Mardi 19 novembre 2024, LE JOUR OÙ reçoit Vitalie Taittinger (Président, Champagne Taittinger)
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00:00Bonjour à toutes et à tous, je suis ravie de vous retrouver dans le jour où, pendant
00:20près d'une heure, nous allons échanger avec une figure emblématique du monde du
00:24champagne.
00:25C'est une femme.
00:26Elle incarne à la fois l'élégance et l'innovation.
00:28Préparez-vous pour une rencontre pétillante et inspirante.
00:32Vitalie Tétinger, bonjour.
00:33Bonjour Franny.
00:34Vous êtes à la tête de l'une des maisons de champagne les plus prestigieuses au monde.
00:38Vous avez su perpétuer la tradition familiale tout en apportant une nouvelle énergie à
00:42la maison Tétinger.
00:43Vous avez su marier votre amour de l'art et votre sens des affaires pour faire rayonner
00:48la marque Tétinger à travers le monde.
00:50Sous votre direction, le groupe Tétinger a non seulement consolidé sa réputation
00:53d'excellence, mais a également pris des initiatives audacieuses en matière de développement
00:59durable et de responsabilité sociale.
01:02Plongeons-nous tout de suite dans l'univers de Vitalie Tétinger.
01:06Votre parcours est indissociable de l'histoire de votre famille, de votre père tout d'abord.
01:10Est-ce que vous pouvez nous en parler ?
01:12Fatalement.
01:13En fait, on est de quelque part.
01:14Et en fait, plus que ne naître de mon grand-père et des générations d'avant, j'ai vécu
01:22en Champagne depuis que je suis toute petite, élevée par un père iconoclaste et par une
01:26mère musicienne.
01:27Donc les deux font un cocktail assez détonnant et je suis d'abord baignée dans un monde
01:34de culture, de diversité où cohabitent les histoires des uns et des autres.
01:39La maison est ouverte, mon père travaille dans la maison de Champagne sans en être
01:44le patron.
01:45Donc il ne nous met pas dedans, mais plutôt nous invite un peu à découvrir les bords
01:52du rivage.
01:53Donc il travaille dans la maison de Tétinger, dans la maison de Champagne ?
01:56Exactement.
01:57Dans les alentours de Reims ?
01:59À Reims même.
02:01Mon père, pour refaire en bref son histoire qui est bien plus longue que ça, est un cantre.
02:10Il fait peu d'études.
02:13Il est un personnage fasciné par la peinture, par la poésie, par Arthur Rimbaud.
02:19Ma grand-mère est ardennaise, donc il est vraiment happé par cet univers rimbaldien.
02:24Il travaille très peu, il a la foi.
02:27Il est élevé dans un collège jésuite, c'est un super bon camarade.
02:31Mauvais élève, il devient un pion pendant quelques années.
02:36Il a eu son bac ou pas ?
02:37Il n'a jamais eu son bac et a une merveilleuse histoire, mais peut-être un jour il vous
02:42le dira lui-même.
02:43À un moment, on lui demande de choisir entre avoir son bac pour de mauvaises raisons et
02:50avouer une faute.
02:51Il avoue sa faute et dit lui-même, je ne mérite pas de l'avoir.
02:55Et donc il ne l'a pas, alors que je crois que c'est son deuxième ou troisième passage,
03:00ce qui est quand même à noter.
03:02Mais voilà, souvent ceux qui n'ont pas le bac peuvent faire de très belles carrières
03:06et c'est souvent le cas.
03:08Je suis élevée par mon père qui, à défaut de faire de bonnes études, développe un
03:18chemin personnel assez intéressant et se nourrit de tout et nous transmet aussi les
03:23choses.
03:24Et donc c'est la famille de votre père, la famille Tétinger, on est d'accord.
03:27Et c'est l'époque de votre papa où il y a eu une petite cession, il y a eu une vente
03:32de parts.
03:33Alors, il est un cancre, son premier travail est d'être représentant en commerce dans
03:37la maison Tétinger.
03:38Il y reste.
03:39Son oncle, Claude Tétinger, qui est le président de la maison, petit à petit l'adopte au
03:45sein de cet écosystème champenois, le fait étudier à nouveau.
03:50Il devient directeur et puis ambassadeur de la maison et il s'y attache tout naturellement
03:58et à un moment se décide la vente du groupe familial dont fait partie le Champagne Tétinger.
04:05Le groupe familial, c'est son histoire, mais à la fois celle aussi de son père, Jean
04:11Tétinger, qui a été pendant 20 ans maire de Reims et qui, après ses 20 ans à la mairie,
04:17a développé tout un groupe dans le luxe.
04:20Il s'appelle le groupe du Louvre dont fait partie le Champagne Tétinger et qui fait
04:24travailler plusieurs membres de la famille.
04:26Il y a des hôtels de luxe, le Lutetia, le Criant, le Louvre, le Martinez, etc.
04:36Très jolis hôtels et puis aussi des parfums, Annick Goutal, une très belle cristallerie,
04:42Baccarat et puis aussi un groupe d'hôtellerie très intéressant qui s'appelle Envergure
04:48qui a été créé par mon oncle Franz Tétinger et qui marche incroyablement.
04:53C'est un groupe qui se développe, qui fait partie des fleurons du milieu entrepreneuriat
05:00français.
05:01Et à cette génération, celle de mon père, il décide de vendre dans un contexte qui
05:07est aussi celui de l'arrivée de la haute finance, de LVMH, du groupe Albert Frère.
05:13Donc, il décide de vendre la maison de Champagne Tétinger.
05:15Il décide de vendre tout le groupe dont la maison de Champagne.
05:19Mon père, lui, est heurté dans ces valeurs.
05:23En fait, il considère que c'est un privilège qu'ils ont eu de recevoir un peu en héritage
05:28ce groupe dans lequel ils ont tous travaillé, qu'ils ont tous participé à développer.
05:33Mais il se dit quel dommage de ne pas le transmettre à la prochaine génération.
05:37Et puis, je pense que pour lui, ce groupe est bien plus qu'un gagnepin, qu'un pactole
05:45ou ce que vous voulez.
05:46C'est surtout...
05:47C'est son héritage.
05:48C'est la France, c'est les valeurs françaises, c'est l'excellence, c'est le devoir de
05:54s'accomplir en travaillant.
05:56Et donc, il a du mal à accepter.
05:59Il se bat secrètement pour pouvoir...
06:02Secrètement.
06:03Secrètement.
06:04De toute sa famille.
06:05Secrètement, voilà.
06:06Parce qu'en fait, c'est un personnage fantasque.
06:08Il est merveilleux.
06:09Il est à l'image de son parcours, c'est-à-dire qu'il est surprenant.
06:14Il n'est pas forcément vu comme le personnage le plus rationnel de la famille.
06:19Celui qui serait capable de reprendre le champagne, en particulier.
06:24Et pour autant, c'est peut-être aussi celui pour qui la construction familiale, y compris
06:31l'exemple de son oncle Michel qui est mort pendant la Seconde Guerre mondiale en défendant
06:37un pont à Saint-Parothètre, un polytechnicien à 20 ans.
06:41C'est celui pour qui tout cet héritage et ce devoir de patriotisme compte vraisemblablement.
06:50Comment il a fait pour récupérer justement le groupe ?
06:54Je pense qu'il a déjà eu la foi.
06:57C'est indispensable.
06:58C'est indispensable.
06:59Il faut déjà l'imaginer, il faut avoir la foi et puis il faut être capable de construire
07:04avec les personnes qui vous semblent plus correspondre au projet que vous avez, le parcours
07:12qui va vous permettre de remettre la main sur cette belle entreprise.
07:16Et pour moi, ça a été une immense leçon parce que je pense qu'il aurait pu faire
07:22ça avec des familles très installées, etc.
07:24Il aurait pu faire ça avec des gens très connus, mais il n'aurait pas eu forcément
07:29la liberté après de conduire le projet tel qu'il l'entendait et de garder ce caractère
07:34familial à l'entreprise.
07:36Et non, il a choisi de rencontrer une banque locale, le Crédit Agricole du Nord-Est, qui
07:43avait à sa tête à cette époque un homme qui avait la tête sur les épaules, qui avait
07:49le bon sens paysan et qui avait aussi connu l'époque de mon grand-père quand il était
07:55maire de Reims, qui avait un profond respect pour cette famille et qui, fort de la caution
07:59de mon grand-père, s'est dit, je vais suivre Pierre-Emmanuel qui a un vrai projet pour
08:05ramener l'entreprise en Champagne.
08:08C'est une belle histoire, vous n'en avez jamais fait un livre ?
08:10Mais je pense qu'on pourrait non seulement faire un livre, mais peut-être même un film.
08:14Pourquoi pas, justement.
08:16Vous êtes artiste de formation, qu'avez-vous fait avant de rejoindre la maison Tétinger ?
08:20La famille Tétinger, c'est trois pieds.
08:24Le pied dans l'entreprise, le pied dans l'engagement et le pied dans l'art.
08:28Et moi, depuis que je suis toute petite, le pied dans l'art est peut-être celui qui
08:33me touche le plus.
08:36J'ai fait des études de dessin, des études où on apprend vraiment les techniques de
08:42l'art.
08:43Et puis après, pendant six ans, j'ai travaillé un peu dans ce milieu en tant qu'illustratrice,
08:48et puis un jour, justement, quand il est arrivé cette histoire avec mon père, quand je l'ai
08:55vue aussi un peu souffrir de cette solitude, souffrir de cette perte, je me suis dit, mais
09:01en fait, il y a quand même une partie de mon identité que je ne peux pas totalement
09:05renier, que je n'avais pas tellement réalisée.
09:07Et je me suis dit, c'est dommage, une fois qu'il a réussi, j'ai eu une espèce de
09:13révélation ou de leçon.
09:15Je suis finalement ce que je suis à moins d'importance que ça.
09:18Le jour, le moment où, justement, vous avez eu cette révélation, est-ce que vous vous
09:21souvenez ?
09:22Oui, je m'en souviens très bien.
09:23J'étais dans Paris, parce que j'habitais à Paris à l'époque, et j'avais ma fille
09:29aînée qui était toute jeune.
09:31Et je me souviens, je marchais dans la rue et je réfléchissais à ça.
09:35Et je me suis dit, je sens qu'il faut que je lui demande.
09:43Dans la rue ?
09:44Dans la rue.
09:45Mais je me souviens très bien.
09:46J'étais à côté de Montmartre et je marchais, je réfléchissais.
09:49Je me suis dit, non, il faut quand même que je lui demande.
09:51Et je lui ai demandé de venir travailler avec moi.
09:53Et qu'est-ce qu'il a dit ?
09:54Et à l'époque, la tête sur les épaules, il m'a dit non, parce qu'en fait, pour
10:00plein de raisons.
10:01Mais un, tu n'es pas celle, tu n'as pas fait forcément des études qui…
10:05Commerce.
10:06Commerce, etc.
10:07Ou bain, etc.
10:08Il m'a dit, ce n'est pas évident.
10:11Et puis lui, en fait, venait de remonter cette histoire.
10:14Et je pense qu'il pouvait craindre aussi le fait d'être fragilisé par un potentiel
10:19échec avec sa fille qui vient travailler, avec qui ça ne pourrait pas fonctionner.
10:23Vous avez des frères et soeurs.
10:24Vous êtes trois enfants ?
10:25Oui.
10:26Trois enfants.
10:27Et ils travaillent tous dans l'entreprise familiale ?
10:28Mon frère travaillait aussi dans l'entreprise familiale.
10:31Et justement, mon frère a fait des études de commerce.
10:34Et puis, je pense que la construction humaine est faite comme ça, c'était plus simple.
10:39Quand même, mon père m'a dit non.
10:41Il a insisté.
10:42Il m'a dit, écoute, je te prends en tant que consultante.
10:45Et donc, voilà.
10:47C'est comme ça que j'ai commencé.
10:49Et mon frère nous a rejoint très peu de temps après.
10:51Lui, il a intégré l'entreprise.
10:53Mais bon, c'était bien.
10:54Il s'est plus jeune que vous ?
10:55Clovis est plus jeune que vous ?
10:56Un an de plus vieux que moi.
10:57Un an de plus vieux que vous.
10:58Donc, il a intégré après vous l'entreprise.
10:59Oh, bain, pas longtemps.
11:00Mais il l'a intégré.
11:02D'accord.
11:03Donc, le jour où vous avez pris cette décision de rejoindre l'entreprise familiale,
11:07vous marchiez à Paris et d'un coup, vous vous êtes dit, tiens, il faut que je rejoigne cette entreprise.
11:11Il faut que je rejoigne notre entreprise.
11:12Je veux me battre pour elle.
11:14Mais je veux apprendre.
11:15Je ne suis pas dit, je veux me battre pour l'entreprise.
11:17Mais je me suis dit, si mon père reprend l'entreprise parce qu'il veut conserver...
11:21Il s'est battu.
11:22Il s'est battu.
11:23Il a dit, je veux conserver le caractère familial de cette entreprise.
11:27Je me suis dit, mais ça n'a pas de sens si personne derrière ne vient.
11:31À l'époque, mon frère n'avait pas encore déclaré quoi que ce soit.
11:35Et en fait, je me suis dit, voilà, c'est tout.
11:39Je peux y aller.
11:40Et quoi qu'il en soit, il n'est jamais trop tôt pour apprendre.
11:43Et j'apprendrai avec mon père.
11:44Et voilà.
11:45Ça, c'est toutes vos motivations.
11:46Exactement.
11:47Ça, c'est toutes vos motivations.
11:48Et ça se résume à ça.
11:49Exactement.
11:50Mais pourquoi vos parents choisissent le prénom Vitalie qui n'est pas un prénom courant finalement ?
11:54Eh bien, parce que justement, ma grand-mère, Corine Deville, est une Ardennaise.
11:59Et qu'elle a longtemps habité à Charleville-Mézières.
12:04Charleville-Mézières, c'est la ville d'Arthur Rimbaud.
12:07Et la mère et la sœur d'Arthur Rimbaud s'appelaient Vitalie.
12:11Très jolie.
12:12Et donc, quand je suis née, mon père a écouté avec beaucoup de sagesse le conseil de sa mère,
12:18ce qui est rarement le cas, qui lui a dit, pourquoi tu ne l'appellerais pas Vitalie ?
12:22Et donc, je me suis appelée Vitalie.
12:24Ce dont je lui suis extrêmement reconnaissante.
12:27C'est rare.
12:28C'est un prénom rare.
12:29C'est rare et en même temps, c'est classique.
12:30Eh oui, c'est vrai.
12:31À quel moment vous avez su que vous prendriez la suite de votre père ?
12:34Pas avant le jour où ça s'est fait.
12:37Parce qu'en fait, ça n'a jamais été vraiment le but.
12:40Mon but, c'était d'être là, de comprendre et d'être capable.
12:43Vous étiez consultante au service marketing pendant combien de temps ?
12:46Pendant deux ans.
12:47Et puis après, au bout de six mois, j'étais pleinement happée par l'avis de l'entreprise.
12:52Je suis devenue ambassadrice de cette entreprise.
12:57J'ai été sur les campagnes publicitaires.
12:59Donc en fait, c'était presque une évidence.
13:02Avec du recul, je me suis dit que mon père avait eu raison.
13:05Parce que quelque part, il avait raison d'avoir peur.
13:08Ce n'est pas facile d'intégrer un enfant.
13:10Si jamais ça se passe mal, vous avez toujours la peur de vous fâcher avec lui.
13:15Et la deuxième chose, c'est que rien n'est garanti.
13:18Vous ne savez pas si cet enfant aura envie de rester.
13:21Et finalement, je suis arrivée avec beaucoup de liberté dans cette entreprise
13:25par une porte qui était une porte très naturelle pour moi.
13:29J'ai rencontré tout le monde.
13:31J'ai travaillé avec tous les services.
13:33Et petit à petit, j'ai fait mon chemin comme une petite souris.
13:37Et comment on se prépare à devenir présidente d'une maison de champagne comme Tétingy ?
13:41Ça ne doit pas être évident.
13:43En fait, ce n'est pas une préparation.
13:46Avant de devenir présidente, j'ai passé 15 ans dans l'entreprise.
13:50Vous étiez d'abord consultante, après ambassadrice.
13:53En fait, j'étais ambassadrice toute ma vie dans l'entreprise.
13:57Ce qui est normal.
13:59Mais j'étais consultante.
14:01Ensuite, j'étais au développement marketing.
14:04Ensuite, j'étais directrice de création.
14:07Ensuite, je suis devenue directrice marketing.
14:10Ensuite, je suis devenue directrice marketing et communication.
14:14Et puis en 2020, je suis devenue présidente de la maison.
14:17Comment ça se passe ?
14:19Tout au long de votre carrière, pendant ces 15 ans,
14:22vous êtes préparée à prendre cette succession ?
14:24Non, pas du tout, parce que mon frère est là.
14:26Et donc, comment ça s'est déroulé ?
14:28En fait, la question ne s'est pas tellement posée jusqu'au moment où mon père nous a dit
14:32« Dans un an, je vais partir. »
14:34Et il ne nous a pas dit « ça sera un tel ou un tel. »
14:37Il vous l'a dit comment ?
14:39Il nous a dit « Sachez que dans un an, je vais partir. Il faut qu'on prépare cette succession. »
14:44Et au lieu de dire « ça sera un tel ou un tel. »
14:47Vous étiez en réunion ?
14:49On était en Codire le lundi matin.
14:52Et puis voilà, les choses sont faites.
14:54On s'est toujours beaucoup parlé.
14:56Et voilà, c'était naturel en fait.
14:59C'était assez naturel.
15:01Et par contre, ce qu'on a fait, c'est que comme il n'a rien dit,
15:05on l'a pris comme un projet.
15:07On s'est dit « On a un an pour construire le projet de la nouvelle gouvernance. »
15:11Et ça, c'était assez génial.
15:13Parce qu'en fait, au lieu de se dire « c'est l'un ou l'autre. »
15:16Et fatalement de se dire « Oui, mais si, mais ça. »
15:19Et même d'avoir peur.
15:21En fait, on s'est demandé quel était le projet des 30 futures années.
15:25Et quel pourrait être notre plaisir à chacun dans ce projet.
15:28Vous et Clovis avez monté deux projets différents ?
15:30Non, pas du tout.
15:31On a travaillé déjà avec tout le Codire.
15:33Sachant que mon père, quand il est arrivé, a monté une équipe de direction hyper jeune.
15:38Donc, on est 5 à avoir vécu ensemble au sein de l'entreprise pendant plus de 15 ans à cette époque-là.
15:45Génial.
15:46Donc, on est frères et sœurs.
15:47En fait, je ne suis pas seule avec mon frère au sein d'une équipe.
15:50Nous sommes 5 frères et sœurs.
15:52Et donc, on a beaucoup parlé ensemble de ce qu'était la présidence,
15:55de ce que ça représentait, de ce que ça imposait,
15:58de ce que nous étions, de ce que nous avions envie de vivre,
16:01de ce qui nous rendrait heureux.
16:03Parce que souvent, les gens prennent ça comme un privilège.
16:06Être président d'une maison ou être dans une maison familiale,
16:12je ne me dis pas que je vais aller travailler sur une île pendant 30 ans.
16:17Je suis un peu assignée à résidence.
16:20Vous travaillez beaucoup finalement.
16:21Je travaille beaucoup.
16:22Et donc, l'enjeu, c'est le plaisir.
16:24C'est comment, dans la vie, je vais prendre du plaisir à faire ce que je fais en ne me contrariant pas.
16:30Pas totalement.
16:31En apportant à l'entreprise ce que je suis capable de lui apporter.
16:35Vous arrivez à lier vie familiale et vie professionnelle.
16:37Heureusement.
16:38Parce que si c'est un projet de transmission et que je n'ai plus de vie familiale,
16:41je suis dans un non-sens.
16:43Donc voilà.
16:44Tout à fait.
16:45Et donc, au bout d'un an, vous présentez le projet à votre papa.
16:48Et là, vous aviez décidé entre vous qui serait le président.
16:52Oui, on avait décidé entre nous.
16:56Et on le présente bien sûr à mon père,
16:59mais on le présente aussi au comité de surveillance.
17:02Donc en fait, c'est une décision qui implique, bien sûr, une totale...
17:07Il fallait que nous soyons à l'aise dans l'équipe,
17:09mais il fallait aussi que les choses soient acceptées par le comité de surveillance.
17:14Et je pense que la condition, pour les uns comme pour les autres,
17:17était que nous soyons tous à l'aise avec la décision.
17:20Très bien.
17:21Vitalie, pour vous, tout se transforme et se tourne vers un demain lumineux,
17:25heureux et vivant.
17:26Vous le mettez en œuvre dans votre parcours.
17:28Comment décririez-vous votre style de leadership ?
17:31Vous nous en avez déjà un petit peu parlé, pardon.
17:34Mais pour moi, tous les jours,
17:39je n'ai pas l'impression d'être la présidente de Tétangé.
17:42Je ne me lève pas le matin en me disant, il faut que je fasse ci, il faut que je fais du...
17:45Il faut que vous emmènez les équipes quand même.
17:47Il faut que j'emmène les équipes.
17:48Mais je les emmène parce que mon rôle, c'est de savoir où je vais.
17:53Et cette vision, elle est décidée avec mon frère Clovis.
17:57Elle est décidée aussi avec Damien Le Sueur, qui est notre directeur général.
18:00On a construit cet organe de gouvernance qui est le COMEX.
18:04Nous en discutons tous les trois.
18:06Et c'est vraiment nourri par des aspirations qui sont communes à tous les trois.
18:10Pour qu'on sache à peu près, c'est combien de personnes ?
18:11Combien de collaborateurs ?
18:12On est plus de 250.
18:14Plus de 250.
18:15Et c'est pour un chiffre d'affaires à peu près, si vous pouvez en parler ?
18:18Un peu moins de 200 millions d'euros.
18:19D'accord.
18:20C'est quand même assez énorme.
18:21Et vous avez une vision commune, j'imagine, pour l'avenir de la maison Tétangé.
18:24Est-ce qu'on peut en parler un petit peu ?
18:25Oui.
18:26On a une vision commune qui est déjà une vision qui s'inscrit aussi dans le prolongement
18:30de ce qui a toujours été la maison.
18:32Parce que moi, j'aime le caractère de cette entreprise qui cultive le temps long.
18:37Quand on travaille la nature, on s'inscrit dans une démarche qui est une démarche d'humilité.
18:44D'une année à l'autre, les choses peuvent totalement bouger.
18:47Et donc, en fait, ce qui nous importe, c'est vraiment cette idée de respecter ce qui a toujours été fait.
18:52D'être capable de bouger.
18:55Justement, ma prochaine question, allez-y.
18:58Attention qu'elle vous brûle les lèvres.
19:00Comment vous conciliez tradition et innovation, justement, au sein de Tétangé ?
19:04Ce n'est pas forcément facile de trouver le bon curseur.
19:07Mais le curseur, c'est d'être en vie.
19:11La base.
19:12Non, ce n'est pas la base, d'être vivant.
19:14En fait, vivant, ça veut dire se nourrir d'aujourd'hui en s'appuyant sur ce qui était fait hier.
19:21C'est d'avoir ce respect.
19:23Par exemple, quand on va dans les vignes.
19:25Même quand je suis arrivée dans la maison.
19:27Et encore aujourd'hui.
19:29J'étais la plus jeune.
19:31Et j'avais des gens qui avaient 30 ans.
19:33Moi, j'avais 28 ans.
19:35Voilà, j'étais quand même jeune.
19:37Il y avait des gens qui avaient déjà 30 ans, 40 ans de maison.
19:40Et pour moi, la maison était plus à eux qu'à moi.
19:44Ils la connaissaient par cœur.
19:46Vous étiez timide, je pense.
19:48Non, je n'étais pas tellement timide.
19:51Vous ne connaissiez pas rien.
19:52Non, je ne connaissais rien du tout.
19:54Vraiment.
19:55Je suis arrivée.
19:56Moi, je n'ai jamais été baignée.
19:58Quand mon père travaillait au Champagne et qu'on était petits,
20:02on allait très peu au Champagne.
20:04On allait beaucoup dans les vignes.
20:05Mais les vignes de tout le monde.
20:07Parce que ma mère aimait vraiment nous mettre dehors tout le temps.
20:11Il fallait qu'on respire.
20:13Ça, je lui en suis grève parce que c'est merveilleux d'aimer la nature.
20:17Et c'est capital quand on travaille dans le Champagne.
20:20Mais en tout cas, je n'avais pas du tout cette connaissance.
20:24En fait, j'ai beaucoup appris des uns et des autres.
20:26Et j'ai respecté et je respecte toujours infiniment cette maison
20:30qui est la leur avant d'être la mienne.
20:33Vous auriez une anecdote justement dans cette passation avec votre papa.
20:37Comment ça s'est passé ?
20:39Je ne sais pas.
20:40Est-ce qu'à un moment donné, il vous a pris dans son bureau
20:42et il vous a dit « je te sens prête à être présidente ».
20:46Non. En fait, on a décidé d'une date.
20:48La date, c'était le 1er janvier 2020.
20:51Et lui travaillait jusqu'au 1er janvier.
20:55Et moi, je travaillais après le 1er janvier.
20:57D'accord.
20:58Ça te fait que vous êtes le 31 ?
21:00En tout cas, pas ensemble.
21:03Non, mais surtout, le 31, on ne fait rarement la fête avec ses parents.
21:07Non, c'est vrai.
21:09Je ne sais pas comment vous faites.
21:10Je ne la fais pas avec mes parents non plus.
21:13Moi non plus.
21:15Quand on travaille en famille, parfois, il faut se ménager quelques espaces.
21:19Je suis bien d'accord.
21:21J'avais pris des vacances et je savais qu'après, je prenais ce rôle
21:28auquel je n'étais pas préparée.
21:31Mais je n'avais pas d'appréhension parce que je connais.
21:34Là pour le coup, au bout de 15 ans, on commence à connaître.
21:36Un petit peu l'entreprise.
21:38En fait, je suis arrivée dans mon bureau.
21:43Lui venait de prendre ses vacances et en fait, il avait déménagé totalement son bureau
21:47qui est un bureau emblématique parce que c'est vraiment un bureau de président à l'ancienne
21:52et comme il le dit si bien, un immense bureau.
21:55Et comme il le dit si bien, il me dit, tu ne vas pas trop changer.
21:59Tu sais, c'est un bureau d'apparat.
22:02On ne travaille pas dans ce bureau.
22:04Est-ce que c'est vrai ?
22:06Cela dit, ce n'est pas totalement faux.
22:10En fait, cette pièce est beaucoup plus importante par ce qu'elle représente que par ce qu'on y fait.
22:15Et donc en ça, bien sûr qu'il avait raison.
22:18Et il avait tout enlevé sauf les choses qui sont emblématiques qui ont toujours été là.
22:25Le fauteuil.
22:26Le bureau, le fauteuil.
22:28Il avait accroché les tableaux que j'aime.
22:30J'adore.
22:31Et ça, j'avais le tableau de ma grand-mère.
22:35Les deux tableaux de mon arrière-grand-mère qui étaient peintes aussi.
22:39Il m'avait laissé une petite figurine de lui qu'il avait fait faire en 3D un jour dans la Napa-Vallée lors d'un voyage.
22:48Il est absolument magnifique parce que c'est lui en tout petit.
22:52Il l'avait mis comme ça un peu en hauteur.
22:54Je te surveille.
22:55Je te surveille.
22:56Attention.
22:57Et il avait surtout laissé deux lettres, un à droite et un à gauche dans les tiroirs du bureau.
23:03Quand vous arrivez, vous avez deux lettres dans le bureau.
23:05Exactement.
23:07C'est bien.
23:08Il respire.
23:09Et là, je découvre deux lettres.
23:11Et c'est vrai que je pense que pour lui, c'était un moment important.
23:16Et en fait, il a fait comme il le fait toujours.
23:19A la fois, il vous donne une responsabilité.
23:23Il vous fait confiance et il vous montre qu'il est derrière vous.
23:26Et qu'il vous regarde avec bienveillance.
23:29Et en même temps, il vous dit aussi d'être bienveillant avec les autres.
23:34C'est une bonne façon de dire que ta responsabilité, ça va être maintenant de regarder les uns et les autres dans cette entreprise
23:42et de les accueillir avec gourmandise et de faire en sorte qu'ils soient heureux.
23:46J'ai une question un petit peu rigolote pour vous.
23:48Mais quelle est votre vision de la fête, Vitalie, en tant que présidente de la Maison Tétinger ?
23:51Parce qu'on se posait la question.
23:53Est-ce que c'est indissociable du champagne ?
23:55Alors oui, c'est indissociable du champagne.
23:59Ma vision de la fête, c'est quand même une vision de moment où on est capable de se laisser aller à un certain abandon.
24:09Parce que je pense que ça fait beaucoup de bien.
24:12On en a besoin.
24:14On a besoin d'avoir ces moments de rire.
24:17On a besoin de s'étourdir.
24:20On a besoin de rêver.
24:22On a besoin de danser.
24:24On a besoin de vivre des énergies différentes.
24:26Donc il y a la journée où on est quand même dans une intensité cérébrale.
24:31Il y a les déjeuners où, heureusement, on peut faire une petite pause agréable.
24:39Moi, j'aime beaucoup les déjeuners.
24:41Et puis la fête, plus généralement, j'adore parce que c'est vraiment les moments d'extravagance où chacun peut se révéler.
24:49Et j'aime beaucoup aussi la fragilité de la fête.
24:53Alors, on va parler un peu défi-réussite maintenant.
24:55Vous dites qu'il faut accueillir l'art là où il est pour offrir à tous.
24:58Il ne suffit pas d'être généreux pour être pertinent.
25:01Il faut structurer cette générosité, lui dédier des ressources non seulement financières mais humaines.
25:06Et vous le mettez en œuvre grâce au Fonds de dotation philanthropique Ars Nova.
25:11Comment ça fonctionne ?
25:12Ça fonctionne.
25:13En fait, déjà, j'ai eu quelque chose dont on n'a pas parlé.
25:18Mais en mars 2020, j'ai trois mois de maison.
25:22Arrive le Covid avec la décision la plus incroyable dans l'entreprise qui est celle de devoir fermer.
25:30Donc, on vous confie les rênes.
25:33Trois mois plus tard, on me dit que je ferme tout.
25:36Et c'est l'angoisse ?
25:38Non, ce n'est pas l'angoisse.
25:40Parce qu'il n'y a pas de choix.
25:44Je pense qu'il faut déjà mettre les uns et les autres en sécurité.
25:48Première chose, il faut réorganiser pour pouvoir petit à petit réouvrir et assurer aussi la continuité économique de l'entreprise.
25:56Donc, ça se fait de façon très structurée.
26:00J'ai beau avoir fait des études d'art, je suis quelqu'un d'assez structuré.
26:06Moi, j'aime bien quand les choses sont quand même assez ordonnées, efficaces.
26:11Même si tout le monde va rigoler quand je vais dire ça.
26:13Parce que quand vous voyez mon bureau, c'est un monceau de papier, de livres.
26:19Mais c'est vrai que la structure est importante.
26:23C'est votre organisation.
26:24C'est mon organisation.
26:26Et donc, je me dis, petit à petit, je commence à rentrer dans les projets en art et à structurer.
26:35Et en fait, dans la maison, on a toujours été généreux et on a toujours donné dans des domaines qui sont un peu toujours les mêmes.
26:44Et des domaines qui me plaisent en plus.
26:46La gastronomie, c'est un projet que j'ai porté moi depuis le début quand je suis arrivée dans l'entreprise,
26:52qui est le prix culinaire, le T1G.
26:54Donc, un prix qui est là pour révéler la jeune génération de grands chefs.
26:59Vous le faites dans une école, je crois ?
27:01Chaque année, la finale internationale se tient dans une école.
27:06Ça a été ferrandi pendant des années.
27:08Et puis maintenant, c'est au cordon bleu.
27:10Mais voilà, c'est dans plusieurs écoles parce que c'est un prix international.
27:15Donc, pendant 15 ans, mettons, où j'ai été là...
27:19C'est des jeunes chefs internationaux qui gagnent ?
27:22Exactement.
27:23Des jeunes chefs internationaux qui travaillent dans des grandes maisons.
27:25Et donc, on a neuf pays concurrents.
27:30Des très beaux pays de gastronomie.
27:33Le Japon.
27:34On a entré les États-Unis il n'y a pas longtemps.
27:36On a la Suède.
27:37Gastronomie, les États-Unis, moyen quand même.
27:39Si, c'est petit à petit.
27:41Il ne faut pas avoir les idées.
27:43Et puis même, les prix, c'est fait aussi pour faire grandir.
27:48Donc voilà, l'idée, la France, la Belgique, bref.
27:53Et ce prix, je l'aime et je l'organise depuis des années.
27:57Et je me dis, voilà, on fait beaucoup pour ça.
28:02On fait beaucoup.
28:03On est aussi mécène de l'Opéra de Paris.
28:06Et pareil, c'est quelque chose qui nous tient à cœur.
28:09Parce que là encore, c'est vraiment un lieu où l'excellence du travail d'équipe
28:15et des métiers traditionnels sont capables de procurer au public une émotion
28:21qui est assez incomparable et qui vous prend.
28:24Que vous aimiez ou pas, que vous ayez des appréhensions a priori ou pas,
28:29l'émotion de l'opéra, c'est quelque chose d'incroyable.
28:33Et puis, l'art et le patrimoine artistique.
28:38On a, depuis les années 80, lancé un projet de rapprochement
28:43entre le champagne et l'art contemporain
28:46qui s'appelle la Tétanger Collection.
28:48On a travaillé avec les plus grandes signatures artistiques du monde entier.
28:52Des photographes.
28:53Le dernier artiste à avoir travaillé pour la Tétanger Collection est Sébastien Ossalgado,
29:00qui est non seulement un photographe de talent et un homme merveilleux,
29:06mais très impliqué aussi dans cette idée d'environnement,
29:13de regard sur le monde, de distance, etc.
29:16C'est un homme exceptionnel.
29:19Mais sinon, des grandes signatures comme Roy Lichtenstein,
29:24comme Victor Vasarely, comme Pérat da Silva,
29:28comme Rauschenberg, comme Corneille.
29:32Des gens qui ont marqué l'écriture artistique du siècle dernier.
29:38Je me suis dit, on fait beaucoup de choses
29:42et finalement, j'adorerais pouvoir continuer à faire ça pour le champagne,
29:47mais j'adorerais surtout le mettre au sein d'un fond
29:50et pouvoir le partager avec des gens qui ne sont pas nécessairement liés au commerce du champagne.
29:56Voilà la chance que j'ai reçue.
29:58J'aimerais pouvoir la donner parce qu'en fait, je considère qu'elle m'a construite
30:02et qu'elle a construite aussi mon père, ma mère, etc.
30:05Je trouve qu'à travers les émotions, on se découvre
30:09et que quand on se découvre, c'est beaucoup plus facile de trouver sa place.
30:12Tout à fait, vous avez bien raison.
30:14D'ailleurs, on va parler des grands défis auxquels vous avez été confrontée
30:17en tant que dirigeante de Tétinger.
30:19Quels ont été les plus grands défis depuis que vous êtes présidente ?
30:25Déjà le Covid.
30:27C'est basique, mais en fait, quand il faut réorganiser toute la production,
30:34le post-Covid, réorganiser déjà le lendemain du Covid,
30:41où il faut lutter pour que chacun...
30:43Tout a fermé.
30:44Ah oui, on a été obligés de fermer, sauf le vignoble,
30:47parce que le vignoble étant à ciel ouvert, c'était plus facile,
30:52mais il a fallu réorganiser l'acheminement, tout simplement,
30:55parce que les gens ne pouvaient plus partager le même véhicule.
30:58Mais sinon, après, la production, faire en sorte qu'on organise des circuits
31:03où les uns et les autres ne se croisent pas,
31:06que chacun garde son travail, que chacun garde son salaire,
31:11que chacun soit en bonne santé.
31:13Donc vous, vous avez travaillé comme une dingue.
31:15On a travaillé tous comme des dingues, mais en même temps,
31:18j'ai travaillé aussi à domicile, parce que c'était la règle,
31:22et donc je me la suis appliquée aussi.
31:24J'avais mes trois enfants, ce qui est rarissime.
31:26Ce n'était pas facile.
31:28Ce que j'ai beaucoup aimé, alors j'ai un petit peu abandonné le suivi scolaire.
31:32C'était très difficile pour être maman.
31:34Ce n'était pas évident, et j'avoue que je n'ai pas lutté plus de trois jours,
31:37ce qui n'est pas…
31:38Mais nous ne sommes pas professeurs.
31:40Ça, c'est vrai, c'est un vrai métier.
31:43Je le savais déjà, mais là, je confirmais.
31:46Mais surtout, je trouvais que c'était génial qu'ils puissent vivre aussi
31:49une période d'oisiveté, et qu'en fait, dans l'ennui,
31:54dans le fait d'être ensemble tous les jours à des âges très différents,
31:58il s'est passé des choses, et je pense qu'ils ont peut-être trouvé aussi
32:02le ciment qu'il leur aurait peut-être manqué plus tard.
32:05Donc finalement, c'était très bien.
32:08Et ça, ça a été la première épreuve.
32:10Et ensuite, toutes les conséquences du Covid.
32:16Parce qu'en fait, on ne peut pas dire que ce soit totalement fini.
32:21Même, je trouve que beaucoup de gens sont sortis fragilisés
32:25intellectuellement par le Covid.
32:27Il y a eu beaucoup de conséquences qu'on ne voit pas,
32:31qui ne sont pas évidentes et qui, pour autant, sont sous-jacentes.
32:34Vous avez une idée assez précise du télétravail, d'ailleurs, je crois, à ce sujet.
32:38Oui. Je peux vous raconter une anecdote.
32:42Allez-y, j'adore.
32:44Un jour, parce que quand même, je revenais de temps en temps au Champagne,
32:49parce que j'avais bien sûr des choses à y faire, et que j'avais quand même...
32:54Votre bureau d'appart.
32:58Il fallait bien sûr, de temps en temps, être là.
33:01Et en fait, je me souviens d'un jour,
33:05ça devait être après un pont du mois de mai,
33:10j'arrive et là, je croise une assistante commerciale
33:15qui était en larmes.
33:17Je lui dis « ça va ? » et là, elle s'écroule devant moi.
33:22Et en fait, je lui dis « mais qu'est-ce qui se passe ? »
33:24Et en fait, il y a eu un pont.
33:26Pendant cinq jours, je n'ai même pas eu un coup de téléphone.
33:30Je n'avais pas mes enfants.
33:32Mes amis étaient, je ne sais pas où.
33:34Et en fait, je n'ai pas eu un seul coup de téléphone.
33:36Et là, je me suis dit « mais en fait, je compte pour qui ? »
33:40Et en fait, j'ai trouvé ça extrêmement dur.
33:43Et je me suis dit « bah oui, l'entreprise, elle sert aussi à ça. »
33:49En fait, très souvent, on croit que l'entreprise, c'est le travail.
33:53C'est bien plus que du travail.
33:55C'est une grosse partie de votre vie.
33:57L'entreprise, c'est être utile.
34:00C'est avoir des rapports avec vos collègues.
34:02C'est rigoler.
34:04C'est être capable de dire quand il y a un truc qui vous pèse un peu.
34:07Quand vous n'avez pas une famille avec qui vous entendez,
34:09l'entreprise, c'est quand même aussi une soupape.
34:11Quand vous avez un mari qui est un peu oppressant,
34:14c'est un échappatoire.
34:17Mais en fait, il faut arrêter de stigmatiser l'entreprise.
34:22L'entreprise, c'est un lieu de vie.
34:24Et en tout cas, pour moi, c'en est réellement un.
34:26Et donc, le télétravail, je considère que ce n'est pas la règle.
34:33Pour moi, la règle, c'est de vivre ensemble
34:35et de créer ensemble ce projet qui nous anime au quotidien.
34:39Le futur, c'est ensemble.
34:41C'est comme ça qu'on arrive le mieux à faire.
34:44Et c'est vrai que moi, j'ai besoin de l'énergie des uns et des autres.
34:47Une autre chose, je ne sais pas si...
34:50C'est très personnel et on a tous le droit d'être différents.
34:52Mais quand moi, je ramène du travail à la maison,
34:54j'ai l'impression d'abîmer ma maison.
34:56C'est drôle.
34:58Tu travailles beaucoup chez moi.
35:00Non, mais moi, j'ai l'impression que je suis moi chez moi.
35:02J'ai l'impression que c'est le travail qui vient chez moi et qui m'envahit.
35:04Et en fait, je trouve que c'est assez sain aussi
35:06d'être capable de compartimenter un peu les choses.
35:08Tout à fait, de le dissocier.
35:09Donc, vous, à vos équipes, vous ne leur donnez jamais le travail.
35:11Par exemple, un vendredi soir,
35:12tiens, montre-moi un dossier pour le lundi.
35:14Alors là, ça n'existe pas.
35:17Non, non, non.
35:19Je ne peux pas sur parole.
35:29En fait, je suis fière
35:31parce que l'équipe...
35:33En fait, mon père m'a fixé une mission.
35:35Il m'a dit,
35:37Vitalie, ta mission, c'est de faire en sorte...
35:39C'est sa figurine ?
35:41D'entretenir ma figurine.
35:43De l'épouster tous les matins.
35:45Je vais te filer un tout petit plumeau.
35:47Non, il m'a dit, je voudrais...
35:49En fait, il m'a dit, Vitalie,
35:51pour moi, le plus important, c'est que cette équipe
35:53qui s'est construite
35:55sous ma présidence soit
35:57heureuse et continue de travailler
35:59avec joie au Champagne et à contribuer
36:01à son développement.
36:03Et en fait, aujourd'hui,
36:05je pense que nous sommes tous
36:07extrêmement serrés les uns les autres.
36:09Les choses ont beaucoup changé.
36:11Nous sommes entrés dans plein de démarches
36:13de restructuration, y compris une des
36:15démarches RSE qui était nécessaire
36:17parce qu'en fait, on sent bien que les enjeux
36:19d'aujourd'hui,
36:21mais encore plus de demain,
36:23nous imposent d'être
36:25organisés, d'être flexibles,
36:27d'être complètement
36:29connectés
36:31à ce qui se passe.
36:33Il faut que tout le monde soit dans le même
36:35mouvement, soit capable de le comprendre,
36:37soit capable de comprendre
36:39la position de l'entreprise dans la société
36:41pour que nous soyons forts.
36:43Je dirais que pour moi,
36:45la plus grande réussite, c'est ça.
36:47Mais après, ce n'est pas une réussite
36:49totale. En fait, tous les jours, vous êtes challengés.
36:51Parfois, je crois
36:53qu'on est bien et puis en fait, je me rends compte
36:55qu'en fait, il n'y a
36:57rien de pire finalement que de croire qu'on a réussi.
36:59Ce n'est pas possible.
37:01C'est un échec.
37:03Là, on commence à être fragiles.
37:05Je suis d'accord.
37:07Il faut sans se fouetter, tous les jours, être capable
37:09d'avoir des oreilles et des yeux
37:11et les utiliser.
37:13On a parlé déjà un peu de culture d'entreprise,
37:15mais comment se traduit exactement la culture
37:17d'entreprise de Tétinger ?
37:19Il faudrait que vous veniez.
37:21Il faut que vous veniez nous voir.
37:23Je pense que c'est une culture...
37:25Déjà,
37:27c'est une
37:29entreprise familiale.
37:31Je pense que ça
37:33change quand même beaucoup de choses parce que quand vous
37:35arrivez dans cette entreprise, vous le sentez.
37:37Il y a une familiarité.
37:39En fait, nous nous connaissons tous.
37:41Il y a une forme de proximité.
37:43S'il y en a un qui n'est pas très
37:45cool un jour...
37:47Un tournage une semaine dans la maison Tétinger
37:49avec vous, avec vos équipes, on serait ravis.
37:51Eh bien, venez.
37:53Par exemple, je peux vous raconter un tournage
37:55qui a eu lieu il y a deux jours. Nous sommes
37:57en train de refaire le film
37:59qui va être projeté
38:01pour les visiteurs.
38:03En fait, il y avait une scène
38:05à tourner pour illustrer
38:07un peu ce qu'est un dîner
38:09au champagne.
38:11Bien sûr, on se dit toujours...
38:13Il doit y avoir des candelas.
38:15Exactement.
38:17Il faut que ça fasse rêver.
38:19En fait,
38:21les acteurs du tournage, mais comme tout le temps
38:23dans les publicités,
38:25sont bien sûr des gens
38:27qui travaillent dans l'entreprise ou alors
38:29des parties prenantes très proches
38:31qu'on connaît. C'est comme un cocktail
38:33assez magique. Et là, il y avait une dizaine
38:35de personnes.
38:37Je n'y étais pas, mais j'avais organisé
38:39soigneusement
38:41le tour de table.
38:43Le bonheur, c'est que le lendemain, tout le monde
38:45arrive
38:47à 9h du mat'
38:49ayant terminé à 4h
38:51en disant que c'était génial. On était un peu
38:53fatigués, mais... C'est pas grave.
38:55C'est pas grave.
38:57En fait, ce n'est pas un sujet.
38:59Il y a un vrai bonheur.
39:01Je devais aller regarder, mais on m'a dit
39:03d'enfiler une robe. Je suis arrivée.
39:05Ce n'est pas souvent qu'on peut vivre ça.
39:07L'idée,
39:09c'est quand même que
39:11les choses soient faites
39:13ensemble.
39:14Je pourrais changer de métier quand vous m'en parlez,
39:16mais justement, quelle qualité particulière faut-il
39:18pour intégrer vos équipes chez Détingé ?
39:20Eh bien...
39:22Il faut aimer les familles.
39:24Parce qu'en fait,
39:26c'est très rigolo. Il y a des profils
39:28parfois...
39:30Ça nous est arrivé de nous tromper.
39:32Parce qu'en fait...
39:34Déjà, la famille,
39:36c'est quelque chose qui prend de la place.
39:38Il y a certains postes où
39:40on s'est dit qu'on allait arrêter
39:42d'essayer de les pourvoir.
39:44On va plus parler métier
39:46que poste.
39:48Parce que ça ne fonctionne pas.
39:50Par exemple, mon frère et moi,
39:52nous avons une idée super précise
39:54de l'expression de la maison,
39:56de ce que nous voulons
39:58avoir comme résultat visuel
40:00de ci, de ça, des étiquettes...
40:02D'ailleurs, est-ce qu'un jour,
40:04vous dessineriez une étiquette ?
40:06Pendant des années,
40:08j'ai déjà composé tous les fichiers
40:10et on a vraiment les mains dans le camp, oui.
40:12Mais dessiner en tant qu'artiste,
40:14probablement pas.
40:16Sûrement pas. Parce que je ne suis plus
40:18une artiste, je suis
40:20une femme au service de l'art.
40:22Voilà.
40:24J'ai remarqué qu'en fait, l'art était partout
40:26et j'ai trouvé mon chemin artistique.
40:28Ça, c'est une bonne nouvelle.
40:30C'est une bonne nouvelle.
40:32Et donc, quel est votre champagne préféré
40:34parmi la gamme de tes dingers, justement ?
40:36Est-ce que vous aimez le champagne d'abord ?
40:38Oui.
40:40Ça serait dommage.
40:42Ma réponse serait que c'est impossible
40:44de travailler dans une entreprise comme celle-là
40:46sans aimer ce qu'on y fait.
40:48Et j'aime le champagne,
40:50mais bien au-delà de ses valeurs gustatives,
40:52je l'aime aussi pour sa portée symbolique,
40:54pour l'ivresse qu'il procure,
40:56et même s'il faut le consommer
40:58avec modération.
41:00Je trouve que c'est presque
41:02le vin le plus spirituel
41:04qui soit et le plus artistique
41:06qui soit.
41:08Et après,
41:10ça devient un monde
41:12quand vous le pétrissez
41:14tous les jours,
41:16quand vous connaissez de la vigne
41:18à la table,
41:20au cinéma, à l'art,
41:22c'est merveilleux.
41:24Vous avez des projets assez étonnants
41:26avec l'Angleterre, je crois que vous avez acheté un domaine
41:28en Angleterre, non ?
41:30C'est l'œuvre de mon papa, oui.
41:32Mais mon père
41:34a eu une période
41:36qui a été très visionnaire
41:38et à la fois il a consolidé
41:40tout l'héritage
41:42du Champagne Tétinger.
41:44Il nous a permis aujourd'hui d'avoir
41:46en production toute la capacité
41:48à nous développer.
41:50C'est entre 6 millions,
41:525 et 7 millions de bouteilles par an.
41:54C'est énorme.
41:56C'est une taille...
41:58C'est une belle ville.
42:00C'est une belle ville.
42:02Mais finalement c'est assez peu
42:04quand vous regardez la consommation mondiale
42:06de vin.
42:08C'est finalement
42:10assez peu de bouteilles
42:12et il faut les adresser aux personnes qui sont capables
42:14de les aimer et ça aussi c'est notre métier.
42:16Et votre champagne préféré alors ?
42:18C'est lequel ?
42:20Une petite préférence ?
42:22J'ai une petite préférence pour le Comte de Champagne Rosé.
42:24J'adore le Comte de Champagne Rosé.
42:26C'est un vin
42:28qui vieillit un peu plus de 10 ans
42:30dans nos caves,
42:32qui est un assemblage
42:34de grands crus de chardonnay
42:36et de grands crus de pinot noir
42:38avec un petit pourcentage de pinot noir
42:40vinifié en rouge. En fait j'adore
42:42parce que c'est un mariage
42:44absolument parfait entre la chair
42:46et la lumière.
42:48C'est très beau.
42:50Et donc le projet de votre papa
42:52c'est d'acheter des vignes
42:54en Angleterre.
42:56Est-ce que nous ne serions pas en train de répondre aux questions en décalé ?
42:58Un tout petit peu je crois, mais c'est pas grave.
43:00On s'en sort.
43:02Avec notre
43:04importateur
43:06anglais
43:08qui s'appelle Patrick Magrass
43:10qui représente une entreprise qui s'appelle Hatchmansfield
43:12ils ont eu
43:14il y a 9 ans exactement
43:16l'idée
43:18ensemble
43:20d'investir dans un
43:22vignoble en Angleterre. Ils ont
43:24cherché un peu partout. Ils n'ont pas trouvé un
43:26vignoble, ils ont trouvé un terroir.
43:28Ils ont trouvé un terroir
43:30juste à côté de Canterbury
43:32près d'un petit village qui s'appelle
43:34Shillam dans le Kent.
43:36Et là
43:38en fait c'est un
43:40territoire qui est nommé
43:42le jardin de l'Angleterre.
43:44Il y avait des pommiers
43:46et en fait ils ont déplanté
43:48les pommiers, ils ont planté les radis pour aérer
43:50les sols, ils ont déplanté les radis,
43:52ils ont planté les vignes
43:54et il se trouve que
43:56au mois de septembre, nous allons
43:58Ah ! Première récolte ?
44:00Non, non, non, la première récolte
44:02nous l'avons eue, fort heureusement,
44:04depuis quand même quelques temps. Nous allons sortir
44:06la première bouteille.
44:08Vous ne mettez pas la petite champagne ?
44:10Non, et d'ailleurs
44:12c'est un projet que nous avons voulu
44:14vraiment fidèle au terroir
44:16qui est celui
44:18de l'Angleterre. Donc à l'anglais ?
44:20Ça s'appelle
44:22Domaine Evremont.
44:24En fait nous avions cette marque
44:26dans l'entreprise et
44:28en fait nous l'avons offerte
44:30à ce projet
44:32et Charles de Saint-Evremont
44:34est le seul
44:36Français à être
44:38transféré
44:40à Westminster.
44:42C'était
44:44un personnage assez
44:46emblématique.
44:48C'est une toute autre histoire mais en tout cas
44:50la première bouteille sort
44:52au mois de septembre.
44:54Est-ce que vous avez d'autres anecdotes un peu personnelles
44:56à nous raconter sur la maison Tétinger ?
44:58Des choses qui vous ont fait rire,
45:00des moments assez incroyables que vous avez vécu
45:02en famille ou pas en famille ?
45:04Les moments les plus incroyables
45:06que j'ai vécu sont quand même
45:08à mettre au crédit de mon père
45:10parce qu'il a été pour nous
45:12un président absolument
45:14incroyable
45:16et avec du recul
45:18je me dis que nous avons eu beaucoup de chance.
45:20Exemple.
45:22Un jour
45:24je reviens
45:26de ma maison. Mon mari
45:28travaille à Troyes et donc on a une maison
45:30près de Troyes. On aurait pu faire
45:32entre les deux mais...
45:34C'est pas très loin.
45:36C'est plus joli surtout.
45:38C'est près de la Bourgogne.
45:40Je reviens de cette maison pour
45:42arriver à Reims
45:44et là je reçois ma collaboratrice qui me dit
45:46je te donne en mille, tu connais pas
45:48la une du journal L'Union ?
45:50Je dis ben non.
45:52Elle dit ton père !
45:54Ce qu'il a encore fait.
45:56Il se présente !
45:58Il va être président !
46:00Et donc mon père
46:02s'est présenté
46:04à la présidence de la République.
46:06Ah bon ?
46:08C'était une blague ?
46:10C'était pas une blague.
46:12Sans y croire
46:14je pense que c'est un personnage
46:16qui a toujours été
46:18nourri par son père
46:20qui lui-même a été un homme politique
46:22très investi
46:24qui a été maire de Reims pendant plus de 17 ans
46:26qui a été ministre
46:28sous Georges Pompidou
46:30qui a été député
46:32donc en fait c'est quand même
46:34un monsieur qui s'est toujours nourri
46:36de l'histoire de France
46:38qui vit pour ce pays
46:40et qui ne peut pas considérer
46:42une seule fois
46:44qu'on doit baisser les bras
46:46si jamais on trouve qu'il n'y a pas la solution.
46:48Et en fait
46:50pour lui la France
46:52c'est ce qu'il y a de plus important
46:54et j'ai presque envie de vous dire que
46:56il y a la France
46:58que l'entreprise il l'a faite
47:00pour la France et que tous les jours
47:02il vit pour cette idée de la France
47:04qu'il a depuis qu'il est tout petit
47:06et c'est un pays qu'il respecte, qu'il aime
47:08et je pense qu'il sera capable
47:10de se battre pour ce pays
47:12jusqu'à son dernier souffle.
47:14C'est beau.
47:16En fait moi j'ai été élevée comme ça
47:18et ce jour-là...
47:20Vous êtes une vraie patriote.
47:22Ah oui.
47:24C'est important de le dire.
47:26Je suis une vraie patriote
47:28et tous les engagements
47:30que je prends c'est vraiment
47:32par amour
47:34plus même que par devoir.
47:36J'aime ce pays, j'aime sa ruralité
47:38j'aime ses métiers
47:40j'aime les Français
47:42qui parfois peuvent râler
47:44mais sont truculents
47:46sont fidèles, savent s'attacher
47:48savent se fâcher, savent rigoler
47:50savent déborder
47:52et en fait je trouve que cette France-là
47:54cette France vivante, elle est importante.
47:56Je suis bien d'accord avec vous.
47:58On va parler de l'évolution du Champagne
48:00du marché du Champagne dans les prochaines années.
48:02Comment vous le voyez ?
48:04Je le vois bien.
48:06En fait
48:08je pense que c'est ce qu'on en fera.
48:10Je pense que c'est à nous
48:12d'être généreux
48:14et que le Champagne
48:16aura le futur
48:18de sa générosité d'aujourd'hui.
48:20Très bien.
48:22Que se démarque-t-il de la concurrence
48:24aujourd'hui ?
48:26Je pense que le meilleur moyen de se démarquer
48:28est d'être soi-même.
48:30100% soi-même.
48:32D'accord. Les initiatives Tétinger
48:34mettent en place en termes de développement durable.
48:36Quelles initiatives vous mettez en place ?
48:38En fait
48:40je ne dirais pas que c'est une initiative
48:42c'est une démarche, c'est une mue.
48:44Tout le monde doit le faire.
48:46Et en fait
48:48nous avons choisi de le faire
48:50en prenant du temps pour enraciner
48:52la démarche de façon profonde.
48:54Nous avons commencé il y a 3 ans
48:58par le COMEX
49:00ensuite par le comité de direction.
49:02Maintenant on est en train de redescendre
49:04toutes les démarches
49:06dans toutes les équipes
49:08et là ça s'est traduit par
49:10une certification
49:1214001 en management environnemental
49:14cette année.
49:16Et puis petit à petit
49:18nous allons continuer.
49:20En fait l'idée c'est surtout de se dire
49:22qu'est-ce qui est pertinent pour cette entreprise
49:24compte tenu de ses valeurs
49:26et de son ambition.
49:28Et pour le consommation électrique par exemple
49:30d'une entreprise comme Tétinger ?
49:32Ce n'est pas ce qui pèse le plus
49:34pour nous. Les grands enjeux sont dans le vignoble
49:36mais la maison
49:38a toujours été très engagée
49:40et en fait on pratique
49:42une viticulture de bon sens
49:44mais depuis longtemps
49:46pour vous donner une illustration
49:48quand mon père est arrivé
49:50aux commandes
49:52du Champagne Tétinger
49:54le directeur du vignoble
49:56il avait 3 personnes
49:58il y a 3 personnes
50:00qui l'ont suivi
50:024 personnes pour être précis
50:04qui l'ont suivi dans cet acte
50:06un peu fou de racheter la maison
50:08le directeur du vignoble, le directeur financier
50:10le directeur général
50:12et le directeur commercial
50:14le directeur du vignoble était là
50:16déjà depuis le début de sa carrière
50:18et avant lui son père
50:20qui avait planté
50:22une partie du vignoble avec
50:24mon grand-oncle François Tétinger
50:26il y a une continuité
50:28la viticulture
50:30c'est comme l'agriculture
50:32ce n'est pas des grands coups de barre
50:34c'est du bon sens
50:36c'est être capable justement de se dire
50:38on a des personnes
50:40qui sont dans le vignoble tout le temps
50:42qui connaissent les individus
50:44qu'ils pratiquent au quotidien
50:46ces pieds de vignes
50:48et en fait
50:50ils savent ce qu'il faut faire
50:52et bien sûr il faut être
50:54extrêmement raisonnable, c'est comme les enfants
50:56ce n'est pas parce qu'il y en a un qui a mal à la tête
50:58que vous allez donner à toute la famille
51:00un Doliprane
51:02donc heureusement, mais n'empêche que c'est
51:04un peu de ça dont il est question
51:06donc en fait nous on est extrêmement responsables
51:08et on est à l'observation
51:10donc on est certifié
51:12de tout ce qu'il faut
51:14sans grands efforts
51:16pour nous ce qui importe c'est le bon sens
51:18et la liberté d'action
51:20comment vous abordez la question de la responsabilité sociale
51:22au sein de l'entreprise ?
51:24elle est vachement importante
51:26parce qu'en fait, 1, nous sommes une partie
51:28d'un tout
51:30donc la première chose
51:32est d'engager ceux qui sont avec nous au quotidien
51:34la deuxième partie est d'être
51:36influent sur les gens avec qui nous travaillons
51:38et qui ne dépendent pas de nous
51:40et d'être aussi
51:42exemplaire dans la façon
51:44justement dont nous sommes patriotes
51:46mais là, patriotes du monde
51:48et voilà, pour moi
51:50c'est plutôt
51:52le souci d'être cohérent
51:54femme présidente, vous avez
51:56la parité au sein de Tétangé ?
51:58dans des services
52:00nous sommes quasiment, exclusivement
52:02féminins, dans des services
52:04un peu plus masculins, mais il y a
52:06beaucoup de femmes, et notamment
52:08au comité de direction, nous avons
52:10la parité, et ce que je trouve formidable
52:12c'est très important
52:14par contre, si je dois dire quelque chose
52:16euh
52:18je crois que
52:20déjà c'est vraiment bien
52:22qu'il y ait eu cette question de la parité, parce que ça quand même
52:24fait avancer la question de la présence de la femme
52:26et même si parfois, on arrive
52:28pour de mauvaises raisons
52:30au sein d'un conseil d'administration, je pense que
52:32on peut apporter de bonnes choses
52:34ah mais tout à fait
52:36par contre, après
52:38c'est vrai qu'on pourrait de temps en temps
52:40être choisi
52:42sans qu'il soit nécessaire
52:44de se référer à ce besoin
52:46de parité
52:48je suis bien d'accord avec vous
52:50comment envisagez-vous l'évolution de la marque Tétangé à long terme ?
52:52comment ça va se passer ?
52:54pour moi, c'est un
52:56développement qui doit se faire
52:58de façon raisonnable
53:00en considérant
53:02toujours à la fois
53:04ce qu'est capable d'absorber l'équipe
53:06et les
53:08opportunités qui s'offrent
53:10à nous dans le futur
53:12je me dis, bien sûr
53:14on a tous envie de se développer, bien sûr
53:16on se dit qu'il y a des synergies à créer
53:18entre des domaines et d'autres domaines
53:20bien sûr, on a un dessin
53:22du monde qui nous est personnel
53:24et qui peut se rapprocher d'ailleurs d'une
53:26peinture, parce qu'en fait
53:28on pourrait dire
53:30que c'est une stratégie d'entreprise
53:32mais on pourrait tout simplement dire que nous sommes des grands enfants
53:34avec
53:36un très beau territoire
53:38de plaies mobiles et que là on voit là
53:40là on voit ci, là on voit ça
53:42et en fait, ce qui se dessine c'est ça
53:44mais voilà, tout doit se faire
53:46avec une mesure et pour de bonnes raisons
53:48alors Vitalie, vous êtes très jeune mais j'ai quand même
53:50une idée à votre tour, comment vous allez
53:52plus tard, bien plus tard
53:54transmettre le flambeau à vos enfants
53:56comment ça va se passer ?
53:58vous réfléchissez à ça ?
54:00bien sûr que j'y réfléchis
54:02et j'y réfléchis, mon frère y réfléchit
54:04aussi, en fait
54:06pour moi, nos enfants c'est vraiment
54:08l'enjeu de demain
54:10et je les regarde tous
54:12avec énormément d'amour, d'attention
54:14ils se jouent des choses
54:16j'ai quand même des adolescents
54:18en fait, ils se cherchent
54:20aussi
54:22et je pense que
54:24je n'ai pas envie de leur donner de réponse
54:26je n'ai pas envie de leur imposer quoi que ce soit
54:28si ce n'est d'être travailleur
54:30d'avoir le respect
54:32des uns et des autres
54:34et d'être fiable
54:36je demande vraiment ça
54:38et puis qu'ils soient heureux
54:40j'ai envie qu'ils soient bien dans leurs pompes
54:42et qu'ils soient droit dans leurs bottes
54:44comme on dit chez nous
54:46c'est important d'avoir les pieds sur terre
54:48et d'être capable d'être heureux
54:50et d'avoir ce sens des uns et des autres
54:52je suis bien d'accord avec vous
54:54à beaucoup de bonheur
54:56moi ça me suffirait
54:58et bien je vous le souhaite
55:00merci Vitalie de vous être prêtée au jeu du question-réponse
55:02dans le jour où
55:04c'était un vrai plaisir de vous avoir sur le plateau
55:06je rappelle que vous êtes la présidente de Tétinger
55:08vous pouvez le rappeler
55:10on s'en rappellerait peut-être plus
55:12merci à toutes et à tous de nous avoir suivis
55:14à très bientôt pour une nouvelle rencontre