• il y a 2 mois
Trois jours après la nomination de Michel Barnier à Matignon, le président du MoDem, haut-commissaire au Plan et maire de Pau était interrogé par Olivier Bost (RTL), Pauline Buisson (M6), Perrine Tarneaud (Public Sénat) et Jim Jarrassé (Le Figaro).
Regardez Le Grand Jury avec Olivier Bost du 08 septembre 2024.

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Transcription
00:00Le Grand Jury, présenté par Olivier Bost.
00:13Bonjour à tous, bienvenue dans ce Grand Jury en direct sur RTL et sur Public Sénat, canal 13 de la TNT.
00:20Bonjour François Bayrou.
00:21Bonjour.
00:22Vous êtes président du Modem, haut-commissaire au plan et maire de Pau.
00:28Vous ne vous êtes pas exprimé depuis que le nom de Michel Barnier est apparu.
00:33Nous avons donc un Premier ministre de droite sous la menace permanente de la gauche et du Rassemblement National
00:40et qui doit en même temps composer avec le Bloc central.
00:44Une configuration politique inédite et fragile, alors participez-vous au gouvernement.
00:50Bienvenue dans ce Grand Jury, François Bayrou.
00:53A mes côtés pour vous interroger aujourd'hui Perrine Tarnot de Public Sénat, Jim Jarassé du Fidiaro et Pauline Buisson de M6.
01:00Dans ce Grand Jury, François Bayrou, au-delà des questions brûlantes sur le gouvernement, nous aurons une séquence dédiée au Parlement,
01:06le futur chaudron de Michel Barnier.
01:08Vous serez soumis à nos questions express avec des réponses par oui ou par non.
01:12Et puis vous aurez le droit aussi à un moment 2027.
01:15On commence tout de suite ce Grand Jury.
01:18Le Grand Jury, l'actualité de la semaine.
01:21Et commençons, si vous le voulez bien, François Bayrou, par qualifier cette situation politique.
01:27Michel Barnier à Matignon, est-ce une cohabitation ?
01:30Non, ça ne pouvait pas être une cohabitation parce que le résultat de cette élection empêchait que cela en fût une.
01:41Pourquoi ? Qu'est-ce que c'est qu'une cohabitation ?
01:44C'est une majorité à l'Assemblée Nationale hostile au Président de la République.
01:48Et donc le Président de la République reste en fonction, mais il a des adversaires à l'Assemblée Nationale qui ont la majorité absolue.
01:55Ça c'est une cohabitation, on a déjà connu ça, Mitterrand, Chirac, Balladur, nous avons connu tout.
02:02Alors si ce n'est pas une cohabitation, comment vous qualifiez la situation ?
02:05Je me suis exprimé souvent, le concept que je défends, c'est une co-responsabilité.
02:15Chacun est dans son rôle, chacun avec ses convictions, dans un moment particulièrement dangereux, particulièrement risqué,
02:25parce que la succession des crises et le contexte international et les difficultés que nous connaissons,
02:31notamment à partir de la guerre en Ukraine, tout cela nous oblige à une démarche nouvelle, une démarche inédite.
02:39Et je dis co-responsabilité. Co-responsabilité, ça veut dire le Président de la République exerce la plénitude de ses fonctions définies par la Constitution,
02:49le Premier ministre exerce la plénitude de ses fonctions définies par la Constitution à l'article 20,
02:56et pour moi c'est un équilibre qui correspond à un triptyque, un Président fort, un gouvernement fort, un Parlement fort.
03:04À ce moment-là, en co-responsabilité, on peut avancer.
03:08Michel Barnier a quand même acté une forme d'autonomie, de liberté vis-à-vis du chef de l'État.
03:12Il dit qu'il y aura des changements et des ruptures. Comment vous interprétez cette prise de parole ?
03:18Il a tout à fait raison d'affirmer une autonomie. J'ai été toute ma vie politique, et dans des épisodes nombreux et différents,
03:29partisan d'un chef de gouvernement autonome. J'ajoutais autonome et complice avec le Président de la République,
03:37autonome et en respect réciproque, et en bonne entente et en discussion.
03:41Et pour moi, ça ne présente absolument aucune difficulté. Ce qui présente une difficulté, c'est l'antagonisme.
03:48On a connu ça, y compris du temps où les Présidents avaient une majorité.
03:53Je ne suis pas sûr qu'entre Mitterrand et Rocard, l'amour était la lumière.
04:05Ce sera plus simple entre Emmanuel Macron et Michel Barnier ?
04:09Je crois que oui.
04:11Mais comment vous interprétez le fait que lors de son premier discours, lors de la passation de pouvoir,
04:15Michel Barnier n'ait pas une seule fois prononcé le nom du Président de la République ?
04:19Je ne fais pas l'exégèse avec une loupe ou un microscope des discours des uns et des autres, il y aurait trop de travail.
04:26Mais quand même, c'est un symbole.
04:28Souvent, on prononce le nom de celui qui vient de vous nommer.
04:31Je suis absolument certain, et je ne suis pas certain dans l'abstrait, je suis certain pour avoir passé ces jours avec eux,
04:42chacun d'entre eux, pour avoir parlé beaucoup avec eux.
04:45Je suis absolument certain qu'il n'y a pas ce climat d'offense, et qu'il n'y aura pas ce climat d'offense.
04:52Et pourtant, Michel Barnier, il a quand même dit, on va maintenant plus agir que parler, donc faire un peu moins de com',
04:59sous-entendu, il y avait trop de com' jusqu'à maintenant.
05:01Je ne suis pas certain qu'il parlait du Président de la République.
05:04Du Premier ministre, sortant peut-être.
05:06Gabriel Attal.
05:07Je ne sais pas, mais en tout cas, je ne suis pas certain.
05:10Justement, qu'est-ce que vous avez pensé de cette passation de pouvoir entre Gabriel Attal et Michel Barnier ?
05:15Est-ce que vous avez trouvé ça sympathique, décalé ou carrément peu respectueux ?
05:20En politique, on a mille occasions, ça veut dire plusieurs par jour, d'entrer dans les affrontements de personnes,
05:36les petites phrases vaches, les méchancetés qu'on peut dire sur les uns ou sur les autres,
05:42l'observation des méchancetés que les uns disent sur les autres et les autres sur les uns.
05:47Je n'ai pas envie de jouer à ça.
05:50Bon, on est dans un moment particulier dans lequel chacun a une responsabilité.
06:01Ceux qui étaient en place avant ont une responsabilité.
06:05Ceux qui étaient en place avant les précédents ont eux aussi une responsabilité.
06:10Parce que la situation du pays, elle est la résultante de mois et d'années.
06:17On reparlera de Gabriel Attal.
06:20Je n'entrerai pas dans cette mêlée.
06:24Vous rencontrerez Michel Barnier en début de semaine ?
06:28Non.
06:29Ah bon ?
06:30Je le rencontrerai cet après-midi.
06:33C'est une information en soi.
06:35Dès cet après-midi, qu'est-ce que vous allez lui dire ?
06:39D'abord, je lui ai parlé beaucoup.
06:43Vous savez, on se connaît, Michel Barnier et moi, depuis longtemps.
06:47Je crois qu'on se respecte.
06:49Je pense que c'est, dans les circonstances actuelles, un bon choix.
06:56Je pense qu'il a des atouts.
07:00Par exemple, il va permettre d'élargir la majorité.
07:05Il va permettre de créer la majorité au Sénat.
07:10Tout ça, c'est des atouts importants.
07:12Il a une image rassurante à Bruxelles.
07:15Dans les circonstances où nous sommes, c'est très important.
07:20Donc ça fait beaucoup d'atouts.
07:23Il a, à mes yeux, deux exigences devant lui.
07:27La première exigence, c'est de trouver un gouvernement équilibré,
07:31c'est-à-dire avec des personnalités qui représentent les sensibilités de gauche
07:38autant que les sensibilités du centre et les sensibilités de droite.
07:43Nous sommes sur un triptyque.
07:46L'avantage des trépieds, tout le monde sait ça,
07:49c'est que ça tient en toutes circonstances.
07:52C'est la seule configuration pour un siège qui ne se renverse pas,
07:56si on ne fait pas de bêtises.
07:58– Mais c'est fragile aussi, dans la situation politique actuelle.
08:02– Et donc, c'est cet équilibre-là.
08:06Première exigence.
08:09Deuxième exigence, le renouvellement.
08:12Je pense, je l'ai dit à Michel Barnier,
08:15qu'il faut qu'une configuration nouvelle apparaisse.
08:22Il faut qu'on sente une nouvelle manière d'être pour le gouvernement
08:29et ça passe par des visages qui n'étaient pas au gouvernement précédemment.
08:33– On reviendra sur la composition du gouvernement
08:35et sur les exigences que vous venez de lister.
08:37Mais auparavant, vous disiez aussi, vous connaissez Michel Barnier depuis longtemps.
08:42Quelle histoire partagez-vous avec Michel Barnier ?
08:46On sait que vous aviez été au gouvernement dans les années 90.
08:49– Vous allez nous faire faire de l'archéologie amicale.
08:51– Non mais c'est intéressant.
08:53– Nous étions, Michel Barnier et moi,
08:56dans un mouvement que j'avais impulsé,
09:00qui s'appelait les Rénovateurs.
09:03C'est il y a 35 ou 36 ans.
09:10Et quand on regarde la photo, je l'ai regardée cette semaine par hasard,
09:15on voit qu'il y avait là des visages qui ont joué un rôle,
09:20ou qui auraient pu jouer un rôle très important par la suite.
09:23Par exemple, il y avait Philippe Séguin,
09:26pour lequel j'avais beaucoup de considérations,
09:30même si on n'avait pas toujours les mêmes idées.
09:34Il y avait Michel Noir, qui était à l'époque maire de Lyon.
09:37Par exemple, il y avait des personnalités aussi différentes que Philippe de Villiers,
09:41qui était à l'époque plus sage qu'il ne l'était.
09:45– Chacun a eu de lui un parcours différent.
09:47Est-ce que vous diriez aujourd'hui que c'est le retour ou la revanche de l'Ancien Monde ?
09:51– Non, c'est des bêtises.
09:53Je n'ai jamais cru au Nouveau Monde,
09:55donc je ne vais pas vous dire Ancien Monde.
09:58Je pense que l'heure exigeait de l'expérience et de l'apaisement.
10:05Vous voyez bien que je crois que la figure de Michel Barnier répond à cette double exigence.
10:11Après, le chantier est très difficile,
10:15mais après tout, il a mené de très difficiles négociations au moment du Brexit,
10:20et il a été commissaire européen,
10:22c'est-à-dire la fonction dans laquelle vous êtes le plus obligé de tenir compte
10:29des sensibilités, des nationalités, des convictions, des obsessions des uns et des autres.
10:38– De ce que vous décriviez de votre parcours politique,
10:40finalement, aujourd'hui, vous dites que ce sont des retrouvailles, quelque part.
10:43– Non, parce qu'on ne s'est jamais perdu de vue.
10:46On a toujours parlé, même quand il n'était plus directement engagé dans les affaires publiques,
10:53on a ce lien-là, puis on est tous les deux issus des régions de montagne,
11:00on est tous les deux avec des convictions de décentralisation assez fortes.
11:05– Nicolas Sarkozy, dans son dernier livre, dit à propos de Michel Barnier,
11:09son serieux est reconnu, mais il peut parfois manquer un peu de charisme.
11:12Qu'est-ce que vous pensez de cette prise d'opposition ? Est-ce que vous partagez cet avis ?
11:17– Non, je n'ai aucune envie de jouer à ça.
11:22Les vacheries des uns sur les autres, je vous ai dit, ce n'est pas mon affaire.
11:25– Parmi les exigences que vous avez données concernant Michel Barnier,
11:32vous n'avez pas parlé d'Emmanuel Macron.
11:34Quelle va être la marge de liberté du nouveau Premier ministre vis-à-vis du chef de l'État,
11:39dont on sait qu'il ne laisse pas toujours beaucoup de marge de manœuvre à ses premiers ministres ?
11:43– Tout est écrit dans la Constitution, tout.
11:46– Si je peux me permettre, elle n'est plus appliquée depuis un certain temps en matière de Premier ministre.
11:51– Oui, je crois que ça a été une erreur.
11:54Ce que je vous dis là, le Président de la République sait exactement que je le pense,
11:59et j'ai défendu ce point de vue devant lui plusieurs fois.
12:02– Donc il va le laisser gouverner, il va le laisser composer son gouvernement ?
12:05– Tout est écrit dans la Constitution.
12:07Le Premier ministre détermine et conduit la politique,
12:12enfin le gouvernement détermine et conduit la politique de la nation.
12:16Il y a des décisions qui lui appartiennent en propre,
12:19et il y a des décisions qui ne peuvent être prises qu'avec l'accord du Président de la République.
12:24Et donc tout est parfaitement écrit.
12:29– Mais ce n'était pas l'exercice du pouvoir d'Emmanuel Macron jusque-là ?
12:32Est-ce qu'on pourra dire, Emmanuel Macron a changé ?
12:35– Ce n'était pas l'exercice du pouvoir d'Emmanuel Macron,
12:37ce n'était pas celui de François Hollande, ce n'était pas celui de Nicolas Sarkozy,
12:40ce n'était pas celui de Jacques Chirac.
12:42– Donc Emmanuel Macron doit changer.
12:44– Ça n'était pas tout à fait celui de François Mitterrand, c'est le moins que l'on puisse dire,
12:47ce n'était pas celui de Giscard avant lui, et le reste est trop loin.
12:51– Donc ça impose à Emmanuel Macron de changer ?
12:53– J'étais un peu jeune.
12:55– Donc ça impose à Emmanuel Macron de changer ?
12:58– Pas besoin de changer, il faut se réaliser.
13:02Les événements, quand vous êtes un homme d'État,
13:06les événements vous imposent par une sorte de, je ne sais pas comment on peut dire, de métabolisation.
13:15Vous êtes soumis à des tempêtes, à des vagues,
13:19à des sentiments profonds que vous voyez apparaître devant vous.
13:24– Il semblait pourtant jusque-là qu'Emmanuel Macron était plutôt dans la résistance
13:28face à ces tempêtes et à ces événements.
13:30– Oui mais bon.
13:31– Pas dans l'adaptation toujours ?
13:32– Pas toujours, souvenez-vous des Gilets jaunes,
13:36devant une crispation sociale très importante,
13:40il a au contraire, comme on dit pour les surfeurs, pris la vague.
13:44C'est-à-dire qu'il est allé à la rencontre des gens,
13:47et c'est très bien parce qu'il va le faire,
13:49et ça va lui permettre de trouver une nouvelle dimension de lui-même.
13:54– Un pouvoir moins vertical aujourd'hui, c'est ce que vous dites.
13:56– Par la force des choses, la force des choses.
14:00On fait des montagnes alors que tout est simple.
14:03Moi je suis un défenseur de la Ve République.
14:07Tout a été dit, par exemple le fait que c'est le Président de la République
14:11qui choisit le Premier ministre.
14:13Et qui choisit le Premier ministre en tenant compte de la situation politique.
14:18Et donc ce choix il l'a fait, et il l'a fait, vous savez très bien
14:23dans quelles circonstances, quand le parti socialiste a refusé,
14:28et encore lors de sa réunion de son bureau national,
14:32de dire, bon, on censurera pas le gouvernement
14:36si c'est Bernard Cazeneuve qui le conduit.
14:38Il y a eu un vote, et ils ont refusé de donner cette garantie,
14:45ou cette assurance, ou cette sécurité.
14:48Et à ce moment-là, vous savez que j'étais partisan
14:52de la nomination de Bernard Cazeneuve, et que je le dis sans aucune réserve,
14:58et à ce moment-là, le parti socialiste a décidé que ça ne serait pas lui.
15:03Et donc on s'est trouvé, ou le Président de la République
15:07s'est trouvé dans une situation parfaitement claire, paradoxale.
15:12C'est une erreur historique du parti socialiste, vous diriez, aujourd'hui ?
15:16Non, il y a à la base de tout ça, quelque chose qui est un,
15:21comme vous dites dans les rédactions, un fake.
15:24Une escroquerie, une fausse information,
15:28qui était d'avoir répandu partout, à son de trompe,
15:31l'idée que le Nouveau Front Populaire, comme il s'appelle,
15:38avait gagné les élections. Ils n'ont rien gagné du tout.
15:41C'était drôle, je ne sais pas si vous avez suivi le discours de Jean-Luc Mélenchon hier.
15:46Moi je l'ai suivi, parce que c'est toujours intéressant de s'instruire.
15:51Et Jean-Luc Mélenchon, il dit,
15:54le Président de la République a subi trois défaites successives.
15:58Il dit sans, je veux dire, sans rechercher la nuance,
16:02avec grande éloquence, comme les tribuns aiment faire,
16:07et de ce point de vue-là, en se laissant porter quelquefois par son propre verbe.
16:12Il dit trois défaites successives.
16:15Première défaite, en 2022,
16:21au moment des élections législatives,
16:24il n'a pas eu la majorité absolue.
16:26Il a dit que c'était une majorité présidentielle, mais c'était une défaite.
16:30Vous vous souvenez combien il y avait de sièges,
16:32lors de la défaite que Jean-Luc Mélenchon évoque,
16:36pour le Bloc central ?
16:38Il y en avait 250, 255.
16:42Et là, le Nouveau Front Populaire en a eu 50 ou 60 de moins.
16:48Et donc, c'est évident qu'il n'y avait pas de victoire d'un bloc ou de l'autre.
16:54Pour des raisons que vous savez.
16:56Il y a eu une victoire du Rassemblement National au premier tour.
16:59Et puis au deuxième tour, il y a eu le choix des Français
17:01de ne pas lui confier la totalité du pouvoir.
17:03Et une fois qu'on dit ça,
17:05alors on décrit un paysage qui donne des devoirs à tout le monde,
17:09qui oblige tout le monde.
17:11Justement, vous évoquez le Rassemblement National...
17:13Et le Parti Socialiste a refusé de faire face à cette responsabilité.
17:17Vous évoquez le Rassemblement National,
17:19qui est de fait aujourd'hui le premier groupe à l'Assemblée, hors coalition.
17:23Le RN dit...
17:25Michel Barnier, aujourd'hui, c'est un Premier ministre sous surveillance.
17:28Comment Michel Barnier peut gouverner avec les coups défranches,
17:30alors que le RN fait planer, et va faire planer en permanence,
17:34la menace d'une censure ?
17:36C'est comme ça que l'Assemblée Nationale est constituée.
17:40Vous savez que j'ai été très hostile
17:45au choix qui a été fait de ne pas donner
17:49de poste de responsabilité au sein de l'Assemblée Nationale,
17:53au Rassemblement National.
17:55J'étais très très hostile.
17:58Non pas que ce soit des postes de pouvoir,
18:01mais ce sont des signes de reconnaissance.
18:05Et le choix qu'un certain nombre de groupes ont fait,
18:09pas le nôtre,
18:11le choix qu'un certain nombre de groupes ont fait
18:13d'écarter le RN des responsabilités,
18:17est un choix, à mes yeux, irresponsable.
18:20Parce que quand vous êtes élu député,
18:23vous êtes parlementaire,
18:25et tous les parlementaires sont à égalité,
18:27et les parlementaires portent un certain nombre de voix,
18:30en tout cas pour ce mouvement,
18:33un nombre très important, 11 millions de voix.
18:37Est-ce que vous pourriez aller jusqu'à dire qu'il faudrait,
18:39par exemple, des ministres de l'Assemblée Nationale
18:41au sein de ce gouvernement d'ouverture ?
18:43Je ne pense pas que ce soit ni possible,
18:45ni souhaitable aujourd'hui.
18:47Pourquoi ? Parce que ce gouvernement s'est constitué
18:51en réalité sur le large espace central hors extrême.
18:57Alors le Nouveau Front Populaire le nie,
19:00parce qu'ils ne veulent pas voir, évidemment,
19:02que la situation eût été exactement la même,
19:05et peut-être plus offensive, agressive encore,
19:11à l'égard de LFI,
19:14que beaucoup de Français considèrent
19:17comme portant atteinte à leurs valeurs profondes,
19:20que beaucoup de Français,
19:22y compris ceux qui ont voté pour eux,
19:24puisque nous avons mélangé les voix pour faire barrage.
19:28Donc tout ça est extrêmement simple.
19:31Donc, je ne suis pas pour qu'on considère
19:34que l'Assemblée Nationale est une menace permanente.
19:38Je ne suis pas pour qu'on considère
19:40que le gouvernement est sous contrôle ou surveillance.
19:46C'est une réalité, chacun prendra ses responsabilités.
19:50Et les Français seront aussi les juges.
19:55Derrière l'Assemblée Nationale, il y a des juges.
19:59Et les juges, ce sont les Français,
20:01qui disent franchement,
20:03si c'est devenu ça la politique,
20:06c'est-à-dire d'abattre tous ceux qui essaient de faire quelque chose,
20:10de mener contre eux des accusations permanentes,
20:15des mises en cause permanentes, des hurlements permanents,
20:18alors les Français diront aussi leurs sentiments.
20:21Et donc, je finis ces deux phrases.
20:26Pourquoi ?
20:27Tout le monde vit avec l'idée
20:29qu'on va avoir une nouvelle dissolution dans neuf mois.
20:33Je ne suis pas partisan de cette instabilité.
20:38Je suis pour qu'on fasse ce qu'il faut,
20:44on se mette en situation de citoyen responsable.
20:50Donc vous aussi, vous menacez les extrêmes,
20:52finalement vous dites, attention, les Français vous regardent,
20:54vous êtes vous aussi sous surveillance.
20:56Je ne menace rien, j'indique ce que je crois être
21:01les fondements de la démocratie dans laquelle nous voulons vivre.
21:08Mais si on résume la situation, François Bayrou,
21:11donc la gauche va censurer Michel Barnier, elle l'a déjà dit.
21:14Le Rassemblement National dit, on verra.
21:17Et sur l'accueil même du bloc central de Michel Barnier,
21:22expliquez-nous quand même, ça a été assez frais comme accueil.
21:25Si on reprend l'accueil des députés Modem,
21:27le groupe Les Démocrates prend acte,
21:29il appartient désormais à Michel Barnier de traduire,
21:31dans les faits, le vote qui s'est exprimé.
21:33Renaissance dit, ni blocage, ni soutien inconditionnel.
21:38On a vu plus enthousiaste comme accueil, non ?
21:41Le monde parlementaire, l'univers du Palais Bourbon,
21:51est un monde dans lequel, vous le savez bien, c'est votre métier,
21:56on joue assez facilement au bowling.
22:00On lance la boule parce que c'est rigolo d'abattre les quilles.
22:06Je suis persuadé que tout le monde va réfléchir.
22:10En tout cas, c'est moi que vous interrogez.
22:12Et moi, je vous réponds.
22:14Je suis président de ce mouvement,
22:16qui est un mouvement central de cet ensemble.
22:22Moi, je soutiendrai Barnier.
22:25Je ferai tout ce que je peux pour que ça marche.
22:31Je ferai tout ce que je peux pour que le pays...
22:34Et pour ça, il y aura des ministres Modem ?
22:37J'ai la certitude que nous faisons tous ce qu'il faut pour sortir de l'impasse.
22:42Et pour ça, il faut des ministres Modem au gouvernement ?
22:44Ça dépendra de ce que Michel Barnier en pense.
22:48Parce que ce n'est pas les partis politiques qui composent les gouvernements.
22:51Ça, c'était la 4ème République.
22:53Ça veut dire que ça ne vous semble pas une évidence ?
22:56Ça me semble une évidence.
22:58Mais souvenez-vous aussi de ce que j'ai dit.
23:00Je suis pour le renouvellement.
23:02Et François Bayrou comme ministre ?
23:04Non, je ne serai pas ministre.
23:07Si ça avait été Matignon, et c'était impossible pour la raison que vous savez,
23:11même si mon nom a été assez souvent prononcé,
23:14c'était impossible parce que le président de la République a dit qu'il voulait un opposant.
23:18Et si ?
23:20Parce qu'il se trouve que les élections avaient été perturbées, chahutées,
23:33et que le président de la République voulait montrer qu'il entendait ce message-là.
23:38Donc il avait dit qu'il voulait un opposant.
23:40Vous dites du renouvellement.
23:42Est-ce que ça veut dire que vous redoutez un gouvernement qui soit trop RPR ?
23:45Non.
23:47Non, parce que ça ne passerait pas la rampe.
23:50Les premiers rendez-vous quand même de Michel Barnier ont été avec les LR,
23:55les représentants des groupes LR au Sénat et à l'Assemblée nationale.
23:58Ce sont ses amis et il voulait...
24:01Est-ce que vous craignez qu'il soit majoritaire au sein du gouvernement Barnier ?
24:05Pardon ?
24:06Est-ce que vous craignez que les LR soient majoritaires au sein du gouvernement Barnier ?
24:08Non. Je vous ai dit, équilibre et renouvellement.
24:12Équilibre, ça veut dire qu'il faut que les trois grandes sensibilités soient représentées.
24:20Ce sera une exigence pour moi qu'on représente aussi les sensibilités de gauche.
24:28Parce qu'on ne traverse pas une période comme ça sans qu'il y ait des sensibilités,
24:36l'impression qu'on n'a pas été entendu.
24:41Il faut que tout le monde sache qu'il est entendu.
24:44Et il faut que tout le monde sache qu'il est légitime à prendre sa part du redressement du pays.
24:50On va revenir sur cette composition du gouvernement.
24:52Mais juste avant la pause, quelques questions.
24:55Le grand jury. Question express.
24:57Alors, question express, c'est une série de questions et une réponse par oui ou par non, pour qu'on comprenne aussi.
25:02Si vous m'obligez à répondre par oui ou par non, vous êtes fort.
25:06Alors, le nom de l'abbé Pierre doit-il disparaître de l'espace public après de nouvelles accusations pour agressions sexuelles ?
25:12C'était dans l'actualité de la semaine.
25:14Je ne connais rien du dossier. Je ne sais pas sur quoi reposent ces allégations.
25:21Vous savez, l'abbé Pierre, il a été pour des dizaines de millions de Français le visage d'un idéal.
25:33Et je ne suis pas, moi, pour qu'on abatte les idéaux s'il n'y a pas de certitude et de certitude de fait gravissime.
25:44Donc, votre réponse est plutôt non.
25:45Faut-il garder les vitraux d'origine à Notre-Dame de Paris ?
25:49Le président veut en installer de nouveau.
25:52Il faut que chaque génération apporte sa sensibilité artistique.
26:01Mais on garde l'essentiel, l'immense majorité des vitraux, j'imagine.
26:07Qu'on en mette quelques-uns de nouveau, je suis d'accord.
26:10Et est-ce que pour la fin de la restauration et la réouverture de la cathédrale Notre-Dame de Paris,
26:14Emmanuel Macron doit-il prononcer un discours ou ça serait trop décalé ?
26:17C'est lui qui l'a voulu, fait, imposé.
26:19Je me souviens des discussions avec lui à cette époque quand tout le monde disait
26:23« 5 ans ? Mais vous êtes malade ? 5 ans on ne peut pas… »
26:26Et puis en 5 ans…
26:27Non mais la question c'est un discours du président dans la cathédrale, c'est sa place.
26:31C'est lui qui verra.
26:32Tiens, il y a une question expresse que vous ne m'avez pas posée.
26:35Je fais comme le général de Gaulle.
26:39Faut-il garder les anneaux olympiques sur la tour Eiffel ?
26:42Oui ou non ?
26:43Pardonnez-moi de vous dire, c'est stupide.
26:46Qu'on les garde un petit moment pour célébrer l'esprit olympique
26:49mais on ne va pas transformer la tour Eiffel, sa vocation, son dessin et son esthétique
26:57en y ajoutant ou en y imposant des symboles d'événements transitoires.
27:06François Bayrou, on a encore plein de questions à vous poser,
27:09notamment sur 2027 puisque nous avons un nouveau candidat cette semaine à l'élection présidentielle.
27:14On en parle juste après la pause dans le Grand Jury.
27:17A tout de suite.
27:27Suite du Grand Jury, présenté par Olivier Bost.
27:30François Bayrou, le président du MoDem, au commissaire au plan et maire de Pau
27:34et notre invité ce dimanche dans le Grand Jury.
27:37François Bayrou, en première partie, vous nous avez dit que vous ne seriez pas ministre de Michel Barnier.
27:42Pour quelles raisons ?
27:44Parce que c'est lui le Premier ministre et que j'ai beaucoup de volonté d'être en soutien de son action.
27:56Mais deuxièmement, parce que j'ai deux choses très importantes à faire.
28:03Vous savez bien, si on m'avait confié Matignon, c'est ce que je vous disais, bien sûr j'aurais accepté.
28:09J'ai deux choses très importantes à faire.
28:11D'abord, je suis maire de Pau et c'est une fonction à laquelle, dans notre ville, dans toute son agglomération
28:19et dans notre région, je tiens beaucoup.
28:21Parce que c'est la locomotive de toute une région.
28:24Il y a des emplois, des étudiants, des chercheurs.
28:27Et c'est une ville qui est en train de décoller ou de redécoller.
28:31Et c'est très précieux pour moi.
28:33Et deuxièmement, parce que je veux aller au bout de la mission du plan.
28:40Je me suis beaucoup battu pour qu'on fasse renaître le plan.
28:43Le plan, ça veut dire qu'au lieu d'être prisonnier, à quelques heures ou à quelques jours,
28:49de l'actualité des réseaux sociaux, de vos articles, toujours excellemment écrits, naturellement.
28:55Mais on a le nez sur le guidon.
29:00Et on a le nez sur l'écorce de l'arbre qui vous cache la forêt.
29:05Et je suis absolument déterminé, autant qu'on me fera confiance,
29:12à faire du plan ce qu'il devrait être.
29:15C'est-à-dire voir à 10 ans, voir à 30 ans,
29:21et faire naître un nouveau climat de réflexion autour des nouvelles politiques publiques.
29:26Le plan, ça doit être le laboratoire des nouvelles politiques publiques.
29:30On aura l'occasion d'en parler.
29:32Vous savez, le commissaire au plan dépend du président de la République, pas du gouvernement.
29:38Et en décalage avec le gouvernement, en dialogue avec le gouvernement,
29:42pour qui j'ai les sentiments que je vous ai dit,
29:44je suis persuadé qu'on peut faire apparaître des idées nouvelles.
29:48Donc vous gardez vos fonctions.
29:50Ça se passe au Parlement.
29:52À mes côtés pour vous interroger dans cette seconde partie du Grand Jury,
29:54Pauline Buisson de M6 et Perrine Tarnot de Public Sénat,
29:57une première question sur l'Assemblée Nationale, François Bayrou,
30:00où le groupe Modem va changer de place dans l'hémicycle.
30:03Vos députés vont siéger géographiquement à la gauche du groupe Renaissance
30:08pour être plus au centre sur l'image.
30:10Symboliquement, vous êtes désormais plus à gauche que la Macronie ?
30:14Non, symboliquement, nous sommes à notre place, c'est-à-dire au centre de l'hémicycle.
30:20Il y avait quand même un enjeu sur ce changement de place ?
30:22Il faut demander ça à Marc Fesneau, le président du groupe.
30:26Ce n'est pas une conversation que nous avons eue,
30:28mais je connais suffisamment ses convictions et son caractère
30:32pour savoir qu'il a réfléchi à tout ça.
30:34François Bayrou, la pression monte pour l'ouverture d'une session extraordinaire
30:38au Parlement en septembre, avant même la session ordinaire d'octobre.
30:41Vous y êtes favorable ?
30:42Oui, je suis favorable à une session extraordinaire
30:45pour que le Premier ministre puisse faire un discours de politique générale.
30:49Gérard Larcher, lui, est opposé.
30:51Il préférait attendre le mois d'octobre, le temps que le gouvernement se compose.
30:54Il pose les premiers jalons.
30:56Oui, mais chacun exprime sa sensibilité.
31:00Les relations entre le gouvernement et l'Assemblée,
31:05vous y avez passé toutes les questions, ou presque toutes les questions de votre interview,
31:11ces relations vont être cruciales.
31:14Et donc, il n'y a rien de plus normal, de plus souhaitable
31:19que de voir le Premier ministre venir devant l'Assemblée,
31:23devant les représentants des Français, et au travers d'eux, devant les Français,
31:27pour dire de manière solennelle, construite par lui,
31:31quelles vont être les orientations de la politique qui va suivre,
31:36et prendre des engagements.
31:38Mais alors, le gros morceau...
31:39En tout cas, si j'avais été Premier ministre, moi, j'aurais demandé une session.
31:42Le gros morceau, l'énorme morceau, on pourrait même dire,
31:45pour les Parlements, ça va être bien évidemment le budget.
31:48Les parlementaires des commissions des finances sont effarés.
31:51Ils ont épluché la masse de documents fournis par Bercy en début de semaine,
31:55et qui alertent sur une dérive potentielle du déficit de cette année à 5,6%,
32:01une situation budgétaire catastrophique, selon le rapporteur général du budget au Sénat,
32:06de la responsabilité exclusive de l'exécutif.
32:10Pourquoi les parlementaires ont-ils été alertés si tard,
32:14et cette situation vous inquiète-t-elle ?
32:17On avait un gouvernement démissionnaire,
32:20et le budget a été préparé par ce gouvernement.
32:23Le budget qui va venir ne sera pas le même.
32:26Mais je me suis souvent fait une observation, que je partage avec vous.
32:30J'ai souvent entendu des parlementaires s'exprimer sur le budget, sévèrement.
32:38Je n'en ai jamais entendu aucun monter à la tribune pour exiger des économies.
32:44Allez, 95% d'entre eux.
32:48Je les ai tous entendus monter à la tribune pour demander des dépenses supplémentaires.
32:52Pour toutes les catégories sociales.
32:55Elle est inquiétante ?
32:58Elle est un peu meilleure que celle des Etats-Unis,
33:01qui vit la même course en avant.
33:05Si on prend notre échelle, c'est-à-dire l'échelle européenne,
33:07on est très très très mal pensé.
33:10Vous savez bien que je pense que depuis 30 ans, nous avons fait de mauvais choix.
33:15J'ai même fait une campagne présidentielle pour alerter sur le risque que nous rencontrons.
33:20Sauf que dans la dernière période François Bayrou, c'est-à-dire ces dernières années,
33:23où nous avons tous le même contexte économique au Nouveau-Européen,
33:26nous finissons 24ème sur 27 pour nos déficits,
33:30alors que nous avions les mêmes contraintes que nos voisins.
33:32Oui, mais on est parti d'une situation beaucoup plus dégradée.
33:36A partir de 2008, la situation budgétaire du pays...
33:40Mais comme tous nos voisins européens.
33:42Non, parce que les autres ont fait d'autres choix.
33:44La crise financière de 2008, elle a touché toute l'Europe.
33:46Les autres ont fait d'autres choix.
33:47Ce n'est pas moi qui vais défendre le déficit.
33:49J'ai toujours pensé qu'il y avait là un risque qu'on ne mesurait pas.
33:53Toujours est-il qu'Emmanuel Macron...
33:55Laissez-moi vous dire ma philosophie budgétaire.
33:59Je pense que l'emprunt peut être tout à fait utile,
34:07à condition que cet emprunt soit consacré à l'investissement,
34:12c'est-à-dire à la préparation de l'avenir du pays.
34:15Quand vous construisez des universités,
34:18des voies de chemin de fer pour une meilleure conscience écologique
34:23et pour rendre le territoire plus perméable
34:27et l'aménagement du territoire...
34:29Quand vous construisez des hôpitaux et des universités,
34:32il est normal que vous en partagiez la charge
34:35avec les générations qui vont en profiter.
34:37Mais toujours est-il, François Bayrou,
34:38que la situation ne s'est pas améliorée sous Emmanuel Macron.
34:41D'ailleurs, Marine Le Pen, aujourd'hui, ironise.
34:43Elle dit qu'on comptait sur le Mozart de la finance,
34:46le Cador de la finance, et on est tous déçus.
34:48Qu'est-ce que vous lui répondez ?
34:49Je ne suis pas Mozart, mais je sais une chose.
34:51On a vécu trois crises.
34:53La première crise, c'est les gilets jaunes.
34:56Et ça a coûté de l'argent pour essayer de rééquilibrer
35:01le sentiment de toute une partie de la population.
35:06Deuxièmement, on a eu le Covid.
35:08Je ne rencontre pas un seul chef d'entreprise.
35:11C'est très rare d'avoir de la reconnaissance en politique.
35:14Mais je ne rencontre pas un seul chef d'entreprise
35:17qui ne me dise pas quand même...
35:19On peut dire ce qu'on veut, mais Macron nous a sauvés.
35:23Mais là, au minimum, il faudrait faire 30 milliards d'euros d'économie.
35:26Quelles peuvent être les priorités ?
35:28Permettez-moi de finir.
35:29La troisième crise, qui est l'Ukraine,
35:31qui est la guerre en Ukraine, et l'inflation,
35:34le renchérissement du coût de l'énergie,
35:36tout ce qui est venu avec la guerre en Ukraine.
35:38Et ce n'est pas fini.
35:40On est encore en plein là-dedans.
35:42Donc, succession de crises.
35:44Est-ce qu'on aurait pu gérer différemment ?
35:46Probablement, mais les responsables de l'époque,
35:51qui appartenaient à toutes les sensibilités,
35:53a n'ont jugé autrement.
35:56Donc, moi, je sais ce qu'il faut faire.
35:59Ou je crois savoir ce qu'il faut faire.
36:02Il faut faire un plan décennal de retour à l'équilibre des finances publiques.
36:08Vous ne pouvez pas gérer un budget par des décisions brutales.
36:12Vous ne pouvez pas aller d'un côté et aller de l'autre,
36:16virer de bord.
36:18Tout ceci, la population ne le comprend pas.
36:21Mais il faut s'inscrire dans un plan de long terme
36:25pour revenir à l'équilibre des finances publiques,
36:28selon le principe que j'indique.
36:31Vous pouvez emprunter, mais vous empruntez pour investir.
36:34On n'investit pas en France et on emprunte trop.
36:37Vous disiez qu'il n'y a aucun parlementaire qui est capable de dire
36:40où il faut faire des économies.
36:42Est-ce que vous, vous pouvez dire où il faut commencer par faire des économies ?
36:45Même si c'est sur 10 ans, il faut bien commencer par quelque part.
36:48Notamment dans le budget 2025.
36:50J'espère bien avoir cette discussion avec le Premier ministre
36:53et le futur ministre de l'économie.
36:56Parce que si j'ai des idées, c'est à eux que je les soumettrai
36:59et pas directement à vous, quelle qu'estime que j'ai pour vous.
37:03Michel Barnier veut améliorer la réforme des retraites.
37:06Les retraites, jusque-là, c'était plutôt une piste d'économie.
37:09Il veut l'améliorer notamment pour les plus fragiles,
37:12mais sans toucher à l'équilibre financier de la réforme.
37:15Qu'est-ce qu'il est possible de faire avec ces contraintes ?
37:18Passer l'âge à 65 ans ?
37:21Pardon de dire des choses choquantes.
37:24Équilibre financier de la réforme, je ne suis pas absolument sûr qu'on y soit.
37:29J'ai souvent exprimé mes regrets
37:34sur la manière dont on a conduit tous la réforme des retraites.
37:39Est-ce que le déficit est largement supérieur à ce qu'on jette sur les retraites ?
37:42J'ai mis sur la table, avec le commissariat au plan,
37:47pour la première fois la réalité des chiffres.
37:50C'était il y a deux ans ou un peu plus.
37:54La réalité des chiffres.
37:56Sur lequel tout le monde mentait.
37:59Y compris avec des déclarations surprenantes
38:02du conseil d'orientation des retraites
38:04qui prétendaient qu'on était en excédent.
38:07On est en excédent comptable, quelquefois.
38:11Mais l'excédent comptable n'est établi
38:17que parce qu'on a une subvention de dizaines de milliards,
38:2330 milliards, 40 milliards,
38:26du contribuable public
38:29et des générations à venir,
38:32parce que ce sont des sommes dont nous n'avons pas le premier euro
38:36et que nous empruntons.
38:38C'est-à-dire que ce sont les plus jeunes de la nation
38:42et leurs enfants qui paient les retraites d'aujourd'hui.
38:45Vous connaissez quelque chose de plus scandaleux que ça ?
38:48Moi pas.
38:49C'est moralement, socialement, sociétalement inacceptable.
38:55Et donc je pense qu'il y a place et matière,
39:00et après tout le plan est prêt à prendre ses responsabilités
39:03pour une réflexion de fond sur ces sujets
39:06dans le cadre de cette idée que je défends
39:09d'un retour en disant à l'équilibre des sciences publiques.
39:13Est-ce que cet après-midi, avec le Premier ministre,
39:16vous parlerez aussi de la proportionnelle ?
39:19La proportionnelle est une évidence désormais.
39:22Je l'ai expliqué souvent et notamment dans une interview au Monde.
39:26Pour vous, le contexte politique est favorable pour enfin avoir la proportionnelle ?
39:29Emmanuel Macron l'a promis depuis 2017.
39:31Je suis certain que le Président de la République a discuté de ça avec le Premier ministre.
39:35Et je suis certain que c'est une question qu'on ne peut pas éluder
39:39parce que ce n'est pas une question politique.
39:42C'est une question de société.
39:45Si vous regardez la France aujourd'hui prétendre
39:48qu'elle doit être découpée entre deux partis ou deux factions,
39:52c'est complètement ridicule.
39:54C'est un pays qui est devenu pluriel et pluraliste avec des sensibilités.
39:58À la proportionnelle, la vie politique ne serait pas plus simple demain avec la proportionnelle ?
40:02Elle ne serait pas plus simple mais elle serait plus loyale.
40:05C'est-à-dire que la proportionnelle a cette vertu
40:09de ne pas vous obliger à vous allier avec des gens
40:12dont vous ne partagez aucune des idées.
40:15C'est ça le scrutin majoritaire.
40:18Périnternement.
40:20J'ai souvent énoncé une règle, une loi de Bayrou.
40:26Les partis se tiennent par leur noyau dur.
40:29Regardez les Etats-Unis.
40:32Si vous avez une confrontation bi-polaire entre eux...
40:38On verra si la loi de Bayrou sera retenue.
40:41Le moment pour vous est arrivé pour la loi de Bayrou.
40:43François Bayrou, la France Insoumise a lancé une procédure
40:46de destitution du président de la République.
40:49Un Français sur deux souhaite le départ du chef de l'État.
40:52Est-ce que vous prenez cette menace au sérieux ?
40:55De destitution parlementaire, non.
40:57Ce n'est pas une menace.
40:59C'est vrai que les mots « destitution », « démission »
41:01sont un peu rentrés comme ça dans la tête des Français,
41:05dans l'atmosphère, comme on dit.
41:07Pardonnez-moi.
41:09Peut-être qu'il ne faut pas mélanger les deux.
41:11Ils sont deux choses différentes, mais qui peuvent se rejoindre.
41:14Il y a des oppositions.
41:16Je pense qu'elles s'estomperont.
41:18Et je souhaite qu'elles s'estompent.
41:20S'estompent notamment grâce à ce nouvel équilibre des pouvoirs.
41:25Et que le président de la République puisse faire entendre
41:28le fond de ce qu'il pense et qui ne ressemble pas
41:31à ce qu'on lui prête.
41:33Parce que, par exemple, on dit « c'est un libéral ».
41:37C'est le pays qui dépense le plus d'argent
41:39pour ses services publics.
41:41Et donc, tout ça, c'est des blagues.
41:43Et donc, ce scénario-là est une offense au bon sens.
41:49Mais peut-être que ce rééquilibrage va nous aider
41:51à mieux apprécier les choses.
41:53On va parler de la suite, maintenant.
41:59Et on ne sait pas quand est-ce que c'est, la suite.
42:01Quand vous avez vu, probablement sur votre téléphone,
42:03tomber l'alerte « Édouard Philippe est candidat à l'élection présidentielle ».
42:07C'était mardi, en début de soirée.
42:09Vous vous êtes dit quoi ?
42:11Je me suis dit que ce n'était pas tout à fait le moment
42:13que j'imaginais.
42:15Je pense qu'en politique, les fautes de temps
42:18sont plus graves qu'en grammaire.
42:21Mais est-ce vraiment une faute de temps ?
42:22Parce qu'Édouard Philippe ne parle pas de 2027,
42:24mais de la prochaine élection présidentielle,
42:27sous-entendant, ou même, c'est même plus un sous-entendu,
42:29qu'elle pourrait être précipitée.
42:31Édouard Philippe a été, que je sache,
42:35trois ans Premier ministre,
42:38sous l'autorité du Président de la République.
42:41Son parti appartient à la majorité.
42:44Appartenait à la majorité.
42:47Et appartenu au Bloc central pour ses élections,
42:50quoiqu'avec nuance,
42:52ça ne me paraissait pas évident de considérer
42:58que c'était contre le Président de la République
43:02qu'il fallait braquer les feux.
43:04Et là, vous considérez qu'Édouard Philippe...
43:07Je ne considère rien, je vous ai dit tout ce que je pense.
43:10Mais c'est un timing, comme on dit,
43:16qui a été surprenant pour beaucoup de gens,
43:19et je suis de ceux qui ont été surpris, oui.
43:21Et cette idée d'une présidentielle anticipée,
43:23ça vous paraît possible, probable ?
43:26J'ai beaucoup discuté de ça, par exemple,
43:29avec François Hollande,
43:32avec qui je parle depuis longtemps,
43:34comme vous savez, avec des hauts et des bas.
43:37Mais en politique, il y a des hauts pour beaucoup de gens,
43:40et il y a des bas pour beaucoup de gens,
43:42et pour beaucoup de relations.
43:44Si nous ne faisons pas attention à nos institutions,
43:49et si je pouvais faire passer le souci qui est le mien sur ce sujet,
43:57si nous nous aventurions sur un chemin
44:01dans lequel la règle devient
44:06on va abattre celui qui est en place pour organiser de nouvelles élections.
44:11C'est une fragilisation extraordinaire de nos institutions.
44:15Mais qui vous visez comme ça ?
44:17Et je ne connais personne, je vise vous,
44:19puisque c'est ça la question que vous me posez.
44:21Je ne connais personne de responsable dans la République
44:29qui se livre ou se laisse aller à ce scénario-là.
44:36Parce que nos institutions ne s'en relèveraient pas.
44:40On peut être d'accord, on peut être en désaccord,
44:44on peut exprimer son accord ou son désaccord dans la vie publique,
44:47dans les médias, à l'Assemblée Nationale,
44:50mais l'idée de cibler ce qui est la clé de voûte de nos institutions,
44:57et c'était pareil, mes propos auraient été exactement les mêmes
45:03avec François Hollande, avec Nicolas Sarkozy,
45:06avec Jacques Chirac, avec François Mitterrand.
45:10J'étais dans l'opposition.
45:12J'étais un jeune aventurier de l'opposition.
45:17Jamais on n'a pensé que le but à atteindre était,
45:22et Dieu sait que les haines à l'égard de François Mitterrand
45:26étaient considérables,
45:28et les haines à l'égard de Giscard étaient considérables,
45:31et les haines à l'égard de Nicolas Sarkozy étaient considérables.
45:36Jamais personne n'a considéré,
45:38et nous ne l'aurions pas accepté, je ne l'aurais pas accepté,
45:42jamais personne n'a considéré que le but devait être d'abattre la fonction présidentielle.
45:47Et donc c'est pourquoi je suis sévère à l'égard de ces démarches-là.
45:53Il nous reste quelques minutes.
45:55Le grand jury, tout est politique.
45:58Alors, tout est politique, effectivement.
46:00L'affaire Pellicot bouleverse la France.
46:03Cette femme a été violée par des dizaines d'hommes, droguée par son mari.
46:07Une mission sur la soumission chimique avait été confiée,
46:10notamment à la députée modem Sandrine Jossot.
46:12Mission interrompue par la dissolution, François Bayrou.
46:15Est-ce que vous demandez d'urgence à Michel Barnier de rétablir cette commission ?
46:20D'abord, une commission, ce n'est pas le Premier ministre qui l'établit.
46:24C'est l'Assemblée.
46:25Et donc oui, je soutiens, Sandrine Jossot a été, comme vous le savez...
46:29Victime elle-même.
46:30Victime elle-même d'une tentative de cet ordre-là.
46:34Et de ce genre de saloperies-là.
46:39Il faut remplacer les choses par leur nom.
46:41Et donc oui, je pense qu'il est normal et légitime
46:48que cette commission soit recréée.
46:51Mais il est normal et légitime que nous portions tous en nous la révolte.
46:56J'ai trouvé cette femme très courageuse de vouloir un procès public.
47:02Pour affronter l'horrible et l'indicible.
47:08Et donc oui, je ne suis pas prêt à faire preuve
47:13ni d'indulgence ni de silence sur ces sujets.
47:17Périnternant.
47:18Alors dans le quotidien des Français, il y a bien sûr les salaires,
47:20le pouvoir d'achat va être les premiers dossiers importants pour Michel Barnier.
47:25Est-ce que vous, vous êtes favorable pour ouvrir le dossier
47:28de la désmicardisation des salaires ?
47:31Oui.
47:33Et la désmicardisation de la société du travail est un très grand sujet.
47:39Parce que, sans doute avec de bonnes intentions,
47:43on a accumulé les exonérations et les aides sur les salaires au SMIC.
47:52Ce qui fait que de plus en plus de Français se trouvent au SMIC.
47:5620% ! On approche les 20%.
47:59On était à 10%, on approche les 20%.
48:02Et plus on fait monter cette marée de personnes au SMIC,
48:11plus d'une certaine manière, on introduit, je ne sais pas comment on peut dire...
48:18De la stabilité politique aussi par la même ?
48:20Du découragement parmi les salariés.
48:23Est-ce que vous êtes favorable à une grande convention sociale
48:27pour réfléchir à cette question ?
48:29Ce serait aussi une manière de retisser du lien avec les partenaires sociaux
48:32dont on dit qu'ils ont été pas mal malmenés.
48:34Travaillant sur ce sujet, je suis prêt moi-même à y travailler.
48:37Marie-Lise Léon parle de la CFDT, parle d'entreprises biberonnées.
48:41Oui, sûrement. Vous voyez, quel est le schéma normal
48:47dans une société comme on pourrait imaginer qu'elle soit ?
48:51Vous avez un SMIC qui permet aux plus jeunes, aux plus inexpérimentés
48:57d'entrer tôt dans le monde du travail.
49:00Chaque fois qu'ils le peuvent et qu'ils le veulent.
49:04Et après, leur salaire monte.
49:06Or, dans la société dans laquelle nous entrons,
49:09et c'est ça la smicardisation.
49:12Vous entrez au SMIC, vous restez au SMIC toute votre vie.
49:16Ça n'est pas bon, ni pour vous-même, ni pour votre équilibre,
49:20ni pour votre famille, ni pour l'image que vous avez de vous-même.
49:25Et donc, cette idée-là, elle doit être explorée.
49:30Elle doit pas être explorée uniquement par des augmentations massives du SMIC.
49:39Parce que plus vous faites des augmentations massives,
49:42plus vous avez de personnes au SMIC.
49:44Le tout dernier moment de ce Grand Jury.
49:47Le Grand Jury inattendu.
49:50Avec une dernière question, François Bayrou, plus personnelle.
49:53Vous incarnez le centre depuis au moins une vingtaine d'années.
49:57Avez-vous songé un jour à votre succession pour reprendre le flambeau du centre ?
50:02Oui, naturellement. J'ai même fait ce qu'il fallait.
50:05Mais, vous savez, probablement, dans les années précédentes,
50:10cette question m'aurait agacé.
50:12Aujourd'hui, ma réponse est toute prête.
50:14Je suis plus jeune que le nouveau Premier ministre.
50:17Et donc, cette réalité, qui est purement d'état civil,
50:23et aussi de tempérament, et aussi d'envie de vivre,
50:27apporte en elle-même la réponse à votre question.
50:30Merci beaucoup, François Bayrou, pour ce Grand Jury.
50:33Bon dimanche à tous, à la semaine prochaine.