Le magazine Traits Urbains vient de désigner Fadia Karam, directrice générale d'Espaces Ferroviaires, personnalité de l'année dans le cadre du diner des 100 qui font la ville.
Category
🗞
NewsTranscription
00:00On est ravis d'accueillir sur Smartimo la personnalité de l'année pour un direct du dîner des 100 qui font la ville
00:11et la personnalité de l'année c'est Fadia Karam. Bonjour Fadia !
00:14Bonjour !
00:15Vous êtes Directrice Générale d'Espace Ferroviaire et on va voir avec vous ce que vous avez réalisé
00:21non seulement cette année mais au long cours puisque ce sont des réalisations vraiment au long cours.
00:26Est-ce que vous pouvez nous dire un mot de votre parcours pour démarrer ?
00:29Écoutez, je suis déjà libanaise d'origine, je suis arrivée en France il y a maintenant 35 ans
00:38avec une formation d'ingénieur architecte urbaniste et donc les premières dizaines d'années étaient un mixte de travail et de formation
00:48dans les différentes entreprises mais aussi dans les grandes écoles de l'aménagement, la matrice d'ouvrage urbaine
00:56comme l'école des ponts, l'ESSEC sur le management immobilier et donc au travers de tout ça j'ai pu me construire et me faire mon idée
01:04sur ma passion, c'est-à-dire comment je vais approcher la fabrique urbaine dans mes années à venir dans mon métier.
01:14Et ça vous venez d'où cette passion justement pour la ville, pour la fabrique de la ville ?
01:19Déjà je viens d'un pays qui est riche en histoire, en patrimoine mais qui a été meurtri par la guerre et c'est lourd sur un enfant qui grandit
01:30de rêver de la beauté, de rêver d'une ville dans laquelle tout le monde est heureux et qui est dans des situations très difficiles au quotidien
01:42et c'est un combat pour dire qu'on peut faire mieux, qu'on peut faire meilleur, qu'il y a un monde meilleur et cette aspiration vers le meilleur m'a toujours tirée.
01:51C'était un choc quand vous êtes arrivée en France ?
01:53Ah oui, un choc d'une générosité incroyable, déjà je considère que c'est une générosité d'accueillir des jeunes qui viennent d'autres pays sans jugement
02:06parce que quand je suis arrivée, mon diplôme, je ne sais pas ce que ça signifiait pour les gens en France mais moi je savais ce que j'avais fait,
02:12je savais ce que je pouvais donner mais je savais tout ce que j'avais à apprendre.
02:16Et le choc c'était de voir tous les services, la qualité de vie et tout est gratuit, les musées, c'est rien les entrées dans les musées en France
02:28alors que les infrastructures culturelles sont quasi absentes dans des pays en développement ou en sous-développement.
02:36Pourtant le Liban n'est pas un pays très dégradé mais étant en guerre, quand j'avais un livre, j'étais ravie.
02:43Alors là quand je rentrais dans les bibliothèques à Paris, je faisais mes recherches, je fais des thèmes sur l'histoire de Paris, la ceinture, les premières ceintures,
02:54comment ça s'est fait, comment ça s'est effacé dans les bâtiments, dans les grands archives parisiennes.
02:59C'était pour moi des moments d'immersion totale dans une culture et surtout de bonheur de tout ce que je n'ai pas pu déguster dans des années précédentes.
03:09C'est une richesse incroyable, tout est à disponibilité.
03:13C'est vrai qu'on ne s'en rend pas toujours compte et c'est dommage.
03:17C'est ce que je disais parce que moi j'étais dans la joie et je suis toujours dans la joie de dire merci mon Dieu d'avoir eu toute cette chance et cette évolution de mode de vie.
03:32Et quand je vois les gens qui se plaignent et en permanence dire que ce n'est pas suffisant, je me dis qu'ils n'ont pas vu la vie dans toute la facette.
03:40Alors il faut dire, Fadia, que c'est vrai que vous étiez plutôt un bon profil, une bonne élève, très douée en mathématiques.
03:45Vous l'avez dit, également attirée par tout ce qui est art, tout ce qui est poésie.
03:49Et vous avez déclaré il y a un instant sur la scène ici, la beauté apporte aussi de la valeur dans la ville.
03:55Expliquez-nous.
03:56En fait, dans tous les cas, on est dans la période la plus compliquée aujourd'hui.
04:01Dans une situation où on ne sait plus comment placer notre activité de développeur immobilier.
04:08Donc là, je vais dans le deuxième aspect.
04:10Parce qu'on se dit, les investisseurs ne sont pas au rendez-vous.
04:14Les prometteurs ne sont pas au rendez-vous.
04:16Mais on peut quand même remarquer que quand il y a des bâtiments qui sont beaux, ils peuvent passer plus de leur valeur dans le temps.
04:27Quand ils sont intelligemment conçus, c'est-à-dire réversibles, transformables, flexibles et agréables à vivre.
04:37Ils auront toujours une valeur au regard des investisseurs et des acquéreurs potentiels ou utilisateurs.
04:43Donc, c'est une forme de pérennité de valeur qui sera et qui est aujourd'hui recherchée par les investisseurs.
04:50Qui se ressent peut-être sur le centre de Paris.
04:52Parce qu'on a des bâtiments qui sont jolis, qui sont de belles qualités, des belles hauteurs sous plafond qui peuvent muter.
04:59Mais qui sont très anciens.
05:00C'est-à-dire que le bel osmanien, il a déjà plus d'un siècle pratiquement.
05:04Le bel osmanien, il est très intelligemment conçu.
05:07C'est aussi beaucoup d'ingéniosité.
05:11Parce qu'on a la hauteur suffisante pour pouvoir donner mille et une programmations dans le même espace.
05:16C'est des bâtiments qui sont assez compacts autour d'une cour.
05:20Et souvent, il y a cette transversalité qui permet d'assurer la ventilation des locaux.
05:29Donc, ils sont des bâtiments sains.
05:32Ce qui leur manque, c'est peut-être la dimension biodiversité.
05:36Parce que c'est des cours très minérales.
05:38Et c'est là, nous, notre rôle.
05:41C'est de partir de ces modèles, de ce type de bâtiments ou d'îlots urbains très bien conçus, très denses.
05:49Parce que c'est des densités très importantes.
05:51Mais de les fertiliser.
05:53Et donc, moi, je profite aujourd'hui de nos fonciers artificialisés.
05:58Qui sont des fonciers ferroviaires pour les transformer en quartier.
06:02Mais, beaucoup de travail avec la maîtrise d'oeuvre sur le mode d'îlotage d'urbanisation.
06:07Et donc, la compacité, c'est un gain d'économie et d'énergie.
06:12C'est un gain de circulation.
06:14Mais aussi, un moyen de refertiliser le cœur d'îlot.
06:17Donc, c'est peut-être du Haussmannien, mais nouvelle génération.
06:21Où la nature reprend place, mais dans des îlots très compacts, très denses.
06:26Et qu'on assume pleinement.
06:28Parce que quand on fait des îlots compacts, on libère de l'espace public.
06:31Et l'espace public, il est ouvert à tous.
06:34Et donc, plus l'espace public est riche et de qualité, plus il étend toutes les surfaces.
06:40Du logement et des espaces de bureaux.
06:42Donc, c'est une générosité gratuite.
06:44Et un partage de la ville pour tous.
06:46Exactement.
06:47Et c'est de la valeur pour l'immeuble.
06:49Parce que c'est l'adresse de l'immeuble.
06:51C'est son espace d'extension.
06:53C'est la pièce en plus.
06:55Mais la pièce en plus dans laquelle on va chercher de l'interrelationnel.
06:59Et non pas juste de la qualité pour soi.
07:02On a son espace de soi.
07:05Mais on a l'espace où on va partager avec notre quartier, la communauté.
07:09Et c'est ça qui fait l'équilibre de la santé mentale des gens.
07:12Bien sûr, c'est le lien.
07:14C'est échanger.
07:16Nous, dans la conception qu'on s'est donnée de nos projets,
07:22c'est que ça ne soit pas uniquement une performance technique.
07:26C'est plutôt une performance technique, sociétale, sociale.
07:32Donc, trouver toutes les catégories sociales dans nos quartiers.
07:35Mais aussi trouver ces lieux de partage.
07:38Et qu'ils soient de qualité pour que tout le monde puisse en profiter.
07:43Vous avez dit, et on le sait, qu'il y a beaucoup de contraintes
07:45qui passent aujourd'hui sur les aménageurs, l'immobilier d'une manière générale.
07:48Est-ce que cette contrainte économique, on y fait face, elle est là.
07:53Est-ce que vous ne regrettez pas qu'elle soit un peu trop importante aujourd'hui ?
07:57Et qu'elle nous empêche de faire du beau, de faire du durable ?
08:00Sur la qualité et la beauté, je ne lâche jamais.
08:03C'est hors de question.
08:06Ce n'est pas parce qu'on en fait un acharnement.
08:09Comme je le disais, c'est la qualité et la beauté qui garantent de la valeur.
08:15Dans le temps.
08:17Et donc, je ne lâche pas là-dessus.
08:19Par contre, là où on est tous appelés, dans les différents métiers qu'on représente,
08:23c'est d'apporter plus d'ingéniosité et de créativité sur la façon de produire.
08:28Donc, on peut parfois, en s'appuyant sur toutes les innovations de l'industrie et de la ville,
08:36avoir des process de construction plus rapides, plus économes,
08:40plus garants d'économies de ressources aussi,
08:44comme la construction hors site, comme les produits biosourcés, géosourcés,
08:50qui sont aussi des leviers d'innovation dans la construction.
08:54Donc, bien sûr, ce n'est pas nécessairement toujours plus économe,
08:58mais il faut raisonner économie globale, un temps de chantier plus court
09:02et des charges plus réduites pour les utilisateurs,
09:06peut attirer des investisseurs sur un projet,
09:10beaucoup plus que des chantiers qui sont interminables
09:13et qui sont en même temps, au final, des gouffres de consommation énergétique.
09:18Donc, je parle de ce cas-là, mais je voudrais parler aussi de la place de la santé.
09:23On a travaillé et on a mis un collectif à bord avec la Fondation Palladio
09:31pour travailler la place du soin, qui est le service le plus humaniste.
09:37Le soin et donc la santé dans la conception des quartiers,
09:41dans la conception des immeubles.
09:43Donc, ça, c'est de la valeur aussi.
09:45C'est du temps passé et ce n'est peut-être pas nécessairement plus de coûts,
09:48mais c'est de la valeur.
09:49C'est de l'ingénierie finalement.
09:50C'est de l'ingénierie et donc, savoir choisir la bonne maîtrise d'oeuvre,
09:53donner les bonnes attentes pour avoir une qualité d'espace,
09:57un espace sain, c'est-à-dire un espace de ventilation naturelle,
10:01les matériaux qui sont sains.
10:03Donc, tout ça aide à créer de la valeur qui est vendable.
10:07Donc, on sait amplifier la valeur en travaillant sur l'ingénierie industrielle
10:12de la production de la ville,
10:14mais aussi on sait créer de la valeur d'optimisation sur des montages différents
10:21où la valeur foncière impacte les bilans des opérateurs
10:25et comment on peut trouver des montages,
10:28des associations du sol par rapport aux bâtis
10:31ou différer de la valeur dans le temps, de la valeur foncière
10:34pour aider l'acquisition à se faire.
10:36Donc, en tout cas, en tant qu'aménageurs,
10:38aujourd'hui, nous, on travaille main dans la main avec les opérateurs immobiliers.
10:42On prend en compte cette contrainte de marché.
10:45On essaie de trouver ensemble des solutions.
10:48On donne du temps aussi.
10:50On leur donne plus de temps pour trouver leurs solutions.
10:53C'est-à-dire là où on était plutôt dans des contraintes,
10:55on ne vend pas un lot avec une condition de commercialisation.
11:02Là, aujourd'hui, on donne plus de temps pour que les gens fassent leur commercialisation.
11:06Donc, on est facilitateur parce qu'il faut que la fabrique urbaine neuve continue.
11:13Bien sûr, c'est important de renover l'existant,
11:16mais c'est très important de créer de bons bureaux,
11:19de bons logements, d'une nouvelle génération
11:23qui est conçue depuis le début avec un système optimisé et intelligent
11:26pour être plus durable dans le temps.
11:28Voilà, et si ça peut être beau et durable, c'est tant mieux et ça le sera fatalement.
11:31Voilà, et soyons solidaires et unis pour qu'on fasse tous le mouvement
11:36de se réinventer à chaque projet
11:40et d'aller chercher des solutions par la transversalité des métiers
11:44parce que tout seul, on ne fait pas grand-chose.
11:46Ça, c'est sûr.
11:47On en sait un petit peu plus sur les convictions et les valeurs qui guident chaque jour
11:50Fadia Karam en tant que dirigeante et décisionnaire d'Espace Ferroviaire.
11:55Merci Fadia, c'était un plaisir et à très bientôt sur Vismart.
11:59Merci à vous, au revoir.