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Aujourd'hui dans "Punchline", Julien Pasquet et ses invités débattent des émeutes au Royaume-Uni.
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Transcription
00:00un week-end émaillé de grosses tensions au Royaume-Uni,
00:03avec des manifestations violentes dans plusieurs villes.
00:06Je voudrais qu'on revienne un instant sur les différentes images
00:09et les heures observées outre Manche avec Tancrede Guillotel.
00:13À la une des journaux britanniques ce matin,
00:16un seul sujet au cœur des préoccupations.
00:18Les émeutes, survenues dans de nombreuses villes du pays ce week-end.
00:22Le Royaume-Uni se réveille groggy, marqué par ces images de violence.
00:26À Roserham, dans le nord du pays,
00:27un hôtel hébergeant des demandeurs d'asile a été attaqué
00:30par plusieurs centaines d'émeutiers, au cri de slogans anti-immigration.
00:34John Healy, secrétaire d'État à la Défense britannique, déplore les dégâts.
00:38J'étais ici hier avec les équipes de secours, la police, les ambulances.
00:43Vous pouvez le voir, la zone a été dévastée.
00:45Le personnel et les résidents étaient en état de choc
00:47et épris par la peur tout au long de la journée d'hier.
00:53Ils se sont barricadés dans l'hôtel
00:54alors que des gens cassaient les fenêtres et essayaient d'y mettre le feu.
00:58Les affrontements opposent force de l'ordre et émeutiers.
01:01Lindsay Butterfield, chef adjointe de la police du South Yorkshire, fait le bilan.
01:08Au moins douze de nos agents ont été blessés par des objets
01:11tels que des briques, des poteaux de clôture, des branches
01:14et d'autres projectiles qui leur ont été lancés.
01:17Sur l'ensemble du pays, plusieurs centaines de manifestants ont été interpellés.
01:21Au sortir d'une réunion de crise ce matin,
01:23le Premier ministre britannique Keir Starmer a annoncé vouloir faire preuve
01:28de fermeté.
01:30Mon objectif est de veiller à ce que nous mettions fin à ce désordre,
01:33à ce que les sanctions pénales soient rapides et visibles.
01:35C'est pourquoi j'ai demandé que l'on envisage d'identifier
01:37et de nommer au plus tôt ceux qui se sont impliqués.
01:40Beaucoup ont été arrêtés, certains ont été inculpés,
01:43certains d'entre eux sont actuellement devant le tribunal.
01:50Le Royaume-Uni n'avait pas connu une telle flambée de violence depuis 2011.
01:55Ce qui est intéressant de voir, notamment Jérémy Stubb,
01:58c'est la réaction du gouvernement parce qu'on voit des prises de parole
02:00dans l'urgence, des demandes du nouveau Premier ministre,
02:03là encore, qui font face à l'urgence de la situation.
02:07La vérité, c'est que le gouvernement britannique n'est pas très habitué
02:10à ce genre de situation.
02:11Il y a très peu de manifestations aussi violentes dans le pays.
02:15En fait, on a une grande tradition.
02:20C'est pas la même chose qu'en France.
02:23D'ailleurs, la tradition au Royaume-Uni, plutôt,
02:26est de manifestations d'émeutes spontanées.
02:30Mais dans la durée comme ça, peut-être un peu moins.
02:33Peut-être un peu moins, mais quand même,
02:36on peut faire la comparaison avec Naël l'année dernière en France.
02:40Et on va en parler tout à l'heure.
02:43Il y a des similarités, mais c'est très différent.
02:45Ce qu'on a là, il faut le souligner,
02:48ces émeutes ne sont pas arrivées dans le vide.
02:53Il y a toute une série d'événements qui ont précédé, par exemple...
02:58Et la tuerie de Southport est une forme de goutte d'eau
03:00qui fait déborder le vase, si je puis dire.
03:02En quelque sorte, déjà, l'année dernière,
03:05je pense qu'il y avait deux jeunes étudiants
03:08qui ont été poignardés par un migrant
03:11qui a été identifié en tant que tel dans la région du Nord.
03:16Tentative d'assassinat sur un militaire en uniforme
03:19dans le Kent au mois de juillet avec un couteau.
03:21Tout ça, c'est du couteau.
03:25Ensuite, émeute dans la ville de Leeds,
03:29une semaine avant l'événement de Southport,
03:33quand les services sociaux ont essayé d'emmener quatre enfants
03:37qui appartenaient à une famille de gens du voyage de Rome.
03:41Alors là, grande émeute.
03:44La police bat la retraite et revient le lendemain.
03:49On voit aussi des véhicules à police se renverser et brûler.
03:53Alors les gens se disent, mais quand c'est pas
03:57les classes ouvrières blanches,
04:01il y a une certaine indulgence ou compréhension.
04:04Mais dès que c'est les classes ouvrières blanches,
04:06là, on tape fort. Il faut être très strict.
04:10Et tout le discours du gouvernement de Keir Starmer,
04:12qu'on vient de voir là, c'est un discours classique.
04:14Il faut taper fort, il faut punir.
04:18C'est tout le discours disciplinaire.
04:20C'est comme M. Macron l'année dernière,
04:23Londres, Londres, Londres, toujours la même chose.
04:26Ce qu'on voit en Angleterre, Vincent Roy,
04:28qui vient de nous rejoindre sur le plateau.
04:30Ici, en France, question rhétorique,
04:33parce que je connais un petit peu la réponse,
04:34mais la laïcité nous protège de ce phénomène ?
04:37Non. Le problème, c'est que la laïcité
04:40est de plus en plus inefficiente.
04:42On le voit bien.
04:46Beaucoup de choses ont été dites autour de ce drame de Southport,
04:50notamment sur l'identité, l'idéologie du présumé coupable.
04:54Et en l'occurrence, rien n'est vérifié pour le moment.
04:57C'est pour ça que je parle d'étincelles, de gouttes d'eau.
04:59Mais le fond de cette affaire précisément,
05:01personne ne le connaît vraiment aujourd'hui.
05:03Tout ce qu'on sait, c'est que 9 gamines ont été poignardées
05:06et que 3 sont mortes.
05:07Ça, c'est une indignation nationale
05:09et personne ne peut revenir là-dessus.
05:10Oui, sauf que là, dans le cas qui nous occupe,
05:12pour ce qui est de l'Angleterre,
05:14le gouvernement, au départ, le gouvernement anglais,
05:16est resté relativement flou,
05:17tout à la fois sur l'identité de l'individu.
05:21Et ce flou, me semble-t-il,
05:23a sans doute fait monter une colère.
05:27Il faut être...
05:29Le gouvernement n'ayant pas été assez net,
05:32il a nourri cette colère qui s'est amalgamée au fil des mois,
05:35comme vous le rappeliez, avec le drame de Leeds.
05:38Tout à fait. Le jour de l'événement,
05:41il était encore mineur.
05:43Donc, on n'avait pas le droit de divulguer son identité.
05:47Et comme, je pense, après-demain, il aura 18 ans,
05:50un juge a décidé qu'il était illicite de divulguer son identité.
05:54Voilà. Et je pense que là,
05:56il y a eu une erreur d'appréciation, d'une certaine façon.
06:00Et le gouvernement n'ayant pas mesuré la colère,
06:02puisque ce qu'on voit là, me semble-t-il,
06:04c'est tout de même la face visible de l'iceberg.
06:07La colère anglaise, elle est cachée.
06:10Là, elle est révélée.
06:12Mais effectivement, le fait d'avoir amalgamé au fil des mois
06:16un certain nombre de colères fait que maintenant, elle éclate.
06:19Et par conséquent, c'est difficile de transposer
06:22ces événements-là sur la société française.
06:25Mais pour répondre très directement à votre question,
06:27on voit bien qu'on a bien vu, au cours des derniers mois,
06:31que la laïcité ne nous protégeait plus de grand-chose,
06:34et que l'idée communautariste anglaise,
06:37typically English, si j'ose dire,
06:40les protège non plus de rien.
06:42C'est vrai que c'est la croisée de beaucoup de phénomènes, ce qui se passe.
06:44Jeremy Stubbs, on ne peut pas expliquer ce que l'on voit
06:47uniquement par le biais de l'attaque de Southport.
06:50C'est globalement l'échec d'une politique migratoire
06:53qu'on a évoquée tout à l'heure dans la première horme,
06:55et sur laquelle vous pouvez revenir.
06:56L'échec d'une idéologie multiculturaliste à l'anglaise
06:59qui est bien différente ici.
07:01Il y a peut-être aussi un retour de bâton post-Brexit
07:03que les Britanniques sont en train de payer.
07:05Une croisée des chemins ?
07:07Non, je pense que le seul lien avec le Brexit,
07:10c'est que ce sont les mêmes personnes
07:12qui se considèrent comme des laissés-pour-compte
07:15de la mondialisation, de l'immigration,
07:18de toutes les autres politiques modernes.
07:21Parce qu'on parle d'ultra-droite, d'extrême-droite,
07:23mais est-ce que ça suffit à qualifier les Britanniques en colère aujourd'hui ?
07:26Non, non, non.
07:27Il y a, comme je l'ai dit tout à l'heure,
07:29des groupuscules qui sont très actifs,
07:32mais qui canalisent en quelque sorte une colère générale.
07:37Et comme le disait Vincent,
07:41c'est la partie visible,
07:44mais ça couvre depuis très longtemps.
07:47On peut dire que le Brexit, c'est une des manifestations,
07:50mais ce sont, pour tout dire,
07:52les classes ouvrières blanches
07:55qui sont frappées par le chômage.
07:58Et qui cherchent un bouc émissaire aussi, d'une certaine manière.
08:01Peut-être un bouc émissaire,
08:03mais qui surtout voient le deux poids, deux mesures.
08:06C'est-à-dire qu'entre eux, ils ont des plaintes.
08:08Non, non, non, on ne les prend pas au sérieux.
08:11Et pourtant, ce sont les électeurs naturels des travaillistes.
08:16Et les travaillistes devraient faire plus pour les bichonner quand même un peu.
08:23Et là, ils vont taper dessus,
08:25ils vont aliéner une partie de leur propre électorat.
08:28Ce n'est pas un bon début pour ce qu'est Starmer.
08:31Classes ouvrières blanches non urbaines.
08:33Un dernier mot, Gilles Mihaili, il nous reste une minute sur ce sujet.
08:35Oui, il y a un sentiment de dépossession
08:38qui a été aggravé ces derniers mois.
08:40Car pendant les manifestations contre la guerre au Gaza,
08:44d'ailleurs parfaitement légitimes,
08:46on peut critiquer Israël, on peut demander de cesser le feu,
08:49on a vu trop de barbus, trop de femmes voilées
08:53qui s'est comportée comme une force expéditionnaire en terre qu'il faut conquérir.
08:59Pas comme des Anglais d'origine quelconque, on s'en fout,
09:02qui manifestent en tant qu'Anglais ou qu'Anglaise
09:05son indignation vis-à-vis un supposé massacre ou une guerre.
09:09Mais véritablement comme une force qui va conquérir et changer le pays.
09:16Et je pense que ce qui énerve les gens, c'est ça.
09:20Ils appellent ça immigrés,
09:23mais ce sont des gens qui refusent de s'adapter,
09:25ils veulent adapter les lieux qui les accueillent.
09:28Oui, comme une forme de haine de l'Occident d'ailleurs,
09:30d'une manière un peu plus globale.
09:32Voilà ce que l'on pouvait dire dans cette première partie
09:34sur ce qui se passe en Angleterre.
09:36Et on aura bien sûr un œil attentif,
09:38parce que pour l'instant la situation ne redescend pas forcément.
09:41Jeremy Stubbs.
09:42Et on verra combien de temps ça peut durer.

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