Mercredi 5 février 2025, SMART BOURSE reçoit Jean-Jacques Friedman (Directeur de gestions déléguées, Vega IS) , Samy Chaar (Chef économiste, Lombard Odier) et François Chaulet (Président, Montségur Finance)
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00:003 invités avec nous chaque soir pour décrypter les mouvements de la planète marché.
00:13François Chollet est avec nous, le président de Bonseigur Finance.
00:15Bonsoir François.
00:16Bonsoir.
00:17Samy Char nous accompagne également, chef économiste de Lombardodier.
00:20Bonsoir Samy.
00:21Bonsoir.
00:22Et Jean-Jacques Friedman que nous retrouvons également, directeur de gestion déléguée
00:25de Vega IS.
00:26Bonsoir Jean-Jacques.
00:27Bonsoir Nicolas.
00:28Je suis ravi de vous retrouver messieurs, merci beaucoup d'être là.
00:30Parlons de Trump, évidemment, on est dans la troisième semaine d'exercice du pouvoir
00:35de Donald Trump et je partage un commentaire avec vous Jean-Jacques, puisqu'on en discutait
00:40avant de prendre l'antenne.
00:42C'est vrai qu'on a tous en tête, en tout cas beaucoup de commentateurs, louent d'ailleurs
00:47la capacité transactionnelle d'un Donald Trump, le dealmaker, le roi du deal.
00:53Quand je regarde le bilan des deux premières semaines ou de deux mandats de Trump, je vois
00:59quand même qu'il a cédé très très vite dans la négociation avec le Mexique, avec
01:04le Canada, après avoir utilisé la menace de 25% de tarifs, c'est-à-dire une masse
01:10pour écraser une noisette, et que face à ça, je n'ai pas l'impression que le Canada
01:15et le Mexique aient cédé quoi que ce soit par rapport à l'existant.
01:18On le partageait, je suis tout à fait d'accord.
01:20Un vrai négociateur, ça prend du temps, quand on est dans une telle position de force
01:25et de dealer au bout de 24 heures, je ne trouve pas que c'est un exploit.
01:28Sans rien obtenir.
01:29Les commentaires sont très laudatifs, comme si on était absolument impressionnés que
01:34sa parole allait être performative et que ça allait fonctionner sur tout, alors que
01:37c'est assez dangereux.
01:38Je pense que ça sera quand même plus compliqué sur la Chine et sur l'Europe.
01:42Moi ce qui m'inquiète un peu, c'est qu'une partie des économistes aussi qui entourent
01:47Trump, ou des économistes avec lesquels on peut discuter aux Etats-Unis, ont un peu
01:51la même foi aveugle que nous on ne ressent pas, parce qu'on sait mécaniquement qu'il
01:55n'y a qu'à avoir les gens qui bossent et qui concourent à la croissance, au financement
02:02des Etats-Unis, on ne peut pas les enlever, les déporter, etc.
02:05Donc on pouvait se dire, il peut y avoir une mesure un peu symbolique, mais les gens croient
02:08à des choses qui économiquement ne marchent pas, donc c'est ça qui peut être un peu
02:12dangereux, et qui peut faire que dans une situation consensuelle où plus personne ne
02:16croit à une possible récession, où tout le monde voit une croissance entre deux ou
02:19trois des Etats-Unis, si on fait de grosses bêtises économiques, avec des barrières
02:24tarifaires, avec du doute, voilà, ça peut coincer à un moment donné.
02:28C'est le biais de surconfiance qui mène à la faute de carte.
02:32Oui, et surtout dans un environnement qui va absolument dans son sens, donc c'est ça
02:39un peu le danger possible qu'on voit, oui, tout à fait.
02:43Bon, vous l'avez dit, peut-être que Mexique et Canada, c'était la partie facile quand
02:46même de l'histoire commerciale, Trump n'avait pas beaucoup d'intérêt à appliquer ces
02:51tarifs de 25% pour des économies qui sont aussi imbriquées avec la sienne, sans doute
02:57qu'il y aurait eu un effet inflationniste au moins en première vague assez rapide.
03:03Comment vous voyez le sujet de l'affrontement, de la conflictualité, alors avec la Chine,
03:09avec l'ennemi historique, traditionnel, mais aussi avec l'Europe ?
03:13Alors sur la Chine, les mesures de rétorsion ont été quand même assez douces pour l'instant.
03:17Sur l'Europe, on se demande ce sur quoi ça peut porter, ça peut porter sur la technologie,
03:21ça peut porter sans doute sur les exportations de pétrole de schiste des Etats-Unis, avec
03:27une réduction quand même du lien avec la Russie pour l'Europe, mais on voit par exemple
03:34que sa position est également tournée par rapport à l'Ukraine, avec l'histoire des
03:38terres rares, qui est quand même assez surprenante aussi, donc j'ai l'impression qu'on a toujours
03:43un temps de retard pour essayer de comprendre Trump, alors il n'y a peut-être pas grand-chose
03:46à comprendre d'un filet, et qu'on réinterprète tout à l'aune de ce qu'on vient de voir,
03:50en disant mais si, bon ben, il va dealer, etc., ce n'est pas parce qu'il a dealé là qu'il
03:53ne peut pas y avoir des bêtises qui soient faites d'ici quelques semaines, voilà, donc
03:58oui je crois que ça va être plus compliqué, parfois historiquement, vous parliez tout
04:02à l'heure du comparatif que vous allez faire entre Trump 1 et Trump 2, parfois il est plus
04:05dur avec ses amis qu'il ne l'a été avec ses ennemis, on a vu des ennemis structurels,
04:11on a vu des grosses bêtises par exemple faites Trump sur l'Asie, sur la politique qui entourait
04:17finalement la Chine, donc d'autres bêtises sont possibles par la suite, et donc je suis
04:21un peu étonné aussi du fait qu'on lui porte, non pas une telle intention, mais un sentiment
04:29comme quoi quand on exerce le pouvoir, on attache quelque chose, voilà, comme presque
04:33le roi qui guérissait des écrouelles auparavant, c'est un peu la même chose, c'est la Hype
04:38Trump, voilà, et le pire, prudence sur la Hype Trump, et puis il est entouré aussi,
04:45on ne ressent pas ça en Europe, mais il est entouré de personnes qui ont une foi aveugle
04:49et même d'économistes, et c'est ça qui moi me surprend un peu aux Etats-Unis, ouais.
04:53Sur les tarifs intéressants, parce que dans l'arsenal de rétorsion de Pékin, alors
04:58il y a les tarifs, mais il y a aussi des facteurs non tarifaires, la capacité à limiter
05:05l'exportation des terres rares, c'est quelque chose que Pékin a tout de suite remis en avant,
05:09et dans le même temps, effectivement, on voit la négociation sur le front russo-ukrainien
05:14qui intègre la dimension terres rares ou sécurisation potentielle des terres rares
05:19ukrainiennes.
05:20Ça au moins, par rapport à tout ce qu'on vit à l'heure actuelle, ça aurait quand
05:22même du sens économique.
05:23Oui, oui, tout n'est peut-être pas qu'improvisation non plus, ne nous méprenons pas là-dessus.
05:29Bon, Samy, sur l'entrée en matière de Donald Trump, sur les aspects économiques, est-ce
05:35que ça éclaire la compréhension du personnage, de la stratégie de Trump et de son administration,
05:41est-ce que ça jette plus de troubles qu'autre chose ?
05:44Je crois que ça illustre déjà énormément ce que vont être nos quatre prochaines années,
05:47donc je pense que sur cette table, on se réjouit énormément, c'est un vrai plaisir au quotidien.
05:52La discipline qu'on va avoir, c'est de ne pas trop écouter les paroles et vraiment
05:56d'essayer de se cantonner aux actes, aux actes qu'on peut mesurer et, comme on est
06:00un peu des geeks quand même, de modéliser autant que possible.
06:03Et je comprends très bien ce que dit Jean-Jacques, il a raison par beaucoup d'aspects, mais
06:09enfin la réalité, c'est que les faits, les tarifs vont augmenter et donc quand on
06:12doit modéliser l'impact des tarifs sur la croissance, sur les bénéfices, sur l'inflation,
06:16la réalité, c'est qu'on se retrouve quand même avec un niveau de tarif qui est plus
06:19élevé et franchement, si on regarde par rapport aux soixante dernières années, on
06:24va être pas très très loin du plus haut de ce qu'on ait pu connaître.
06:27Et c'est que le début, effectivement, parce que vous savez qu'ils sont en train de faire
06:30une révision des plans qui devront, qui devra un rapport, qui sera soumis à Trump le 1er
06:37avril, c'est peut-être là aussi que les choses sérieuses vont commencer.
06:40Encore une fois, les déclarations, le bruit, je pense qu'il faut être capable de le mettre
06:44de côté, mais encore une fois, quand on regarde les faits, il y a 10% de tarifs sur
06:49la Chine, ça a des effets sur les devises et évidemment, ça va quand même avoir un
06:55impact économique.
06:56Je crois qu'il faut se concentrer là-dessus et finalement, la situation me semble être
07:00un peu l'exacerbation de ce qu'on a connu jusqu'à maintenant, c'est-à-dire quand même
07:04des conditions pour le reste du monde qui sont pas très très favorables et qui font
07:09que quand même la surperformance économique, financière et bénéficiaire américaine
07:13semble être amenée à se prolonger.
07:15Ça reste pour vous le scénario central aujourd'hui ?
07:18Absolument.
07:19J'entends.
07:20C'est intéressant de remettre les choses, c'est vrai que l'économie américaine, quoi
07:23qu'on en dise, une économie quand même très très ouverte, enfin le marché de la consommation
07:26est quand même très ouvert.
07:27La barrière tarifaire moyenne est de 3%, c'est ça aux Etats-Unis, Samy, aujourd'hui.
07:34Alors évidemment, quand on a fait le calcul en ajoutant les 25% potentiels sur le Mexique,
07:38sur le Canada, 10% sur la Chine, 10% sur l'Europe, on multiplie par 3 quasiment ce chiffre, c'est
07:43ça Samy ?
07:44Exactement.
07:45Et on n'aura peut-être pas 25% sur les Mexicains et les Canadiens, mais enfin on va quand même
07:50avoir un niveau global de tarifs qui va être entre 5 et 10%.
07:53Le pire des scénarios, c'est qu'ils soient entre 10 et 15%, évidemment, mais enfin entre
07:565 et 10%, c'est quand même hyper considérable, il faut se rendre compte.
08:00Et bien sûr que ça a un impact qui n'est pas génial sur l'économie américaine et
08:05peut-être que les économistes qui sont près de Trump ne lui mentionnent pas assez.
08:08Par contre, les économistes qui ne sont pas proches de Trump, eux, sont très vocaux.
08:11Évidemment, on suit tous le Peterson Institute, on voit que quand même, ils mettent en garde
08:16en quelque sorte.
08:17Mais la réalité, c'est qu'on a un cycle économique qui est tiré par la consommation,
08:23on a des cycles du commerce mondial et de production qui sont un peu en dedans, donc
08:27pour la Chine et l'Europe, c'est pas terrible, et les Etats-Unis, ils ont toujours cette
08:30carte-là et continuent d'aller un peu plus vite sur l'autoroute économique que les
08:34Européens et les Chinois.
08:35Comment on absorbe les tarifs dans le contexte actuel ? Est-ce que le consommateur américain
08:44a des marges pour encaisser d'éventuelles hausses de prix nouvelles demain ? Est-ce
08:50que le bilan du consommateur le permet ? Est-ce que les bilans des entreprises, notamment
08:54des marges, permettent d'envisager aussi une partie de l'absorption par les marges des
08:59entreprises ? Alors, soit celles qui importent, soit celles qui exportent aussi, d'ailleurs
09:02qui peuvent avoir un intérêt à prendre aussi un peu sur leurs marges pour rester
09:05compétitive.
09:06Comment tout ça peut se distribuer, Samy ?
09:08C'est toujours un grand jeu de poker mental, les tarifs et le commerce mondial, est-ce
09:11qu'on redistribue beaucoup de choses ? Il va se passer beaucoup de choses.
09:14Le premier facteur d'absorption de ces tarifs, ça va être les taux de change, et on voit
09:18qu'évidemment, le yuan chinois, le dollar canadien, le mexicain, l'euro, évidemment...
09:22Une partie a été faite, déjà.
09:23Une partie a été faite, donc ça, ça va quand même absorber, et c'est peut-être
09:27la partie la plus maligne, quelque part, on ne réagit pas trop à ce qui peut sortir
09:31des Etats-Unis, mais on laisse finalement le taux de change faire une partie du travail.
09:35Et puis, il va y avoir des bifurcations au niveau commercial, on va chercher à contourner
09:40ces tarifs.
09:41Les marges vont absorber une partie, et au final, pour le consommateur américain, il
09:45me semble qu'il va rester quand même en bonne posture, d'autant que, encore une fois, c'est
09:49pas tellement la consommation des biens qui fait aujourd'hui ce cycle, mais plutôt la
09:53consommation des services, qui sont peut-être un peu moins impactés, donc on sent quand
09:57même que la dynamique économique américaine devrait se poursuivre, on n'a pas de très
10:01grande crainte d'avoir un accident au coin de la rue.
10:04– Bon, François Cholet, vos commentaires sur la hype Trump, marque de mois de janvier.
10:09– C'est difficile de compléter, on avait eu une première version de Trump qui nous
10:12avait animé Twitter pendant quelques années, on a une deuxième version qui est en place
10:16depuis, la V2 est en place depuis une vingtaine de jours, et je partage l'avis général,
10:21on n'est pas près de s'ennuyer, je crois qu'on va avoir tous les jours des idées
10:25à commenter, plus ou moins sur Renaud.
10:28La vraie question c'est, est-ce qu'on a un hard Trump, c'est-à-dire celui qui
10:32a été dans les campagnes électorales extrêmement fort, puissant, caricatural, ou est-ce qu'on
10:37va avoir un Trump un peu édulcoré, c'est-à-dire un peu matiné quand même d'un parti républicain
10:44qui n'est pas totalement derrière lui, aligné sur tout ce qu'on vient de dire,
10:49et moi j'ai plutôt tendance à penser qu'il y a des contre-pouvoirs en place pour lui,
10:53malgré le bruit actuel, et que ce n'est pas innocemment que la bataille qui se joue
11:01sur les tarifs est en train de déborder sur les grands intérêts généraux des Etats-Unis
11:06et pas forcément uniquement sur les aspects économiques, donc je ne suis pas aussi pessimiste
11:12que ce qui pourrait être, en tout cas ce qui aurait pu être le cas si on avait pris
11:16au pied de la lettre tout ce qu'il avait dit pendant la campagne électorale qui a
11:19été quand même assez musclée et véhémente.
11:21Ensuite, si on regarde la situation telle qu'elle se présente pour nous, et le signal
11:26des marchés, je partage l'avis sur les parités de change, on a déjà fait des mouvements
11:31assez marqués.
11:32On était à 1,12 en septembre, à partir du moment où le marché a commencé à anticiper
11:37sérieusement la victoire de Trump.
11:38Et on est descendu à 1,01, c'était quand même un point à noter, et vous avez malgré
11:45tout des marchés européens qui viennent de faire en janvier la performance de 2024.
11:51Et donc, on a des clients très heureux, évidemment, mais ça veut dire que la lecture
11:55qu'annoncent les investisseurs aujourd'hui, elle n'est pas aussi négative que ça, alors
11:59que les chiffres de croissance économique au dernier trimestre, que ce soit pour la
12:03France et l'Allemagne, donc l'embarqué de croissance que nous avons pour le premier
12:07trimestre 2025, il n'est absolument pas de nature à nous réjouir plus que cela.
12:12Même l'auto a rebondi un peu.
12:14Oui, je ne vais pas raconter l'histoire du chat mort, vous la connaissez, je ne suis
12:19pas certain que ce soit la fin, mais peut-être qu'on a effectivement poussé le raisonnement
12:24des tarifs un peu trop loin sur ce secteur-là, et que l'Europe va être, pourquoi pas, capable
12:30de se défendre.
12:31N'oublions pas quand même que la bonne nouvelle, c'est qu'on a tous été prévenus, préparés,
12:37et que donc, a priori, on a vu la vitesse de réaction des différents pays attaqués,
12:41que ce soit le Mexique, que ce soit le Canada, que ce soit la Chine, on peut espérer que
12:46L'Europe s'est également préparée avec quelques mesures, je pense même qu'il y a eu quelques
12:51piqueurs de rappel, on a pu le voir sur les aspects logiciels par exemple, où la réglementation
12:56européenne a déjà commencé à marquer quelques banderilles pour montrer qu'il y avait une
13:01présence malgré tout du juridique et de la capacité à mettre quelques grains de sable
13:08dans les rouages trop bien huilés.
13:10Donc ça veut dire que le signal des marchés, et c'est là où je voulais terminer, c'est
13:15un signal quand même de confiance, il n'est pas perturbé à ce stade en tout cas par
13:22tous ces errements et toutes ces vocalises, et je crois que pour l'instant, en tout cas,
13:27c'est de nature plutôt à me rassurer sur la façon dont les investisseurs regardent
13:31cette arrivée de Trump au pouvoir.
13:33Le pire de Trump n'est peut-être pas certain, le meilleur non plus, mais le pire n'est pas
13:37de Trump n'est peut-être pas certain.
13:38Il est traduit par les marchés aujourd'hui.
13:40Et François a dit quelque chose d'intéressant, c'est vrai qu'il va avoir des baisses d'impôts
13:47à négocier, et il n'a pas la majorité qui lui permet non plus de faire ça.
13:50Très fine à la Chambre, la Chambre des représentants, très fine, peut-être plus fine d'ailleurs
13:53que lors de son premier mandat, si je ne dis pas de bêtises.
13:56Absolument, c'est 220, 221 sièges, il a une majorité à 218, donc il ne peut pas faire
14:00ça tout seul.
14:01Non, et une partie du mouvement républicain n'est pas que magas au carré, il y a aussi
14:06des gens qui restent des républicains traditionnels, attentifs à la question des trajectoires
14:10de finances publiques par exemple.
14:12Je reviens sur votre point sur la tech en Europe, c'est ce qu'on disait déjà hier
14:15dans l'émission, qui s'annonce comme étant peut-être la vraie ligne de front entre Donald
14:20Trump et l'Europe.
14:21L'automobile, les spiritueux, c'est les classiques de la littérature trumpienne, mais c'est
14:25un peu 2018-2019 quoi, et c'est vrai qu'aujourd'hui, on sent quand même que la réglementation
14:32européenne du point de vue américain, je le rappelle, les Etats-Unis sont exportateurs
14:36nets de services vers l'Europe, services tech et financiers qui sont les deux gros
14:41poids.
14:42La réglementation européenne, visiblement, est vécue comme une entrave protectionniste
14:47du point de vue américain, et donc c'est sans doute là que la pression va se faire.
14:52Avec déjà des dispositifs, un arsenal européen qui semble être prêt, réfléchi.
14:57Dans le FT, on nous explique qu'il y a une forme de bazooka sur la question des services
15:02pour la tech, pour les services financiers, donc c'est un instrument anti-coercition
15:09qui peut être activé par l'Europe, qui n'a jamais été activé, mais qui permet
15:12de mettre ici et là des réglementations, des barrières, pour freiner éventuellement
15:18la percée des services américains sur notre territoire.
15:21Oui, mais c'est peut-être sur quoi les Etats-Unis vont négocier justement pour empêcher cela.
15:25Une bonne manière d'aborder le sujet côté européen.
15:30Une bonne manière, on est spécialiste en la matière, ce que j'aimerais bien c'est
15:36qu'on soit spécialiste aussi, un peu comme les Chinois ont pu le démontrer, avoir des
15:39solutions techniques aussi et technologiques qui puissent prendre le relais du côté européen.
15:44Parce que si on a que ça à opposer, les Etats-Unis vont vraiment rentrer frontalement
15:49là-dessus, je ne suis pas sûr que ce soit une barrière suffisante pour négocier de
15:53mon côté.
15:54Sur la tech, ce qui est intéressant, c'est peut-être que ce qui s'est passé avec une
15:58alternative, même dans les annonces tout à l'heure, il y avait presque des formes
16:03de contradictions.
16:04On voit qu'on s'interrogeait sur la tech pour se dire, est-ce que des investissements
16:07très importants sont encore nécessaires ? Et là, on voit bien que Google le dit, toujours
16:12c'est nécessaire.
16:13Plus que ce que vous imaginez, messieurs les analystes.
16:16Le doute sur Nvidia, etc., il peut être partiellement levé.
16:19Et de l'autre côté, on voit bien, mais ça ne se voyait pas justement dans le chiffre
16:23d'AMD, qu'il y a le fait d'avoir des solutions qui seront sans doute moins technologiques.
16:29Mais là où il y aura des dizaines de milliers de boîtes qui vont s'engouffrer dans ces
16:32nouvelles technologies comme des sortes d'applicatifs concrets par rapport à l'IA.
16:38Et là, l'Europe comme la Chine a toute sa place derrière.
16:43Il y a encore des wagons qui arrivent.
16:44Oui, c'est pour ça que je pense que par rapport à la…
16:47Le patron de SAP, il était très content de l'arrivée de DeepSeek.
16:49Oui, il y a vraiment les logiciels qui ont fonctionné.
16:52On voit bien qu'il y a toute une rotation de la tech.
16:54Alors, il y a eu des petits secteurs comme les ordinateurs quantiques ou l'énergie
16:57nucléaire.
16:58On voit bien que tout ça déclenche vraiment beaucoup de thématiques possibles et que
17:02la surperformance des 7 magnifiques, elles risquent d'être vraiment contestées parce
17:06qu'elles, elles doivent absolument avoir des CAPEX extrêmement importants.
17:09Et donc, quand on a beaucoup d'argent, on fait parfois des bêtises.
17:11Alors qu'il y a plein d'autres entreprises qui vont profiter à plein de l'émergence
17:15de cette IA.
17:16Et donc, on le voit sur beaucoup de boîtes du Nasdaq qui se réveillent.
17:19Je pense que c'est un point important.
17:21Et l'Europe aussi, plutôt que de parler que de juridique, c'est un des points aussi
17:25sur lequel elle pourrait se concentrer, se focaliser et proposer des alternatives à
17:31la toute puissance américaine sur ces grandes diaphas où là, le match est plié.
17:35Mais je dirais que sur le reste, c'est là où je trouverais plus d'intérêt que de
17:38se concentrer uniquement sur des questions tarifaires, douanières, juridiques qui risquent
17:44d'être percutées par l'administration Trump.
17:46Et cette rotation au sein du Nasdaq, comme vous l'expliquez Jean-Jacques, ça permet
17:52au Nasdaq de rester un indice solide, un indice fort, malgré le fait qu'une Nvidia fonctionne
17:59et fonctionnera peut-être un peu moins bien ou avec un peu moins d'éclats sur le plan
18:03boursier, j'entends ?
18:04Exactement.
18:05Nous, on l'interprète favorablement en disant que c'est une diffusion plus rapide encore
18:08qu'anticipée de l'introduction de l'IA et de tous les modèles qu'il y aura autour
18:13de l'IA.
18:14François, forces et faiblesses du Nasdaq à l'heure de DeepSeek ?
18:18C'est vraiment très intéressant parce qu'on a un monopole sur les batteries dans le secteur
18:21automobile par exemple et on se disait qu'on allait avoir le même monopole sur l'intelligence
18:26artificielle et que donc une grande partie de la valeur ajoutée de l'intelligence artificielle
18:30serait évidemment captée par les grands fournisseurs de cette IA.
18:34Et il s'avère que le signal de DeepSeek est un signal intéressant parce que c'est un
18:37signal qui vient dire à l'ensemble des fabricants de logiciels, vous allez pouvoir trouver des
18:44alternatives pour pouvoir garder une facturation qui vous soit favorable et vous fournir à
18:49des IA compétitives, pas forcément fermées, pas forcément américaines, pas forcément
18:54propriétaires et peut-être même avec des codes transparents et qui ne passeront pas
18:59par les trois grands fournisseurs que vous pouvez imaginer parce que quand vous êtes
19:05client de Microsoft, l'IA ça vous coûte cher, c'est une certitude, le prix par utilisateur
19:10ou le prix à l'allocation des instances c'est très élevé.
19:14Co-pilot, on y va doucement dans les entreprises, on met du co-pilot sur quelques postes pour
19:18quelques personnes etc. mais on n'est pas encore dans l'idée qu'on va équiper toute
19:22l'entreprise avec co-pilot.
19:24Et dans le même temps ça va bientôt être nécessaire puisque si je caricature on va
19:28faire écrire des mails par co-pilot qui seront résumés par co-pilot par la personne qui
19:31les reçoit donc on va arriver à être obligé pour surnager dans les masses d'informations
19:37qui vont nous arriver d'utiliser ces outils de manière systématique.
19:41Mais le point c'est qu'on a parlé d'SAP par exemple en Europe, on a parlé de Dassault
19:45System qui vient de publier de très belles publications d'ailleurs, c'est très rassurant
19:49pour ces acteurs-là qui ne sont pas effectivement dans la course première à l'intelligence
19:54artificielle de se dire que stratégiquement ils ont un avenir qui pourra intégrer ces
19:58technologies sans perdre leur marge, sans perdre leur capacité à trouver de la valeur
20:02auprès de leurs clients et je trouve que ça c'est quelque chose de positif.
20:05Ensuite si on regarde la partie tech, le Nasdaq, alors c'est vrai que j'ai un prix un peu particulier,
20:11j'ai un fonds américain qui n'a pas d'NVIDIA donc c'est un choix un peu volontaire,
20:15ça coûte un peu, ça n'a pas beaucoup de poids derrière, mais bon on a quand même
20:26obtenu de très belles performances, mais il faut le bagarrer un peu plus évidemment,
20:30mais c'est juste de dire que vous avez une co-distribution de valorisation que j'ai
20:33du mal à saisir et donc j'essaie de l'éviter à partir de là, ça ne revient pas en question
20:39les 80% de croissance et les 70% de marge, c'est simplement que je considère que quand
20:43vous avez des clients qui dépensent 80 milliards pour Microsoft, 75 pour Alphabet etc., évidemment
20:49qu'ils vont éviter de laisser 70% de marge nette à NVIDIA et qu'ils vont chercher des
20:54alternatives, vous citiez d'autres fabricants de processeurs, mais évidemment qu'ils sont
20:59en train de développer toutes les sources possibles d'approvisionnement en plus pour
21:03essayer de contourner ces marges qui sont un peu prohibitives pour ce secteur et je
21:08ne suis pas donc certain qu'on ait le temps sur NVIDIA de se rembourser les multiples
21:11actuelles de valorisation, mais ça c'est parce que j'ai vécu Cisco dans les années 2000
21:15et que je commence à avoir moins de cheveux, c'est tout.
21:19Traite de plaisanterie, ce qui est intéressant c'est que cette concentration à l'investissement
21:23elle est incroyable, enfin il faut remettre les ordres de grandeur, on parle d'investissement
21:29en CAPEX de 80 milliards pour Microsoft, de 75 milliards pour Alphabet etc.
21:32Ça va être quasi 300 milliards pour les 3-4 gros hyperscalers cette année et peut-être
21:36qu'avec le chiffre d'Alphabet Google ce sera peut-être un peu plus maintenant.
21:40Et la vieille théorie économique montre que les investissements sont décroissants
21:42en termes de rentabilité et donc on ne peut pas imaginer qu'on obtienne la même rentabilité
21:47sur les années qui viennent par rapport à ce qu'on a pu connaître ou ce qu'on pourrait
21:49connaître pour 2025-2026.
21:51Samy, il y a un sujet macro derrière DeepSeek et ce que représente DeepSeek, c'est-à-dire
21:56l'accélération de la commoditisation de l'IA, ça peut remettre en cause, alors Alphabet
22:02Google nous démontre l'inverse, est-ce que ça peut remettre en cause quand même une
22:05partie du cycle de CAPEX américain très tirée par ces infrastructures IA, est-ce
22:10que ça peut être, ce qu'il y a toujours derrière une valeur aussi importante qu'NVIDIA
22:15dans le portefeuille des ménages américains, il y a aussi la question à un moment de l'effet
22:18richesse qui peut se poser si jamais vraiment il y a un décrochage marqué, enfin quoi
22:23un peu les réflexions macro derrière ?
22:25Alors l'adoption plus massive c'est vraiment un facteur positif, je pense en termes de
22:29productivité, sans faire trop mal aux marges, mieux réparti sur la planète, probablement
22:35en tout cas plus généralisé, et ça c'est une bonne chose, mais c'est vrai que le grand
22:39débat au fond c'est est-ce qu'on arrive à faire bouger la barrière d'innovation,
22:42et ce qu'ils nous disent c'est qu'en gros si on veut aller à la barrière d'innovation,
22:48finalement on peut y aller assez facilement et assez rapidement et avec moins de moyens,
22:51c'est super, et il y aura une adoption plus large et franchement c'est très bien pour
22:54la productivité, mais par contre si on veut être capable et être en mesure de bouger
22:59et de faire avancer cette barrière d'innovation, et bien il faut les mettre ces milliards,
23:02et qui a les moyens de les mettre ? Et bien toujours les mêmes finalement, alors peut-être
23:05que les chinois ont raison et il faut se contenter d'être toujours la première, mais il y a
23:10la frontière d'après.
23:11Mais voilà, le sentiment c'est que quand même si les américains veulent et qu'on
23:15est vraiment dans une compétition au niveau de la technologie, si vous voulez rester premier
23:18à mon avis il faut les faire ces investissements, on ne peut pas constamment être deuxième,
23:23et c'est vrai qu'on comprend qu'elle est quand même difficile à bouger cette barrière
23:26d'innovation.
23:27Pour ça les américains sont importants, c'est pour ça que la consommation des européens
23:32en tant que services technologiques, il faut la maintenir, moi je serais plus dans le
23:36camp d'une Christine Lagarde qui disait écoutez, de toute façon il ne faudra plus s'acheter
23:40américains, il faut s'y faire, vous savez quoi, on a besoin des biens et des services
23:44américains, achetons-les, faisons croire à Trump que c'est grâce à sa négociation,
23:48faisons lui ce cadeau, et quelque part Zelensky est très malin en disant...
23:51C'est ce qu'a fait Claudia Scheinbaum au Mexique et Justin Trudeau au Canada.
23:55Exactement, donc il ne faut pas aller contre, on va lui faire croire que c'est lui qui les
23:59a gagnés, mais d'un autre côté, le LNG américain on en a besoin, la technologie
24:03américaine on en a besoin, et très certainement qu'une partie de la défense américaine on
24:07en a besoin aussi, quitte à en avoir besoin autant faire croire que ce sont des victoires.
24:10Et ce n'est pas contradictoire avec l'idée de développer une souveraineté européenne
24:14un peu plus tough ?
24:15Ça, on l'espère tous, et on aimerait voir les européens mettre des moyens, mais vous
24:20savez quoi, en attendant, on n'a qu'à acheter un américain, et puis le jour où nous on
24:23se réveille et on décide de vraiment développer une forme d'autonomie...
24:27En attendant la volonté politique, en attendant le consensus politique qui permettra...
24:32Mais si on ne fait aucun des deux, c'est-à-dire qu'on n'avance sur aucun front, on va quand
24:37même commencer à prendre beaucoup de retard, et ce retard, sincèrement, je pense qu'on
24:40le sent tous, ça commence à frustrer énormément les acteurs économiques européens, on a
24:45eu beaucoup de sorties de grands patrons, on a une population aussi qui est un peu frustrée,
24:50et donc à un moment, il faut que les autorités européennes, qu'elles soient fiscales ou
24:53monétaires, soient un peu plus focalisées sur la dynamique, et pas uniquement sur l'inflation
24:59et sur les risques.
25:00On va y venir, monétaire, c'est la BCE bien sûr.
25:03François, pardon.
25:04Juste pour rajouter un élément, les investissements dont on parle sont très matériels, c'est-à-dire
25:08qu'on est dans l'usine, c'est de l'infrastructure, c'est puces, énergie, c'est ça l'infrastructure
25:17Effectivement.
25:18Les serveurs.
25:19Si on rate cette génération de serveurs, la seule chose qu'on peut se dire, c'est qu'on
25:23aura peut-être possibilité, dans 2-3 ans avec la loi de Moore, de gagner un cran, mais
25:28objectivement, ils prennent une avance absolument considérable, c'est un train qui est impossible
25:33à suivre à l'échelle des pouvoirs publics, qu'ils soient même européens, c'est-à-dire
25:36que les montants en question et déjà investis, on parle de ce qui est annoncé là, mais on
25:41oublie les 5 dernières années, si on fait le cumul, on n'est pas du tout au niveau,
25:46mais le fait que ce soit extrêmement matériel, peut-être que c'est pour nous aussi une
25:51opportunité de pouvoir d'abord utiliser ce matériel à des coûts raisonnables, et
25:55puis peut-être demain envisager une nouvelle génération qui serait encore plus performante.
25:59On a des boîtes qui, sur la dimension énergétique, efficacité énergétique, sont des contributeurs
26:05très positifs à la création de valeur dans ce thème de l'IA.
26:08Schneider est directement corrélé aujourd'hui à cette idée-là de l'efficience énergétique
26:14nécessaire pour la puissance de calcul qui nous tombe dessus.
26:19Oui, et puis même en amont, vous avez ASML qui est un acteur très européen de ce métier.
26:25Comment on fait de la politique monétaire dans le monde de Trump ?
26:28Sur la BCE, ça a l'air relativement… Bon, c'est consensuel, c'est difficile, mais
26:36c'est vrai qu'on a l'impression qu'elle est beyond the curve et que rien n'empêche
26:40à ce que les taux aillent vers 2, qu'elle annonce d'ailleurs que ce soit les taux
26:43neutres.
26:44La question, c'est est-ce que les Etats-Unis, il n'y a pas aussi peut-être un peu plus
26:46de baisse des taux que ce que le marché anticipe, au moins 2 ?
26:49On anticipe une et demie ?
26:52On anticipe une et demie, ça peut être 2 voire 3.
26:55Pour vous, le risque, c'est plutôt par rapport au pricing de marché, c'est plutôt
26:58qu'il y en ait un peu plus ?
26:59Voilà, qu'il y en ait un peu plus.
27:00Et donc sur l'euro-dollar, on a peut-être touché les bas.
27:03L'idée que Trump ne fera pas tout bien.
27:05Voilà, pas tout bien.
27:06Et sur la BCE, 2, c'est peut-être consensuel, mais une fois qu'on est à 2, peut-être
27:11que le débat se poursuivra et que ça peut aller un peu plus loin.
27:14C'est pour ça que même s'il y a un parcours qui a été fait sur les taux, on s'interroge
27:17ou a été surpondéré sur les taux longs.
27:19Est-ce qu'on revient à la neutralité ou pas ?
27:21C'est les débats qu'on a à l'heure actuelle, en se disant peut-être que voilà, si on
27:25va juste à 2, à un 2,30, 2,40 sur le 10 ans allemand, c'est le prix, peut-être
27:29qu'on peut gratter un peu plus.
27:31Progressivement, on revient quand même à la neutralité sur le long.
27:33C'est un peu les débats qu'on a à l'heure actuelle.
27:35Voilà, l'idée qu'on va vers 2, qu'elle est en retard et qu'elle poussera peut-être
27:39un peu.
27:40Je trouve que la porte, ça serait curieux, mais la porte n'est même pas totalement
27:44fermée pour un 50 centimes en mars, par exemple, dans les surprises possibles.
27:48Elle ne fait jamais de surprises.
27:50Donc on passerait d'un meeting en janvier où le mot 50 n'a même pas été prononcé,
27:55selon Christine Lagarde, ni 5 ni 0, à un meeting où le marché imagine que…
28:02Dans les anticipations, peut-être.
28:04Ça peut faire source de débats.
28:06Ça montre bien le sens, quand même, l'idée.
28:10Pour la Fed, qu'est-ce que ça peut impliquer, effectivement, Samy ? Et puis, pour la Banque
28:15centrale européenne, 2 étant un taux neutre consensuel, mais la question étant de savoir
28:21à partir de quand la BCE aura les arguments suffisants, de son point de vue, pour aller
28:27peut-être en dessous de 2 ?
28:29Je suis un peu simpliste dans mes perspectives, mais je vois l'économie américaine en sur-régime.
28:34Je suis plutôt à l'aise avec le pricing de marché pour la Fed.
28:36Pas besoin d'en faire plus, quoi.
28:38Ça me paraît assez légitime.
28:40Mais on n'est pas non plus à un point de surchauffe où il faudrait se poser la question
28:44de remonter les taux.
28:45On est à 150 sur l'autoroute, on n'est pas à 210.
28:48Donc, effectivement, mon sentiment, c'est qu'il reste un peu au-dessus du taux neutre.
28:524 sera au-dessus du taux neutre, mais je n'ai pas le sentiment que dans un environnement
28:56où on est quand même un petit peu au-dessus de la vitesse de croisière, qu'il faille
29:00baisser les taux bien en dessous.
29:01C'est un peu la vie inverse pour l'Europe.
29:02Je trouve qu'on est dramatiquement en sous-régime.
29:04François le mentionnait, le quatrième trimestre pour une partie de l'Europe était quand même
29:10très fragile.
29:11Et je trouve qu'il y a une inconsistance ici.
29:12Christine Lagarde reconnaît qu'elle est restrictive, que la politique monétaire de la BCE est
29:18restrictive.
29:19Elle reconnaît en même temps que le niveau de croissance est sous le potentiel.
29:22Bon, si on a un niveau de croissance sous le potentiel, il ne faut pas être restrictif,
29:26mais enfin, il ne faut même pas être neutre.
29:28C'est bizarre de parler de neutralité.
29:30On est complètement en sous-régime.
29:32Il faut évidemment être en dessous du taux neutre.
29:34Nous, on voit la BCE à 1,25 cette année.
29:36Donc, c'est vrai que par rapport à...
29:39Je crois que vous battez tout ce que j'ai entendu.
29:41J'entendais 1,50, mais 1,25.
29:43Oui, on voit du coup l'euro-dollar quand même à la priorité.
29:46Ça m'intéresse beaucoup la séquence.
29:48Parce que 2%, je crois que le consensus est formé autour de l'idée d'aller à 2%.
29:54Mais dès la réunion du 6 mars prochain, on va avoir des faucons qui vont demander
29:58à Christine Lagarde justement de ne plus qualifier la politique monétaire comme étant restrictive
30:03parce qu'on sera à quoi ? 2,50 de taux de dépôt avec la baisse de 25% de 6 mars.
30:09Donc, ça veut dire qu'à 2,50 de taux de dépôt, on va déjà, pour certains, se demander
30:14si on n'est pas déjà dans le neutre et si chaque mouvement en dessous de 2,50
30:18ne nous amènerait pas vers quelque chose de stimulatoire.
30:21Je comprends, Grégoire, mais il y a quand même un consensus.
30:23Le consensus et la manière de penser de la BCE, c'est
30:26la trajectoire d'inflation est donnée par la trajectoire des salaires.
30:29Vous savez quoi ? Ça tombe bien.
30:30Ça s'effondre.
30:31Vous avez eu un nouveau data point, un nouveau point
30:35sur cet indicateur avancé des salaires en Europe qui est complètement effondré.
30:40Donc, il nous dit que l'inflation et l'inflation des services
30:42va être quand même assez basse en Europe.
30:43On va tomber à 3 sur l'inflation des services ?
30:46Oui.
30:47C'est au moins ce qu'il faudrait, j'imagine, pour que la BCE soit vraiment confortable.
30:50Exact.
30:51Et je pense qu'on verra des niveaux d'inflation plus bas que les deux
30:53à un moment en Europe aussi cette année.
30:55À côté de ça, je vous rappelle qu'il y a le prix de l'énergie aussi qui rentre dans les négociations.
30:59À côté de ça, on est tous d'accord pour dire qu'on est en croissance en sous-régime.
31:02Je ne sais pas ce qu'il faut, mais il y a une inflation des services tirée par les salaires
31:07qui monte quand même une direction vers le bas.
31:09Il y a une croissance en sous-régime.
31:11On peut parler longtemps du taux neutre, mais c'est typique européen.
31:14On est beaucoup plus concentré sur les risques.
31:17On n'est absolument pas concentré sur la croissance et je trouve que c'est un peu dommage.
31:21On s'inflige nous-mêmes nos propres barrières.
31:23On se met nos propres boulets.
31:25Revenons quand même au cas de l'investissement en Europe.
31:30François, avec potentiellement des surprises sur les taux
31:35ça pourrait peut-être amener de la nourriture supplémentaire au marché boursier.
31:41Grégoire, vous me voyez sur un mea culpa.
31:43J'étais sur le plateau en novembre pour dire que j'étais plutôt optimiste sur la fin d'année.
31:46Le décalage a été d'un mois.
31:48Vous êtes pardonné, François.
31:50On était plutôt constructif et c'est vrai que c'est plutôt rassurant ce qu'on vit aujourd'hui.
31:56D'ailleurs, les mèches de taux disant que ce soit en Europe et aux Etats-Unis,
32:00c'est plutôt rassurant aussi sur les niveaux de valorisation des marchés.
32:03On a une période de publication qui nous empêche peut-être de retrouver les records absolus.
32:07Pourquoi ? Ce n'est pas si bon ?
32:09Parce qu'on a des arbitrages, on a des relativités.
32:11Pour l'instant, les publications sont plutôt bonnes.
32:13En tout cas, côté européen, il n'y a pas de grandes surprises négatives.
32:17Les banques n'étaient pas, en tout cas pour les banques françaises,
32:20un sujet de stress particulier au vu des guidances qui avaient été données
32:24et forcées de constater que le coût du risque ou la croissance des marges
32:29étaient plutôt au rendez-vous.
32:31Donc, il n'y a pas de stress là-dessus.
32:33On a effectivement des secteurs qui sont restés collés en bas.
32:37On parlait de l'automobile tout à l'heure.
32:39Si on prend la consommation, les Pernod Ricard par exemple,
32:44ils subissent évidemment des prises énormes de profit.
32:48C'est assez intéressant.
32:50On a un marché qui est assez sain.
32:52On parlait de Nvidia.
32:54Mais on a des corrections au sein de ce marché qui sont assez fortes.
32:56C'est valable en Europe et aux Etats-Unis
32:58qui ne remettent pas en cause la tendance de fond du marché.
33:01Vous pouvez avoir des consolidations d'Apple de 20%,
33:04de Microsoft de 10% et quasiment de Tesla de 15 ou 20%
33:09sans que pour autant vous ayez des à-coups particuliers
33:11sur les grands indices américains.
33:13Si vous prenez la même chose côté européen,
33:15on a vu des consolidations terribles.
33:17En France, c'était luxe, mais on a vu des consolidations.
33:19On parlait d'ASML ou de Novo par exemple
33:21dans les gros points indiciels européens.
33:23Des baisses de 30-40% l'an dernier.
33:25Très grosses baisses de gros points d'indices.
33:27Et pourtant, on a malgré tout des indices
33:29qui se sont bien comportés
33:31et qui ne sont pas rentrés dans les territoires de correction.
33:33Donc ça veut dire qu'on a un marché
33:35qui a encore cette sérénité-là.
33:37Force est de constater aussi,
33:39on parlait des taux,
33:41mais on a des montagnes de liquidités
33:43dans des dépôts à terme,
33:45dans des monétaires,
33:47dans des livrets plus ou moins à.
33:49Mais globalement,
33:51cet argent-là au fur et à mesure des baisses de taux,
33:53on voit bien, nous les appellent les clients
33:55qui nous appellent.
33:57Qu'est-ce qu'on peut faire ?
33:59Que proposez-vous comme alternative ?
34:01Jusqu'à présent, le livret d'épargne
34:03ou le compte à terme faisait le job
34:05à 4,5 milliards d'euros l'année dernière.
34:07Donc on ne se posait pas la question.
34:09Ça veut dire quand même qu'on va avoir
34:11un décalage significatif de montagne d'épargne
34:13vers des actifs,
34:15pas forcément risqués,
34:17mais petit à petit des actifs.
34:19Oui, on ne passe pas du livret A au bitcoin.
34:21Mais globalement, vous avez une échelle
34:23où les coûts étaient proches de zéro
34:25pour aller chercher un peu de rendement supplémentaire
34:27quitte à prendre un peu de durée,
34:29quitte à prendre un peu de risque de signature
34:31en allant peut-être sur de l'investissement.
34:33Mais cet argent peut aller sur des fonds d'action européennes ?
34:35Parce que pour l'instant,
34:37les flux que les gens mettent
34:39de l'argent dans les actions, oui,
34:41mais ils en mettent dans les actions américaines.
34:43En janvier, ça a changé un peu ?
34:45On a assisté
34:47à des mouvements colossaux
34:49sur les flux,
34:51que ce soit, on peut parler des ETF
34:53ou de la gestion active,
34:55mais la gestion active, c'est de la décollecte
34:57qui aura été tout au long de l'exercice 2024
34:59sur les actions. Il n'y a que la partie
35:01obligataire qui a réussi à tirer son épingle du jeu.
35:03Et il faut aussi constater
35:05que ce sont les
35:07grands vendeurs d'ETF
35:09qui ont collecté
35:11240 milliards d'euros
35:13en actions, ce qui montre quand même
35:15que les courbes vont se croiser très vite
35:17en termes de part d'un marché.
35:19Et une fois qu'on a dit ça, on a assisté
35:21à des phases où les Etats-Unis
35:23ont absorbé, mais comme par enchantement,
35:25la totalité de l'épargne du monde
35:27en l'espace de quelques jours.
35:29On a eu des semaines qui sont sorties
35:31vraiment de tous les radars
35:33de l'historique. Et là,
35:35on a un léger rééquilibrage sur l'Europe
35:37et c'est plutôt rassurant.
35:39La sous-performance de l'Europe n'est pas une fatalité,
35:41Jean-Jacques ? Par moment, non.
35:43Il y a souvent des rattrapages rapides. Après, il y a une vérité
35:45de différentielle de productivité et de croissance.
35:47Là, il y avait un gap historique
35:49de 70% de différence de valorisation
35:51même à secteur constant,
35:53alors que 30 ou 40% paraît le niveau.
35:55Donc, il peut y avoir un rattrapage ponctuel
35:57de l'Europe. Mais pour revenir
35:59sur la qualité de la croissance,
36:01même le jour où il y a eu le décrochage important
36:03sur l'ETEC,
36:05350, je crois, valeurs du S&P 500
36:07ont monté ce jour-là. Et le S&P équipondéré
36:09termine à zéro flat
36:11sur la séance. Ça, c'est un deal assez
36:13consensuel, mais qui fonctionne.
36:15Et d'ailleurs, c'est normal.
36:17Quand vous avez des très grosses
36:19capitalisations qui, elles, sont
36:21en retrait, normalement, ça devrait affecter
36:23plus que ça l'indice
36:25où il y a 30% de l'indice
36:27constitué par ces grosses capitalisations.
36:29Donc, si ça veut dire que ça,
36:31ça n'a pas provoqué, ça a provoqué finalement une consolidation
36:33presque à plat de ces indices, c'est-à-dire que
36:35la cote derrière... Il y a des forces en dessous qui en remontent,
36:37bien sûr. Mais donc, la diversification
36:39va enfin payer. C'est-à-dire que
36:41en 2024,
36:43le plus vous étiez proche des 7
36:45magnifiques, le mieux c'était pour vous.
36:47C'est ce qu'on disait tout à l'heure, c'est qu'il y avait vraiment
36:49une vérité économique derrière ça.
36:51C'est-à-dire qu'il y avait un gap même entre le Nasdaq et
36:53ses valeurs, je crois 40% d'écart de
36:55BPA. Cette année, on va tomber
36:57à 5%. Donc, voilà.
36:59La diffusion est un élément
37:01sain. La dynamique des profits, déjà, se rapproche
37:03de l'indice. Voilà. Donc ça, c'est
37:05quelque chose de favorable. Plus sain.
37:07Il y a un rattrapage clair.
37:09La performance du S&P 500 équipondéré
37:11pour une première fois depuis
37:13de très nombreux trimestres
37:15est trois fois supérieure que la performance
37:17de l'indice avec les pondérations
37:19habituelles. Sur la logique
37:21d'investissement chez Lombard-Audier, quels sont
37:23les messages à ce stade pour
37:25la suite ? Alors, on reste quand même un tout petit peu
37:27méfiant sur l'Europe. C'est vrai que
37:29la baisse de l'euro et
37:31cette croissance bénéficiaire
37:33évidemment peut aider. On avait vu ça un peu l'année
37:35dernière quand même, dans les 5-6
37:37premiers mois de l'année. L'Europe avait fait pas si mal.
37:39Et là, ce qui nous
37:41inquiéterait peut-être après cette bonne performance
37:43européenne, c'est qu'on va quand même avoir
37:45les politiques américaines un peu plus pro-croissance,
37:47les baisses de taxes, qui pourraient ramener un petit peu
37:49de l'intérêt sur les Etats-Unis.
37:51Donc c'est vrai qu'on a un peu de mal à complètement se départir
37:53de notre surpondération américaine.
37:55Et pour l'instant, voilà,
37:57on reste un peu comme ça.
37:59Sur l'échange, je sais qu'il nous reste 30 secondes.
38:01Il faut...
38:03Le discours que vous portez, l'idée
38:05que le scénario reste celui d'un
38:07chemin de croissance naturel pour les Etats-Unis
38:09un peu dynamique,
38:11etc., ça soutient encore le dollar ?
38:13Oui, bien sûr.
38:15Donc différentiel de taux d'intérêt, différentiel de croissance.
38:17C'est vrai qu'on reste sur une idée
38:19d'un euro-dollar autour de la parité.
38:21Et encore une fois, on ne le fait pas en achetant des
38:23forward. On a des actifs derrière.
38:25On a envie d'avoir un peu plus d'actifs américains
38:27encore aujourd'hui.
38:29Pas sans protection, mais voilà,
38:31l'obligataire et les options, ça peut aider.
38:33En 2017, le dollar avait perdu
38:3510%. Première année de
38:37Trump à la Maison Blanche.
38:39Après, sur l'échange, c'est très
38:41compliqué. Je pense qu'il y a une grosse partie du chemin
38:43qui a été fait. Parce que quand le dollar était revenu à parité,
38:45à l'époque, c'est quand le prix
38:47du gaz, du pétrole étaient extrêmement chers.
38:49Il y avait des balances courantes très négatives
38:51pour l'Europe qui ne profite pas à l'heure actuelle.
38:53Donc c'est pour ça que nous, on est un peu
38:55plus haut. Alors après, l'échange, c'est...
38:57Oui, les facteurs peuvent tourner.
38:590,5, mais bon, voilà.
39:01Non, je dirais que la tendance...
39:03Vous ne voyez pas l'euro dollar à 1,20, quoi ?
39:05Non. Ça peut être un 10, un 12,
39:07ça peut... Si on pivote à 0,5...
39:09C'est le niveau de septembre, quoi. Oui, c'est ça.
39:11Et c'est sur le Yen, peut-être, où là, on a
39:13l'impression qu'une tendance serait plus claire que sur le dollar.
39:15Une tendance à la hausse ?
39:17À l'appréciation du Yen.
39:19Eh bien, on suivra ça, évidemment,
39:21au fur et à mesure des hausses de taux de la Banque
39:23du Japon, puisque c'est la Banque centrale
39:25qui montera ses taux encore cette année.
39:27Merci beaucoup, messieurs. Merci d'avoir été les invités
39:29de Planète Marché ce soir. Jean-Jacques Friedman,
39:31Vega IS, Sam Ichard,
39:33Lombard-Rodier, François Cholet, Montségur Finance.