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Au lendemain de l'allocution d'Emmanuel Macron sur la situation internationale et la guerre en Ukraine, écoutez l'interview du député de la Somme (groupe écologiste et social) et porte-parole de Picardie Debout !
Regardez L'invité de RTL avec Thomas Sotto du 06 mars 2025.

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Transcription
00:00RTL Matins
00:02Et tout de suite sur RTL, c'est l'invité d'RTL Matins, Thomas, vous recevez aujourd'hui François Ruffin, député de la Somme, ex-insoumis et désormais sous bannière Picardie-Debout.
00:12Bonjour et bienvenue sur RTL, François Ruffin.
00:14Bonjour.
00:15Qui peut croire que la Russie d'aujourd'hui s'arrêtera à l'Ukraine ? La menace russe est là, il nous touche sans connaître de frontières.
00:20Notre sécurité est menacée, nous entrons dans une nouvelle ère. Face à ce danger, rester spectateur serait une folie.
00:27Ce sont les mots d'Emmanuel Macron hier soir. Le chef de l'Etat a-t-il été alarmiste ou lucide ?
00:32D'abord dire que lui-même se trouve spectateur et commentateur de la crise en cours, puisqu'il commente à la télé, mais en vérité il est hors jeu sur le terrain des négociations.
00:46Pourquoi ? Il est allé à la Maison Blanche il y a une dizaine de jours.
00:48Sans influence, sans que ça n'ait aucune importance. Mais malheureusement c'est le cas aujourd'hui de tous nos dirigeants européens qui sont hors champ alors qu'on a une guerre qui se déroule sur notre continent.
00:59Avec des négociations à riade entre Russes et Américains, sans les Européens et sans les Ukrainiens.
01:06Et ça, alors que je veux signaler ce paradoxe, ce naufrage, alors que sur le terrain militaire, l'Ukraine a plutôt enregistré des succès.
01:15Alors qu'on s'attendait à quoi ? A ce qu'en une semaine, trois semaines, la Russie, avec ses troupes, envahissent l'Ukraine, parviennent jusqu'à Kiev.
01:26L'Ukraine, et par son héroïsme, par le sacrifice de ses soldats, a réussi à bloquer la Russie, à stopper la Russie.
01:36Elle a été très soutenue, notamment par l'Europe.
01:38Et donc avec des succès militaires qui se traduisent en une défaite complète diplomatique.
01:44Pourquoi ? Alors qu'on peut considérer qu'elle réagit tard, mais il y a un sommet encore...
01:51Mais l'Europe fait trois sommets par semaine, d'accord ? Ok.
01:55Mais quelles conséquences ça a ? Nul. Nous ne sommes pas à la table des négociations.
02:00Nous grattons à la porte, aujourd'hui, pour obtenir un strap-on tard.
02:03On pousse pour essayer d'y aller. Parce que ni Trump ni Poutine ne veulent de nous.
02:06On avait trois ans, Monsieur Soto. On avait trois ans pour ouvrir la voie diplomatique.
02:11En trois ans, on n'a rien fait. On avait Donald Trump, qui était candidat à l'élection présidentielle,
02:17et dont on savait les intentions sur l'Ukraine. Nous n'avons pas bougé.
02:20On a eu Donald Trump élu, pas encore investi, avec trois mois de tuilage avec Joe Biden,
02:26qui pouvait servir d'appui aux Ukrainiens avec les Européens. Nous n'avons pas bougé.
02:31Pendant tout ce temps-là, nous avons mis notre diplomatie à l'écart, et résultat, elle se retrouve complètement à l'écart.
02:37On fait quoi, maintenant, alors ?
02:39D'abord, il y a un bilan à tirer, quand on parvient à tel naufrage, d'une guerre qui se déroule sur notre continent,
02:45et dont nous sommes exclus. Et ensuite, on prépare la suite.
02:48La suite, c'est ce qu'on pourra encore aider l'Ukraine, sur les garanties de paix, sur le maintien de sa souveraineté,
02:57et sur le fait que, face à la Russie, elle soit un rempart utile pour l'Europe. Ce qu'elle a été.
03:02Est-ce que, pardon, parce qu'il y a quand même un contexte, beaucoup de Français ont écouté le chef de l'État hier,
03:07et il nous a fait un peu peur. On ne dit pas qu'il a tort ou qu'il a raison, on dit, est-ce que vous, vous avez peur ?
03:12Est-ce que vous dites, est-ce que vous prononcez ce mot, qu'on entend de plus en plus, on l'entendit dans la bouche de Donald Trump,
03:16la Russie a déjà fait du conflit, un conflit mondial, a dit Emmanuel Macron hier, est-ce que vous pensez qu'on est vraiment au bord du gouffre, là ?
03:24Moi, pas maintenant. C'est pas dans l'urgence, mais en revanche, il faut se préparer.
03:30Il faut retrouver notre souveraineté, il faut retrouver notre autonomie de défense et notre autonomie tout court.
03:35Mais sans paniquer, sans paniquer, et je veux, moi, vous avez, n'ayez plus peur, disait le Pape.
03:43Je pense qu'il faut se lever ce problème de peur et avancer en regardant, pas seulement les malédictions, mais les chances, les opportunités de l'époque.
03:53Je le redis, un, l'Ukraine a bloqué la Russie, avec les fonds, l'appui des Européens et des Américains, mais l'Ukraine a bloqué la Russie, c'est une première bonne nouvelle.
04:03Il va y avoir une paix, une paix sans doute dans de mauvaises conditions, mais enfin, des hommes vont cesser de mourir en Ukraine, des soldats et des civils.
04:13Donc vous dites, la priorité, c'est de cesser le feu, là, par exemple ?
04:16En tout cas, c'est Volodymyr Zelensky qui a dit que voilà, maintenant, il souhaitait une trêve qui a cessé le feu et qu'on s'oriente vers un plan de paix.
04:23Mais la troisième bonne nouvelle pour nous, c'est que nous étions dans la vassalité, nous étions dans la soumission, dans l'obéissance, avec en contrepartie la protection américaine,
04:36elle n'est plus là, elle n'est plus là pour nous, et je dirais que les Français étaient préparés à ça, mais elle n'est plus là pour les Polonais, elle n'est plus là pour les Pays-Bas,
04:44elle n'est plus là pour les Allemands. Ça nous permet de retrouver la liberté. C'est une liberté toujours inconfortable, la liberté c'est de l'inquiétude.
04:51François Ruffin, je vous écoute et j'ai l'impression d'un formidable décadé, j'ai l'impression qu'on est dans Goodbye Lénine ou dans Hibernatus,
04:56c'est-à-dire que j'ai l'impression que ce dont vous nous parlez là, avec plein de bonnes nouvelles, c'est pas la situation que ressentent les Français, c'est pas la situation que ressentent les Ukrainiens qui sont extrêmement inquiets.
05:05Qu'est-ce qui se passe ?
05:06Je me prépare pour la suite, d'accord ? Qu'est-ce qui se passe là ? Je suis d'accord pour que nous mettions en place une défense.
05:14Et où est-ce qu'on va chercher l'argent ? Une question qu'a posée le chef de l'état hier, il a dit « j'attends des propositions de chacun ».
05:20Est-ce qu'on va faire les poches des milliardaires ? Est-ce qu'on va taper dans les avoirs gelés ?
05:25Je suis d'accord avec le président de la République quand il dit qu'il faut relever notre budget de défense, qu'il faut la construire en solidarité avec tous les européens.
05:37Donc où est-ce qu'on va chercher l'argent ?
05:38Maintenant, on a un grand désaccord. La guerre ne peut pas être le prolongement de la casse sociale par d'autres moyens.
05:45C'est ce que propose Emmanuel Macron. Qu'est-ce qui s'est passé dans les guerres ? Les guerres, elles réclament quoi ? Elles réclament l'unité de la nation.
05:52L'unité de la nation, elle se fait par la justice. Elle se fait par le sentiment d'égalité.
05:56La première guerre mondiale, ça a été la naissance en France de l'impôt sur le revenu.
06:00Mais regardez la deuxième guerre mondiale aux Etats-Unis avec Roosevelt, c'était une multiplication par 20 de l'impôt sur l'égalité sur le revenu, une multiplication par 16 de l'impôt sur les sociétés.
06:10Je vous repose ma question, mais là, dans cette situation de crise, d'urgence, où est-ce qu'on va chercher l'argent ?
06:15Je vous dis, l'impôt est un levier, mais ce n'est pas la seule question.
06:19Il a dit qu'il ne faut pas augmenter les impôts.
06:21Oui, mais je sais, il y a un désaccord majeur avec Emmanuel Macron.
06:23Vous vous dites qu'il faut augmenter les impôts.
06:24Maintenant, l'impôt sur les hauts patrimoines, l'impôt sur les multinationales, c'est ce qui s'est pratiqué, je vous le dis, en Angleterre et aux Etats-Unis pendant la deuxième guerre mondiale.
06:33C'est ce qui s'est passé en France pendant la première.
06:35Maintenant, la question, ce n'est pas où on va chercher l'argent, c'est qu'est-ce qu'on en fait ? Qu'est-ce qu'on en fait, cet argent ?
06:40Il nous faut retrouver une autonomie de la défense, mais il nous faut retrouver une autonomie tout court.
06:44Il nous faut retrouver une industrie de défense, et heureusement, la France l'a maintenue.
06:49La France a maintenu son armée, la France a maintenu sa dissuasion nucléaire, ce qui nous offre quand même des points d'appui pour la suite.
06:55Mais il nous faut retrouver une industrie tout court.
06:57Le coût de la réindustrialisation, on l'a déjà fait au moment du Covid.
07:01Et puis quand la crise disparaît, on est rattrapé par les contrats, on est rattrapé par le coût du travail, et ça ne se fait pas.
07:07Si les Européens ne mettent pas en place, et ça me fait un point commun avec M. Lenglet, une protection, des taxes frontières, des barrières douanières, des quotas d'importation,
07:15s'en est fini de la sidérurgie, s'en est fini de la chimie, s'en est fini de l'électronique, s'en est fini de la télécommunication.
07:20On a besoin de tout ça pour l'industrie de la défense.
07:22Mais ça suppose du coup de se protéger des capitaux américains, qui ces dix dernières années ont racheté 1500 entreprises,
07:28dont, vous le savez, la branche énergie de Halstom, secteur stratégique, dont Exelia qui fabrique des composants électroniques, secteur stratégique.
07:36Mais ça suppose de nous protéger aussi de la Chine, vers où sont partis notre textile, notre sidérurgie, notre métallurgie, ainsi de suite.
07:44François Ruffin, Patrick Martin, le président du MEDEF, fait remarquer que le Danemark a décidé de reporter à 70 ans l'âge de départ à la retraite pour que l'économie finance la guerre.
07:51Est-ce que ça fait partie des efforts à envisager ? Est-ce que c'est envisageable ?
07:54Je vous dis, dans des temps comme le nôtre, sera important l'unité de la nation.
07:59Donc vous n'excluez pas ?
08:00Non, au contraire, je l'exclus complètement.
08:02Ah, vous l'excluez ?
08:03Mais oui. Vous avez vu ce que produit le report de l'âge de retraite pendant deux ans ?
08:09Ça produit une grande division de la nation, et je le disais déjà il y a deux ans.
08:12Dans un temps comme le nôtre, quels sont nos objectifs communs ? Comment on se serre les coudes pour aller où ?
08:18Vous savez, Roosevelt disait que ceux qui n'ont pas payé le prix de sang, ils doivent payer le prix de l'impôt.
08:24Il va falloir que les amis de M. Martin, ils payent le prix de l'impôt quand on sait que leur grande fortune...
08:30Et l'impôt, hausse d'impôt, pour les entreprises et pour les plus fortunés, ou pour tout le monde, pour tous les Français ?
08:34On verra ce dont il y a besoin, d'accord ? On verra ce dont il y a besoin.
08:39Le souci n'est pas là. Maintenant, le souci, c'est qu'est-ce qu'on veut faire ? Qu'est-ce qu'on veut faire ensemble ?
08:43Je le redis, la question industrielle est une question importante si on veut avoir derrière une industrie de défense.
08:48Est-ce que chez les consommateurs que nous sommes, il faut boycotter les produits Made in USA ou pas ?
08:52Je ne pense pas qu'on s'en sortira par le boycott.
08:54En revanche, ce sont des décisions qui doivent être prises par les Européens réunis,
08:58et qui font qu'on se protège contre les industries américaines si c'est nécessaire.
09:04Vous voyez, moi je ne suis pas pour un protectionnisme qui soit de rétorsion dans une guerre commerciale.
09:08Mais en revanche, c'est un protectionnisme de construction, c'est un protectionnisme de préservation,
09:12en se demandant quels sont les secteurs importants pour nous.
09:14François Ruffin, j'ai une dernière question sur une information qu'on a donnée tout à l'heure à 7h30 et qui nous ramène en France.
09:19Le CRIF a publié un sondage qui nous apprend que la moitié des collégiens et des lycéens ont déjà entendu dire du mal des Juifs dans leur entourage.
09:26Un sur quatre dit « Hitler, il aurait pu finir le travail ».
09:31Comment en est-on arrivé là aujourd'hui en France ?
09:3416% des élèves ne veulent pas d'un Juif pour ami, en France, aujourd'hui.
09:37D'abord, il faut combattre ça, il faut le combattre tous les jours,
09:41et je pense qu'on a affaire à un éloignement de la question de la Deuxième Guerre Mondiale,
09:44et qu'il faut remettre la question mémorielle, la question de ce qui s'est passé,
09:47qui doit être un acte fondateur pour notre temps toujours.
09:51Mais là, plusieurs générations se sont écoulées, c'est comme si on espaçait le souvenir...
09:55Il y a une responsabilité d'une partie de la classe politique ?
09:57Non mais...
09:58Et peut-être des Insoumis ?
09:59La question, vous le savez malheureusement,
10:02elle n'est pas juste de pointer quelques responsables tout en haut,
10:04c'est une culture qui se diffuse possiblement en bas, je le dis parce qu'il y a un éloignement
10:09pour moi du travail mémoriel de la Deuxième Guerre Mondiale.
10:11Moi, j'ai été élevé dans le souvenir de la Shoah, dans le souvenir permanent
10:15des crimes abominables contre l'humanité produits à ce moment-là,
10:19dans le souvenir du procès de Nuremberg, et je pense que ces mots Shoah et Nuremberg
10:24sont malheureusement inconnus sans doute des générations qui y sont présentes.
10:27Donc remettre le cap sur l'éducation.
10:29Merci beaucoup à vous François Ruffin d'être venu ce matin.

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