Avec Stéphanie Les Solières, auteure du livre "Lou : mes combats pour sauver ma fille" - Ed. Robert Laffont
Retrouvez Muriel Reus, tous les dimanches à 8h10 pour sa chronique "La force de l'engagement" sur Sud Radio.
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##LA_FORCE_DE_L_ENGAGEMENT-2025-02-16##
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00:00AGP, Association d'Assurés Engagés et Responsables présente
00:05Sud Radio, le grand matin week-end, la force de l'engagement, Muriel Reus.
00:10Bonjour Muriel. Bonjour Jean-Marie.
00:12S'engager pour sauver notre hôpital, on va en parler en recevant le témoignage bouleversant de votre invité Stéphanie Lessoulière
00:19qui est journaliste, ancienne reporter, autrice de ce livre « Loups, mes combats pour sauver ma fille »,
00:24c'est publié chez Robert Laffont, évidemment c'est une cause qui vous tient à cœur Muriel.
00:28Oui, on va en parler tout à l'heure mais pour l'instant on va parler des hôpitaux et des hôpitaux français,
00:34nos hôpitaux français qui vivent une asphyxie sans précédent.
00:37Les chiffres parlent d'eux-mêmes. En 2021, près de 20 millions de passages aux urgences ont été enregistrés
00:43contre 14 millions environ en 2002, soit une hausse de plus de 40% en deux décennies.
00:48En 2023, la France comptait 719 points d'accueil des urgences, majoritairement dans des établissements publics,
00:55mais évidemment cela reste insuffisant face à cette demande en constante augmentation.
00:59Et puis face à cette pression croissante, les moyens eux stagnent.
01:03Résultat, des couloirs saturés de brancards, des délais d'attente interminables
01:07et des patients parfois renvoyés faute de temps ou de place.
01:10Le personnel hospitalier lui est à bout, les infirmiers, aides-soignants, les médecins
01:14dénoncent des conditions de travail devenues insoutenables, charges de travail excessives,
01:18sous-effectifs chroniques, heures supplémentaires non payées, environnement stressé,
01:22tout cela accompagné d'agressions verbales et parfois même physiques.
01:25Un soignant sur trois déclare avoir été victime d'une agression.
01:29Cet épuisement général contribue à la détresse du personnel hospitalier,
01:32au départ massif, à l'augmentation d'erreurs médicales, avec des conséquences parfois tragiques.
01:38Selon la Haute Autorité de Santé, les incidents liés à l'administration de médicaments
01:42et à l'usage de produits pharmaceutiques restent fréquents.
01:4541% concernent des surdosages, 31% des confusions médicamenteuses,
01:5014% des erreurs d'identification de patients.
01:54Ces dysfonctionnements, observés à 65% au moment des soins, révèlent des failles
01:58dans le protocole et la formation.
02:00Parmi les plus vulnérables dans cette crise, les enfants, et particulièrement les enfants
02:05en situation de handicap.
02:06Trop souvent, leurs symptômes sont minimisés, retardant des diagnostics pourtant vitaux.
02:11Un enfant handicapé, écoutez bien, peut attendre jusqu'à 30% de temps supplémentaire
02:16pour accéder à des soins spécialisés.
02:18Ces lacunes, dues en partie au manque de formation spécifique des soignants,
02:22peuvent conduire à des interprétations erronées, des retards critiques
02:25et une inégalité flagrante dans l'accès aux soins.
02:28Et puis, des préjugés inconscients, on est bien forcé de le dire,
02:31renforcent parfois ce sentiment que ces enfants sont moins prioritaires.
02:36La charte Romain Jacob offre pourtant des pistes concrètes.
02:40Former les soignants à la prise en charge du handicap, coordonner les parcours de soins,
02:44garantir une écoute attentive des patients et de leurs familles.
02:47Mais ces recommandations peinent à être appliquées, faute de volonté politique et de moyens adaptés.
02:52Alors, comment accepter qu'en 2025, des enfants en urgence vitale doivent encore attendre des heures
02:57avant d'être pris en charge ?
02:59Comment tolérer que des soignants à bout de souffle soient contraints d'abandonner leurs vocations,
03:03faute de reconnaissance, de soutien, de moyens ?
03:06Et comment rester silencieux face à ces parents qui perdent un enfant à cause d'erreurs inévitables
03:12amplifiées par un système à bout de souffle ?
03:15Protéger notre hôpital, c'est lui redonner son rôle fondamental.
03:18Celui d'un refuge, d'un lieu où l'on vient chercher du soin, du réconfort
03:22et non davantage d'incertitude ou de stress.
03:25C'est garantir que chaque patient, chaque enfant, chaque parent puisse franchir ses portes
03:30avec la certitude qu'il sera pris en charge, écouté et accompagné.
03:34Et ce n'est pas simplement une question de moyens, c'est aussi une question de confiance.
03:38Et on en parle avec votre invitée qu'on accueille avec plaisir sur Sud Radio, Stéphanie Lessoulière.
03:43Bonjour et bienvenue.
03:44Bonjour, merci de m'accueillir.
03:45Vous êtes journaliste, ancienne reportère et autrice de ce livre
03:48« Lou, mes combats pour sauver ma fille » qu'on trouve aux éditions.
03:52Robert Laffont, vous êtes l'invitée de Muriel Réuss.
03:54Bonjour Stéphanie.
03:55Bonjour Muriel.
03:56Alors dans ce livre, « Mes combats pour sauver ma fille », vous racontez avec une très grande sincérité
04:01les défis, les combats, les injustices que vous avez dû affronter
04:04pour offrir à Lou, votre fille atteinte de handicap moteur dès sa naissance,
04:08une vie la plus normale possible.
04:10Ce livre, on en parlera vraiment, c'est un cri d'alerte sur les lacunes d'un système de santé
04:15et de notre société face au handicap.
04:18Est-ce que vous pouvez juste nous raconter le moment où vous avez appris
04:22que Lou aurait besoin d'un accompagnement particulier et spécifique ?
04:28En fait, ça n'a pas été tout de suite.
04:29Ça a été une forme d'errance diagnostique parce qu'au départ,
04:32ma fille ne tenait pas assise et le pédiatre ne s'en inquiétait absolument pas.
04:35Et du coup, j'ai attendu.
04:37Il a fallu vraiment attendre quelques mois.
04:39Elle arrive à peu près à 12 mois où elle tombait toujours comme une quille
04:42où il m'a dit « Non, il faut attendre encore ».
04:45Et il m'a envoyé juste voir un ophtalmologue pédiatrique
04:48parce qu'elle avait un strabisme convergent.
04:50Et là, l'ophtalmologue m'a dit « Écoutez, savez-vous que votre fille a une midriase bilatérale ?
04:54Ça veut dire une pupille dilatée des deux côtés qui est signe de souffrance neurologique. »
04:58C'est à partir de là où j'ai commencé à consulter un neurologue
05:02et à réaliser qu'elle avait souffert d'une anoxie cérébrale,
05:05c'est-à-dire un manque d'oxygène au moment de la naissance.
05:08Enfin, on ne sait pas si c'est la naissance ou l'opération qu'elle a eue petite,
05:11mais en tout cas, un manque d'oxygène qui faisait qu'elle ne pouvait pas bouger ses membres.
05:15Donc, il a fallu mettre en place un système.
05:17La vie de cet enfant démarre par une erreur de diagnostic.
05:19Tout à fait.
05:20Et comment vous avez construit votre quotidien autour des besoins de loups
05:26et évidemment avec la préservation d'un équilibre familial et personnel ?
05:30J'avoue que c'était très difficile, on ne va pas se mentir,
05:32parce que tout d'un coup, je me suis retrouvée face à un monde que je ne connaissais pas,
05:35le handicap.
05:36Pour moi, je n'avais pas de personnes handicapées autour de moi.
05:39Et donc, j'ai découvert pas de crèche pour l'apprendre.
05:41Et j'ai même une personne qui m'a dit « Non, c'est trop compliqué, ces enfants-là.
05:44Donc, pas de crèche, pas de cantine. »
05:47Ensuite, quand il a fallu aller à l'école, pas de cantine.
05:49L'école en maternelle, on ne la prenait que deux après-midi par semaine pour commencer,
05:52et dans une école privée, parce que toutes les écoles sont encore avec des escaliers,
05:56à la Jules Ferry, comme m'a dit un directeur.
05:58On m'a dit « On n'y peut rien, c'est à la Jules Ferry. »
06:00Donc, on est vraiment en retard.
06:02On a 30 ans de retard dans notre pays sur l'adaptation au cinéma, au métro, au théâtre,
06:07pour pouvoir simplement permettre à nos enfants, aux personnes qui vivent avec un handicap moteur,
06:11qui touche quand même énormément de monde,
06:13je crois que c'est 125 000 personnes qui ont une paralysie cérébrale,
06:1613 millions de personnes handicapées en France,
06:18qui n'ont pas accès, comme tout le monde, comme n'importe quel être humain,
06:21aux choses dont nous, nous avons accès.
06:25Alors, quand j'ai lu votre livre, j'ai trouvé que cet enfant,
06:28elle est magique, magnifique,
06:30et vous la décrivez d'ailleurs comme une enfant pleine de courage et de détermination.
06:34Qu'est-ce qui l'a aidé, cet enfant, à surmonter ses défis liés à son handicap ?
06:40Je pense, bien sûr, l'entourage, ça c'est sûr.
06:43On aimait notre fille passionnément, donc l'amour pour elle,
06:46mais surtout, elle avait un caractère.
06:48Je pense que ces enfants qui sont face à l'épreuve, très jeunes,
06:51développent une force.
06:53C'est une leçon de vie pour nous, sincèrement,
06:55et j'ai l'habitude de dire que le vrai héros, c'est celui qui surmonte l'épreuve.
06:59Et que toutes ces personnes qu'on considère comme des citoyens de seconde zone,
07:02ce sont eux nos modèles, ce sont eux nos héros mythiques,
07:05parce qu'ils surmontent l'épreuve, et sans jamais se plaindre,
07:08sans jamais se plaindre, et Dieu sait que c'est difficile.
07:11Elle avait de la kiné trois fois par semaine, de la rééducation,
07:14un agenda de ministre déjà en maternelle,
07:17et elle souriait tout le temps, elle voulait tout le temps aider les autres.
07:20C'était vraiment une leçon de vie pour ses camarades de classe.
07:23En décembre 2019, un loup âgé de 11 ans a été confronté à de très violentes douleurs abdominales.
07:30En dépit de plusieurs consultations aux urgences pédiatrices,
07:33sa douleur n'a pas été correctement évaluée ni traitée.
07:36Les médecins ont initialement diagnostiqué une angine virale,
07:39sans procéder à des examens approfondis, tels que des prises de sang ou des imageries médicales,
07:44et ce n'est qu'après quelques jours et une détérioration significative de son état de santé
07:50qu'elle a été émise en chirurgie viscérale,
07:53où là, finalement, une péritonite a été diagnostiquée.
07:57Et là, le drame va se produire.
07:59La prise en charge tardive, très tardive, a conduit à des complications irréversibles,
08:04et loup va vous quitter le 22 décembre 2019.
08:08Comment est-ce qu'on peut expliquer ces failles d'un système de santé
08:12au sein d'un hôpital qui a des urgences pédiatriques,
08:16qui est un très grand hôpital français, réputé,
08:19et qu'en plus vous êtes arrivé sur la recommandation de SOS Médecins ?
08:22Comment c'est possible ça ?
08:23Exactement, c'est terrible.
08:25Loup est décédé, et c'est vrai qu'il y a un avant et un après.
08:28Et c'est totalement inexplicable,
08:30parce qu'effectivement nous étions envoyés par SOS Médecins,
08:33elle a attendu des heures dans les urgences qui étaient bondées.
08:36Les personnes qui arrivaient après elle passaient devant elle.
08:39Je suis allée trois fois me plaindre à la barre d'accueil,
08:41parce qu'elle était littéralement pliée en deux.
08:43J'ai fait une photo d'elle, justement,
08:45pour essayer de montrer à l'infirmière à la barre d'accueil.
08:47Elle était littéralement pliée comme un sandwich en deux,
08:49en disant « j'ai mal, j'ai mal, demandez un antalgique ».
08:52On me l'a refusé.
08:53On m'a expliqué que le médecin triait les dossiers dans le box derrière.
08:56Je lui ai expliqué qu'elle était paralysée,
08:58donc qu'elle avait priorité sur les autres.
09:00Il n'y a rien à faire.
09:01On a attendu comme ça des heures.
09:03Ensuite, elle a été enfin prise en charge,
09:05et on est passé à une angine.
09:07C'est-à-dire que j'arrive pour une douleur abdominale
09:09envoyée par SOS Médecins, et on me dit « votre fille a une angine ».
09:11Donc j'ai insisté pour avoir...
09:13Parce que nous sommes en plus experts,
09:15nous, parents d'enfants handicapés,
09:16les experts de la pathologie de notre enfant,
09:18il n'y a pas eu d'écoute ni de la douleur de ma petite-fille,
09:21ni de moi, maman, qui suis l'experte de la pathologie de ma fille.
09:24Et ça a été comme ça trois jours de suite,
09:26jusqu'à ce que le troisième jour soit...
09:28Trois jours de suite aux urgences,
09:30là où elle a tout son dossier.
09:32Et il a fallu que j'aille dans le privé faire une échographie.
09:34On m'a dit « c'est une catastrophe,
09:36il faut absolument tout de suite l'opérer ».
09:38Et là, pareil, tout a dysfonctionné.
09:40C'est-à-dire qu'on a à nouveau attendu un scanner pendant trois heures,
09:42avec une péritonite aiguë.
09:44Ensuite, on ne trouvait pas le chirurgien.
09:47Le chirurgien était introuvable.
09:49Ensuite, les blocs étaient fermés à clé,
09:51parce que c'était un jour de grève, on ne trouvait plus la clé.
09:53Enfin, tout a dysfonctionné, totalement.
09:55L'infirmière, je me souviens,
09:56sous du brancard de ma fille,
09:58qui commençait à, je pense, tomber dans les pommes,
10:01parce qu'elle me dit « maman, je vois tout noir ».
10:03Une indifférence totale.
10:04Enfin, ça, ça a été comme un film en slow motion.
10:06Tout a dysfonctionné.
10:07Et donc, c'est totalement hallucinant.
10:09Et effectivement, quand elle est rentrée au bloc, c'était trop tard.
10:12Alors, c'est une question délicate.
10:14Mais je pense que je vais quand même vous la poser,
10:16parce qu'elle est essentielle pour comprendre certaines réalités.
10:19Est-ce que vous pensez que si Lou n'avait pas été handicapée,
10:22sa prise en charge aurait été différente ?
10:25Sincèrement, je pense que ça a effectivement aggravé la situation.
10:28Déjà, comme vous l'avez très bien dit,
10:30il y a un vrai problème global du système de santé à tous les étages.
10:34Tout le monde souffre.
10:35Les soignants, les médecins, les patients et les enfants qui meurent.
10:37Mais en plus, effectivement, je ne m'explique pas
10:40comment cet enfant qui était en fauteuil roulant,
10:42que cet hôpital a ratifié la charte Romain Jacob,
10:45elle n'est pas été prise en priorité.
10:47Et pire, des enfants arrivaient après.
10:49Alors, je sais qu'il y a certaines pathologies,
10:51mais en réalité, il a été reconnu par l'expertise médicale judiciaire
10:54que dans le même circuit d'attente de ma fille,
10:57d'autres valides sont passés devant elle.
11:01Alors, évidemment, vous avez engagé une procédure contre l'hôpital.
11:04Il a été condamné en première instance.
11:06Donc, c'était une première victoire pour vous.
11:08On peut appeler ça une victoire, mais c'en est une.
11:10Il faut quand même le dire.
11:11Et ils ont fait appel, en dépit d'expertises accablantes.
11:14Ce refus de responsabilité est évidemment impossible à accepter.
11:18Comment vous avez réagi face à cette décision
11:20et qu'est-ce que ça représente pour vous,
11:22en tant que parent, mais aussi en tant que citoyenne ?
11:24Moi, j'étais extrêmement choquée.
11:26J'étais extrêmement choquée.
11:27Je me suis dit, mais comment peut-on s'acharner à ce point-là
11:29sur la mémoire de cet enfant ?
11:31Et surtout, à ne pas tirer les leçons, quand même, qui sont gravissimes.
11:34Perdre un enfant en France aujourd'hui, au XXIe siècle,
11:36faute de soins, c'est inacceptable.
11:38Donc, franchement, c'est totalement incompréhensible.
11:42Je suis choquée, très choquée.
11:43Nous sommes très choqués.
11:44Et qu'est-ce que vous attendez aujourd'hui ?
11:46Alors, évidemment, vous avez refusé cet appel.
11:50Vous êtes toujours en procédure.
11:52Vous attendez quoi de ce processus aujourd'hui,
11:54à la fois, j'ai envie de dire, tant sur le plan personnel,
11:57mais aussi sur le plan pour faire avancer la cause des enfants
12:00dans une situation de handicap ?
12:02Exactement.
12:03Je pense que malheureusement,
12:04comme je n'ai pas été écoutée et que personne ne m'écoute,
12:06je pense que la seule manière de faire entendre ce qui s'est passé,
12:09c'est effectivement la procédure, la condamnation,
12:12pour faire comprendre que c'est absolument inacceptable
12:14de laisser attendre comme ça des enfants en souffrance.
12:18Pour moi, c'est une négligence gravissime.
12:21C'est la reconnaissance de la faute,
12:23la reconnaissance de notre douleur en tant que famille
12:25et surtout la reconnaissance que Lou a souffert
12:28et que c'est totalement inacceptable.
12:31Ce combat, c'est aussi celui...
12:33Ce combat pour Lou, c'est aussi celui de toute une famille.
12:35Vous avez un autre enfant, un mari.
12:38Comment cette famille a résisté ?
12:40Comment vous êtes...
12:42Parce qu'on voit parfois que dans ces épreuves,
12:45les familles éclatent.
12:46Pour vous, ce n'est pas le cas.
12:48Qu'est-ce qui a fait que ce lien est resté, a perduré, s'est amplifié ?
12:52Il y a plusieurs choses.
12:53La première, c'est que j'ai envie de dire, est-ce que j'ai le choix ?
12:56Il y a une partie de moi qui est morte avec ma fille
12:58et qui est sous terre avec elle, ça c'est clair.
13:00Et de l'autre, je pense que...
13:03L'amour, ça peut paraître un peu idiot,
13:06mais c'est vraiment l'amour qu'on avait pour elle
13:09et l'amour qu'elle nous a donné.
13:11Et puis cet exemple.
13:12Pour moi, je me dis que je ne peux pas être en dessous de l'exemple de ma fille.
13:15Elle m'a donné une leçon de vie littérale,
13:17de courage, d'abnégation,
13:19de joie de vivre malgré l'épreuve.
13:21Et je me dis aussi, moi, en tant qu'être humain,
13:23je ne peux pas être en dessous.
13:24Et aussi, je ne supporte pas l'idée
13:26que ça arrive à un autre enfant en France aujourd'hui.
13:28Ce n'est pas possible.
13:29C'est le combat de ma vie.
13:30Alors, ce combat de votre vie,
13:32il passe aussi par les rencontres avec d'autres parents.
13:34Quel conseil, aujourd'hui, vous donneriez aux parents qui nous écoutent,
13:37aux parents d'enfants, mais aussi aux parents d'enfants en situation de handicap,
13:41pour que leur prise en charge soit, évidemment, différente de celle de vous,
13:45pour que cette prise en charge soit digne et qu'elle soit équitable.
13:48Qu'est-ce que vous leur dites ?
13:49En fait, les parents, j'ai envie de dire, ils font le maximum.
13:51Eux, ils sont parfaits.
13:53C'est un tel combat tous les jours.
13:55C'est à la société, en fait, de prendre ses responsabilités.
13:57C'est au gouvernement.
13:58Là, on espère que quand le gouvernement sera enfin installé,
14:01il se passe quelque chose.
14:02C'est à la société de faire quelque chose.
14:04Ça n'est pas aux familles.
14:06La vérité, c'est ça.
14:07C'est où va l'argent ?
14:08Comment sont traités les soignants ?
14:10Comment se fait-il qu'il n'y ait pas,
14:12enfin, la plupart du temps, de la bobologie aux urgences,
14:15alors qu'en réalité, il y a des cas gravissimes ?
14:17Il y a quand même des choses à prendre en compte et à changer.
14:20Ne serait-ce que, par exemple, ce médecin qui trie sur dossier derrière.
14:24Moi, je me dis, il suffirait que toutes les heures,
14:26il sorte cinq minutes, regarder les enfants,
14:29regarder dans la salle d'urgence.
14:31Il aurait vu la pâleur.
14:32Il aurait vu mon enfant plié en deux.
14:34Il aurait dit, elle passe tout de suite.
14:35Donc, il y a des petites choses à faire, d'ailleurs, pas très chères.
14:38Peut-être qu'il faudrait faire une maison médicale
14:40dédiée à la bobologie, justement, pour garder les urgences.
14:43Enfin, il y a des choses à faire, mais ça, évidemment...
14:46Il faut une volonté politique.
14:47Exactement.
14:48Est-ce que vous avez le sentiment que le cas de Lou est un cas plutôt isolé ?
14:53Ou est-ce que vous avez reçu, après la publication du livre,
14:55des témoignages d'autres parents qui ont vécu des situations similaires ?
14:58Oui, bien sûr.
14:59Malheureusement, ça, c'est dramatique.
15:00Oui, il y a effectivement un retard de prise en charge
15:03des personnes avec un handicap, des enfants.
15:05Et malheureusement, Lou n'est absolument pas la seule.
15:07Et donc, c'est dramatique, parce qu'effectivement,
15:09c'est un facteur aggravant.
15:10Et ça, c'est très grave.
15:11Alors, aujourd'hui, on va terminer cet entretien,
15:15cette conversation par cette question.
15:17Est-ce qu'avec votre expérience, avec ce que vous avez vécu,
15:20vous diriez quelles sont les priorités pour une meilleure inclusion
15:24des enfants handicapés dans la société ?
15:26J'ai envie de dire qu'il y a plusieurs axes.
15:28La première, déjà, par rapport aux médecins,
15:30c'est la formation des médecins, des soignants.
15:32Parce qu'on a bien vu, on voit bien qu'il n'y a aucun médecin
15:36aux urgences ou ailleurs qui est vraiment spécialisé
15:39autour du handicap.
15:40Donc, il faut tout réexpliquer, etc.
15:41Donc là, il y a vraiment un sujet de, peut-être, dédié à un pédiatre
15:45qui soit spécialisé autour du handicap, etc.
15:47La deuxième chose, c'est dans les écoles de médecine,
15:50quand même, j'ai été très frappée.
15:51Ça dépend des médecins, bien sûr.
15:52Il y a des médecins absolument extraordinaires.
15:54Je viens d'une famille aussi de médecins,
15:55donc je fais vraiment la part des choses.
15:57Mais l'écoute, l'empathie,
15:59ces choses qui paraissent du bon sens,
16:02mais en réalité, parfois, il n'y en a plus du tout.
16:04Certains médecins, vous voyez, n'écoutent pas l'expertise des parents,
16:07n'écoutent pas la douleur de l'enfant,
16:09donc qui relève de l'empathie.
16:11Donc, je me dis, j'ai une étudiante en médecine
16:14que je connais très bien qui m'expliquait
16:16que les modules en psychologie, il y en a quand même très peu.
16:18Donc, peut-être développer les modules de psychologie
16:20pour la formation des médecins,
16:22développer l'empathie, c'est une compétence,
16:25on n'est pas né avec.
16:26Développer la communication non-violente,
16:27j'ai la gestion du stress pour les soignants.
16:29Tout ça, c'est fondamental.
16:30Donc, ça, c'est en amont.
16:31Ensuite, il y a bien sûr le problème de l'accueil.
16:34Comment expliquer qu'il n'y a pas de rame d'accès
16:37encore chez 10% de médecins,
16:40où on n'a pas accès ?
16:41Pour les dentistes, c'est hyper compliqué.
16:43Donc, il faudrait peut-être effectivement
16:45désengorger les urgences de la bobologie
16:47et faire une maison médicale juste à côté
16:50pour pouvoir arrêter de surnager comme ça.
16:53Donc, il y a plein de choses à faire
16:55et effectivement, s'appuyer sur les associations,
16:57bien entendu, parce qu'on milite,
16:59on essaie de faire changer le regard aussi.
17:02Ça, c'est quelque chose de très important.
17:04Le handicap n'est pas l'incapacité,
17:06mais au contraire, voir ce qui reste.
17:08Et j'ai envie de dire, il n'y a pas d'inclusion.
17:10L'inclusion, pourquoi inclusion ?
17:11C'est le respect de l'être humain.
17:13C'est tout.
17:14Eh bien, on va terminer sur ces mots
17:16et je vous engage évidemment à lire
17:17« Lou, Lou, mes combats pour sauver ma fille »
17:19aux éditions Robert Laffont.
17:20Merci Stéphanie.
17:21Merci infiniment.
17:22Merci Stéphanie.
17:23Je rappelle que votre livre,
17:25en fait Muriel vient de le rappeler,
17:26donc c'est très bien.
17:27C'est publié chez Robert Laffont.
17:28« Lou, mes combats pour sauver ma fille ».
17:30À bientôt Muriel Réus.
17:31À dimanche prochain.