Police aux frontières : Fernand Gontier propose «une véritable formation, une validation d'acquis professionnels pour ces policiers»

  • la semaine dernière
ABONNEZ-VOUS pour plus de vidéos : http://www.dailymotion.com/Europe1fr
À 7h42, Europe 1 reçoit chaque matin un invité pour décrypter, commenter et analyser l'actu du jour.
Retrouvez "L'invité actu" sur : http://www.europe1.fr/emissions/l-interview-de-7h40
LE DIRECT : http://www.europe1.fr/direct-video


Retrouvez-nous sur :
| Notre site : http://www.europe1.fr
| Facebook : https://www.facebook.com/Europe1
| Twitter : https://twitter.com/europe1
| Google + : https://plus.google.com/+Europe1/posts
| Pinterest : http://www.pinterest.com/europe1/
Transcript
00:00Vous écoutez Europe 1, il est presque 7h moins 20, 8h moins 20.
00:03La France se donne-t-elle vraiment les moyens de lutter contre l'immigration clandestine ?
00:06Eh bien sans doute pas, c'est le signal d'alarme que lance l'ancien directeur de la police aux frontières
00:10qui pointe un manque d'effectifs, de coordination inter-service
00:12et des procédures de plus en plus complexes qui empêchent une politique efficace en la matière.
00:16Et pour en parler avec vous Lionel Gougeot, Franck Gontier est votre invité,
00:19il est l'ancien président de la police aux frontières.
00:21Fernand Gontier, très exactement. Bonjour Fernand Gontier.
00:24Bonjour.
00:25Merci d'être en ligne ce matin pour Europe 1.
00:28Cette note que vous avez rédigée pour l'observatoire de l'immigration et de la démographie,
00:32vous détaillez les freins qui empêchent un contrôle, on va dire efficace de l'immigration
00:36aux frontières de la France et de l'Europe.
00:38Pour ce qui est de nos frontières intérieures,
00:40vous pointez le manque de moyens et d'effectifs pour lutter contre les entrées clandestines.
00:44Ça veut dire quoi ? Ça veut dire qu'il n'y a tout simplement pas assez de policiers aux frontières ?
00:48Oui, alors cette note est un résumé de l'ensemble des entraves
00:53ou des difficultés auxquelles sont confrontées les services de la police aux frontières.
00:57Mais c'est aussi une note qui formule de nombreuses propositions.
01:01Les entraves et les difficultés sont de différentes natures.
01:05D'abord, effectivement, vous l'avez indiqué, des questions d'effectifs,
01:09mais on ne peut pas tout résumer à des questions d'effectifs.
01:12C'est surtout, j'allais dire, la difficulté pour nous, c'est depuis 2015,
01:17puisque c'est le rétablissement des contrôles frontières liés à la crise terroriste,
01:21c'est la difficulté de contrôler 2900 kilomètres de frontières terrestres
01:25avec des pays qui sont sources, on va dire, importantes d'immigration,
01:30comme l'Italie et l'Espagne.
01:32C'est environ 100 000 personnes par an qui sont interceptées à ces frontières,
01:37qui sont détectées.
01:38Alors détectées ne veut pas dire forcément toutes interpellées,
01:42mais en tout cas, voilà, c'est une vraie difficulté,
01:46à la fois liée aux questions d'effectifs, mais aussi aux questions de technologie.
01:51Et depuis peu, depuis un arrêt du Conseil d'État de février 2024,
01:55des questions aussi juridiques.
01:57On va y revenir sur l'aspect juridique,
01:59mais vous pointez notamment un problème de recrutement et de formation.
02:04Absolument, alors je ne suis pas le premier à le mettre en avant.
02:09Déjà en 2021, la commission d'évaluation Schengen avait inspecté la France à ce titre,
02:15c'est logique, nous devons rendre des comptes,
02:18et il avait été pointé une insuffisance de formation des personnels
02:24affectés au contrôle frontière, que ce soit les frontières extérieures,
02:28bien évidemment, et frontières intérieures.
02:30Donc comment dire, le contrôle frontière est un métier à part entière,
02:35c'est une spécialité, c'est vraiment un domaine extrêmement complexe,
02:40aussi complexe que la procédure pénale,
02:42qui exige une formation lourde, que ce soit pour les gardes frontières
02:46qui sont affectés au contrôle,
02:47que pour les agents, les officiers de police,
02:50qui sont chargés des procédures.
02:52Alors ça veut dire quoi ?
02:53Ça veut dire qu'il faudrait une espèce de formation type garde frontière ?
02:56Il faudrait que ce soit un métier à part entière d'une certaine façon ?
02:58Tout à fait, tout à fait, comme le fait Frontex à son niveau.
03:02Frontex a des formations, on va dire, spécifiques,
03:07qui permettent de former de manière professionnelle des gardes frontières.
03:13Ce n'est pas un métier comme les autres,
03:15il faut pouvoir lire un passeport, détecter le profil d'un migrant,
03:20procéder à des auditions.
03:22C'est un métier vraiment tout à fait particulier,
03:26et j'explique dans ma note que le contrôle frontière
03:29revêt différentes natures, que ce soit le contrôle migratoire,
03:32même la recherche du renseignement,
03:35la détection d'infractions transnationales.
03:39Donc c'est vraiment une spécialité au sein de la police nationale,
03:45et c'est la raison pour laquelle je propose
03:48qu'on ait une véritable formation avec une validation d'acquis professionnel
03:55pour ces policiers qui ont besoin d'être aguerris.
03:59Alors beaucoup le sont déjà, c'est vrai, par eux-mêmes,
04:02et souvent la police aux frontières forme elle-même ses propres effectifs,
04:06mais je pense qu'aujourd'hui nous devons passer à la vitesse supérieure
04:10et avoir une véritable filière de formation
04:13comme on peut l'avoir dans d'autres domaines,
04:15comme le maintien de l'ordre, le renseignement,
04:17ou encore la police judiciaire,
04:19il faut que nous ayons des agents particulièrement aguerris,
04:23prêts à faire face à toutes les situations.
04:27Alors vous l'évoquiez, l'autre écueil,
04:29c'est la complexité des procédures juridiques
04:32qui empêchent les expulsions notamment.
04:34Oui, alors vous savez, j'ai écrit un livre
04:38qui s'appelle La face cachée de l'immigration,
04:40qui explique tout ça dans le détail,
04:42c'est-à-dire qu'aujourd'hui,
04:44il est impossible de refuser l'entrée à notre territoire
04:51sur nos frontières intérieures
04:53depuis un arrêt du Conseil d'État,
04:55il y a véritablement des entraves juridiques,
04:59ça c'est une question de moyens,
05:01et ça ne coûte pas très cher en fait,
05:03mais s'il vous plaît, il y a un texte européen,
05:06qui est la directive de 2008, la directive retour,
05:09qui nous empêche véritablement
05:11d'avoir un vrai contrôle aux frontières
05:13avec des décisions, on va dire, régaliennes,
05:18qui nous permettent de faire face à ces afflux massifs,
05:21et notamment, puisque l'immigration,
05:23je l'ai dit au départ,
05:25elle est en provenance de pays membres de l'Union Européenne
05:28comme l'Espagne et l'Italie.
05:29Mais vous savez à quel point, sur le plan politique,
05:31ce sujet est sensible et rencontre des oppositions.
05:34Oui, non mais écoutez, je pense qu'à un moment donné,
05:37il faut prendre ses responsabilités.
05:39Nous avons une sous-frontière,
05:41la frontière avec l'Italie et l'Espagne,
05:43elles sont des sous-frontières par rapport à la frontière,
05:45on va dire, de Roissy,
05:47ou la frontière franco-britannique.
05:49C'est ce que j'appelle une frontière molle,
05:51c'est-à-dire que nous n'avons pas les mêmes pouvoirs
05:53que sur une frontière extérieure.
05:55Alors si la France a décidé de rétablir ses contrôles
05:57aux frontières intérieures, encore faut-il
05:59avoir les mêmes outils, les mêmes instruments,
06:01les mêmes moyens de contrôle et de procédure
06:05que sur une frontière extérieure.
06:07Pour avoir effectivement une politique efficace en la matière.
06:10Merci Ferdinand Gauthier.
06:11Je rappelle, le titre de votre livre sorti en début d'année,
06:14« La face cachée de l'immigration »
06:16paru aux éditions Baudelaire.
06:17Merci à vous, bonne journée.

Recommandée