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Lundi 1 juillet 2024, SMART BOURSE reçoit Kevin Thozet (Membre du comité d'investissement, Carmignac)

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00:00Oui, c'est bien le sujet. Entre incertitudes et risques politiques d'un côté et fondamentaux
00:15macro-économiques voire micro-économiques avec les résultats d'entreprises qui vont
00:19revenir, qu'est-ce qui fait bouger les marchés aujourd'hui ? Qu'est-ce qui va faire bouger
00:22les marchés demain ? On en parle avec Kévin Thauzet, membre du comité d'investissement
00:25de Carmignac qui est à mes côtés en plateau. Bonjour Kévin.
00:27Bonjour Joachim.
00:28Merci beaucoup d'être là. Vos commentaires chez Carmignac. Votre analyse de la situation
00:33politique française dans cet entre-deux-tours et de ce qu'elle peut impliquer pour un investisseur
00:39investi en France et plus généralement investi en Europe aujourd'hui, Kévin.
00:44Il y a plusieurs choses. Le premier, c'est qu'on a le risque extrême et sans mauvais
00:48jeu de mots, ce qu'on appelle le « tail risk » en anglais qui se réduit avec les
00:52résultats de ce premier tour et donc la probabilité de voir une majorité absolue d'un parti
00:57non orthodoxe qui est moins élevé. Pour autant, on est dans l'entre-deux-tours.
01:01Il faut, je crois, ne rien écarter et ça, ça amène une vraie respiration sur les marchés.
01:07On le voit sur les primes de risque attachées aux souverains français, aux actions bancaires
01:13qui performent quand même très fort en ce début de semaine ou sur l'euro.
01:18Pour autant, il me semble que c'est quand même une lecture un petit peu optimiste
01:22de la situation. Si je ne dois pas rafraser Shakespeare, beaucoup de bruit pour rien,
01:27mais quand même, on va dire, le scénario qui semble être anticipé par les marchés,
01:31c'est celui d'une non majorité et donc devoir faire des alliances pour pouvoir gouverner.
01:39Ce n'est pas forcément ce qui se fait de mieux en France. Ça se fait très bien dans
01:42d'autres pays européens, pas forcément en France. C'est là où le parallèle avec
01:45l'Italie ou la Belgique me semble peut-être quand même un petit peu optimiste.
01:51Donc ça, c'est un élément. Et l'autre, c'est quoi ? On s'était souligné à l'instant
01:55par Monsieur Plassart, c'est qu'on ne va pas avoir de grandes réformes structurelles
01:59sur cet horizon de temps-là. On a des marchés de l'arrière qui sont faits, une réforme
02:04de rétro-pédalage sur la réforme des retraites qui devait être mise en place là et on attend.
02:09Donc ça, c'en est un. Ça veut dire quoi ? Ça veut dire l'arbre magique, l'argent
02:14magique qui continue à être distribué. Ça, ce n'est pas forcément une bonne nouvelle
02:18pour la croissance, la croissance potentielle et puis pour les finances publiques françaises.
02:22Ça veut dire que ce scénario un peu central que joue le marché aujourd'hui, les anglo-saxons
02:27parlent de hung parliament, parlement suspendu, ingouvernable, sans majorité absolue, etc.
02:33Oui, ça peut apporter un soulagement de court terme, mais ce n'est pas un scénario ultra-bullish
02:39non plus pour le moyen-long terme. C'est ce que je comprends, Kévin.
02:43Oui, tout à fait. C'est-à-dire que là aussi, il y a souvent des précédents qui
02:46sont utilisés, celui de l'Italie avec Mélanie, mais Giorgia Melloni n'est pas
02:51Giordane Bardella. Il y a quand même des points de différence majeurs qui soient liés
02:55au fonctionnement de la démocratie italienne, plutôt sur un parlement contre un président.
03:01On va dire une sensibilité de la population italienne à des périodes d'austérité
03:07marquées, à du stress sur les marchés financiers. On se rappelle de 2016 notamment, moins le
03:11cas en France. Et puis, je crois qu'il y a aussi une position pro-Europe assez forte
03:16de la part de Mélanie, qui n'est pas du tout le cas de M. Bardella. Donc, ce parallèle-là
03:21me semble quand même un petit peu tiré par les cheveux. Et de même, sur des gouvernements
03:25on va dire dits plus techniques, je suis moins convaincu que ça fonctionne en France.
03:32Donc, à votre question qui était comment est-ce qu'on fait pour essayer de se désensibiliser,
03:37en tout cas de gérer avec ça, je crois qu'il y a plusieurs éléments. Un, c'est l'internationalisation.
03:40C'est important quand même. Les principes de base, mais pas mettre tous les deux dans
03:43le même panier quand on investit, c'est tout à fait salutaire je crois. Donc, ça,
03:47c'en est un. Et il y en a un deuxième, c'est quand même les valorisations. C'est-à-dire
03:50que, là aussi, ça a été indiqué et commenté grandement. On parle beaucoup du mouvement
03:55très fort qu'il y a pu avoir sur l'OAT par rapport aux obligations allemandes. Donc,
03:58le 10 ans français par rapport aux 10 ans allemands. Sur le CAC 40, le point de départ
04:01n'était pas le même. C'est-à-dire que quand on avait, pré-élection, un spread,
04:06donc cet écart de taux. Donc, France versus Allemagne à 40 points de base, 50 points
04:11de base. C'était ça l'anomalie ? Avec un déficit à 90%, voire plus. Ça, c'est
04:16une anomalie. Et quand on regarde sur les marchés d'action, on avait aussi un CAC
04:1940 qui traitait sur des niveaux de valorisation qui étaient bien plus élevés que ceux de
04:23l'Italie, de l'Espagne ou de l'Allemagne. Donc, le point de départ, il est aussi important
04:26je crois. Intéressant de noter d'ailleurs que le mouvement de spread se fait de plus
04:31en plus via le bount allemand. Le spread serait celui d'aujourd'hui mais parce que
04:36le taux allemand remonte plus que le taux français qui lui reste autour de 3,30% plus
04:42pour la partie 10 ans. C'est ça. On avait ce phénomène de vase communiquant je crois.
04:45C'est-à-dire que là aussi, on a vu dans cet épisode de stress politique-là, on a
04:50vu des primes attachées à l'état français remonter alors que le taux moyen de l'OAT
04:54était lui, on va dire, relativement stable. Donc, on avait bien des vases communiquants
04:57entre des investisseurs positionnés sur des actifs de dette française qui favorisaient
05:02l'Allemagne. Et là, il y a sans doute une forme de respiration et un peu moins d'angoisse.
05:06Quand vous dites que l'internationalisation des portefeuilles et des stratégies est une
05:10réponse pour se désensibiliser à ce risque ou à ces incertitudes politiques en France
05:15qui se répercutent aussi en Europe, est-ce que ça remet dans l'absolu en cause le cas
05:21d'investissement européen qui semblait retrouver un peu de traction avec un léger redécollage
05:28économique là où les Etats-Unis sont plutôt sur une pente d'atterrissage, avec une BCE
05:33qui avait déverrouillé, j'allais dire, l'idée de quelques baisses de taux devant nous ? Tout
05:39ça était des arguments importants pour des investisseurs globaux. Est-ce que tout ça
05:43est remis en cause ?
05:44Alors, si je regarde les flux, oui. On a eu 3-4 semaines de flux positifs sur les actifs
05:51risqués sur les actions européennes cette année. Ce mouvement-là, il s'est inversé
05:57au cours des dernières semaines. Aujourd'hui, en Europe, on est quand même toujours dans
06:01un cadre où on s'attend bien à ce qu'il y ait une reprise de la croissance économique.
06:05En France, mais plus largement en zone euro, en 2024, en 2025 également.
06:09Le niveau d'incertitude n'empêche pas l'idée de cette reprise économique ?
06:14L'incertitude, encore une fois, elle est relativement élevée. Elle ne sera pas totalement
06:18enlevée avant une semaine, voire plus, en fonction de ce qui se passe par la suite.
06:22Oui, la séquence va se poursuivre, si je puis dire.
06:25Exactement. Mais en l'état, ce qu'on anticipe, ce qu'on peut voir, c'est que cette incertitude-là,
06:31elle peut peser sur le sentiment, elle peut peser sur une volonté d'un consommateur
06:35à dépenser à court terme, un chef d'entreprise à investir, mais plus sur un sentiment qu'une
06:41réalité économique. Aujourd'hui, les baisses de taux de la Banque Centrale Européenne,
06:45elles ont été enclenchées. On anticipe toujours une baisse de taux par trimestre.
06:50Là aussi, quand on regarde les indicateurs avancés, on voit que les salaires continuent
06:54de progresser, mais à un rythme moins important que par le passé. Et puis, ce rebond manufacturier,
07:00cette reprise manufacturière mondiale, elle peut aussi bénéficier à l'Europe.
07:04Intéressant d'ailleurs de noter, du point de vue des banques centrales, mais ce sera,
07:08j'imagine, un des points de discussion à l'occasion du forum de la BCE à Sintra cette semaine.
07:11Alors, c'est une prise de parole qu'a eue le gouverneur de la Banque de France, François-Louis
07:14de Gaulleau, la semaine dernière, indiquant... Alors, la fonction de réaction est en train
07:18d'évoluer, c'est-à-dire que la Banque Centrale est plus à l'aise avec l'inflation qui continue
07:22de se modérer, et partant de là, elle sera beaucoup plus attentive aux projections,
07:28aux prévisions, en essayant de donner de la visibilité aux investisseurs, plutôt que
07:33regarder chaque point de données et le flux permanent des données sur les marchés. Il
07:38y a quelque chose d'un peu plus forward-looking, comme on dit, du côté des banques centrales
07:42et particulièrement de la BCE aujourd'hui. Oui, je crois, et j'indiquais une baisse de
07:45taux par trimestre pour des anticipations qui sont un peu plus positives que le reste
07:48du marché à ce niveau-là. Je crois que là, on est encore plus positif sur, on va dire,
07:52un biais un peu plus facilitateur d'une banque centrale, c'est aux Etats-Unis, parce que
07:56là, on commence à voir quand même une économie américaine qui ralentit. On ne sera pas en
08:00train de parler de récession ou d'atterrissage en douleur de l'économie américaine, mais
08:04d'une économie qui ralentit. On a eu des chiffres du consommateur qui montrent quoi ?
08:08Le consommateur américain, la croissance de la consommation aux Etats-Unis est autour
08:13de 1,5%, donc ça revient sur des niveaux moyens qui prévalaient après Covid.
08:18Les normes antérieures.
08:19Exactement. Donc ça, c'est un élément. On l'a vu sur l'inflation aussi. On a eu un chiffre
08:22d'inflation, le corps PCE, alors désolé pour le jargon, mais la donnée d'inflation
08:28la plus regardée par la réserve fédérale américaine qui est à 0,08% sur le mois.
08:32Donc là aussi, ça montre quand même qu'on a une économie américaine qui ralentit.
08:36On a d'autres indicateurs. En tout cas, on parle de la partie macro, mais il y a la
08:40partie micro aussi. On voit des entreprises qui sont en général un bon reflet du consommateur
08:45et du consommateur américain. On voit une entreprise comme Nike par exemple qui, là
08:49aussi, fait moins bien que ce qui pouvait être attendu.
08:52Et ces signes-là, le fait d'y être attentif dès aujourd'hui, ça se transparaît dans
08:56les discours, en tout cas dans les discours de ceux qui comptent au sein du comité ?
08:59Oui, je crois. C'est-à-dire que ce qui anticipe le marché aujourd'hui, c'est à peu près
09:02une baisse d'auto pour cette année. Je ne suis pas banquier central, mais c'est possible
09:08qu'il y en ait plus. D'autant plus que le risque électoral ou le risque politique,
09:13il existe en France, il est cristallisé, beaucoup regardé en France aujourd'hui,
09:16mais il existe aussi aux Etats-Unis. Et il y a quand même un corollaire du débat
09:20entre M. Biden et M. Trump de la semaine dernière qui est que la probabilité de voir M. Trump
09:25a largement remonté. Je regarde les meilleurs pronostiqueurs, c'est quoi, 60% ? Quelque
09:29chose comme ça. Ça veut dire qu'il faut quand même commencer à regarder qui pourra
09:33être le patron du trésor américain.
09:36Prendre au sérieux l'équipe et l'administration Trump.
09:39Il y a quand même quelques candidats qui semblent se démarquer, notamment certains
09:43gérants de fonds alternatifs aux Etats-Unis. Et quand on regarde un petit peu ce qu'ils
09:47décrivent, ce qu'ils veulent mettre en place, c'est une politique très régalienne.
09:51Donc on va dire une politique de l'offre très importante avec une volonté de faire
09:56remonter fortement la croissance potentielle aux Etats-Unis autour de 3%. Dans le même
10:00temps, réduire les déficits américains autour de 3%. Et ça en venant, on va dire,
10:04produire toujours plus de pétrole notamment.
10:08Ça, ça a quand même un impact. C'est-à-dire, comment est-ce que c'est fait ? C'est fait
10:11avec moins de régulation d'un côté, des baisses de taxes pas forcément fundées
10:16ou financées de l'autre. Et ça, ça veut dire quoi ? Ça veut dire que la réserve
10:20fédérale américaine, ce qu'elle pourra faire en 2025, sera peut-être pas autant
10:24que ce qu'elle peut faire là maintenant en 2024.
10:27La fenêtre de tir pour la Fed, c'est maintenant.
10:30Une fois qu'on a dit ça, effectivement, comment on organise les portefeuilles ? Donc
10:34on a compris l'idée de l'internationalisation concrètement sur les marchés actions.
10:39Ça veut dire qu'on privilégie encore le marché américain aujourd'hui par rapport
10:43au marché européen. On privilégie toujours l'idée des grandes capitalisations plutôt
10:47que les petites. On ne sort pas de cette logique-là aujourd'hui, Kevin, où est-ce
10:51qu'on peut être plus équilibré ? Qu'est-ce qu'on fait avec les émergents ? Et puis
10:55sur les taux, on l'a bien vu encore dans la séquence, la duration reste pour l'instant
10:59un pari compliqué.
11:01Il y a plusieurs façons de le voir. Si je résume en termes de séquence, on parle bien
11:06d'une forme de ralentissement américain. Et dans ce cadre-là, il faut plutôt aller
11:11investir sur des entreprises un peu plus défensives ou qui ont une relative bonne visibilité
11:18sur les trajectoires de résultats. Par contre, il faut le faire en étant conscient des prix.
11:22Parce que la séquence que je décrivais, elle veut quand même dire que potentiellement,
11:25on aura des taux réels qui resteront quand même potentiellement élevés pour un peu
11:30plus longtemps à terme. Comme vous le soulignez, la séquence sur les taux, elle est loin d'être
11:36évidente. Et donc, on va plutôt essayer d'aller chercher des acteurs. Si je regarde
11:40par exemple dans le secteur de la santé, plutôt que d'aller investir sur ces grands
11:44laboratoires pharmaceutiques que tout le monde connaît et regarde, il y a des entreprises
11:48qui font de la distribution de médicaments. Donc là aussi, ils sont peut-être moins
11:52sujets à, on va dire, des risques politiques.
11:55De l'aubri.
11:56Exactement. Il n'est pas lié au prix. Il est lié au nombre de médicaments qui sont
12:00distribués. Donc ça, ça peut en attreindre des sociétés comme l'assurance santé aussi
12:03qui traitent en général sur des niveaux de valorisation qui sont moins élevés.
12:06Donc ça, c'est une partie des investissements. Je crois qu'en Europe, il y a peut-être
12:11aussi un peu de... On peut y faire ses courses.
12:14Ses valeurs.
12:15Dans cet environnement où il y a quand même du stress, pas convaincu qu'on achètera
12:20moins de lunettes ou moins de lentilles demain en fonction de qui sera la prochaine personne
12:26à la tête de l'État français. Donc ça, ça peut être d'autres instruments à rentrer
12:31dans un portefeuille. Et sur la partie obligataire, on reste quand même relativement prudent.
12:35Et notamment sur les obligations les plus longues. Parce que tout ce qu'on décrit, ça veut
12:39quand même dire peut-être un peu plus d'inflation à terme.
12:42Et des primes de risques qui peuvent rester.
12:45Et des primes de risques, des déficits à financer. Et donc préférer des maturités
12:50un peu plus courtes. Donc il y a quand même une forme de plafond. On peut exclure le fait
12:55que la Réserve fédérale ou la Banque centrale européenne sera menée à remonter ses taux
12:58à horizon 6-9 mois. Donc ça, ça fait une forme de plafond. Et par contre, elles peuvent
13:02en faire plus que ce qui est anticipé aujourd'hui.
13:04Donc des actions. 30-35% si je prends notre fonds phare carminiaque patrimoine.
13:10Des obligations plutôt du 2 à 5 ans. Des marchés d'échange.
13:17Peut-être plus de dollars que d'euros. Là aussi, ça peut être une bonne assurance
13:22de portefeuille. Et puis bien performée si on retrouve un peu cet exceptionnalisme américain.
13:27Tout ça dans un contexte politique évidemment très agité. Merci beaucoup Kevin.
13:32Kevin Thauzet, membre du comité d'investissement de Carmignac qui était avec nous en plateau
13:35pour cette demi-heure d'émission. Chatte lundi à la mi-journée.
13:39Vous retrouvez Smartbourse sur Bsmart. Et ce soir à 17h pour la grande édition.

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