Tous les dimanches, Aymeric Pourbaix et ses invités abordent l’actualité d’un point de vue spirituel et philosophique dans #EQE
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00:00Bonjour à tous et bienvenue dans Enquête d'Esprit sur CNews et Europe 1.
00:04On la croyait disparue depuis quelques décennies, brocardée par les intellectuels et les savants.
00:10Elle, c'est la piété populaire, c'est-à-dire la foi des petits,
00:13ceux qui vont à Lourdes, qui processionnent, vont en pèlerinage,
00:16ou gardent un chapelet, un crucifix chez eux, voire se signent volontiers.
00:21Mais elle a fait son grand retour sur le devant de la scène à l'occasion d'un colloque à Ajaccio,
00:25le 15 décembre, où le pape est annoncé.
00:29Alors, qu'est-elle vraiment, cette piété du peuple ?
00:32Est-ce une forme de superstition ou au contraire un terrain formidable,
00:36une force pour le renouveau de la France déchristianisée ?
00:39De tout cela, on parle dans cette émission qui est en partenariat avec l'hebdomadaire France Catholique.
00:45Et on se retrouve tout de suite avec nos invités.
00:59Juste avant, Éloi Rochebrune, bonjour.
01:01Les informations religieuses avec vous, on commence par les chrétiens persécutés.
01:05Bonjour Aymeric, bonjour à tous.
01:07Une semaine rouge pour éveiller les consciences sur le sort des chrétiens persécutés.
01:11Plusieurs centaines de bâtiments dans le monde entier ont été illuminés en rouge cette semaine
01:16et les chrétiens se sont réunis lors de veillées de prière,
01:19comme à Versailles, mardi dernier.
01:21Reportage de Jean-Laurent Constantini et Corentin Brio.
01:25Devant l'hôtel de l'église Notre-Dame à Versailles,
01:29des portraits de martyrs tués au nom de leur foi.
01:33Sur les bancs, les fidèles sont venus nombreux leur rendre hommage.
01:37C'est une manière de s'unir à tous les chrétiens qui sont persécutés dans le monde.
01:41On a la chance de pouvoir vivre notre foi au quotidien en France.
01:45C'est une façon de prier pour eux d'une manière un peu plus spéciale.
01:49La veillée de prière a été organisée par l'ONG Aide à l'église en détresse
01:53pour son directeur Benoît de Blanpré.
01:55Il faut sensibiliser l'opinion publique au sort des chrétiens dans le monde.
01:59Nous considérons qu'un chrétien sur sept dans le monde
02:02vit dans un pays où la liberté religieuse n'est pas respectée.
02:06Témoin parmi tant d'autres ce soir-là,
02:08le père Kechichian est un prêtre arménien.
02:11Il veut avertir sur l'effacement du patrimoine chrétien en Arménie,
02:14orchestré par son voisin Azeri après l'annexion du Haut-Karabagh.
02:19Le risque, c'est même nos monuments sacrés
02:22qui sont centenaires, millénaires, sont en train d'être détruits
02:27parce que ce sont des traces des Arméniens.
02:29À l'extérieur, l'église était illuminée en rouge
02:32comme d'autres monuments toute la semaine partout en France.
02:35Notre-Dame à Paris, à Ajaccio ou encore à Bayonne.
02:39Rouge couleur du sang, symbole du sacrifice de ces chrétiens persécutés.
02:44Plus de 2400 actes antichrétiens en Europe en 2023,
02:48ce sont les chiffres de l'Observatoire sur l'intolérance
02:51et la discrimination contre les chrétiens en Europe.
02:54Dans son dernier rapport, on recense 232 attaques
02:57contre des chrétiens dans 35 pays européens.
03:00Elles comprennent le harcèlement, les menaces et la violence physique.
03:04Deux nouveaux saints pour la jeunesse.
03:06Carlo Acutis sera canonisé en avril 2025
03:09et Pierre Giorgio Frassati en juillet de la même année.
03:12C'est le pape François qui l'a annoncé
03:14au cours d'une audience mercredi dernier.
03:16Les deux bienheureux Italiens seront ainsi reconnus
03:19exemples de vertu par l'Eglise catholique.
03:22Les évêques de France ont présenté leur bilan
03:25des états généraux du patrimoine en début de semaine.
03:27L'enquête visait à dresser un état des lieux
03:29pour aider à la préservation du patrimoine.
03:31Et le constat est assez alarmant.
03:33On fait le point avec Adrien Spiteri.
03:38En 2024 en France, on compte 40 000 églises communales,
03:42149 cathédrales et 150 basiliques.
03:45Un patrimoine riche mais menacé.
03:472 666 églises ont été cambriolées en 20 ans,
03:511 476 dégradées et 396 profanées.
03:55Autre constat alarmant, seulement 40% des églises françaises
03:59sont régulièrement ouvertes,
04:01notamment du fait de la déchristianisation,
04:03mais aussi du manque d'entretien et de financement.
04:06Conséquence, plus de 1 600 édifices religieux catholiques
04:09sont fermés toute l'année.
04:11Pour financer les restaurations,
04:13la culture Rachida Dati veut faire payer aux touristes
04:15l'entrée de Notre-Dame de Paris.
04:17De leur côté, les évêques de France
04:19veulent préserver la cathédrale de toute marchandisation.
04:22Mgr Eric Demoulin Beaufort l'a rappelé
04:24lors du discours de clôture des états généraux du patrimoine.
04:27Les églises ont toujours été des lieux ouverts à tous,
04:30aux pauvres, aux personnes blessées par la vie,
04:33à ceux et à celles qui ont besoin de pleurer,
04:35de se reprendre, de trouver un refuge.
04:38En faire payer l'entrée serait trahir leur vocation originelle.
04:41L'église catholique a aussi publié
04:43un guide du mécénat du patrimoine religieux
04:46qu'elle enverra à tous les maires de France
04:48pour les aider à résoudre les problèmes
04:50de financement de leurs églises.
04:52Et pour terminer, J-15,
04:54avant la réouverture de Notre-Dame de Paris,
04:56la Vierge du Pilier est retournée chez elle
04:58le 15 novembre dernier,
05:00après une procession dans les rues de Paris.
05:02Un moment de joie et d'espérance
05:04avant les festivités de la réouverture,
05:06reportage Chloé Tarka et Noemi Hardy.
05:11La Vierge du Pilier, de retour à la maison,
05:13accompagnée de centaines de pèlerins.
05:15La nuit tombée, une bougie à la main,
05:17il marche vers l'île de la Cité,
05:19derrière une réplique de la statue.
05:21Croyant ou non, c'est une belle occasion
05:23de partager un moment de joie.
05:25C'est pas n'importe quelle Vierge Marie,
05:27c'est celle qui va revenir à Notre-Dame
05:29après 5 ans d'absence.
05:31C'est une forme de résurrection,
05:33c'est magnifique.
05:35C'est une paroisse de campagne,
05:37d'aller sur Paris et de voir tous ces gens
05:39cette fois, ces télans vivants.
05:41C'est très sympathique.
05:43La sculpture date du XIVe siècle.
05:45La Vierge Marie porte l'enfant Jésus.
05:47Elle a été retrouvée intacte après l'incendie.
05:49C'est un symbole d'espérance
05:51pour beaucoup de fidèles.
05:53C'est l'esprit de communion avec la foule
05:55et tout le symbole de ramener
05:57la statue de la Vierge à Notre-Dame.
05:59C'est important, ça nous touche.
06:01Je pense que c'est un moment
06:03qu'on ne voulait pas rater.
06:05La procession s'est terminée sur le parvis de Notre-Dame.
06:07C'était le dernier grand événement
06:09avant la réouverture les 7 et 8 décembre prochains.
06:13C'est la fin de votre journal.
06:15Emric, c'est à vous pour la suite d'Enquête d'Esprit.
06:17Merci Éloi.
06:19Piété mariale, piété populaire,
06:21c'est le sujet d'Enquête d'Esprit aujourd'hui
06:23dont nous parlons à l'occasion d'un grand colloque
06:25sur la piété populaire qui aura lieu
06:27à Ajaccio le 15 décembre.
06:29Le pape est attendu de pied ferme.
06:31Abbé Frédéric Constant, bonjour.
06:33Bonjour.
06:35C'est l'heure de ce colloque.
06:37Et puis, plus globalement,
06:39vicaire général du diocèse de Corse,
06:41curé de la cathédrale d'Ajaccio également.
06:43Vous nous parlerez de cette piété populaire
06:45notamment sur cette île de beauté
06:47qu'est la Corse.
06:49Avec nous également l'abbé Mathieu Bévillard.
06:51Bonjour.
06:53Vous êtes vicaire en paroisse à Draguignan,
06:55prêtre, membre des missionnaires
06:57de la miséricorde divine.
06:59Vous organisez notamment dans votre ville
07:01un chemin de croix grandeur nature à Pâques
07:03qui a été atteinte juste avant Pâques.
07:05Vous nous en parlerez.
07:07Avec nous également Alexandre Cayet.
07:09Bonjour.
07:11Merci d'être avec nous.
07:13Vous êtes le fondateur de SOS Calvaire,
07:15une association qui a pour mission
07:17de restaurer les calvaires.
07:19Vous en avez tiré un livre,
07:21Que la croix demeure,
07:23publié chez Salvatore.
07:25Personnellement, vous avez quitté
07:27le monde de la finance pour vous occuper
07:29justement des croix des villages.
07:31Un lien très ancien entre la Corse et Rome.
07:33La piété populaire, la foi des Corses,
07:35ce n'est pas quelque chose de superficiel.
07:37D'abord,
07:39Abbé Constant, pourquoi avoir voulu
07:41ce colloque sur la piété populaire,
07:43particulièrement à Ajaccio ?
07:45C'est le souhait du cardinal Bustillo.
07:47Après toutes ses visites pastorales
07:49sur le territoire de l'île,
07:51il a rencontré
07:53un peuple
07:55très attachant et attaché
07:57à la foi populaire
07:59à travers notre culture
08:01et notre manière de vivre la foi
08:03tous les jours, dans le quotidien.
08:05Au cœur d'une société
08:07si souvent perdue,
08:09recherchant des valeurs,
08:11la foi chrétienne en Corse
08:13persiste, persévère
08:15et elle est encore
08:17un rempart et un phare
08:19pour tous ceux et celles qui vivent
08:21sur cette île.
08:23Alexandre Cayet, dans la perspective
08:25de ce voyage du pape en Corse,
08:27vous avez reçu une commande
08:29de travailler au mobilier.
08:31Racontez-nous, parce qu'on imagine
08:33que ça vous sort un peu des calvaires.
08:35C'est un gros chantier pour vous ?
08:37Tout à fait, oui.
08:39On a été contacté
08:41pour cette commande très particulière.
08:43En fait,
08:45notre métier, c'est de remettre
08:47la croix au centre du village.
08:49J'avais du mal à voir ce que SOS Calvaire
08:51pouvait faire dans ce colloque.
08:53On s'est rendu compte
08:55qu'on était vraiment cette cheville
08:57ouvrière qui permettait
08:59à la piété populaire de prendre corps
09:01dans notre territoire.
09:03J'ai été tenté de dire
09:05qu'on ne pouvait pas le faire,
09:07au vu des délais.
09:09Nos capacités
09:11sont trop restreintes.
09:13Je me suis rappelé que j'étais le chef des fous.
09:15Chez SOS Calvaire, il n'y a que des fous.
09:17La moitié sont des convertis.
09:19C'est un chiffre à peu près constant chez nous.
09:21Vous avez eu la chance d'accueillir Loïc,
09:23vous avez eu la chance d'accueillir
09:25le chef de SOS Calvaire.
09:27En essayant de mobiliser tout le monde,
09:29on s'est rendu compte que c'était possible.
09:31Parce que nos bâtisseurs,
09:33nos bénévoles,
09:35sont héritiers des bâtisseurs de cathédrales.
09:37Les bâtisseurs de cathédrales,
09:39c'est ceux qui travaillent ensemble
09:41sur quelque chose de concret
09:43qui les dépasse et qu'ils ne verront pas mourir.
09:45Ce chantier-là,
09:47on a fait travailler toutes nos antennes de France.
09:49Il y en a à Bordeaux,
09:51il y en a à Lyon pour l'hôtel,
09:53il y en a dans l'Indre
09:55pour le siège papal notamment.
09:57On va concentrer tout ça,
09:59tout le travail de la France
10:01pour ce colloque.
10:03Abbé Bévilard, ce colloque,
10:05il porte sur la piété populaire en Méditerranée.
10:07Vous êtes à Draguignan,
10:09dans le Var, donc vous êtes dans le périmètre.
10:11Mais qu'est-ce qui finalement
10:13unit
10:15toutes ces démonstrations de piété populaire
10:17autour de la Méditerranée ?
10:19De la civilisation greco-latine,
10:21certainement.
10:23C'est tous les peuples latins
10:25avec leur enthousiasme,
10:27leur démonstration,
10:29la manière dont ils s'expriment.
10:31Ce que Gustave Thibon
10:33appelait l'âme du midi,
10:35qui est un savant mélange entre
10:37l'ancien paganisme greco-latin
10:39et le christianisme qui a travaillé.
10:41Et donc ça fait un peuple
10:43démonstratif.
10:45Avec le sang chaud, on vit dehors
10:47et on prie dehors aussi.
10:49Ça ne veut pas dire que la piété populaire ne peut pas exister ailleurs
10:51qu'en Méditerranée, j'imagine, bien sûr.
10:53Toute l'ironie que j'acquais.
10:55À ce colloque sur la piété populaire, il va y avoir des évêques de Sardaigne,
10:57de Sicile, du sud de la France,
10:59effectivement.
11:01Comment, quand même,
11:03nous expliquer qu'il ne s'agit pas de folklore ?
11:05Parce que l'âme du midi, c'est bien joli,
11:07mais en quoi est-elle ancrée dans quelque chose
11:09de profondément spirituel ?
11:11La question s'adresse à l'abbé Constant et à l'abbé Béfiard.
11:13Je pense que
11:15la piété populaire, elle a deux aspects.
11:17C'est une piété personnelle
11:19et qui devient communautaire.
11:21Moi, j'ai des souvenirs
11:23d'enfants dans mon village
11:25où, pendant le mois de mai,
11:27toutes les dames du village,
11:29nos grands-mères, nos tantes,
11:31préparaient
11:33un petit hôtel dans la maison
11:35avec l'image de la Vierge Marie
11:37et pendant 31 jours,
11:39elles alimentaient
11:41la lampe à huile.
11:43Donc ça, c'est une piété
11:45personnelle.
11:47Mais à la fois, il y avait la piété
11:49populaire communautaire.
11:51Elles se retrouvaient dans deux endroits
11:53quasiment à la même heure dans un village
11:55de 250 habitants.
11:57Aujourd'hui, c'est une commune
11:59de 2000 habitants parce que
12:01il y a la constructibilité
12:03et tout y compte.
12:05Mais après, on se
12:07réunissait pour prier
12:09dans une église.
12:11Encore, ce qui est beau, c'est que
12:13quand une procession est dans la rue,
12:15il n'y a personne qui revendique
12:17ou qui est en contradiction.
12:19L'église, par la piété
12:21populaire, par la sagesse
12:23du message qu'elle annonce,
12:25elle essaye, comme vous le disiez,
12:27cher père, de passer du
12:29paganisme au christianisme
12:31mais aussi, après, d'épurer
12:33toutes nos formes de vie
12:35quotidiennes qui peuvent s'éloigner
12:37mais qui peuvent aussi se retrouver.
12:39Je dirais que c'est la foi
12:41qui s'exprime de manière visible
12:43mais c'est la foi d'abord
12:45qui s'exprime. Un peu comme
12:47l'hémorroïde qui vient toucher
12:49le manteau de Jésus.
12:51La femme hémorroïde
12:53qui vient toucher son vêtement
12:55en espérant être guérie.
12:57Il y a cet acte de foi
12:59qui est une démonstration extérieure
13:01aussi de son amour.
13:03Toutes ces manifestations, processions
13:05et autres piétés populaires,
13:07c'est une manifestation concrète
13:09et visible et publique.
13:11Alors, on va bien sûr essayer
13:13de mieux comprendre, cerner cet ensemble
13:15que constitue la piété populaire.
13:17Juste avant, un exemple en Corse
13:19avec les fameuses polyphonies.
13:21Est-ce qu'elles sont une marque de fabrique
13:23de la piété populaire ?
13:25Regardez ce reportage signé Christina Luzzi.
13:29La Corse possède une culture
13:31musicale singulière
13:33où le chant polyphonique occupe une place centrale.
13:35Comme nous l'explique Jean-Baptiste Arène,
13:37membre de la Confrérie Saint-Martin
13:39ou à Patrimonio.
13:41Le chant polyphonique est central en Corse.
13:43Il est représentatif
13:45de ce que nous sommes.
13:47Il porte ce que nous sommes
13:49au plus profond de notre âme,
13:51de notre cœur.
13:53C'est vraiment un chant qui est présent
13:55au niveau sacré, au niveau profane.
13:57On va le retrouver aussi bien dans des messes d'enterrement
13:59que dans des messes de mariage.
14:01On va le retrouver le soir à des comptoirs
14:03dans les balles de village.
14:05Dans les églises,
14:07la structure vocale unique
14:09des chants polyphoniques corse
14:11crée une atmosphère spirituelle profonde
14:13renforçant l'intensité de la piété populaire.
14:15Ce sont des chants qui se chantent
14:17à trois voix.
14:19À zigonde, qui porte le chant,
14:21à darts, l'aigu,
14:23et au ras, le bariton.
14:25À partir de là,
14:27vient se dégager
14:29ce qu'on appelle en Corse
14:31la part des anges.
14:33Cette quatrième voix
14:35qui va apparaître
14:37généralement sous les voûtes des églises.
14:39Mais c'est vrai que
14:41généralement ce sont trois voix
14:43qui vont donner une voix
14:45et une harmonie particulière
14:47surtout dans les églises
14:49où l'acoustique est merveilleuse.
14:53À travers ces voix superposées
14:55et harmonisées,
14:57ces chants sont un moyen unique
14:59de transmettre des valeurs
15:01et pérenniser une tradition musicale
15:03qui continue de résonner
15:05dans le cœur des Corses.
15:09Alors Abbé Constant,
15:11comment expliquer cet enracinement,
15:13cette profondeur de cette tradition-là
15:15du chant corse ?
15:17Comment expliquer
15:19que ça est particulièrement pris
15:21en Corse ?
15:23Jean-Baptiste l'a très bien expliqué.
15:25La polyphonie est à la fois
15:27un lieu de rencontre,
15:29puisqu'on peut chanter aussi bien
15:31autour d'un comptoir,
15:33sur une place de village,
15:35à travers une soirée de mariage.
15:37Et puis elle est aussi
15:39ce chant sacré qui rassemble un peuple
15:41et qui veut intérioriser
15:43sa foi, mais il a rajouté
15:45la voix des anges.
15:47C'est-à-dire que tous ces groupes
15:49polyphoniques, ces confréries
15:51qui chantent...
15:53Une centaine en Corse à peu près.
15:55Trois mille, trois mille deux cents
15:57confrères et consœurs.
15:59Ils essayent par leur talent
16:01et leur volonté
16:03de rassembler
16:05le peuple chrétien, aussi bien
16:07dans les églises que dans la rue,
16:09et de dire l'élan de la foi
16:11qui n'a qu'une mission.
16:13C'est de
16:15réunifier, rassembler
16:17et ne faire qu'un. C'est ce que le cardinal
16:19a compris dès son arrivée
16:21avec son esprit franciscain.
16:23Il a pris son bâton de pèlerin
16:25et qu'est-ce qu'il a fait ? Il est allé à la rencontre
16:27des gens. Et en rencontrant les gens,
16:29il a vu les visages.
16:31Il a rencontré un peuple
16:33qui a faim et soif
16:35et il a donné le meilleur de lui-même
16:37et c'est ce colloque
16:39qui prend racine et qui
16:41anticipe déjà peut-être
16:43la venue d'un grand événement.
16:45Mais alors, il y a quand même une question qui se pose
16:47et elle s'adresse à tous. Est-ce que
16:49cette piété populaire,
16:51ça peut n'être qu'une tradition
16:53un sentiment
16:55d'appartenance, de façade
16:57mais qui ne serait pas forcément
16:59irrigué par une foi
17:01vécue ? Alexandre Caillé,
17:03quand vous recrutez beaucoup de jeunes
17:05à SOS Calvaire, qu'est-ce qui les attire
17:07finalement ? Est-ce que c'est la dimension spirituelle
17:09ou est-ce que c'est effectivement l'aspect
17:11identitaire, qui n'est pas forcément
17:13un gros mot, mais comment vous voyez les choses ?
17:15Je pense qu'il y en a
17:17beaucoup qui viennent pour
17:19la croix chez nous, en tout cas
17:21qui viennent pour le patrimoine,
17:23pour cet espèce d'enracinement qu'il peut y avoir
17:25le fait aussi de la fraternité
17:27pour beaucoup jouer, d'appartenir à un groupe
17:29qui chante les mêmes
17:31chants qu'on peut chanter
17:33au bord d'un comptoir ou sur la place du village
17:35ou dans une église
17:37et il y en a beaucoup qui repartent
17:39avec le Christ parce que
17:41pour moi c'est un savant mélange
17:43de
17:45quatre choses. Le sens du concret
17:47les jeunes ils viennent parce qu'ils ont envie de
17:49concrer, parce que
17:51ils en ont marre d'être dans leur tête
17:53ou d'être dans leur canapé, ils ont besoin de faire
17:55des choses. C'était votre propre
17:57expérience ? Exactement, oui
17:59tout à fait, j'ai quitté Paris
18:01j'ai quitté Paris pour du concret
18:03parce que selon moi
18:05en fait
18:07un frigo plein c'est pas forcément
18:09un cœur plein, donc il faut
18:11parfois sacrifier un peu du confort
18:13pour trouver des amis
18:15le concret est la fraternité
18:17le sentiment d'appartenance
18:19mais en fait tout ça c'est
18:21un premier pas
18:23même une belle idée de son pays
18:25ou des beaux idéaux personnels
18:27c'est toujours un premier pas
18:29et le besoin d'enracinement
18:31est très important dedans
18:33et la quatrième chose c'est la transcendance
18:35nous quand on pose une croix
18:37quand on organise des chantiers
18:39tout le monde est le bienvenu évidemment
18:41qu'il soit croyant ou pas
18:43mais à un moment donné les gens ont travaillé concrètement
18:45ensemble
18:47ont planté quelque chose dans le sol
18:49mais qui s'élève haut dans le ciel
18:51et il faut lever les yeux
18:53et à partir du moment où les gens
18:55les habitants lèvent les yeux
18:57vous avez tout gagné
18:59Oui je dirais qu'en bien même il y aurait
19:01un petit peu de superstition
19:03ou un petit peu de côté
19:05un peu charnel, c'est quand même la foi
19:07qui s'exprime et c'est une sève
19:09vivifiante pour transmettre
19:11des habitudes qui se prennent
19:13de prière, d'affection
19:15envers un saint
19:17un patron, un sanctuaire
19:19un pèlerinage
19:21et là en fait il y a une vraie transmission qui se fait
19:23donc les choses sont à purifier
19:25mais il y a profondément
19:27quelque chose de la foi
19:29qui s'exprime
19:31C'est ce que vous nous avez dit tout à l'heure
19:33la piété populaire c'est faire passer du paganisme
19:35au christianisme
19:37donc finalement c'est un excellent moyen
19:39pour faire ce chemin
19:41C'est un très bon moyen
19:43et un moyen qui s'adresse à tout le monde
19:45quand on dit populaire
19:47c'est démocratique
19:49Oui c'est pas une question de classe sociale
19:51Exactement
19:53Il faut plutôt le prendre dans le sens
19:55démocratique
19:57qui est pour tout le monde
19:59qui est finalement de proximité
20:01une piété de proximité
20:03que chacun a à coeur de s'approprier
20:05et de transmettre
20:07C'est ce que dit le chapelet
20:09grand chef d'entreprise
20:11à côté de quelqu'un de plus simple dans une procession
20:13et on est tous devant le Seigneur
20:15Abbé Constant puis Véronique
20:17Moi je voudrais souligner que
20:19l'aspect piété populaire
20:21touche le coeur des gens
20:23En Corse
20:25on a été aussi un peu malmené
20:27les années 70
20:29mais les fidèles laïcs ils ont persévéré
20:31alors il y a eu un affaiblissement
20:33ensuite Mgr Casanova
20:35les années 86-87
20:37a relancé cet élan
20:39des confréries
20:41mais il y a toujours eu
20:43cette petite flamme
20:45sous le boisseau
20:47et aujourd'hui
20:49on en récolte les fruits
20:51parce que ce que nous faisons
20:53ce que nous vivons en Corse
20:55c'est pas une revendication
20:57on ne descend pas dans la rue pour dire qu'on est chrétien
20:59on va dans la rue
21:01parce qu'on exprime notre foi
21:03aussi avec nos pieds
21:05dans le sens où la foi
21:07prend tout notre être
21:09notre corps et notre esprit
21:11et c'est très important de dire piété
21:13parce que la piété
21:15est un don, un don de l'esprit
21:17qui nous recentre
21:19comme le disait Alexandre
21:21sur le Christ
21:23notre vraie mission c'est d'être disciple de Jésus
21:25et les confréries
21:27à leur rythme
21:29certains pratiquent tous les dimanches
21:31certains s'investissent à fond
21:33d'autres on les voit à quelques rendez-vous de l'année
21:35chacun va à son rythme
21:37on n'est pas là pour juger les uns et les autres
21:39l'essentiel c'est que la foi au Christ
21:41soit ancrée dans nos vies
21:43et dans nos lieux de vie
21:45familier, c'est la dimension proximité
21:47et ce qui a peut-être
21:49embelli
21:51et rassuré la Corse
21:53c'est l'insularité
21:55notre insularité nous a préservé
21:57aussi, on a d'autres difficultés
21:59mais nous a préservé un peu de cette
22:01sécularisation où il fallait
22:03faire la part des choses
22:05la foi, la laïcité, l'engagement
22:07professionnel, il y a des gens qui
22:09le vendredi saint demandent
22:11leur journée de travail pour faire
22:13la Corse, il y a des chemins de croix
22:15des processions, des caténages dans toute la Corse
22:17donc c'est ancré
22:19dans notre vie quotidienne
22:21alors on va marquer une courte pause
22:23publicitaire, on se retrouve tout de suite après
22:25avec notamment effectivement cette question très importante
22:27de la foi, la présence de la foi
22:29dans l'espace public grâce à la piété
22:31populaire, vous restez à notre écoute
22:33on se retrouve tout de suite après
22:35De retour
22:37dans Enquête d'Esprit sur CNews
22:39Europe 1 et en partenariat avec
22:41l'hebdomadaire France Catholique, nous parlons
22:43de la piété populaire à l'occasion d'un
22:45grand colloque le 15 décembre en Corse
22:47et nous sommes avec l'abbé Frédéric
22:49Constant qui est le curé de la cathédrale d'Ajaccio
22:51vicaire général du diocèse
22:53de Corse, l'abbé Mathieu Bévilard
22:55un membre des missionnaires de la miséricorde
22:57divine à Draguignan qui organise
22:59un grand chemin de croix à grandeur nature dans les rues
23:01de la ville, il nous en parlera, Alexandre Cayet
23:03fondateur de SOS Calvaire qui réinstalle
23:05les croix, les calvaires
23:07au centre des villages et puis
23:09Véronique Jacquier bien sûr qui nous parlera
23:11des liens entre la Corse et
23:13Rome qui sont très anciens
23:15alors juste avant quand même
23:17une question qui se pose
23:19vous nous avez dit combien cette
23:21piété populaire était importante
23:23pour aller rejoindre des gens
23:25qui peut-être sont un peu plus éloignés
23:27la piété populaire c'est la vénération des reliques
23:29les médailles, les chapelets, les bougies
23:31etc, mais pour autant
23:33comment expliquer dès lors
23:35qu'on l'ait abandonnée pendant
23:37plusieurs décennies, l'abbé Mathieu Bévilard
23:39c'est vrai qu'elle a été mise au placard
23:41cette piété populaire, aujourd'hui elle ressort au grand jour
23:43elle a continué en Corse
23:45ou dans d'autres lieux, mais
23:47pourquoi l'a-t-on dédaignée ?
23:49Il y a certainement beaucoup de raisons
23:51on peut évoquer
23:53une influence du protestantisme où là les saints
23:55sont mis de côté, on préfère aller
23:57directement à Dieu plutôt que passer par ses saints
23:59donc ça, ça a marqué
24:01d'une certaine manière l'église
24:03il y a aussi la peur
24:05peut-être de paraître dans l'espace
24:07public avec la volonté
24:09d'enfouissement et puis
24:11une piété
24:13plus discrète et personnelle
24:15voilà, je pense que ça, ça a déjà
24:17contribué à écarter
24:19les manifestations et puis
24:21une forme d'intellectualisation aussi
24:23de la foi qui voulait purifier
24:25certainement ces manifestations
24:27de superstition
24:29et qui étaient
24:31considérées comme superstitieuses et donc
24:33mises de côté.
24:35Est-ce qu'on n'a pas le sentiment aussi
24:37que c'est parce qu'on exalte une forme
24:39d'émotion par rapport à la religiosité
24:41et que ça peut dériver
24:43et que c'est pas bien perçu par l'église ?
24:45Non ?
24:47C'est-à-dire qu'on ne peut pas s'en tenir à embrasser sa médaille
24:49à faire une prière devant Saint Trita
24:51et en même temps ne pas aller à la messe
24:53est-ce que c'est pas ça qui agace ? Pardonnez-moi le clergé.
24:55Oui, mais en fait il faut bien comprendre
24:57le sens du mot populaire
24:59quand vous avez un chanteur populaire
25:01ou un acteur populaire, c'est quelqu'un qu'on aime
25:03et donc on lui fait des démonstrations
25:05il y a une affection
25:07et bien la piété populaire montre notre
25:09affection, on est incarné
25:11on a un corps et donc
25:13on montre ostensiblement
25:15et publiquement aussi, c'est le sens de la
25:17vertu de piété, montrer publiquement
25:19notre attachement au Seigneur
25:21lui il a fait des manifestations
25:23extérieures, il a imposé les mains
25:25il a réconforté, il a relevé
25:27et bien nous-mêmes
25:29par des gestes, par des actes, par des pèlerinages
25:31on montre aussi
25:33physiquement notre attachement
25:35Alexandre Cayet
25:37Oui, je pense que la foi c'est aussi
25:39c'est quelque chose qui se transmet
25:41et pour transmettre c'est comme
25:43c'est un peu un champ de gestes
25:45si personne ne fait ces gestes
25:47et bien plus personne ne connaîtra les paroles
25:49et c'est un peu l'idée de
25:51voilà
25:53il faut perpétuer
25:55il faut transmettre tout ça
25:57Abbé Frédéric Constant, est-ce que ce n'est pas le propre du christianisme
25:59justement par cette incarnation
26:01du Christ en premier lieu, bien sûr, que la foi
26:03populaire est, je dirais, véhiculée
26:05Je pense qu'on a une figure
26:07d'un grand saint, saint François d'Assise
26:09c'est lui qui a
26:11finalement
26:13ancré la foi populaire
26:15puisqu'il fera la première crèche
26:17il fera les premiers chemins de croix
26:19les gens ne savaient pas lire
26:21ne savaient pas écrire
26:23et il a voulu, et bien finalement
26:25faire des crèches vivantes et des chemins de croix
26:27vivants pour évangéliser
26:29le peuple
26:31et de siècle en siècle cette transmission
26:33elle est peut-être un peu dans les livres
26:35mais elle se transmet avec
26:37des variantes et des cultures
26:39et l'essentiel c'est
26:41qu'il reste toujours
26:43dans ce moyen de vivre
26:45une essence de la parole de Dieu
26:47comme vous disiez, le mystère de l'incarnation
26:49c'est de toucher
26:51nos cœurs pour élever
26:53notre âme
26:55à la rencontre du Seigneur
26:57j'ai un exemple magnifique
26:59lorsque j'ai été ordonné prêtre
27:01c'était le 4 juin 2001
27:03et bien 20 jours après
27:05là où j'étais en paroisse à Porto Vecchio
27:07on a fait
27:09la première procession
27:11du Saint Sacrement qui n'existait plus
27:13depuis 30 ans
27:15et bien
27:17ça a relancé la vie paroissiale
27:19et au-delà
27:21parce qu'effectivement il y a la question
27:23du caractère public
27:25ça a mis les gens en mouvement
27:27tout le monde a préparé des chapelles dans la rue
27:29la confrérie s'est mise à
27:31réapprendre des chants qui s'étaient
27:33endormis, les touristes
27:35sur les terrasses de café se levaient
27:37pour prendre des photos et un jour j'ai reçu
27:39une petite carte postale
27:41lorsque vous êtes passé
27:43avec ce soleil à la main
27:45j'ai été touché
27:47c'était l'ostensoire
27:49donc il y a des choses qui nous dépassent
27:51mais nous si nous ne sommes pas acteurs
27:53vivants de cette piété
27:55populaire qu'on appelle aujourd'hui aussi
27:57la nouvelle évangélisation
27:59et bien c'est de nous remettre en question
28:01comment prendre des moyens sûrs
28:03concrets et surtout crédibles
28:05dans la confiance
28:07sans revendication
28:09si cela se vit dans l'apaisement
28:11la piété populaire n'est pas un danger
28:13tandis que s'il y a des restrictions
28:15et des interdictions
28:17chacun va dans ce côté
28:19et crée une religiosité
28:21populaire
28:23qui n'est plus une piété populaire
28:25qui n'est pas la même chose
28:27parce que la piété
28:29elle nous élève, la religiosité
28:31elle peut entraîner
28:33des sectarismes
28:35des individualismes
28:37et là c'est le danger
28:39est-ce que vous avez parlé
28:41d'être touché au cœur
28:43quand on vit cette piété populaire
28:45est-ce que vous avez des exemples
28:47de personnes qui ont été transformées
28:49en participant à un chemin de croix
28:51à Dragnyan ou au Catenaccio
28:53en Corse
28:55je crois qu'il y a une histoire d'ailleurs
28:57par rapport à la personne qui porte la croix
28:59qui n'est pas forcément transformée
29:01en vivant ces choses-là
29:03avec beaucoup de ferveur
29:05vous savez quand le soir du jeudi saint
29:07ou du vendredi saint
29:09dans les ruelles des villages
29:11il fait nuit
29:13toutes les fenêtres sont illuminées
29:15que le pénitent
29:17passe en procession
29:19et qu'on entend
29:21cette mélodie
29:23mais
29:25l'évangélisation
29:27elle est là
29:29c'est un peuple qui se laisse entraîner
29:31par le chant
29:33la méditation
29:35et surtout l'engouement de marcher ensemble
29:37moi j'ai compris
29:39on a une procession circulaire
29:41en Corse surtout dans le nord
29:43la granitola
29:45qui tourne autour de la croix ou de la vierge
29:47quand je suis allé en terre sainte
29:49au Saint-Sépulcre
29:51les franciscains
29:53avec un cierge
29:55autour du Saint-Sépulcre
29:57c'est-à-dire ils se resserrent
29:59autour du coeur de la foi
30:01qui n'est pas une idéologie
30:03mais qui pour nous est une personne
30:05et qui est le Christ
30:07Abbé Bézilard c'est votre cas aussi
30:09le chemin de croix à Draguignan
30:11ça fédère, ça rassemble
30:13y compris au-delà des cercles des habitués
30:15bien sûr, tout un chacun
30:17suit cette procession
30:19ou ces événements qu'on organise
30:21ce qui se passe dans le coeur des gens
30:23des contacts, des points
30:25ou des lieux où le Seigneur
30:27peut agir et peut toucher les coeurs
30:29et donc c'est ce qu'on fait
30:31tous les vendredis sains
30:33il y avait traditionnellement cette procession
30:35du chemin de croix dans les rues de Draguignan
30:37il y a quelques années on a décidé
30:39de le matérialiser un peu plus
30:41de le rendre plus vivant
30:43avec des costumes
30:45qui sont vraiment...
30:47extrêmement saisissants
30:49qui sont des costumes d'époque
30:51pour aider aussi les gens
30:53à entrer dans ce mystère
30:55on avance de station en station
30:57et puis les personnes
30:59qui participent
31:01qui sont costumées
31:03jouent les scènes de la Passion
31:05alors sans surjouer bien sûr
31:07on n'est pas dans l'exagération
31:09il n'y a pas la flagellation
31:11où on ne crucifie personne
31:13mais en tout cas il y a quelque chose
31:15de très méditatif
31:17et il y a je dirais
31:19quelque chose de visuel
31:21aussi qui touche
31:23à la fois nos chrétiens qui participent
31:25et puis toutes les personnes autour
31:27qui sont interloquées de voir ça
31:29Alexandre Cayet
31:31c'est la dimension publique parce que quand vous reinstallez
31:33un calvaire au centre du village
31:35vous manifestez la foi
31:37dans l'espace public et en France
31:39on a plutôt tendance à la réserver au domaine privé
31:41on voudrait la réserver au domaine privé
31:43exactement alors que ça fait partie de la vie de la cité
31:45le calvaire il est public, il est en plein milieu du village
31:47et c'est pas pour rien
31:49il se trouve à la croisée de plein de chemins
31:51de chemin personnel, de chemin de vie
31:53de chemin de tout le monde
31:55et ce que vous disiez
31:57il y a les acteurs
31:59de la piété
32:01alors les acteurs peuvent être costumés
32:03comme à Draguignan
32:05ils peuvent être de tout plein de sortes
32:07chez nous ils ont des doudounes
32:09comme celle-ci qui permettent de porter la croix
32:11et il y a aussi les spectateurs
32:13ceux qui prennent en photo pendant les processions
32:15nous on a énormément
32:17de gens qu'on rassemble
32:19à la croisée des chemins
32:21on va largement les drainer
32:23et ces gens-là
32:25souvent c'est les plus costauds
32:27qui se moquaient de nous au début
32:29et ceux-là ils finissent toujours
32:31par pleurer à un moment donné
32:33donc ça marche
32:35ce que dit Alexandre est évangélique
32:37Simon de Sirène
32:39il n'a pas choisi de porter la croix
32:41on réquisitionne cet homme
32:43et il porte la croix
32:45je pense que notre mission de chrétien
32:47c'est tout à fait ça
32:49on doit devenir des pêcheurs d'hommes
32:51alors aujourd'hui il faudrait dire
32:53pêcheurs d'hommes et de femmes
32:55parce que c'est l'humanité
32:57autrement on serait choqué
32:59mais on doit devenir des pêcheurs d'hommes
33:01pas pour les attirer à nous
33:03mais par le témoignage de notre foi
33:05qui puisse découvrir
33:07le vrai visage de Jésus
33:09et ça c'est très important
33:11Jésus nous dit
33:13faites des disciples
33:15il ne nous dit pas
33:17allez vous asseoir dans une église et priez
33:19c'est toute la pédagogie spirituelle
33:21faites des disciples
33:23c'est appeler le monde à la vraie conversion
33:25il y a quand même
33:27une question qui se pose
33:29c'est que ce ne soit pas uniquement
33:31un surgissement spontané
33:33qui vienne du peuple
33:35mais qui suppose un enracinement
33:37c'est le cas en Corse
33:39dont vous nous parlez
33:41Véronique, faites-nous le point
33:43sur ce lien
33:45entre Rome, le Vatican
33:47et la Corse
33:49qui explique aussi cet enracinement de la foi
33:51oui parce que la Corse
33:53ce n'est pas n'importe quelle terre
33:55quand on vous écoute
33:57Abbé Constant au sujet de la piété populaire
33:59et de l'île de beauté
34:01la Corse a été évangélisée
34:03par les évêques d'Afrique du Nord
34:05à la fin du 5ème siècle
34:07et on s'ardaigne à cause des Vandales
34:09à cause de l'invasion des Vandales sur leur terre
34:11mais le lien spécifique
34:13très spécifique entre le Vatican et la Corse
34:15remonte au 8ème siècle
34:17l'île devient un état pontifical
34:19en 754
34:21c'est pas rien, alors comment cela a-t-il été possible
34:23l'histoire est un petit peu compliquée
34:25le pape Étienne II
34:27est en conflit avec les Lombards
34:29qui se sont installés au sud et au nord de Rome
34:31ils s'enfuient de Rome
34:33ils trouvent refuge auprès de Pépin le Bref
34:35le père de Charlemagne
34:37et il va sacrer Pépin le Bref
34:39roi des Francs
34:41et patrice des Romains
34:43il lui donne deux titres
34:45et en lui donnant ces deux titres
34:47il le consacre empereur avant l'heure
34:49il lui donne une légitimité spirituelle
34:51et Pépin le Bref
34:53va être reconnaissant
34:55envers ce pape Étienne II
34:57et il va lui donner plusieurs biens
34:59dont la Corse et la Sardaigne
35:0120 ans plus tard, Charlemagne valide lui aussi
35:03la Corse soit un état pontifical
35:05mais bon, c'est une tutelle
35:07plus spirituelle qu'autre chose
35:09parce qu'en fait, elle est sous l'autorité carolingienne
35:11toujours est-il qu'à partir du XIIe siècle
35:13la Corse va tomber sous la coupe de Gênes
35:15mais le pape, là encore
35:17va garder une tutelle spirituelle
35:19et en parallèle, il y aura de nombreux
35:21corses qui vont vivre à Rome
35:23la Corse va même devenir le grenier
35:25à blé pour Rome
35:27sur leur table, les papes auront
35:29du vin qui vient de Corse
35:31c'est un lien qui est très fort, même économique
35:33et même des liens amicaux
35:35disons les choses
35:37alors la conséquence qu'on garde dans l'histoire
35:39c'est la création de la fameuse garde
35:41papale corse, il n'y a pas eu que les gardes suisses
35:43il y a eu une garde papale corse
35:45au XVIe et XVIIe siècle
35:47des mercenaires corses
35:49ont assuré le maintien de l'ordre
35:51au Vatican
35:53mais aussi dans les états pontificaux
35:55ils étaient directement assujettis au pape
35:57ils étaient environ 600 hommes
35:59alors la garde a été révoquée
36:01en 1664 à la demande de Louis XIV
36:03après un incident entre
36:05les corses et les français à Rome
36:07je ne vais pas rentrer dans le détail
36:09il y a des français qui ont été tués alors qu'ils assuraient
36:11le maintien de l'ambassade de France
36:13ça n'a pas pu du tout à Louis XIV
36:15donc il a dit on arrête avec les corses
36:17enfin toujours est-il plus près de nous
36:19un symbole quand même très très fort
36:21en 1952, la visite en Corse
36:23d'un futur pape pour témoigner
36:25du lien fort
36:27entre la Corse et le Vatican
36:29c'était Mgr Roncalli, le futur Jean XXIII
36:31il était non-s'apostolique
36:33et il est venu spécialement couronner
36:35la Vierge Marie à Bastia
36:37au sanctuaire de la Vasina
36:39merci beaucoup Véronique, Abbé Constant
36:41est-ce que c'est justement cet enracinement à travers les siècles
36:43en Corse de l'église
36:45finalement jusqu'au Vatican qui explique aussi
36:47la force de cette piété populaire pour aujourd'hui
36:49alors je voudrais un peu réajuster
36:51allez-y, je vous en prie
36:53l'histoire de la Corse c'est bien avant
36:55le cinquième siècle
36:57parce qu'aujourd'hui les plus belles plages de Corse
36:59portent les noms des saints de Carthage
37:01Sant'Cipriano
37:03Sant'Agiulia, Sant'Amanza
37:05dans l'extrême sud
37:07c'est les premières communautés chrétiennes chassées
37:09à la fin du deuxième siècle
37:11et qui accosteront sur
37:13ces belles plages, ces côtes
37:15et on a encore aujourd'hui
37:17des sépultures du troisième siècle
37:19et puis beaucoup de baptistères
37:21à travers l'île
37:23à la Canonica
37:25où Sainte Dévote a été martyrisée
37:27et aujourd'hui elle est encore vénérée
37:29en Corse et à Monaco
37:31et puis la venue en 1952
37:33de Mgr Roncalli
37:35qui a marqué la Corse
37:37il a fait le tour de Corse
37:39et sur la place Saint-Nicolas
37:41il a couronné le tableau miraculeux de la Vasine
37:43où il y avait plus de 50 000 personnes
37:45en 1952
37:47après la guerre
37:49et beaucoup parlent encore de cet événement
37:51parce qu'il était accueilli
37:53au nom du Pape
37:55donc la concrétisation finalement
37:57on pourrait s'installer encore
37:59au Vatican les Corses
38:01bon mais ça veut dire aussi
38:03que ça ne naît pas comme ça
38:05par hasard la piété populaire
38:07il faut semer, il faut que l'église saigne
38:09il faut que les pasteurs, Abbé Bévilard
38:11comme vous le disiez tout à l'heure
38:13la piété populaire ça s'enseigne
38:15ça se transmet, ça se purifie aussi
38:17et pour ça il faut des prêtres
38:19qui la prennent en charge ?
38:21oui je pense que la liturgie
38:23d'ailleurs un lieu qui permet de structurer
38:25d'encadrer avec tous les sacramentaux
38:27qui sont donnés par l'église
38:29les bénédictions, les processions
38:31les pèlerinages
38:33les chapelets publics
38:35la liturgie, les pasteurs doivent être
38:37avec le peuple
38:39au même titre que tout le monde pour prier
38:41et puis aussi pour accompagner
38:43pour évangéliser
38:45pour être pédagogue aussi
38:47sur ces démonstrations de foi extérieures
38:49dans votre paroisse vous l'utilisez beaucoup
38:51en dehors du chemin de croix
38:53de la semaine sainte ?
38:55alors en gros à Draguignan il y a une procession par mois
38:57en fonction des fêtes
38:59et des événements
39:01les paroissiens n'en peuvent plus
39:03on les mobilise à tout bout de champ
39:05mais au contraire
39:07c'est un très bon outil
39:09pour rythmer aussi le temps
39:11la liturgie et le temps liturgique
39:13sont là pour nous aider
39:15à grandir
39:17et à faire croître
39:19avec un tuteur notre foi
39:21alors pour les quelques minutes qui nous restent
39:23je voudrais que chacun de vous puissiez vous exprimer
39:25sur en quoi est-ce que cette piété populaire
39:27dont nous parlons est une force
39:29pour faire face à la déchristianisation
39:31parce que c'est aussi une réalité
39:33il faut être clair, y compris en Corse
39:35malheureusement, Alexandre Cayet
39:37quel est votre avis là dessus ?
39:39pour moi la piété populaire
39:41c'est le fait que Issyba
39:43prépare là-haut
39:45nous on le voit vraiment à la croisée des chemins
39:47les gens horizontalement qui se rassemblent
39:49en fait ils lèvent tous le regard
39:51vers le ciel
39:53Sylvain Tesson disait
39:55je l'aime beaucoup
39:57disait que l'espérance
39:59est un outrage
40:01au moment présent
40:03moi je pense que plutôt le présent
40:05est un outrage à l'éternité
40:07et c'est ce qu'on voit à la croisée des chemins
40:09donc en fait toutes ces graines qui sont
40:11semées et ces jaillissements
40:13donc la piété populaire, il faut les enraciner
40:15comme vous disiez
40:17et chez nous on l'enracine par le travail
40:19le travail artisan
40:21il a ça de beau qui permet
40:23à un moment donné d'être seul avec le sol
40:25et je pense que c'est ça, cette bascule
40:27qu'il faut faire entre le jaillissement
40:29être en contact avec la réalité aussi
40:31Abbé Bévilard
40:33force missionnaire pour demain, la piété populaire ?
40:35oui, Saint Jean-Paul II
40:37disait que c'était une ressource extraordinaire
40:39pour l'église
40:41parce qu'elle nous ramène au concret, au réel
40:43aujourd'hui on est dans un monde virtuel
40:45dématérialisé, l'intelligence artificielle
40:47on est tous sur nos écrans
40:49moi le premier
40:51et là c'est une occasion
40:53de retrouver le concret
40:55on le voit
40:57à Draguignan on a relancé les rogations
40:59ces prières pour les temps
41:01les récoltes
41:03pour avoir de la pluie
41:05ou du soleil, demander au Seigneur
41:07implorer le Seigneur
41:09ça nous ramène dans un cycle du temps
41:11dans un cycle de la Terre aussi
41:13et donc c'est très concret, charnel, incarné
41:15et c'est ça qui nous manque
41:17et il y a une grande attente par rapport à ça
41:19Abbé Constant
41:21la piété populaire finalement
41:23en particulier en Corse, c'est une force
41:25c'est aussi une joie
41:27et ça permet, parce qu'il y a beaucoup de problèmes
41:29aussi de pratiques en Corse
41:31il y a les traditions
41:33mais il y a aussi beaucoup de problèmes de déchristianisation
41:35comme ailleurs finalement
41:37en quoi est-ce que la piété populaire est une force ?
41:39Je pense qu'il faut commencer
41:41par le côté positif
41:43on a un retour de la jeunesse
41:45dans nos églises
41:47qu'on n'avait pas il y a 25 ans
41:49À quoi vous l'attribuez ?
41:51Je pense que les jeunes, comme le disait le Père
41:53à travers tous ces réseaux
41:55à travers tout ce que la société
41:57sollicite pour
41:59finalement
42:01imprégner les gens
42:03de combler quelque chose
42:05un vide intérieur
42:07la cloche qui sonne
42:09la porte de l'église qui est ouverte, c'est votre reportage
42:11les églises sont fermées
42:13on ne voit plus personne
42:15je pense qu'il faut reprendre
42:17le problème à l'envers
42:19et de recommencer par le début
42:21ouvrir la porte de l'église
42:23sonner les cloches, chanter
42:25prier, fleurir
42:27un jour un confrère me dit
42:29mais toi c'est que du bibling et du fast
42:31et m'est revenue
42:33la parole de Don Bosco
42:35quand j'ai accompagné un jour
42:37un groupe de la paroisse
42:39à Torino
42:41on lui avait fait le même
42:43reproche, on lui avait dit
42:45mais toi qui es pauvre, qu'est-ce que tu fais
42:47cette grande église à la Vierge
42:49avec tes dorures, tes marbres
42:51et il a répondu
42:53cette église, elle doit devenir
42:55la salle à manger
42:57des riches et des pauvres
42:59les riches auront toujours une salle à manger
43:01les pauvres n'en ont pas
43:03et l'église doit être ce lieu
43:05où chacun doit se nourrir
43:07je crois que c'est ça la piété populaire
43:29pour le 15 décembre ce grand colloque
43:31sur la piété populaire à Ajaccio
43:33où est annoncé le pape et ce sera
43:35évidemment un grand moment
43:37alors peut-être un petit message
43:39notre cardinal
43:41appelle tous les bénévoles et tous les donateurs
43:43à nous aider pour ce grand événement
43:45voilà, merci aussi à Véronique
43:47Jacquier et puis la lecture de
43:49France Catholique bien sûr comme le conseil de la semaine
43:51tout à fait qui fait sa une
43:53sur la fête
43:55de l'Immaculée Conception, la signification
43:57de l'Immaculée Conception, Marie dans le plan de Dieu
43:59c'est à découvrir donc
44:01sur france-catholique.fr
44:03ou sur abonnement
44:05Marie qui est patronne de la Corse
44:07la reine immaculée de la Corse
44:09merci à Tara Souvé et aux équipes
44:11techniques de CNews
44:13à vous d'avoir suivi cette émission
44:15et puis la semaine prochaine dans Enquête d'Esprit nous parlerons justement
44:17de la réouverture de Notre-Dame de Paris
44:19et de sa renaissance spirituelle qui est derrière
44:21bien sûr c'est ça l'enjeu
44:23et puis ne manquez pas également samedi à 11h
44:25dans les belles figures de l'histoire nous parlerons
44:27de la figure de Sainte-Catherine, la bourrée, la voyante
44:29à qui la Vierge-Marie a révélé
44:31cette fameuse médaille miraculeuse
44:33de la rue du Bac à Paris
44:35pour l'instant vous restez à notre écoute, très bonne journée