"On va transformer profondément le budget libéral qu'on nous prépare", affirme le député Eric Coquerel
Le président de la commission des Finances de l’Assemblée nationale Eric Coquerel rappelle que le le temps presse face à un calendrier de plus en plus resserré pour présenter le budget 2024. Plus d'info : https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-invite-de-7h50/l-invite-de-7h50-du-jeudi-12-septembre-2024-3781323
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00:00Et Sonia De Villers, votre invitée ce matin, est députée NFP-LFI de Seine-Saint-Denis
00:05et président de la Commission des finances de l'Assemblée Nationale.
00:08Bonjour Eric Coquerel, la France aura-t-elle un budget à Noël ? On en parle, mais d'abord,
00:13la polémique fait rage.
00:15François Ruffin, qui fut des vôtres, raconte le virage de la France insoumise à partir
00:19de 2022 qui aurait abandonné les classes populaires blanches pour ne s'adresser qu'à
00:24très jeunesse qu'aux quartiers, qu'aux enfants d'immigrés, au point de tracter
00:29aux faciès pendant les législatives des tracts Jean-Luc Mélenchon pour les Noirs
00:34et les Arabes.
00:35Il dit avoir eu honte.
00:36Vous qui êtes élu de banlieue, vous confirmez ?
00:39Non, bien évidemment.
00:40Écoutez, moi j'ai du respect, en tout cas j'avais du respect pour François.
00:45Pour la petite histoire, c'est moi qui en 2017 avait proposé à Jean-Luc Mélenchon
00:50qu'on investisse François Ruffin, alors même qu'il ne réclamait pas l'étiquette
00:54et les filles.
00:55C'est l'un des seuls pour qui on a fait ça.
00:56Et je pense qu'il a apporté énormément de choses.
00:59Mais là, il se livre à quelque chose qui, moi, ne me va pas du tout.
01:06Je vais essayer de rester mesuré dans mes propos.
01:09D'abord, une première chose, c'est qu'il commence comme d'autres, malheureusement,
01:13parce que ça leur donne pas mal d'audience télé, peut-être en fonction d'une ambition
01:18présidentielle pour la suite, à un peu trop marquer début contre son camp.
01:23Je reprends une métaphore footballistique, parce qu'on partage l'amour du foot avec
01:26François.
01:27En juillet dernier, je ne sais pas si vous vous rappelez, mais au moment où, dans le
01:31camp macroniste, on expliquait que, décidément, la gauche ne pouvait pas gouverner parce qu'elle
01:36ne s'entendait pas sur un nom de Premier ministre, etc., lui-même a cotisé à ça
01:40en expliquant que, en nous parlant de nullité de la gauche, manque de chance, quelques heures
01:45après, on proposait le nom de Lucie Castex.
01:46Et là, c'est nous qui l'attaquent sur le fond de quelque chose qu'il défend depuis
01:52quelques années, sauf qu'il le défendait avec, j'allais dire, des arguments intellectuels
01:55qui me semblaient un peu plus prouvants, même si je n'étais pas d'accord avec lui.
01:59Alors, expliquer que, parce que nous luttons contre le racisme, je vais y venir, nous essentieliarisons
02:06les victimes du racisme, c'est exactement reprendre les arguments du printemps républicain.
02:11Le racisme, ce n'est pas un fait sociétal.
02:15Ce n'est pas juste quelque chose qui s'ajouterait à la situation, c'est un fait social.
02:21C'est un fait social parce que le racisme a toujours servi, en réalité, le système
02:26pour imposer une hiérarchie, diviser les classes sociales et imposer sa domination.
02:31Et c'est ce qui se passe aujourd'hui.
02:32François Ruffin étaille avec des exemples, il explique que, lorsque a été commis le
02:40meurtre de Thomas à Crépole par des jeunes venus de quartiers populaires, le RN s'étale
02:44sur Twitter.
02:45Alors que les dirigeants de LFI n'en disent pas un mot.
02:47Quand Mourad, un jardinier, est égorgé et traité de bout nul, le RN n'en dit rien.
02:51LFI vient en soutien.
02:53Est-ce qu'il faut choisir son camp selon l'origine des victimes et des agresseurs ?
02:57Pose comme question François Ruffin.
03:00Est-ce qu'il estime que Thomas Crépole a été victime de racisme anti-blanc ?
03:08J'aimerais qu'il le dise, il ne le dit pas le terme.
03:10Mais c'est un peu ça, quelque part, qu'il met en terme de comparaison.
03:13Et que nous ne réagirions pas au racisme anti-blanc, qui est une invention de l'extrême-droite.
03:17Chacun sait qu'il n'y a pas de racisme anti-blanc, ne serait-ce que parce que vous
03:22pouvez chercher n'importe où dans l'histoire du XIVe siècle un endroit où on a dominé,
03:26j'allais dire, des gens en fonction de leur couleur blanche.
03:29Vous vous éloignez ?
03:30Non, je ne m'éloigne pas.
03:31D'abord, c'est faux, factuellement.
03:32J'ai même vérifié, si vous voulez, y compris dans mes tweets, nous avons réagi.
03:35Par contre, oui, la question de ce qui s'est passé avec ce jardinier ou autre est d'une
03:42autre nature que l'agression qui s'est passée, et il y a eu des enquêtes après
03:46montrant que c'était une agression de Ricks, c'est-à-dire, évidemment, à dénoncer
03:48que nous avons dénoncé dans nos tweets.
03:50Mais c'est d'une autre nature.
03:52C'est de la nature qui est liée à la question d'un racisme qui se développe malheureusement
03:55dans ce pays.
03:56Et les gens du Nord, vus par Jean-Luc Mélenchon en campagne à Hénin-Beaumont, face à Marine
04:00Le Pen, et il aurait relaté à François Ruffin des gens qui transpiraient l'alcool dès
04:05le matin, qui sentent mauvais, qui sont presque tous obèses, ça vous paraît crédible ? Oui
04:09ou non ?
04:10C'est comme les extraits de Jean-Luc qui sont mis en pâture, sortis de leur contexte.
04:16Je vais vous dire une chose.
04:17Ce que je voulais dire dans ce qu'a dit aussi François, c'est qu'à un moment donné,
04:20ils mettront en opposition quelque part les bastions de la classe ouvrière dans lesquelles
04:23nous ne serions plus, ce qui est affirmé par tous les faits.
04:25Je vous incite à aller voir un tweet de Ludivine Bantini, historienne, qui récapitule toutes
04:32les luttes, y compris Goodyear, où nous avons été présents, où nous sommes présents.
04:36Laissez penser qu'en réalité, parce que nous combattons le racisme, qui est absolument
04:41indispensable, et les filles abandonneraient la question sociale, c'est uniquement cotiser
04:46en réalité à ce que disent nos adversaires, et je pense que ce n'est pas digne de François.
04:50Parlons du budget.
04:51Le vote de la loi de finances, c'est le premier bras de fer parlementaire qui attend manifestement
04:55Michel Barnier.
04:56Vous avez auditionné en tant que président de la commission des finances de l'Assemblée
05:01nationale, les ministres démissionnaires en charge de l'économie et du budget, sur
05:05l'année en cours.
05:06Et suite à cela, vous exigez, c'est nouveau, Éric Coquerel, une loi qui rectifie le budget
05:122024, avant même une loi de finances pour 2025.
05:16Pourquoi ?
05:17Tout simplement parce que Bruno Le Maire conseille qu'aux 10 milliards qui ont été annulés
05:22au début de l'année, on ajoute l'annulation de 16,5 milliards qui ont été gelés.
05:27Quand je dis gelés, ça veut dire que c'est une précaution.
05:29Ça ferait 26,5 milliards d'économies.
05:32C'est énorme.
05:33Pour vous donner une idée, par exemple, le budget des sports, c'est presque 20% d'annulation.
05:37Après les JO, on nous dit qu'il faut que le sport continue de masse, continue en France,
05:41qu'on profite de l'élan JO.
05:42L'aide de développement, c'est 1 milliard de moins, 17,3.
05:46L'écologie, dont chacun constatera que théoriquement, ça devrait être prioritaire, c'est 14% moins,
05:503 milliards.
05:51Et l'éducation nationale, c'est 1 milliard de moins et 1,3 milliard pour la recherche.
05:57Donc, c'est des sommes conséquentes.
05:59C'est une cure d'austérité.
06:00Ce n'est pas possible que ça passe comme ça, soit par des décrets, soit, je ne sais
06:04pas, telle ou telle loi rétroactive.
06:07Donc, il faut un débat au Parlement.
06:09Un débat qui aurait lieu quand ?
06:11On a demandé, par exemple, qu'il y ait une séance extraordinaire.
06:15On pourrait la faire dès septembre.
06:16Et sinon, on aura le temps de les faire en octobre.
06:18Hier encore, en plus de demander une loi de rectification, un débat autour de la loi
06:23de finances rectificatives pour le budget 2024, vous avez aussi exigé ce qu'on appelle
06:28les « lettres de plafond » que vous réclamez depuis plusieurs jours et que vous n'avez
06:32pas obtenues.
06:33Les « lettres de plafond », c'est le détail, ministère par ministère, des budgets qui
06:39vont être alloués dans le budget 2025.
06:40Pourquoi est-ce que vous les réclamez ?
06:42Vous n'êtes pas censé les avoir.
06:43Tout simplement parce qu'on est dans une situation où on a déjà six semaines de
06:46retard par rapport à ce que prévoit la loi sur la transmission des informations budgétaires
06:50au Parlement.
06:51Alors, tout ça procède d'un délit démocratique au départ qui est qu'Emmanuel Macron n'a
06:57pas permis à la force arrivée en tête, le NFP, de gouverner et donc on accumule un
07:01retard.
07:02Maintenant, il faudrait peut-être arrêter.
07:03Le Parlement a le droit de se saisir d'une de ses prérogatives essentielles qui est
07:07de discuter du budget.
07:08Nous n'avons pas eu de tiré à part.
07:11Le tiré à part, en gros, c'est le détail justement, ce qui décide les « lettres de
07:14plafond ». Donc, nous exigeons au moins que les « lettres de plafond » aient été
07:17transmises au ministère.
07:18Et si on ne vous les donne pas ?
07:19À un certain moment, vous-même, Média, avez, les représentants de la nation puissent
07:23en disposer.
07:24Et si on ne les donne pas ?
07:25Nous allons les chercher avec Charles de Courson, lundi à Matignon, puisque c'est
07:28apparemment de là que ça part, pour les obtenir et ainsi informer la représentation
07:33nationale et les Français, ce qui me semble être le minimum.
07:35Pourquoi réclamer à tout prix un débat quand, face à cet hémicycle qui est manifestement
07:40divisé en trois, il y aura de toute évidence blocage, dépôt de motion de censure, vote
07:47de motion de censure ?
07:48Pourquoi demander que le Parlement joue son rôle ?
07:50Ça me semble assez normal quand même.
07:51Théoriquement, on est quand même encore dans une démocratie.
07:54Et j'ai l'impression que, d'ailleurs, on se porterait un peu mieux que le pouvoir
07:58se déplace de l'exécutif, où il est aujourd'hui, dans les mains d'un seul homme, justement
08:04à l'Assemblée nationale.
08:05À mon avis, les choses s'en porteraient mieux.
08:06Donc, ce que nous réclamons, c'est ça.
08:08On réclame du pouvoir en débat.
08:09Et moi, je vais vous dire une chose.
08:10Dans ma commission, on va transformer profondément le budget libéral qu'on est en train de
08:14nous préparer.
08:15On verra bien, à ce moment-là, ce que fait le gouvernement et vous verrez que nous allons
08:18le transformer profondément en faveur des mesures de justice fiscale, de valoriser les
08:24revenus du travail, puisqu'on parlait tout à l'heure de Capital Travail, et ça sera
08:28quelque chose, à mon avis, qui sera bénéfique.
08:29On verra ce que fait le gouvernement à ce moment-là.
08:31Merci Éric Coquerel.