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Tous les jours de la semaine, invités et chroniqueurs sont autour du micro de Pierre de Vilno pour débattre des actualités du jour. Ensemble ils reviennent sur le procès des assistants parlementaires du RN avec le risque d'inéligibilité pour cinq ans qui plane autour de Marine Le Pen.
Retrouvez "Les débats d'Europe 1 Soir" sur : http://www.europe1.fr/emissions/l-invite-actu

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Transcription
00:00Europe Un Soir. 19h21, Pierre de Villeneuve.
00:04Retour maintenant sur l'actualité du procès des assistants parlementaires au Rassemblement National
00:10avec ce réquisitoire envers Marine Le Pen, 5 ans d'inéligibilité,
00:14avec également 5 ans de prison qui ont été requis à l'encontre de la chef de file des députés RN à l'Assemblée Nationale.
00:245 ans de prison, peine aménageable sur les deux enfermes qui sont requis, bracelet électronique, 300 000 euros d'amende.
00:32Et surtout, surtout, ce qu'il y a d'intéressant dans ce réquisitoire, si je puis dire,
00:38c'est que ce sont des peines exécutoires que l'on demande,
00:42c'est-à-dire que même si elle fait appel, Marine Le Pen se verra voir ses peines exécutées.
00:48Avec nous ce soir, Jean-Yves Le Borgne, avocat. Bonsoir Jean-Yves Le Borgne.
00:51Bonsoir.
00:52Merci d'être avec nous. Est-ce que c'est un procès politique dans le sens où,
00:58avec ce qui est, je crois savoir, mais je parle sous votre contrôle, assez inédit,
01:03et Jules Thorez est avec moi du JDD. Bonsoir Jules Thorez.
01:06Bonsoir Pierre.
01:07Est-ce que le fait de demander de façon assez inédite des peines exécutoires,
01:12est-ce que ça en fait un procès politique avant d'être un procès en droit ?
01:15D'abord, ce qui est clair, c'est que c'est un procès dans un contexte éminemment politique.
01:21Le fait qu'il y ait une demande d'inéligibilité est, je dirais, presque normal,
01:29en ce sens qu'en 2017, pour ce type d'infraction, l'inéligibilité est devenue la norme.
01:37Mais le tribunal peut éventuellement renoncer à cette inéligibilité en expliquant pourquoi.
01:45Ça c'est la loi Sapin 2, c'est ça ?
01:48Oui, c'est ça. C'est la loi Sapin 2 qui a, en quelque sorte, renversé les valeurs.
01:53Avant, l'inéligibilité était déjà possible, mais maintenant elle est obligatoire.
01:58Mais dans les deux cas, on pouvait échapper au fait qu'elle n'était que possible
02:03en ne la prononçant pas, tout simplement, et aujourd'hui on peut y échapper
02:07en refusant de se soumettre à cet automatisme que la loi impose et en expliquant pourquoi.
02:15Alors, le contexte politique, il est évident, Marine Le Pen, c'est un secret pour personne,
02:21qu'elle sera candidate en 2027, et une telle interdiction, une telle inéligibilité
02:29pourrait l'empêcher de l'être, bien entendu.
02:32Et l'exécution provisoire, ça veut dire que l'inéligibilité serait applicable,
02:39effective, dès le prononcé du jugement, dont on ignore encore la date,
02:44mais qui sera probablement en janvier ou février, ou peut-être un peu après 2025.
02:49De telle sorte que, là, l'hypothèse qu'un appel, voire qu'un pourvoi en cassation sur l'arrêt d'appel
02:57fasse retarder la pénalité, et notamment la peine accessoire d'inéligibilité, ne jouerait plus.
03:05Je pense que c'est quelque chose qui va à l'encontre des principes du droit.
03:11C'est-à-dire ?
03:12Pour moi, lorsqu'il y a un appel, l'appel est suspensif.
03:17Il est suspensif, c'est ni vous ni moi qui le disons, c'est la loi.
03:21Et de la même façon, le pourvoi en cassation est suspensif.
03:26Et on entend dire, de ci, de là, dans votre bouche ou dans celle de vos confrères,
03:31un tel a été condamné, mais ce n'est pas définitif.
03:34Autrement dit, rendre exécutoire quelque chose qui n'est pas définitif,
03:40c'est quand même un peu problématique.
03:43Oui, mais ça existe, le dispositif est là.
03:45Le dispositif existe.
03:46Le problème est de savoir si les réquisitions...
03:50Il faut toujours souligner que nous ne parlons que de réquisitions.
03:55Lundi, ce sera les plaidoiries de la défense, et mercredi, effectivement, on aura la date.
04:02La date du jugement.
04:03Et on verra si les juges...
04:04Et ce n'est pas tout de suite.
04:06On a toujours tendance à vivre dans l'instant et à penser, dans une sorte de confusion,
04:11que les réquisitions, c'est le jugement.
04:13Non, ce n'est que la demande.
04:14Je l'ai dit dans mon introduction, ce sont des réquisitions.
04:17Vous l'avez dit clairement, mais je le disais pour ceux qui nous écoutent,
04:20parce qu'il peut y avoir des confusions.
04:23Sur l'exécution provisoire, il y a quelque chose que je trouve très intéressant,
04:26donc j'aimerais bien que vous éclairiez ma lanterne.
04:28Il y a une jurisprudence qui s'appelle la jurisprudence Guérini,
04:31qui est ce sénateur qui, en 2021, avait été condamné avec une exécution provisoire.
04:36Sauf qu'il avait pu conserver son mandat de député jusqu'à 2024,
04:42au moment où il a été condamné en cassation.
04:45Ça pourrait être la même chose pour Marine Le Pen,
04:47ce qui voudrait dire que Marine Le Pen pourrait ne pas se présenter à l'élection présidentielle en 2027,
04:51mais elle pourrait rester députée jusqu'en 2027.
04:54Ce qu'on oublie de dire, c'est qu'il n'y a pas que l'échéance de 2027.
04:57Là, avec une peine exécutoire, on lui retire son écharpe tricolore.
05:02Sauf s'il y a cette jurisprudence qui est choisie et qui date de 2041.
05:07Vous avez raison de souligner cette difficulté.
05:11C'en est une parce que le Conseil d'État a considéré
05:15que lorsqu'il y avait une inéligibilité,
05:18immédiatement, on était en quelque sorte dans l'incapacité de poursuivre un mandat en cours.
05:25Là, nous ne parlons pas d'une présentation à une élection,
05:28mais d'un mandat en cours, le mandat parlementaire de Marine Le Pen.
05:31Mais le Conseil constitutionnel a dit le contraire,
05:34a dit que tant que ce n'était pas définitif, le mandat continuait.
05:39Et c'est là, ça correspond à ce que je vous disais tout à l'heure,
05:42c'est-à-dire que le caractère définitif,
05:44aujourd'hui vous êtes coupable, le serez-vous encore devant la Cour d'Appel ?
05:49Aujourd'hui, on pense que le procès est parfait et qu'il n'y a rien à dire.
05:54Est-ce que la Cour de cassation ne va pas casser ?
05:57Le caractère définitif, le fait qu'il faille attendre l'épuisement des recours,
06:03selon la formule habituelle, c'est une précaution tout à fait naturelle.
06:08Ça veut dire qu'au fond, on vous donne un droit d'appel,
06:11ce n'est pas pour commencer à exécuter la peine avant.
06:14De la même façon, ce n'est pas si général et absolu que ça,
06:18parce que lorsqu'il y a par exemple une comparution avec détention,
06:23que la détention se prolonge, elle existait avant le jugement,
06:27elle se prolonge après le jugement, malgré l'appel,
06:30ou que le tribunal mette en prison immédiatement la personne,
06:34ce qu'il peut faire, c'est ce qu'on appelle délivrer un mandat de dépôt,
06:37mais là encore, il y a une possibilité, celle de saisir la Cour d'une demande de mise en liberté.
06:43Et se pose le problème, car ça n'est pas expressément prévu par les textes,
06:48de la saisine de la Cour, parallèlement à un appel sur l'ensemble du jugement,
06:54d'une main levée de l'exécution provisoire.
06:57Ce qui est prévu en matière civile, parce que l'exécution provisoire,
07:01je dirais, ce n'est pas tellement un concept pénal,
07:04c'est en revanche un concept de droit civil.
07:06Et en droit civil, quand le juge de premier degré prononce l'exécution provisoire,
07:11il suffit de faire une requête au premier président de la Cour d'appel,
07:14qui vous suit ou qui ne vous suit pas,
07:16mais vous avez un recours pour faire lever cette exécution provisoire.
07:20Alors je disais que c'était un procès politique,
07:22parce qu'évidemment la classe politique entière s'est levée,
07:25Gérald Darmanin qui juge profondément choquant que Marine Le Pen soit jugée inéligible,
07:29et ainsi ne puisse pas se présenter devant le suffrage des Français,
07:35son ancien collègue des Républicains, Xavier Bertrand, lui dit l'exact contraire.
07:42Et puis il y a eu quand même, au sein même de ce procès,
07:48lorsqu'il y a eu plusieurs prévenus,
07:50il y a eu quand même ce mot d'une procureure,
07:52qui a dit « moi j'ai rien contre ce prévenu dans mon dossier,
07:55mais je ne peux pas demander la relax parce que ça fait trop mal ».
07:58C'est quand même assez étonnant d'entendre ça dans un prétoire, Jean-Yves Leborgne.
08:02Écoutez, qu'un procureur se sente mal à l'aise à l'idée de demander une relax,
08:07je peux le comprendre, c'est un peu contraire au réflexe habituel,
08:10mais ça fait partie de son devoir.
08:12Mais ce que voulait dire cette procureure, c'est parce que c'est l'ERN.
08:16Ça fait trop mal parce que c'est l'ERN.
08:18Ça me fait trop mal.
08:19Ça n'est pas impossible.
08:21Je ne dis pas qu'elle n'a pas le droit d'avoir des sentiments,
08:24mais on est quand même dans un prétoire.
08:26Il est clair que lorsque ce sont des membres du Rassemblement National,
08:31et surtout la présidente, qui n'est pas la présidente,
08:35mais la représentante forte du groupe Marine Le Pen,
08:40il est bien évident que ceux qui sont amenés à requérir ou à juger ont un arrière-fond.
08:46Quel que soit l'effort que fait le juge ou le procureur
08:50pour être objectif, pour être neutre sur un plan politique,
08:54il y a quelque part nécessairement chez lui.
08:57Je n'ai pas à pardonner ou à condamner tel n'est pas mon objet.
09:00Je dis qu'on peut se laisser porter par une passion personnelle
09:06sans vouloir pour autant faire de la politique.
09:08Ce matin sur Europe 1 et sur CNews,
09:10Sonia Mabrouk a interrogé le garde des Sceaux Didier Migaud
09:14pour commenter cette affaire.
09:16Le garde des Sceaux qui a expliqué que ça n'était pas à lui
09:19de commenter cette affaire politique.
09:22On écoute Didier Migaud.
09:23Est-ce à la justice de trancher ce qui devrait être l'être dans les urnes ?
09:27Vous savez que le garde des Sceaux n'a pas le droit
09:29de s'exprimer sur des affaires individuelles
09:32et à partir du moment où un procès est en cours.
09:34Je suis pratiquement le seul responsable politique
09:37à ne pas pouvoir commenter.
09:40Marine Le Pen inéligible.
09:42Monsieur Migaud, garde des Sceaux, mais aussi responsable politique.
09:45Est-ce que ça c'est une question politique ?
09:47Vous pouvez me poser dix fois la même question,
09:49je ferai toujours la même réponse.
09:51Je ne peux pas.
09:52Je comprends votre obstination à me faire parler,
09:55mais là je ne peux pas m'exprimer.
09:58Sur l'un des prévenus, la procureure ou l'une des procureurs
10:00a lancé au sujet d'un contrat.
10:02Lors de ce procès, je cite,
10:04je n'ai aucun élément, mais je ne peux pas demander la relâche,
10:06ça me fait trop mal.
10:07Monsieur le garde des Sceaux, est-ce qu'une procureure peut dire cela ?
10:11Je n'ai pas de commentaire à faire.
10:14Est-ce qu'une procureure peut dire cela ?
10:16Je n'ai pas de commentaire à faire.
10:19Didier Migaud, ponce-pilate.
10:21Je comprends que dans sa position de garde des Sceaux,
10:24il ne puisse pas intervenir dans une affaire en cours.
10:27Ce serait choquant.
10:29On estimerait qu'il fait pression sur le tribunal
10:32ou qu'il critique les procureurs.
10:34Je suis certain qu'il a une opinion personnelle,
10:37mais qu'il ne puisse pas la livrer,
10:39je le comprends parfaitement.
10:41D'ailleurs, la vraie question derrière tout ça,
10:43c'est de dire, si un garde des Sceaux
10:45ne peut se mêler en rien de ce qui se passe dans la justice,
10:49sauf sur des instructions générales,
10:51des orientations générales,
10:53une politique pénale non moins générale,
10:55qu'est-ce que c'est qu'un garde des Sceaux ?
10:57Moi, voyez-vous, j'ai toujours pensé
10:59que l'interdiction des instructions individuelles
11:02qui existent et qui fait qu'il ne peut pas dire le moindre mot,
11:05ce que je comprends parfaitement,
11:07était une absurdité.
11:09Et qu'il fallait, si ces instructions individuelles existaient,
11:11qu'elles soient publiques, écrites et dans le dossier.
11:13Ce qui est scandaleux, c'est l'instruction
11:15soufflée entre deux portes,
11:17murmurée au téléphone,
11:19ce qui n'existe pas.
11:21Bien sûr.
11:23Mais si vous voulez, l'instruction claire, nette,
11:25qui n'est qu'une instruction allant vers le parquet,
11:28aurait quelque chose de clair,
11:30mais il faudrait que ce soit écrit au dossier,
11:32au vu et au su de tout le monde.
11:34Parce qu'on parle de justice politique,
11:36il y a une question, ce sont les juges
11:38et les magistrats politiques.
11:40C'est-à-dire qu'on sait, depuis le début de cette affaire,
11:42que par exemple, le dossier d'instruction
11:44a été mené par des magistrats qui étaient syndiqués
11:46au syndicat de la magistrature,
11:48qui ont appelé en juillet dernier
11:50à voter contre le ration national,
11:53on a la phrase que Pierre vient d'évoquer,
11:56on a la présidente de la 11e chambre
11:58qui n'a jamais caché dans un podcast
12:00son admiration pour Eva Jolie, par exemple.
12:02Est-ce que, finalement,
12:04avoir des personnalités là,
12:06comme celles-ci,
12:08qui vont faire cette décision-là,
12:10est-ce que leur parcours politique en amont
12:14ne donne pas finalement raison à Marine Le Pen ?
12:16Alors, d'abord,
12:18la première question, c'est
12:20est-il légitime
12:22qu'un magistrat qui se doit
12:24à une totale neutralité,
12:26enfin, autant que faire se peut,
12:28parce que la neutralité, chez un individu,
12:30chez vous ou moi, ça a quelque chose
12:32d'un peu théorique, d'un peu philosophique
12:34qui n'existe peut-être jamais,
12:36mais est-ce que cette neutralité
12:38qui, chez un juge,
12:40est une exigence beaucoup plus soulignée
12:42que chez quiconque d'autre,
12:44est-ce qu'elle est compatible
12:46avec une option politique
12:48fut-elle extérieure
12:50à sa fonction de juge ou de procureur,
12:52comme une appartenance syndicale ?
12:54Alors, si c'est le syndicat,
12:56la suédoise, qui revendique
12:58parce que la machine à café ne marche pas,
13:00que les traitements sont insuffisants,
13:02ou qu'il n'y a pas assez de greffiers,
13:04là, ça ne me dérange pas.
13:06Mais on sait bien qu'entre la conception
13:08scandinave du syndicat
13:10et la conception française,
13:12il y a un monde.
13:14Alors, on peut rêver d'une complète neutralité.
13:16Est-ce un rêve raisonnable ?
13:18Merci, Jean-Yves Leborne, d'avoir commenté
13:20ces réquisitions, qui encore
13:22une fois ne sont que des réquisitions.
13:24Mais, voilà,
13:26effectivement, la question est posée.
13:28Est-ce un procès politique contre Marine Le Pen ?
13:3020h27, on va en parler
13:32encore plus avant avec
13:34Jules Torres et Nathan Devers.
13:36A tout de suite sur Europe 1.
13:38Europe 1 Soir. 19h21,
13:40Pierre de Villeneuve. Et Jordan Bardella
13:42a été le défenseur de Marine Le Pen
13:44tout à l'heure chez Laurence Ferrari
13:46dans Punchline sur Europe 1
13:48et sur CNews pour dire
13:50plusieurs choses. La première, c'est que
13:52non, il n'était pas là sur une rampe de
13:54lancement dans un hypothétique
13:56scénario d'inéligibilité
13:58de Marine Le Pen.
14:00Et puis, la deuxième, c'est que la Cour suprême,
14:02je reprends les propos de
14:04Jordan Bardella, la Cour suprême
14:06en France, c'était le peuple et qu'il
14:08fallait donc rendre Marine
14:10Le Pen éligible et
14:12porter aux urnes
14:14Gérald Darmanin et de cet avis
14:16Xavier Bertrand, président
14:18de la région Hauts-de-France, lui ne
14:20comprend pas l'argument du déni de
14:22démocratie. On l'écoute, il était sur RTL ce matin.
14:24Le Parlement européen, s'il a été
14:26lésé, ce sont donc nos impôts
14:28qui ont été détournés. Et ensuite,
14:30qui est responsable de cela ? C'est ce que
14:32le tribunal décidera,
14:34non pas avec les réquisitions, mais avec
14:36la décision. Voilà. C'est aussi
14:38simple que ça et les magistrats appliqueront
14:40la loi. Est-ce que ça serait
14:42un déni de démocratie d'empêcher Marine Le Pen
14:44d'être candidate en 2027 ? La démocratie, c'est aussi
14:46le respect de la justice. Et puis qu'on arrête
14:48avec le déni démocratique, le Front National ne serait
14:50pas capable de présenter un candidat.
14:52Ils ont un candidat de rechange, il s'appelle Bardella
14:54qui n'attend que cela. Et puis
14:56vous savez qui a dit ? Il y en a marre
14:58de ces élus qui détournent de l'argent, ça c'est au
15:00tribunal de décider, mais qui a dit cette phrase ?
15:02Marine Le Pen, 2004,
15:04le procès d'Alain Juppé, une peine
15:06d'inéligibilité, il était candidat possible à la présidentielle.
15:08Plaisante raison qu'un vent
15:10mania tout va. C'est la définition de la girouette ?
15:12Non, c'est la définition de Mme Le Pen aussi.
15:14Mathieu Vallée a été l'invité de
15:16Cyril Hanouna dans On marche sur la tête, voilà ce qu'il
15:18dit. Oui, aujourd'hui, il y a un gros sujet
15:20sur le parquet qui, dans ses
15:22réquisitions, a quand même précisé que
15:24pour un des prévenus, dont il n'avait aucune charge,
15:26ça leur ferait mal de plaider la relaxe.
15:28Donc moi, j'estime qu'aujourd'hui, oui, il y a
15:30de graves doutes sur la sincérité
15:32et sur l'indépendance des magistrats
15:34qui ont recueilli ces peines très fortes
15:36et j'attends évidemment que les juges du fond s'expriment
15:38pour pouvoir savoir où on va. Marine Le Pen...
15:40Vous dites que c'est un procès politique ?
15:42Nous, c'est un procès pénal, ça a été transformé en procès
15:44politique. Marine Le Pen
15:46qui est plus au Rassemblement National ou qui est plus
15:48en tant que députée ou chef de groupe, c'est
15:50un navire sans gouvernail.
15:52Dernier extrait politique, celui de Robert
15:54Ménard, le maire de Béziers, qui était sur TF1 ce matin.
15:56Moi, je me suis retrouvé sur le mur
15:58des cons du syndicat de la
16:00magistrature. Quand je rentre dans
16:02un tribunal... Un syndicat qui est marqué à gauche.
16:04Je me dis, putain, si c'est un mec qui est au
16:06syndicat de la magistrature, ça va pas être
16:08très clean comme procès.
16:10On a le droit aussi de penser ça avec la
16:12politisation d'une partie des magistrats.
16:14Est-ce que cette magistrate
16:16c'était ça ? J'en sais rien, donc je vais pas l'accuser.
16:18Est-ce que politiquement, c'est pas
16:20un problème ? Oui, c'est un problème, parce que c'est quand même
16:22pas les magistrats qui décident
16:24de qui se présente
16:26à l'élection.
16:28Toujours autour de la table, Jules Torres
16:30du JDD et Nathan Devers. Bonsoir, Nathan.
16:32Bonsoir, Pierre. Alors, quoi qu'on en dise,
16:34quelle que soit
16:36l'opinion qu'on porte
16:38là-dessus, c'est
16:40une affaire politique dans un
16:42prétoire. C'est une affaire qui pose des questions
16:44politiques. Pour ma part, je suis vraiment
16:46le premier à critiquer
16:48la pénalisation de la vie politique
16:50qui existe, je pense, depuis une vingtaine,
16:52vingt, vingt-cinq ans en France.
16:54Et qui existe dans toutes les démocraties
16:56occidentales. Depuis l'Antiquité, vous voulez dire.
16:58Oui, mais qui s'accélère. Avec les réseaux sociaux,
17:00avec l'accélération du temps de l'information,
17:02avec la transparence. Aujourd'hui, on a beaucoup plus
17:04de facilité à savoir quelles sont les actions,
17:06quelle est la vie des élus. Il y a de plus en plus
17:08une logique de pénalisation. Mais là, ce qui me dérange
17:10dans cette affaire, c'est trois choses. Premièrement,
17:12de voir que le Rassemblement National,
17:14c'est en effet que ça a été rappelé dans le sujet,
17:16posé depuis toutes ces années comme le
17:18parti de l'intégrité qui critiquait
17:20la corruption qui existait dans l'UMPS.
17:22C'était les fameux slogans de Marine Le Pen
17:24quand elle disait contre la gauche du fric, la droite du fric,
17:26je suis la candidate du peuple. Premièrement. Là, on voit
17:28que les masques tombent. Deuxième chose qui me dérange,
17:30c'est que nous avons affaire à un parti qui passe son temps
17:32à dire que la justice est trop laxiste.
17:34Qui passe son temps à dire qu'il faut
17:36l'enfermement préventif en prison,
17:38etc. Et quand ça les touche,
17:40eux, alors là, ils viennent nous dire
17:42que la justice ne l'est pas. Moi, je veux bien critiquer
17:44cette notion de peine exécutoire, non exécutoire.
17:46Mais je veux bien le faire, sauf avec des gens
17:48qui veulent justement que la justice soit
17:50beaucoup plus sévère concernant les autres délinquants
17:52qu'eux. Et la troisième chose,
17:54c'est les propos de Jordan Bardella. Me semble qu'il témoigne
17:56non pas d'un déni de démocratie,
17:58mais d'un déni de l'état de droit. C'est-à-dire ?
18:00Quand on commence à dire que dans une société, la Cour suprême
18:02c'est le peuple, ça veut dire qu'au nom
18:04de ce qu'on appelle la volonté générale,
18:06au nom du peuple, on critique la notion
18:08de l'indépendance des pouvoirs, de la séparation
18:10des pouvoirs, et on critique le fait
18:12que l'état de droit, que ce soit une démocratie ou non,
18:14c'est le fait de dire que le souverain, quand bien même
18:16c'est le peuple, n'a pas des pouvoirs absolus
18:18et que ce sont des pouvoirs qui sont limités par des institutions,
18:20la Cour suprême aux Etats-Unis,
18:22le Conseil constitutionnel, la justice, etc.
18:24Pour bien comprendre
18:26exactement ce que dit Jordan Bardella,
18:28je vous propose de réécouter
18:30cet extrait sur la Cour suprême.
18:32En Suisse, vous pouvez être
18:34condamné pour des délits,
18:36vous pouvez être condamné pour un certain nombre
18:38de faits qui peuvent être condamnés,
18:40mais j'ai pas de débat là-dessus, mais on ne peut pas
18:42vous empêcher de vous présenter à une élection
18:44parce qu'on considère qu'à ce moment-là,
18:46le pouvoir judiciaire interfère
18:48avec le fonctionnement de la démocratie.
18:50Faut changer la loi sur la question de l'inéligibilité ?
18:52Je pense que
18:54je suis profondément gaulliste sur ce sujet,
18:56je pense que la Cour suprême dans une démocratie,
18:58c'est le peuple français et que c'est au peuple français
19:00et uniquement au peuple français
19:02de déterminer qui
19:04doit ou ne doit pas
19:06être élu à un scrutin,
19:08que ce soit un scrutin local ou un scrutin national.
19:10Faut changer la loi sur cette partie-là.
19:12Je trouve qu'il faut y réfléchir,
19:14mais ce n'est pas le moment, ce n'est pas l'actualité.
19:16Donc c'est ça que vous condamnez, Nathan Devers ?
19:18Bien sûr, encore une fois,
19:20sur la question de l'éligibilité, on peut en discuter.
19:22Et pour ma part, je ne suis pas pour la pénalisation de la vie politique,
19:24je l'ai dit sur Nicolas Sarkozy, je l'ai dit sur Desjardins.
19:26Ces propos-là me choquent.
19:28D'abord, le gaullisme, ce n'est pas ça.
19:30De Gaulle, quand il avait des ministres qui faisaient la moindre bêtise,
19:32il les écartait. Il ne supportait pas d'avoir dans ses équipes
19:34des gens qui avaient un comportement immoral.
19:36Il y avait même cette fameuse anecdote qu'il avait, un de ses ministres,
19:38qui une fois s'était garé, je crois devant un magasin
19:40parisien,
19:42en se garant n'importe comment,
19:44et il s'était fait engueuler et puis écarter
19:46du pouvoir par le général de Gaulle pour ça.
19:48C'est ça le gaullisme. Donc il ne faut pas dire n'importe quoi.
19:50Et deuxièmement, la phrase consistant à dire
19:52que la seule cour suprême c'est le peuple, c'est une phrase
19:54qu'on a entendue dans une logique
19:56à peu près analogue aussi,
19:58outre-Atlantique, chez quelqu'un qui s'appelle
20:00Donald Trump, c'est une phrase qui consiste à dire
20:02le gouvernement des juges
20:04prend en otage la démocratie.
20:06Ce qui n'est pas la réalité, ça s'appelle la séparation des pouvoirs.
20:08Vous parlez du président américain qui vient d'être élu là.
20:10Oui, exactement.
20:1245-47.
20:14Qui a fait un raz-de-marée sur 112 électeurs
20:16contre 226.
20:18Avec ces réquisitions
20:20qui sont très dures,
20:22on n'a pas vu ça dans notre
20:24histoire politique,
20:26des réquisitions qui sont aussi dures.
20:28Là où je pense que Nathan a raison,
20:30c'est que l'ERN s'est fait le chantre depuis
20:3220 ans
20:34du côté, nous on est plus propres que les autres.
20:36Et là, finalement, je vais rendre un petit
20:38hommage, j'espère qu'il ne m'en voudra pas, à votre rédacteur
20:40en chef, Julien Brigo, qui nous a glissé
20:42juste avant l'émission, que finalement,
20:44c'est la normalisation du ERN
20:46qui est comme les autres partis.
20:48Tous les autres partis ont eu leur
20:50scandale politico-judiciaire.
20:52Fillon, Cahuzac,
20:54Chirac bien avant, Alain Juppé.
20:56Donc finalement, c'est la normalisation
20:58du ERN.
21:00Après le sujet, il est démocratique,
21:02il est politique. Est-ce qu'on peut
21:04empêcher une femme politique
21:06qui a recueilli plus de 15 millions d'électeurs
21:08à la dernière présidentielle, qui est la personnalité
21:10politique favorite des Français,
21:12selon plusieurs sondages, qui est la grande
21:14favorite du prochain scrutin présidentiel ?
21:16Est-ce qu'on peut l'empêcher, au nom de la
21:18justice, au nom d'une affaire
21:20où il n'y a pas d'enrichissement personnel ?
21:22Est-ce qu'on peut l'empêcher d'être
21:24candidate aujourd'hui à la présidentielle ? Je suis désolé,
21:26moi, ça pose un grand débat.
21:28On va nous dire que de toute façon, comme Zébartrand,
21:30de toute façon, Jordan Bardella, il est prêt, il n'attend que ça.
21:32Mais franchement, c'est vraiment
21:34pas le sujet. Et puis, il y en a un autre sujet, c'est que
21:36on parle de 5 ans de prison.
21:38Jawad, qui a hébergé des terroristes
21:40du 13 novembre 2015,
21:42il a pris 4 ans de prison.
21:44Donc, il y a aussi
21:46la proportionnalité, finalement,
21:48des réquisitions. Encore une fois,
21:50Marine Le Pen, elle n'est pas condamnée. Peut-être
21:52qu'il n'y aura pas cette exécution
21:54provisoire pour sa peine d'inéligibilité.
21:56Peut-être ne sera-t-elle même pas condamnée
21:58à une peine d'inéligibilité. Mais la réalité des choses,
22:00c'est qu'aujourd'hui, les juges, les magistrats,
22:02les procureurs, ont ouvert un débat
22:04qui, à mon avis, va faire beaucoup de mal
22:06à la politique. Et honnêtement,
22:08je ne pourrais jamais en vouloir au RN
22:10de dénoncer aujourd'hui une justice qui est politique.
22:12Quand on voit la composition, depuis
22:142014, on a des procureurs,
22:16des magistrats, qui sont syndiqués au syndicat
22:18de la magistrature, qui ont mené l'enquête, qui ont été
22:20les juges d'instruction, qui ont appelé
22:22à voter, qui ont manifesté dans la rue
22:24aux dernières élections législatives, contre le RN.
22:26On a une présidente
22:28de la 11e chambre,
22:30correctionnelle, qui nous dit
22:32dans un podcast qu'elle est arrivée
22:34dans le monde de la justice, grâce à
22:36Eva Joly. Tout ça, c'est public.
22:38Donc, comment voulez-vous que le RN
22:40ne dénonce pas ensuite
22:42un jugement, une justice, qui est politique ?
22:44Quand on voit la politisation de
22:46toutes les personnes qui composent, aujourd'hui,
22:48ce procès-là.
22:50Dato Devers ?
22:52Je suis d'accord avec vous sur la question
22:54de l'éligibilité. Pour ma part,
22:56j'estime que Marine Le Pen doit être combattue
22:58dans les urnes, que ça fait partie
23:00bien sûr des arguments, si elle est condamnée,
23:02ça fera partie des arguments pour la prochaine
23:04campagne.
23:06De manière générale, je ne suis pas
23:08favorable au fait que la justice
23:10puisse couper à quelqu'un la possibilité
23:12de se présenter devant les électeurs. Mais quand je compare
23:14les propos de Jordane Bardella à Donald Trump,
23:16c'est parce qu'il me semble qu'il y a une logique plus profonde.
23:18Regardez en France, quand même, sur ces dernières années.
23:20Les personnalités politiques
23:22qui ont été condamnées, ou qui ont eu des affaires
23:24prenez quelqu'un comme M. Cahuzac,
23:26comme M. Fillon, on pourrait multiplier les exemples.
23:28Leur vie politique s'est
23:30arrêtée. Immédiatement.
23:32Parce qu'ils se sont effondrés dans les sondages.
23:34Parce que tout le monde leur a dit...
23:36Vous dites tout est son contraire, puisque vous dites
23:38Marine Le Pen... Comment ça, oui ?
23:40Oui, bien sûr.
23:42J'allais justement retomber sur mes points
23:44après avoir dit tout est son contraire.
23:46Je trouve ça intéressant que, justement,
23:48Marine Le Pen manifestement ne descende pas dans les sondages.
23:50Qu'elle reste, en effet, une personnalité politique
23:52très appréciée.
23:54Donc elle doit avoir un destin à la Trump,
23:56si vous voulez faire la comparaison.
23:58Elle a critiqué des élites en disant que
24:00ces élites ne sont pas sincères, qu'elles trahissent les Français,
24:02etc., quand on est soi-même exactement pareil.
24:04Mais elle s'est construite comme ça.
24:06Le paradoxe de cette séquence, c'est que
24:08depuis 20 ans, Marine Le Pen dénonce un gouvernement
24:10des juges, dénonce un système.
24:12D'ailleurs, sa ligne de défense pendant
24:14ce procès-là, c'était de dire que c'était un procès
24:16où elle était accusée, mais déjà
24:18coupable. Donc elle s'est construite comme ça,
24:20Marine Le Pen. Donc pourquoi aujourd'hui,
24:22finalement, les personnes qui votent pour elle,
24:24elles ne sont pas choquées par ce qui est en train
24:26d'arriver ? Parce qu'ils pensent que c'est un système.
24:28Le 6 avril hier, on n'a pas fait le sondage.
24:30En tout cas, on n'a pas fait
24:32un micro trop loin. Non, mais cette affaire dure depuis
24:34quand même un moment. Les gens savent
24:36que Marine Le Pen est dans un tourbillon judiciaire
24:38va être dans un tourbillon judiciaire.
24:40Alors les gens savent...
24:42Elles ne baissent pas dans les sondages.
24:44Ils savent qu'il y a cette histoire, ils en ont entendu
24:46parler de ses assistants parlementaires.
24:48C'est une affaire qui dure depuis 2014.
24:50On est mal chaussés, nous, si j'ose dire,
24:52parce qu'on est dans le guidon tous les jours.
24:54C'est vrai.
24:56Allons faire un petit tour.
24:58On va faire un petit tour, Jules.
25:00Jeudi prochain, on aura souvent un sondage.
25:02On va prendre la voiture,
25:04on va jusqu'en Lozère.
25:06Est-ce que vous avez entendu parler ?
25:08Pas sûr.
25:10Les personnes qui sont électeurs de Marine Le Pen
25:14ne seront pas choquées de cela.
25:16Et les autres, ils n'auront pas changé
25:18complètement d'avis grâce
25:20à ces réquisitions-là. Donc finalement,
25:22ça va être un petit peu le statu quo.
25:24Pierre, Nathan, Jules et les autres.
25:2620h43 au cœur de l'histoire.
25:28C'est tous les jours de 15h à 16h
25:30sur Europe 1 avec Stéphane Berne
25:32qui vous accueille du lundi au vendredi.
25:34Demain, Stéphane parlera d'Aliénor d'Aquitaine,
25:36la reine la plus populaire du Moyen-Âge.
25:38On se retrouve dans un instant
25:40dans Europe 1. A tout de suite.

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