• il y a 3 mois
Vendredi 27 septembre 2024, SMART BOURSE reçoit Michel Ruimy (Économiste associé, SPAK)

Category

🗞
News
Transcription
00:00Le dernier quart d'heure de Smart Bourges chaque soir, c'est le quart d'heure thématique.
00:13Une fois par mois, le dernier vendredi du mois, nous avons rendez-vous pour un décryptage
00:17économique avec Michel Rumi, qui est économiste associé de SPAC.
00:20Bonsoir Michel.
00:21Bonsoir.
00:22Merci beaucoup d'être avec nous.
00:24Alors, c'est vrai qu'on parle beaucoup des banques centrales en ce moment.
00:27Moi, j'ai l'impression que j'en parle beaucoup, en tout cas depuis 15 ans.
00:31Elles nous accompagnent au quotidien, dans les marchés.
00:34On parle même des banques centrales dans la presse, c'est-à-dire presque grand public.
00:38Aujourd'hui, Michel, d'où cette question ? Qu'est-ce qu'une banque centrale ?
00:43Alors, tout d'abord, ce qu'il faut bien saisir, c'est qu'une banque centrale est une banque.
00:48Et une banque, c'est une entreprise.
00:50D'accord.
00:51Donc, une entreprise se caractérise notamment par son capital, ses actionnaires et son objectif.
00:58Bon, pour la banque centrale, rapidement, c'est la mise en œuvre de la politique monétaire
01:02pour l'objectif, l'objet social, on va dire, entre guillemets.
01:04La mission, la raison d'être, comme on dit aujourd'hui.
01:07Exactement.
01:08Et par contre, le capital et les actionnaires.
01:11Alors, ce qu'il faut savoir, c'est que la BCE a un capital, grosso modo, de 10 milliards
01:15d'euros.
01:16Et l'idée, c'est de savoir qui sont ces actionnaires.
01:20Donc, ce qu'il faut bien voir, c'est qu'ici, ce capital vient des banques centrales nationales
01:25qui appartiennent à l'Union Européenne.
01:26Et c'est là qu'il y a aussi déjà un petit truc à voir, c'est que de manière générale,
01:31quand on regarde une multinationale, il y a l'holding qui détient des parts dans la filiale.
01:35Ici, c'est plus de 50%, c'est des filiales, justement.
01:38Oui, c'est ça.
01:39Et là, c'est l'inverse.
01:40C'est-à-dire que les banques centrales détiennent une part de la BCE.
01:44Et l'idée est que, justement, par exemple, l'Allemagne détient à travers sa banque
01:49la Deutsche Bundesbank, 22% du capital.
01:51La France, il y a la Banque de France, je crois que c'est 16%.
01:54Banque d'Italie, 13%, je crois.
01:56Et l'Espagne, 12%.
01:57Proportionnelle au poids du pays, c'est ça ? Il y a cette clé de répartition ?
02:01Oui, cette clé de répartition, c'est PIB, c'est la population.
02:05Oui, ce n'est pas que le PIB, mais c'est le poids un peu général du pays, on va dire,
02:12dans la zone monétaire, en l'occurrence, qui nous unit aujourd'hui.
02:15Pourquoi on dit centrale ? Pourquoi c'est une banque centrale ?
02:19Et c'est ça qu'il faut bien saisir, c'est que cette centralité fait que c'est la place
02:24de la banque centrale au sein du système bancaire.
02:27En fait, les banques commerciales doivent se refinancer et elles vont vers cette banque
02:35centrale et qui, entre guillemets, va les refinancer.
02:38C'est pas qu'elle le fait, mais c'est cette place-là qui est la place au niveau.
02:43Mais ce qu'il faut bien voir, c'est que l'adjectif porte son nom.
02:46C'est une banque centrale et pas commerciale.
02:49C'est-à-dire que vous ou moi, nous ne pouvons pas ouvrir un compte à la banque centrale.
02:53Elle est le banquier des banques, c'est-à-dire qu'elle gagne son argent, comme une banque
02:57commerciale fait avec nous lorsqu'elle octroie des crédits, eh bien, la Banque de France
03:00gagne notamment son argent à travers cette notion de prêt auprès des banques commerciales.
03:04Je renvoie à un épisode précédent de nos rendez-vous, Michel, où on a fait justement
03:09comment est-ce que les banques centrales gagnent leur argent.
03:12Parce que oui, même si ce sont les banques des banques commerciales, il y a quand même
03:18l'idée que ce sont des établissements qui doivent aussi gagner du profit et maximiser
03:22même peut-être le profit qu'elles peuvent réaliser, Michel ? Est-ce qu'on peut dire ça ?
03:27Alors oui, non, dans toute réalité, non, ce sont des entités, on va dire, publiques
03:33et elles n'agissent pas comme, on va dire, maximiser ce profit, mais elles doivent être
03:37profitables.
03:38Elles doivent être profitables pour plusieurs raisons, notamment, première des choses,
03:45pourquoi faire du profit ? Parce qu'il y a cette notion d'indépendance des banques centrales.
03:48Indépendance dans sa mission de prise de décision de la politique monétaire, mais aussi une
03:53indépendance financière.
03:54Financière, c'est-à-dire qu'elle doit se débrouiller pour gagner son argent et en
03:58même temps, son projet de fonctionnement.
04:00On ne peut pas être indépendant en demandant à son père de nous financer, donc d'une
04:04certaine manière.
04:05Donc, qu'est-ce qu'il fait ? Elle doit gagner son argent.
04:07Et l'idée, c'est quoi ? Un, première des choses, satisfaire ses actionnaires comme
04:11toute entreprise.
04:12Et donc, ici, ce sont les banques centrales nationales dont l'unique actionnaire, c'est
04:16l'État, par exemple.
04:17Elles doivent rémunérer la Banque de France et c'est l'État français qui a une part
04:21substantielle du bénéfice de la Banque de France.
04:24Et donc, par exemple, supposons que l'ensemble des opérations de politique monétaire des
04:30banques centrales nationales rapportent 100 en total, les 20 banques, eh bien, ceci est
04:34remonté à la BCE qui prend une cote par, généralement, c'est 8% pour son fonctionnement.
04:39Donc, il ne reste plus que 92 et, on va dire, la clé de répartition...
04:4422% à l'Allemagne, 16% à la France, 12% à l'Italie, 10% à l'Espagne, etc.
04:49Et ça, après, ça rentre dans le compte de résultats de la Banque de France et ça
04:55descend comme ceci.
04:56Donc, ça, c'est la première des choses.
04:57Et puis, deuxième chose, elle doit faire aussi, comme toute entreprise, faire des
04:59investissements.
05:00D'abord, pour améliorer son service public en termes de stabilité des prix.
05:05Et puis, en même temps, elle va tout faire pour améliorer son action, son efficacité,
05:11en fait, que son action soit la plus efficace possible.
05:13Et donc, c'est là aussi que ça joue là-dessus.
05:15Une fois qu'on a dit ça, reposons la question.
05:18Qu'est-ce qu'une banque centrale ? Quelles sont les missions, justement, et qu'est-ce
05:22qui caractérise une banque centrale ?
05:24En fait, il y a, on va dire, il y a des missions cruciales en termes de politique monétaire.
05:29La première des choses, c'est la mise en œuvre de la politique monétaire.
05:31Ça veut dire quoi, concrètement ? C'est mettre la juste quantité de monnaie en circulation
05:36pour permettre à l'activité économique d'être optimale.
05:38Deuxième chose, c'est aussi la supervision du système bancaire.
05:42Parce qu'on pourrait se poser la question, pourquoi les banques sont-elles si surveillées
05:47alors que le commerce de détail, il est beaucoup moins qu'eux ?
05:50Simplement, c'est que ces banques commerciales détiennent notre épargne et on n'est pas
05:53très heureux lorsqu'on perd notre épargne par une mauvaise gestion.
05:56Donc, on les surveille, d'une certaine manière.
05:58Troisième fonction qui est importante.
06:00Bien sûr, on les surveille grâce à une réglementation bancaire, je précise, c'est pour être plus clair.
06:05Troisième chose, bien sûr, c'est la fabrication et l'émission de billets.
06:08Même le cash, s'il diminue dans sa proportion des moyens de paiement, il faut la fabriquer.
06:14Et puis également aussi, on ne se pose pas de questions, c'est qu'aujourd'hui, on parle beaucoup de digitalisation,
06:17de choses qui se font de façon électronique, même les banques se font.
06:21Et le grand problème, qu'est-ce qui se passe si un système de paiement tombe en panne ?
06:24Qui est responsable ? Et donc, c'est la Banque de France qui est en charge de la robustesse des systèmes de paiement.
06:30C'est-à-dire que quand les banques s'échangent de la monnaie, on ne voit pas les camions de transporteur de fonds qui se baladent dans les rues.
06:35On va dire ça comme ça.
06:36Donc, c'est ça une banque centrale.
06:38Et donc, bien sûr, c'est une institution financière dont la mission principale, c'est la mise en œuvre de la politique monétaire.
06:43Et demain, c'est la transition écologique, etc.
06:48Enfin, c'est un périmètre qui peut s'accroître aussi dans le temps.
06:52Exactement, tout à fait.
06:53C'est qu'aujourd'hui, devant l'objectif de l'environnement et des changements climatiques,
06:59les banques centrales se doivent d'entrer.
07:02Et donc, il y a une dimension, on va dire, d'environnementale dans leur gestion.
07:06Depuis quand est-ce qu'on vit avec des banques centrales ?
07:09Excellente question.
07:10La mesure, c'est que de manière générale, en fait, la première banque qui pouvait faire fonction, je dirais, de banque centrale, c'est la Banque d'Angleterre.
07:19C'est au 17e siècle, 1694.
07:22Mais c'est relativement récent.
07:25Quand on regarde, par exemple, la Fédérale Réserve, c'est 1913.
07:27Et puis, la BCE, c'est peut-être le 17e siècle.
07:30Donc, bien sûr, c'est assez récent, on va dire.
07:33Mais c'est parce qu'on a souhaité qu'il faut que la banque centrale soit dans la main, mais pas trop telle, pour reprendre le mot de mon appart.
07:41La Banque d'Angleterre, vous dites ?
07:42Parce que j'avais en tête que la banque de Suède, la Riksbank, était une des plus vieilles banques centrales du monde.
07:46Oui, tout à fait, tout à fait.
07:47En fait, qu'est-ce qu'était l'idée ?
07:48C'était que le banquier Pamstruck, en fait, qui avait des difficultés.
07:53En fait, la Suède avait des difficultés.
07:56Et donc, c'est à ce moment-là, un financier qui avait une certaine notoriété, a eu cette, je dirais, inspirée confiance.
08:06Et on retrouve la confiance encore par ici.
08:08Et donc, il s'est substitué, on va dire, au gouvernement.
08:12Et en fait, le grand problème, c'est que...
08:13Il a fait le jeu du prêteur en dernier ressort, quoi.
08:15Exactement.
08:16Et ce qui s'est passé, c'est qu'il a émis trop, on va dire, de billets de banque et ça lui est retombé sur la figure.
08:20Mais le système a conservé.
08:22Et donc, bien sûr, ça a donné lieu à la Banque de Suède, qui était, je crois, en 1648.
08:31Mais l'idée, c'est surtout la vision occidentale, c'est la Banque d'Angleterre.
08:37On peut vivre sans banque centrale ?
08:39Oui, tout à fait.
08:40Dans une certaine mesure.
08:42Tous les pays n'ont pas besoin d'une banque centrale.
08:44Oui, près de nous, nous avons Monaco, puis nous avons Andorre, qui, dont le ministère des Finances, en fait,
08:50joue le rôle de banque centrale, d'une certaine manière.
08:55Mais un peu plus loin de nous, nous avons les îles Kiribati, nous avons les îles Marshall, les îles Loroz et tout.
09:01Ce ne sont pas des pays majeurs non plus, j'entends.
09:05On peut se le permettre quand on est les îles Kiribati ou les îles Marshall.
09:09Exactement, on peut se le permettre.
09:12La banque centrale, est-ce qu'elle est unique sur le territoire national ou est-ce qu'il peut y avoir une cohabitation de systèmes ?
09:20Alors, là aussi, en fait, je ne dirais pas forcément qu'on peut avoir une certaine cohabitation.
09:25Par exemple, en France, lorsque la Banque de France, je dirais, au XIXe siècle, lorsqu'elle a été créée en 1800,
09:34elle n'avait pas tout à fait le monopole de l'émission.
09:38Et elle a partagé ce monopole jusqu'en 1850.
09:41Mais aujourd'hui, on a qu'à voir aux États-Unis, il y a 12 banques fédérales régionales qui se permettent d'émettre des billets.
09:50Et donc, c'est cette notion, ce qu'il faut bien saisir, c'est que le système de réserve fédérale,
09:54le fédéral, c'est, et non pas, on va dire improprement, c'est la banque centrale, mais rigoureusement, c'est fédéral.
10:03Oui, c'est ça, c'est la réserve fédérale, c'est la banque fédérale de l'ensemble des États.
10:07Mais les 12 banques centrales régionales peuvent émettre des billets, d'une certaine manière.
10:12Et c'est ça qui est important de saisir.
10:14Bon, on a beaucoup parlé de la lutte contre l'inflation pour la Banque centrale européenne.
10:20Quand on connaît les textes comme vous, est-ce que vraiment le mandat est aussi obsessionnel et unique autour de l'inflation ?
10:28Alors, je dirais bien le mandat principal. Un adjectif, un mot est un mot.
10:34De la BCE, c'est la stabilité des prix, entendue comme une inflation comprise entre 0 et 2 % à moyen terme, tel que c'est.
10:41Mais on s'aperçoit, par exemple, que la fédérale réserve a plusieurs objectifs.
10:47C'est la soutien à la croissance économique, à l'emploi, etc.
10:50Mais la BCE n'a pas de double mandat au sens de la fédérale réserve.
10:54Néanmoins, le traité de Maastricht stipule que, sous réserve du respect de l'objectif principal,
11:03la BCE peut mener différents objectifs, notamment une politique de l'emploi, une protection de l'environnement, etc., par exemple.
11:11— Oui, donc il n'y a pas d'antinomie. Si la stabilité des prix est garantie, la Banque centrale européenne peut participer à d'autres missions également, quoi.
11:24— Tout à fait. La seule problème qui peut se poser, c'est sa crédibilité à créer dans son nouveau métier.
11:29— Un mot pour finir, justement, en lien avec l'inflation. On parle de taux directeur. Parfois, il y a plusieurs taux directeurs.
11:36Il y a le taux directeur effectif, etc. Qu'est-ce qui caractérise ? C'est quoi, le taux directeur de la Banque centrale ?
11:41— Le taux directeur, concrètement, c'est le taux d'intérêt que la Banque centrale va appliquer aux banques commerciales.
11:48Et donc, par exemple, celui de la BCE, qu'on appelle le taux refi, c'est le taux des opérations principales de refinancement.
11:55Donc c'est à ce niveau-là. Et donc selon – on va dire – la conjoncture et selon les études qu'elle fait, la Banque centrale va ou monter ou baisser les taux.
12:04Et en quoi est-il directeur ? Parce qu'il va diriger, il va orienter les taux d'intérêt du marché, qui fait qu'en fonction des taux d'intérêt,
12:12s'il s'élève ou se baisse, il sera plus ou moins facile de s'endetter.
12:15— Un mot rapide pour finir. La notion de prêteur en dernier ressort, qu'est-ce que ça veut dire, Michel ?
12:21— Ça veut dire qu'en fait, l'idée, c'est qu'à tout moment, si la situation l'impose, si une banque est en difficulté...
12:27— Une banque commerciale ? — Oui, tout à fait. Une banque commerciale a des difficultés. Elle pourra toujours se retourner vers la Banque centrale
12:33pour avoir – on va dire – de l'argent pour lui permettre de s'en sortir. — Merci. Merci beaucoup, Michel.
12:38Épisode de ce Décryptage éco avec Michel Rumi, économiste associé de SPAC, à retrouver bien sûr en replay sur bsmart.fr ou encore
12:45en podcast sur vos plateformes préférées.

Recommandations