:18souvent à cette idée
10:19de non-binarité
10:20finalement ce serait plus simple
10:21d'être au-delà
10:23de cette binarité
10:24femme-homme
10:25mais est-ce que
10:26la question de la femme
10:27on a beaucoup parlé
10:28de l'homme déconstruit
10:28on ne s'y est pas
10:29trop peu intéressé
10:31la femme déconstruite
10:32Ben oui
10:33c'est ce que je vous disais
10:34de la compétition entre filles
10:35c'est exactement ça
10:36mais je pense que
10:37c'est pour ça que j'ai pris
10:38deux enfants
10:39garçons et filles
10:40et l'un et l'autre
10:41sont construits par l'extérieur
10:42et l'un et l'autre
10:43subissent
10:44une norme violente
10:45les injonctions virilistes
10:48qui sont faites
10:49aux petits garçons
10:50le détruisent
10:52et les injonctions
10:54qui sont faites
10:54à la petite fille
10:55de devenir conquérante
10:57indépendante
10:57autonome
10:58quoi qu'il en coûte
11:00d'une certaine manière
11:01ça aussi la détruit
11:02donc ma question
11:04c'est comment on fait
11:05pour construire
11:06l'identité sexuelle
11:07sans que ça coûte
11:08autant
11:09et à l'un et à l'autre
11:10sachant que la petite fille
11:11en question
11:12il lui arrive aussi
11:12un peu tous les malheurs
11:13du monde
11:14à Cap
11:14déjà quand elle prend son bain
11:16son père fait la compétition
11:17avec la chasse d'eau
11:17pour savoir s'il va pucer
11:19plus vite
11:20elle n'a pas forcément
11:21envie de voir un sexe d'homme
11:22pendant qu'elle prend son bain
11:23c'est aussi quelqu'un
11:24qui l'appelle machine
11:25c'est quelqu'un
11:26quand elle s'habille trop sexy
11:27qui lui dit qu'elle va
11:28se faire violer
11:29et enfin elle va subir
11:30elle aussi
11:30l'inceste
11:32en tout cas dans cette famille
11:34élargie
11:34qui revient
11:35la famille recomposée
11:36la famille agrandée
11:37donc pourquoi est-ce que
11:38vous avez voulu
11:39quelque part aussi
11:39qu'il lui arrive tout ça
11:40à votre héroïne
11:42là j'avais envie
11:43de porter tous les témoignages
11:44qui me sont parvenus
11:46depuis la famille agrandée
11:47et donc ces femmes
11:48qui m'ont raconté
11:49leur histoire
11:49et je ne savais pas
11:50comment répondre
11:51je n'ai pas répondu
11:52individuellement
11:53alors que les partages
11:55étaient magnifiques
11:55et donc je me suis dit
11:56le seul moyen
11:57de continuer à interagir
12:00et de continuer
12:00à porter cette lutte
12:02c'est d'écrire un roman
12:03voilà
12:04c'est ma manière
12:04de répondre
12:05à toutes les femmes
12:06qui m'ont écrit
12:07et de construire un personnage
12:08qui d'une certaine manière
12:10les incarne
12:10ce personnage
12:11et toutes les femmes
12:12tous les messages
12:12que vous avez reçus
12:14depuis la famille agrandée
12:15vous avez commencé aussi
12:17à rencontrer vos lecteurs
12:18depuis que le livre est sorti
12:19qu'est-ce qu'ils vous disent
12:21depuis la sortie d'immortel ?
12:24début avril
12:24l'immortel
12:25votre premier roman
12:25en fait ça dépend
12:26des générations
12:27ça dépend des points de vue
12:28et ça dépend
12:29voilà
12:30des bords politiques aussi
12:32ah oui
12:33c'est assez drôle
12:33qu'est-ce qui diffère ?
12:34une lecture des hommes
12:36qui trouve que quand même
12:37le personnage du petit garçon
12:39devient particulièrement agressif
12:42alors que bon
12:43les femmes ne voient pas ça
12:44comme ça
12:44elles voient ça un peu
12:46comme un homme
12:46et puis non mais c'est vrai
12:48c'est des retours
12:49ils y voient une caricature
12:50là où vous avez
12:51simplement le sentiment
12:52de faire une description commune
12:53exactement
12:54donc ça c'est assez drôle
12:55et vice versa
12:56en disant
12:57c'est quand même particulier
12:58ce qui arrive à ce personnage
12:59de cas
13:00ça c'est la lecture masculine
13:02et les femmes vont vous dire
13:03ben non
13:04c'est la vie de femme
13:05donc c'est assez intéressant
13:07exactement
13:07c'est assez intéressant
13:08c'est la norme
13:09comment est-ce que vous avez vécu
13:10cette expérience du texte
13:11je sais que
13:12Manon Garcia par exemple
13:13qui a publié son livre
13:14sur comment vivre avec les hommes
13:16après le procès Mazan
13:17dit qu'elle avait construit
13:18d'abord comme une plaidoirie
13:19sa première conversation
13:20entre les sexes
13:21et là plutôt comme un tableau
13:22impressionniste
13:23vous l'avocate
13:24comment vous l'avez construit
13:26justement ce premier texte
13:27fictionnel
13:28Camille Kouchner
13:29alors moi je suis plus avocate
13:31je suis prof de droit
13:32mais moi j'avais
13:34l'avocate de formation
13:36voilà
13:36moi j'avais envie
13:39après la familia grande
13:41de me donner le droit
13:43à l'imaginaire
13:44c'est vraiment retrouver l'enfance
13:45d'une certaine manière
13:46c'est pour ça que c'est vraiment
13:47une fiction ce livre
13:48même si je me suis amusée
13:51à construire des personnages
13:52qui me sont proches
13:53que j'ai
13:53je me suis quand même amusée
13:56vraiment à dépeindre ce tableau
13:57mais je me suis offert
13:59le droit au roman
14:00parce que je ne m'offrais pas
14:01ce droit là
14:02je pense que j'avais besoin
14:03d'écrire la familia grande
14:04avant ça
14:05et maintenant voilà
14:07c'est une mosaïque
14:08fictionnelle
14:09oui maintenant vous voilà
14:10lancé dans l'écriture
14:11avec des passages assez audacieux
14:12je voudrais qu'on écoute
14:13un extrait de cette musique
14:14de Sugar Hill Gang
14:15vous allez comprendre
14:16alors là on est le soir de la Bastille
14:29enfin on est à la Bastille
14:30le soir de l'élection
14:31de France Amitaire en 1981
14:33et vous vous faites ce plaisir
14:34Camille Kouchner
14:35vous écrivez donc
14:36les parents dansent joyeusement
14:38sur ce titre qu'on entend
14:39Rapper The Light
14:40de Sugar Hill Gang
14:41et vous vous écrivez
14:41carrément toutes les paroles
14:42dans le roman
14:44vous nous dites
14:44oui oui I say the hip hop
14:45the hippie in the hippie
14:46in the hip hop
14:47and you don't stop
14:48and you're rocking to the bank
14:49bank the bookie
14:50say hop the boogie
14:51bravo
14:51c'est pas mal
14:52et je m'arrête
14:53moi j'applaudis
14:54il y a un critique croc
14:55qui a publié un livre
14:56qui s'appelait
14:56et vous lui faites
14:59de la concurrence
15:00vous avez envie
15:02de vous amuser
15:02c'est ça que je veux dire
15:03je retrouve l'enfance
15:05donc j'avais envie
15:06que ce soit lumineux
15:06et drôle
15:08et il se trouve que moi
15:08j'ai pas été à la Bastille
15:09en 1981
15:10j'étais très jalouse
15:11des copains
15:11qui me racontaient
15:12donc je suis allée
15:13rechercher un peu
15:14les images de tout ça
15:15et notamment
15:16la bande son
15:17et donc ça m'a beaucoup
15:19amusée
15:19d'imaginer
15:21les gens autour de moi
15:22danser là-dessus
15:23il y a quand même
15:24un plaidoyer
15:25dans ce roman
15:27il y a une charge
15:29de la narratrice
15:29contre les parents
15:31qui est assez fou
15:32qui dit en fait
15:34nos parents sont devenus
15:35des adultes ridicules
15:37Ben
15:37une féministe
15:38qui remercie les hommes
15:39un journaliste
15:40qui ne s'intéresse
15:41qu'à lui-même
15:41un philosophe
15:42qui ne pense qu'avant
15:43de ses essais
15:44une femme de théâtre
15:45muette d'admiration
15:46the world is a stage
15:47camarade
15:48de la lutte collective
15:49au pur individualisme
15:50de la révolution
15:51à l'indifférence
15:52de leurs propres enfants
15:53nos parents ont suivi
15:54un chemin
15:55qui les a conduits
15:56tout droit
15:56vers le cynisme
15:58et ça continue
16:00jusqu'à la fin
16:01du monde
16:02ça c'était
16:02il est quand même là
16:04finalement
16:04le réquisitoire
16:06oui alors après
16:07pour moi
16:08c'est un roman
16:08qui est sur l'enfance
16:09donc c'est un discours
16:10qui est porté par l'enfance
16:11c'est que voilà
16:12que moi
16:13ça me paraît très important
16:16c'est-à-dire que
16:16ces enfants
16:17ils ont été construits
16:18dans des idéaux
16:19dans une idéologie
16:20très porteuse pour eux
16:22et ils ont vu
16:23leurs parents
16:24mettre un gap immense
16:25entre le discours
16:26et les actes
16:27donc ça finit
16:28par les mettre en colère
16:28et comme c'est un
16:30un livre sur l'enfance
16:32et sur l'engagement
16:33l'authenticité
16:35sur la foi
16:35qu'on peut avoir
16:36dans l'enfance
16:37voilà moi j'essaye
16:39de raconter
16:39qu'adultes
16:40on peut porter encore
16:41ces idéaux
16:42et ne pas verser
16:44vers le cynisme
16:45ni l'idéologie
16:46du coup
16:47on garde les idéaux
16:48mais pas l'idéologie
16:49tout à fait
16:49et encore une fois
16:51ces cinquantenaires
16:53aujourd'hui
16:54où sont-ils
16:54ceux qui ont grandi
16:55là-dedans
16:56nos antiracismes
16:57toutes les idées
16:59dans lesquelles
16:59on a grandi
17:00il faut qu'on les porte
17:01encore aujourd'hui
17:01je pense que
17:02c'est très important
17:03il nous reste une minute
17:04pour les porter
17:05Camille Kouchner
17:06et en plus
17:06ça ne va pas vous plaire
17:07c'est binaire
17:07c'est l'heure
17:08des impromptus
17:09des questions rapides
17:11et alors vous dites
17:12Renaud ou Nancy Sinatra ?
17:14Renaud
17:15est-ce que vous êtes
17:17plutôt Monique Wittig
17:18ou Manon Garcia ?
17:20Wittig
17:21mais bon
17:21c'est une histoire
17:22de filiation
17:23d'accord
17:24est-ce que vous seriez
17:25plutôt Bastille
17:26ou Nation ?
17:28ah là là
17:29c'est dur
17:29Bastille hier
17:31Nation demain
17:32est-ce que vous votez
17:34Camille Kouchner ?
17:35est-ce que je vote ?
17:36bien sûr que je vote
17:37liberté, égalité, fraternité
17:39notre devise
17:40vous choisissez quoi ?
17:41alors on ne peut pas
17:42prendre l'un sans l'autre
17:43il vous faut les trois
17:44vous choisissez pas
17:45et puis quant à la fraternité
17:46peut-être on remplace ça
17:47par la delphité
17:48la delphité
17:49liberté, égalité, adelphité
17:51ce sera votre devise
17:52Camille Kouchner ?
17:52ce serait pas mal
17:53et Dieu dans tout ça
17:54alors là
17:55aucune idée
17:57on lui laisse un vocal
17:59voilà c'est ça
18:01on voit s'il vous rappelle
18:02bonne journée à vous
18:03immortelle
18:04votre premier roman
18:05c'est publié au seuil
18:07et c'est beau
18:08saisissant
18:09ça vous éveille
18:10sans vous rendre woke
18:12qu'est-ce qu'on dirait ?
18:13même si le wokisme
18:14c'est peut-être bien
18:15ouais c'est pas si mal
18:15bonjour neuf
18:17merci