Face à Michel Onfray (Émission du 25/05/2024)

  • il y a 4 mois
Michel Onfray passe en revue l’actualité de la semaine dans #FaceAMichelOnfray. Présenté par Laurence Ferrari.

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Transcript
00:00 - Et bienvenue dans "Face à Michel Onfray" sur CNews et sur Europe 1 pour une heure d'échange avec vous. Bonjour Michel.
00:05 - Bonjour Laurence.
00:05 - Ravie de vous retrouver aujourd'hui au sommaire.
00:07 La question de la Nouvelle-Calédonie après la visite d'Emmanuel Macron, qu'est-ce que ce déplacement signifie à vos yeux ?
00:13 Comment expliquez-vous la position aussi de Marine Le Pen qui, tout en ayant voté la réforme du code électoral qui a mis le feu aux poudres,
00:20 estime qu'il faut la reporter et que ce n'était pas le bon moment.
00:23 Encore un signe peut-être de la volonté de normalisation du rassemblement national qui se présente comme un parti de gouvernement, c'est ce que l'on va voir avec vous.
00:31 On écoutera aussi bien sûr Michel, parce que je connais votre passion pour le général de Gaulle, les mots qu'il avait employés à l'époque en
00:37 1966 lors d'un déplacement en Nouvelle-Calédonie.
00:41 Les élections européennes, c'est dans deux semaines maintenant. Comment les grandes alliances politiques pourraient être
00:46 bousculées par le scrutin du 9 juin mais surtout quelles capacités ont
00:50 les européens à retrouver à travers leur vote une partie de leur souveraineté ? Je vous pose la question dans un instant aussi Michel.
00:56 Enfin le procureur de la Cour pénale internationale qui demande un mandat d'arrêt contre Benjamin Netanyahou et l'un de ses ministres mais aussi contre les chefs
01:04 militaires du Hamas, cette organisation terroriste.
01:07 Quelle portée, cette demande, revêt-elle à vos yeux ? Peut-on renvoyer dos à dos un État et un groupe terroriste ?
01:14 Voilà l'une des nombreuses questions que j'ai à vous poser aujourd'hui Michel.
01:18 On commence si vous le voulez bien par la Nouvelle-Calédonie. Le président Macron vous le savez s'est rendu sur place avec des paroles d'apaisement
01:24 mais aussi de fermeté. Pas question pour lui de passer en force sur la loi électorale qu'il a pourtant fait voter au Sénat et à l'Assemblée.
01:32 Il promet un vote des Calédoniens en cas d'accord politique général. On écoute Emmanuel Macron.
01:39 "J'ai pris un engagement très clair ce soir avec un processus très précisément défini.
01:47 Je me suis engagé à ce que cette réforme
01:49 ne passe pas en force aujourd'hui dans le contexte actuel
01:54 et que nous nous donnions quelques semaines
01:57 afin de permettre
02:01 l'apaisement, la reprise du dialogue en vue d'un accord global."
02:06 Voilà pour Emmanuel Macron. Michel, comme ça,
02:09 cette visite d'Emmanuel Macron, quel caractère elle revêt à vos yeux ?
02:12 Il y a toujours de la psychopathologie chez lui. C'est-à-dire qu'il a vraiment l'impression qu'il guérit les écrouelles. Vous savez, comme les rois
02:17 de France jadis, ils avaient l'impression qu'ils avaient la possibilité, en imposant les mains,
02:22 de guérir tel ou tel. Et là, c'est la même chose. C'est "moi j'arrive, je saute dans l'avion et je vais vous parler".
02:28 Il mouille la chemise en même temps.
02:30 Ça veut dire quoi mouiller la chemise pour le coup ? Il lit les textes qu'on lui a écrits. Il y va mais ça veut dire quoi ?
02:35 Moi je préférerais qu'il travaille. C'est cette façon de dire "je prends l'avion, j'arrive, je suis dans l'avion, je descends de l'avion,
02:41 j'ai descendu l'avion,
02:43 j'ai pris
02:45 la voiture qui me permet d'aller là, etc." Tout ça, c'est de l'occupation du terrain médiatique.
02:48 C'est du temps pendant lequel il ne travaille pas. C'est précieux le temps d'un chef de l'État, quand il est vraiment chef de l'État.
02:53 Et tout ce temps consacré à la mise en scène de soi-même,
02:56 et cette mise en scène qui consiste à dire "je vais vous parler". Il fait ça depuis le début.
02:59 Les gilets jaunes, les paysans, j'arrive, je parle, y compris, vous savez, le salon d'agriculture,
03:04 il retrousse la manche, il enlève la veste, bon alors on y va et je vais vous parler. Et il en bobine.
03:09 Il en fume tout le monde. Et le discours est absolument insaisissable.
03:12 On lui demande juste de respecter la République, on lui demande juste d'être le président de la nation, on lui demande juste de dire
03:17 "il y a eu des élections, c'est déjà insupportable,
03:19 il y a eu trois référendums, il y en a un et puis on y obéit. Qu'est-ce que c'est trois référendums ?"
03:24 En disant "peut-être qu'un quatrième serait bienvenu".
03:26 - Et là il va y avoir sans doute un nouveau.
03:28 - Bah voilà, mais qu'est-ce que ça veut dire ?
03:29 - D'autant que c'est une occasion de réfléchir sur la question du référendum, cette aventure, parce que le référendum, tout le monde s'en moque depuis
03:35 depuis 2018, depuis le traité de Lisbonne. En 2005, une question est clairement posée et on demande aux Français s'ils veulent du traité constitutionnel.
03:42 Massivement, ils disent "on n'en veut pas". Et en 2018, on nous dit, président Sarkozy, président Hollande, tous les deux,
03:48 Paris Match avait fait une belle couverture.
03:50 - Très belle couverture de Paris Match à l'époque.
03:52 - Vous voyez, blanc bonnet, blanc bonnet, qui disent "d'accord, jouons les députés et jouons les sénateurs contre le peuple".
03:56 "Ah, vous avez voulu ça, mais nous, finalement, on veut autre chose".
03:59 Le Vaté, Régis Cardestin, avait dit d'ailleurs dans Le Point à cette époque-là que finalement, on avait changé les deux places, deux ou trois paragraphes
04:04 pour donner l'impression que c'était autre chose, mais que c'était la même chose.
04:07 Qu'est-ce que ça veut dire, cette façon de demander au peuple ce qu'il en pense, et de dire "vous ne pensez pas bien, on jette tout ça à la poubelle".
04:13 Je rappelle qu'il y a eu la même chose avec le président Hollande, qui au moment de l'extension de l'aéroport de...
04:18 - Notre-Dame-des-Landes.
04:19 - Notre-Dame-des-Landes, avait dit "on va faire un référendum".
04:21 Il demande, les gens disent "ben oui, continuons, c'est pas trois... c'est pas des minoritaires, c'est ça la question,
04:26 c'est pas des minoritaires qui vont faire la loi en démocratie en République, c'est pas comme ça que ça se passe".
04:30 Il dit "bon, vous voudriez l'extension, mais finalement, il n'y aura pas l'extension".
04:33 Et donc, il y a un moment donné où on peut ajouter les trois référendums en Nouvelle-Calédonie,
04:37 on nous dit "on va choisir les électeurs pour être bien sûr du résultat,
04:41 nonobstant, il se fait qu'on se retrouve quand même avec le résultat qui n'était pas forcément attendu, on va recommencer".
04:45 Et puis on va recommencer.
04:46 On va même jusqu'à Marine Le Pen qui dit "on va recommencer dans 40 ans".
04:49 Cette façon de croire que tant qu'on n'a pas obtenu le bon résultat,
04:52 c'était la même chose avec le référendum, avec Maastricht et le Danemark, souvenez-vous, il y a très longtemps, en 1992,
04:57 "si vous avez mal voté, on va recommencer".
04:59 Le général de Gaulle, c'était un référendum, il donne son avis, le peuple,
05:03 et quand le peuple a donné son avis, on s'en va, lui il est parti.
05:05 Il aurait même pu dire "ben écoutez, vous ne voulez pas de la régionalisation, je reste quand même".
05:09 Il a dit "non, non, si vous ne voulez pas de l'idée que je présente, c'est que vous ne voulez plus de moi, je m'en vais".
05:13 Eux, on leur dit "on ne veut pas de vous", ils disent "ben je reste".
05:15 Alors justement, on va écouter le général de Gaulle, vous l'évoquez, c'était en 1966, Michel Anoumea,
05:21 il a évoqué le destin français des Calédoniens avec fierté et reconnaissance.
05:24 Écoutez ce qu'il a dit.
05:26 "Vous avez un rôle français à jouer dans cette partie du monde.
05:33 Vous êtes un morceau de la France, vous êtes la France australe.
05:37 Et vous devez, dans la paix, comme vous l'avez fait dans la guerre,
05:47 être pour toute notre communauté nationale un exemple d'effort, de fraternité et de progrès."
05:58 Fraternité et progrès, ça c'était les mots qu'il fallait employer.
06:02 Oui, c'est tout à fait le discours à tenir si on veut rester dans le cadre de la Vème République.
06:06 Si on veut une espèce de communautarisme de type américain, c'est-à-dire une espèce de démocratie contre la République,
06:12 on tient le discours de Macron ou les discours de Macron.
06:14 Là, il y a un discours qui est formidable.
06:16 Moi, je ne suis pas un jacobin et je défends la République sur le principe du général de Gaulle
06:20 qui d'ailleurs pensait en termes de régionalisation sur la fin de son existence.
06:23 Donc je pense que ça pourrait être l'occasion pour le président Macron de dire "nous allons repenser un schéma français".
06:29 C'est-à-dire pas seulement dire "Nouvelle Calédonie" parce qu'après il va y avoir des problèmes probablement en Marne-Étienne,
06:34 en Marne-Petit, et après en Guadeloupe, et puis après en Guyane.
06:37 Et je comprends ces peuples qui diraient "nous aussi, pourquoi pas, si la violence ça paye, on va utiliser la violence".
06:43 Il y avait là l'occasion de dire "nous allons refonder vraiment un projet de société"
06:46 en disant "voilà, il y a une spécificité calédonienne, comme il y a une spécificité antillaise, martiniquaise, guadeloupéenne, etc.
06:53 mais Corse, Bretonne, Savoyarde, Normande, etc.
06:57 Comment est-ce qu'on peut refaire une République avec justement le souci de ces peuples divers qui n'en font qu'un dans la République ?
07:03 C'est le discours à tenir de l'Elysée, pas juste prendre un avion en disant "j'arrive".
07:07 Et puis de dire après "on nomme quelqu'un, je ne sais pas qui, à droite, à gauche, enfin quelqu'un qui fait autorité".
07:12 Je ne vais pas donner de nom.
07:14 Un ancien Premier ministre, un sage, un expert ?
07:16 Un décollène royal qui adorerait ne plus s'occuper des sphères australes ou je ne sais plus...
07:20 Elle n'est plus en passant de ses épaules, mais effectivement, il tient un discours de raison.
07:23 Des gens qui pourraient être là en disant "bon, on va faire ce travail",
07:26 mais pas le chef de l'État qui arrive, qui retrouve sa manche et qui dit "bon, attendez, on va faire une bonne discussion,
07:30 là-dessus vous allez voir, je vais vous embobiner et puis vous allez comprendre
07:33 que je vais faire un référendum qui ne sera pas un référendum tout en en étant un,
07:36 si ça doit avoir lieu, mais si on retire... mais je ne retirerai pas parce que vous savez que..."
07:40 Et c'est ça, le fond du discours de Macron.
07:43 Ça gaudit.
07:44 - Michel, on a évoqué Marine Le Pen très rapidement,
07:47 parce qu'effectivement, ses députés elles-mêmes ont voté le dégel de la réforme électorale,
07:52 du corps électoral, et puis après elle a dit "mais en fait, c'était pas le bon moment".
07:56 J'avais prévenu Gérald Darmanin, elle était invitée de CNews et Europe 1,
08:00 elle nous a dit "j'avais prévenu que c'était pas le bon moment, que tous les ingrédients n'étaient pas réunis".
08:04 Ça traduit quoi pour vous ? Une volonté de normalisation du Rassemblement National ?
08:09 - Déjà que Marine Le Pen a le téléphone portable de Darmanin et qu'elle l'appelle,
08:12 "allô Gérald, je voudrais te dire deux ou trois choses".
08:15 - Ce qui est pas absurde, dans l'absolu.
08:18 - Je sais pas, je pense que chacun fait son travail,
08:20 quand on dirige un parti, on dirige un parti,
08:22 puis en même temps on le dirige avec des idées qui ne changent pas au fur et à mesure.
08:25 Ils ont beau jeu, moi je regarde les débats que vous faites sur CNews,
08:28 mais ils ont beau jeu, tous les opposants de Marine Le Pen,
08:30 de dire qu'elle a tout dit et le contraire de tout, parce que c'est assez vrai.
08:33 Et là, d'un seul coup, sur quelques jours, elle nous dit une chose puis son contraire.
08:36 Alors évidemment, on voit bien qu'il y a une ligne de force,
08:39 exactement comme chez Macron qui dit tout et n'importe quoi,
08:41 mais il y a toujours une ligne de force, c'est d'abord l'Europe et la France,
08:44 et ensuite s'il en reste un peu quoi.
08:46 Et elle c'est "normalisons-nous".
08:48 Et c'est le Chirac des années 70, Marine Le Pen aujourd'hui.
08:51 Il y a un moment donné où on dit "mais est-ce qu'il y a une doctrine chez Marine Le Pen ?"
08:54 Il y en a une chez le général de Gaulle, on vient de la voir,
08:56 ce que c'est que la France, comment la France se constitue.
08:59 On peut être effectivement dans la différence, dans la diversité,
09:02 et en même temps fabriquer une nation, mais là ça ne semble pas du tout être son propos.
09:06 Donc c'est un peu problématique de voir que, je ne sais pas,
09:08 elle a peut-être un conseiller en communication ou des spécialistes en sondage
09:12 qui lui disent "cette idée-là fait monter, cette idée-là fait baisser,
09:15 donc choisissons l'idée qui est meilleure".
09:17 - Elle-même se dit "il vaut mieux temporiser, apaiser, plutôt que de cliver".
09:20 - Mais ce n'est pas clair, non, moi je suis pour le clivage, il faut que les choses soient claires.
09:23 On est de droite, on est de gauche, on défend une idée ou on ne la défend pas,
09:27 une porte est ouverte ou elle est fermée, et puis voilà.
09:29 - C'est noir ou c'est blanc.
09:31 On ne va pas parler un petit peu de la gauche, parce qu'il y a des personnalités
09:34 qui dénonçaient des positions identitaires, défendent le droit au peuple canaque
09:37 à ne pas être minoritaire chez soi.
09:40 La gauche, elle est complètement divisée en fait sur cette question aussi.
09:42 On a entendu Christiane Taubiran, c'est une garde d'Esso,
09:45 qui défendait le droit de vote des étrangers aux élections locales,
09:47 demandait le retrait du texte, juger normal que des citoyens français
09:50 n'aient pas le droit de vote en Nouvelle-Calédonie.
09:52 Ça vous paraît absurde ou pas ?
09:54 - Il y a des gauches, il y a plusieurs gauches, il y en a au moins trois d'une certaine manière.
09:58 J'ose avec vous une espèce de classification à partir de la devise de la République française.
10:03 Elle est très intéressante, elle est de Robespierre d'ailleurs.
10:05 Liberté, égalité, fraternité.
10:07 Alors vous avez des gens pour lesquels la liberté est essentielle, c'est plutôt la droite.
10:09 Tant pis si l'égalité en prend un coup.
10:11 Vous avez plutôt la gauche qui pense que c'est l'égalité, tant pis si la liberté en prend un coup.
10:15 Et la fraternité, elle est où ? Nulle part.
10:17 L'intérêt c'est que, alors vous avez une gauche plutôt libertaire,
10:20 vous avez une gauche plutôt autoritaire, enfin une gauche de la liberté, une gauche de l'égalité.
10:23 Et elle est où la gauche de la fraternité ?
10:25 Et le génie de cette formule, qu'on doit je le redis à lain ça Robespierre,
10:29 c'est que ce sont trois choses en même temps.
10:31 C'est-à-dire la liberté sans l'égalité, l'égalité sans la liberté, ça ne va pas.
10:34 Mais en même temps sans la fraternité rien ne va.
10:36 Qui parle de fraternité aujourd'hui ? Personne.
10:38 Y a-t-il aujourd'hui une gauche fraternelle ?
10:40 D'ailleurs ça fait presque rire ce terme.
10:42 Ce n'est pas celle de M. Glucksmann ?
10:44 Non, lui c'est la gauche libertaire, la gauche libérale si vous voulez.
10:47 Mélenchon pour parler plus clairement c'est la gauche égalitaire.
10:50 Donc Glucksmann c'est effectivement celui qui pense en termes de totalitarisme,
10:53 de droit de l'homme, etc.
10:55 Enfin bon, c'est Mitterrand depuis 83.
10:57 C'est exactement la même chose.
10:59 C'est plus neuf, c'est plus souriant, c'est plus gentil.
11:01 Mais c'est très exactement ça.
11:03 C'est-à-dire que c'est Macron, mais c'est aussi Hollande,
11:05 et que c'est aussi Mitterrand depuis 83.
11:07 Et puis Mélenchon c'est un mélange de Georges Marchais, d'Alain Crévin,
11:10 donc l'égalité d'abord, tant pis si on doit couper des têtes.
11:13 Il y a des têtes qui dépassent, on les fait sauter,
11:15 puis il y a des têtes qui sont pour en dessous, on tire dessus
11:17 pour que ce soit vraiment à la même hauteur de tête.
11:19 Et il n'y a pas de gauche fraternelle.
11:21 C'est-à-dire le souci des gens simples, des gens modestes,
11:23 des gens qui crèvent la faim, des miséreux,
11:25 des gens qui aujourd'hui dorment dans leur voiture
11:27 parce qu'ils n'ont pas les moyens de se payer un loyer.
11:29 Je le dis souvent en votre présence.
11:31 Des femmes divorcées, des hommes ou des femmes divorcées
11:35 qui retournent vivre chez leurs parents.
11:37 Des gens qui sont obligés d'économiser sur les repas.
11:39 Elle est où la fraternité ?
11:41 Elle n'est pas chez Glucksmann, dans la gauche libérale et libertaire.
11:44 Elle n'est pas non plus chez Mélenchon,
11:46 qui a beaucoup plus le souci aujourd'hui du néo-peuple.
11:49 Si vous êtes effectivement canaque,
11:51 si vous êtes transsexuel, porteur de flammes,
11:53 ou si vous êtes olympique, je ne sais quoi.
11:55 Alors là, vous avez Mélenchon pour vous, mais si vous êtes pauvre,
11:57 ces gens souvent vont chez Marine Le Pen
11:59 et se font traiter de fascistes.
12:01 On est en face à Michel Onfray sur CNews et sur Europe 1.
12:03 Michel, on évoque les élections européennes,
12:05 on est à deux semaines du scrutin.
12:07 Le Rassemblement National reste largement en tête
12:09 des intentions de vote, avec une liste Renaissance
12:11 qui est très loin derrière,
12:13 et Raphaël Glucksmann pour le Parti Socialiste
12:15 qui est assez haut.
12:17 Au-delà des enjeux nationaux, on voit que les alliances vont évidemment
12:19 être remises en cause au niveau européen,
12:21 après le scrutin du 9 juin.
12:23 Giorgia Meloni, la chef du gouvernement italien,
12:25 tente un rapprochement avec Marine Le Pen.
12:27 Elle veut, dit-elle, tenter, tâche difficile
12:29 mais fascinante, de reproduire en Europe
12:31 ce qui a été fait en Italie, en unissant
12:33 des partis compatibles dans leur vision,
12:35 mais en un scrutin qui a des nuances complètement différentes
12:37 et envoyer la gauche en opposition.
12:39 Giorgia Meloni, elle veut l'union des droites.
12:41 Marine Le Pen, elle veut l'union des français.
12:43 Elle dit cette semaine sur le plateau de CNews et Europe 1.
12:45 Il y a une différence entre les deux ou pas ?
12:47 Oui. C'est tout ce qui distingue
12:49 le général de Gaulle des autres.
12:51 Chez le général de Gaulle, c'est l'idée qu'il y a la droite
12:53 et qu'il y a la gauche,
12:55 mais que de droite, c'est oublier la moitié de la France
12:57 et de gauche, c'est oublier l'autre moitié de la France
12:59 et que la France, c'est au-delà de ça.
13:01 C'est-à-dire, droite et gauche,
13:03 comme je le disais, c'est une lecture horizontale.
13:05 On sait qu'elle est issue de la Révolution française
13:07 quand, en 1792, il a fallu décider
13:09 du destin du roi.
13:11 Faut-il lui couper la tête ?
13:13 Faut-il le fameux droit de veto ?
13:15 On le condamne à mort, mais on ne le décapite pas.
13:17 Ou ceux qui disent oui, on le décapite tout de suite
13:19 du simple fait qu'il ait été roi.
13:21 Et le général de Gaulle, lui, dit que cette lecture horizontale
13:23 n'est pas bonne. Il faut une lecture verticale.
13:25 Il y a la France et ceux qui n'aiment pas la France.
13:27 Après, vous avez des histoires d'intendance.
13:29 C'est-à-dire qu'en gros,
13:31 on partage les chauffeurs,
13:33 les placards à balais, les bureaux,
13:35 ce genre de choses qui font qu'on est obligé
13:37 de fabriquer des groupes. On se dit "mais avec qui va-t-on faire un groupe ?"
13:39 - Donc des convergences d'intérêts. - Et ce sont des convergences d'intérêts.
13:41 Et bien voilà, c'est ça le problème.
13:43 Et après, vous vous dites "alors, Annemle Pen, vous n'êtes pas fasciste ?"
13:45 Encore que, mais
13:47 vous l'êtes toujours, la preuve.
13:49 Vous vous êtes associé avec quelqu'un qui fait partie d'un parti
13:51 qui, en Allemagne, a dit que, dans une soirée,
13:53 un peu arrosé, quelqu'un qui était...
13:55 Et là, vous vous dites "qu'est-ce que je fais de cette alliance ?"
13:57 Plutôt que de pouvoir dire "bah non, on n'est pas du tout d'accord avec ce parti-là",
13:59 on se dit "bah c'est celui avec lequel on est le moins d'accord".
14:01 À chaque fois que vous faites des alliances
14:03 pour des histoires de petits intérêts,
14:05 véritablement, ça, peut-être, il faudrait revoir
14:07 que ça puisse être autre chose et autrement.
14:09 Vous êtes obligé, après, d'avoir des convergences idéologiques
14:11 alors que vous ne les avez pas.
14:13 C'est pas une bonne chose.
14:15 - En tout cas, Marine Le Pen, cette semaine,
14:17 a clairement acté la rupture avec l'AFD allemande,
14:19 dont le leader avait tenu des propos inqualifiables
14:21 sur les criminels nazis, qui n'étaient pas forcément tous des criminels.
14:23 - Les SS.
14:25 - Les SS, qui n'étaient pas tous des gens méchants.
14:27 - Voilà, absolument.
14:29 - C'est terrible. D'un seul coup, on se dit "au revoir, monsieur"
14:31 et "au revoir, merci".
14:33 - Vous pensez que les Européens ont un moyen
14:35 de reprendre en main leur souveraineté ou pas,
14:37 à travers ces élections ?
14:39 - Non, parce que la vraie question, c'est ça, justement.
14:41 Voulez-vous une France souveraine dans une Europe
14:43 qu'il serait peut-être,
14:45 mais autrement et différemment,
14:47 ou alors, est-ce que vous voulez vraiment diluer l'Europe
14:49 dans la France ? Et je pense que pratiquement
14:51 tous les candidats veulent diluer l'Europe dans la France.
14:53 - Tous ? Même Marine Le Pen ?
14:55 - Oui, simplement, elle ne sait pas trop comment le dire,
14:57 elle ne veut pas trop le dire, elle veut laisser croire que non,
14:59 etc. Mais on ne peut pas monter
15:01 sur un bateau en disant qu'on ne veut pas y aller.
15:03 Si on monte sur le Titanic, on monte sur le Titanic
15:05 et on sait qu'il est en train de couler.
15:07 Alors, si les gens veulent ça, qu'ils aillent voter,
15:09 vous connaissez ma position là-dessus, ou qu'ils continuent à faire semblant
15:11 de s'opposer, mais in fine, quels sont les pouvoirs
15:13 véritablement, et juste les pouvoirs que vous donneront
15:15 les gens de la Commission Européenne,
15:17 et qu'ils vous diront
15:19 "ça vous pouvez, ça vous ne pouvez pas".
15:21 Donc les hommes politiques sont aux ordres.
15:23 On voit bien François-Xavier Bélamy qui est plein de bonne volonté,
15:25 mais en fait, quand il est
15:27 dans l'action, il ne choisit pas
15:29 grand chose, à la marge, ce genre de choses.
15:31 Alors est-ce que ça vaut vraiment le coup ?
15:33 On aurait un vrai chef d'État qui aurait vraiment un projet
15:35 pour la France, en disant "voilà, nous avons
15:37 sur les 50 ans qui suivent, le projet de
15:39 remettre la nation debout, de refaire
15:41 une république, de profiter de ce qui se passe
15:43 en Nouvelle-Calédonie pour dire "vous allez être un laboratoire",
15:45 comme la Corse aurait pu être l'occasion d'un laboratoire.
15:47 Je parle comme elle pourrait,
15:49 parlons plutôt au présent,
15:51 ou dans la possibilité ou dans l'hypothèse
15:53 d'un futur, en disant "nous allons repenser
15:55 la République". Ça, ça aurait de la gueule,
15:57 d'un seul coup, que le chef de l'État nous dise
15:59 "tel que ça fonctionne, la France jacobine,
16:01 ça ne marche plus". Donc refaisons
16:03 quelque chose qui permettrait,
16:05 dans les campagnes, dans les provinces,
16:07 on appelle ça les territoires, peut-être l'occasion
16:09 de le dire. - Les provinces, c'était...
16:11 On n'ose plus dire ce mot-là en réalité. - Voilà, territoire.
16:13 Vous savez, c'est l'éthologie, c'est la science des comportements
16:15 animaux. Le territoire. Vous savez, un animal,
16:17 il fait trois petits pipis, et puis il dit "c'est un
16:19 espace, c'est chez moi, c'est un territoire". Donc il y a le
16:21 territoire de la belette, et il y a le
16:23 territoire du lapin, et il y a le territoire du savoyard,
16:25 il y a le territoire du normand. - Du vôtre. - Non, non,
16:27 ce ne sont pas des territoires, pardonnez.
16:29 Il y a une spécificité des provinces,
16:31 qui ont été détruites par le président Hollande,
16:33 qu'il fallait savoir à une époque où on pouvait bricoler
16:35 des nouvelles régions un peu n'importe comment,
16:37 qui n'avaient aucun sens historique, aucun sens géologique
16:39 ou géomorphologique. Il y a pourtant
16:41 une spécificité aux provinces.
16:43 Et il y a une spécificité calédonienne, bien sûr.
16:45 Et Corse, et Bretagne, et Antillaises.
16:47 Et ça, ce serait l'occasion de vraiment
16:49 faire de la politique, mais pour le coup, il faudrait
16:51 mettre la France d'abord, et l'Europe
16:53 un peu derrière. Ce qui n'est pas le cas de ces gens qui vont
16:55 probablement se partager les sièges.
16:57 - Encore un mot, Michel Onfray, dans cette première
16:59 partie de "Face à Onfray",
17:01 à propos de la situation des agents pénitentiaires,
17:03 qui ont payé un très lourd tribut, on en a
17:05 parlé la semaine dernière, après une évasion
17:07 sanglante. Deux d'entre eux ont été
17:09 abattus un hommage national.
17:11 L'or a été rendu cette semaine à Caen,
17:13 en présence du Premier ministre Gabriel Attal.
17:15 Il les a décorés à titre posthume de la Légion d'honneur.
17:17 On va écouter juste les mots utilisés par le Premier
17:19 ministre, la main de la justice
17:21 qui ne tremble pas, et on va
17:23 écouter ce qu'il a dit, et son émotion
17:25 aussi, parce qu'il était ému.
17:27 - Je veux le dire,
17:29 il n'y a pas de justice digne de ce nom
17:31 si son autorité n'est pas
17:33 respectée. Pas de
17:35 justice s'il subsiste
17:37 une once d'impunité.
17:39 Pas de justice si les peines
17:41 ne sont pas appliquées.
17:43 Alors la justice,
17:45 c'est aussi Fabrice Muelot
17:47 et Arnaud Garcia. C'est Nicolas,
17:49 c'est Damien,
17:51 c'est Arnaud. Ce sont
17:53 toutes les femmes et tous les hommes
17:55 de l'administration pénitentiaire
17:57 dont l'engagement est exceptionnel.
17:59 Le dévouement,
18:01 remarquable. La mission,
18:03 essentielle.
18:05 - Et encore ce qu'a dit Gabriel Attal,
18:07 à Caen, pas de justice sans autorité.
18:09 C'est un vrai thème de philosophie ça Michel Onfray.
18:11 - Oui c'est du pipeau tout ça.
18:13 Ce monsieur, on le voit quand il a 9 ans
18:15 je crois, dans l'école où il est, il nous dit
18:17 "Ah mais mon père m'a dit, si tu veux réussir dans la vie,
18:19 il faut faire du théâtre."
18:21 Et de fait, je pense qu'il a bien écouté.
18:23 - Vous lui dignez le fait qu'il ait pu être ému tout simplement. Non, pas moi.
18:25 - Bah oui, non mais je pense la même chose.
18:27 - Tu penses qu'il l'était sincèrement ?
18:29 - Non mais moi je vais vous dire pourquoi je pense que
18:31 l'amour d'émotion, elle est peut-être pas feinte,
18:33 on a le droit d'être ému quand on voit ce qu'on voit.
18:35 - Quand on a deux cercueils en face de soi et des familles.
18:37 - Oui, mais quand on est vraiment ému, on agit.
18:39 C'est-à-dire on ne parle pas, on agit.
18:41 On ne fait pas des phrases à la Malraux,
18:43 on ne lit pas des discours qui ont été écrits par d'autres.
18:45 Je crois simplement que quand on est vraiment ému,
18:47 on dit "il y aura ceci, il y aura cela"
18:49 et le lendemain, peut-être même le jour même, ou à l'instant même,
18:51 il y a des actes. Simplement, c'est sans cesse.
18:53 C'est sans cesse tout ça.
18:55 Et à chaque fois qu'un enfant est
18:57 rentré, à chaque fois qu'il y a une femme violée,
18:59 à chaque fois qu'il y a des gens décapités, on a le droit à ce genre de discours.
19:01 On a le droit à ce genre d'émotion.
19:03 On a vu l'autre jour, Dupond-Méretti,
19:05 justement, je crois que c'était aussi à la prison de Caen,
19:07 "je sors de..." Enfin, le discours bien fait, quoi,
19:09 avec un grand silence, avec une façon de regarder,
19:11 avec une espèce d'émotion feinte. Ne croyez pas que ces gens-là
19:13 ne soient pas capables de faire du théâtre.
19:15 - Donc vous pensez que c'est de l'action des acteurs.
19:17 - Oui, je ne crois qu'à l'action. Mais c'est comme ça dans la vie, vous savez.
19:19 Entre les gens qui parlent et les gens qui font, moi je regarde,
19:21 je juge les gens sur ce qu'ils font, pas sur ce qu'ils disent.
19:23 Et donc là, je me dis, ça fait 10 ans
19:25 que ces gens-là sont au pouvoir, ou presque.
19:27 Et quand ils ne font rien, ils continuent d'ailleurs,
19:29 ils continuent. Vous avez vu récemment
19:31 qu'il y a un certain nombre de
19:33 prisonniers qui vont aller faire un petit tour à Versailles,
19:35 là, ils vont faire quoi, 300 km en bus ?
19:37 Formidable, comme annonce.
19:39 - C'est une excursion qui n'est pas encore
19:41 confirmée, qui peut avoir lieu fin juin.
19:43 - À jadis, ils avaient fait des courses
19:45 de karting aussi dans les prisons.
19:47 Et puis, je rappelle cette chose que j'avais signalée
19:49 à l'époque comme étant obscène, c'est-à-dire que le jour
19:51 où Dupond-Moretti est élu, qu'est-ce qu'il fait ?
19:53 On fait des choses symboliques quand on est ministre,
19:55 quand on est chef d'État, etc. On devrait en faire beaucoup plus, d'ailleurs.
19:57 Et même quand on fait des choses dont on estime qu'elles ne sont
19:59 pas symboliques, elles sont pourtant symboliques.
20:01 Il s'en va dans une prison. Il est presque applaudi.
20:03 - Oui. Et où il rencontre aussi les agents pénitentiaires.
20:05 - Il rencontre parce qu'il ne peut pas les voir.
20:07 Il ne peut pas ne pas les voir. - Oui, mais il va aussi pour les rencontrer.
20:09 - Non, mais il va dans une prison, quand même.
20:11 Il aurait très bien pu voir les membres du service pénitentiaire,
20:13 pas là où il les voit.
20:15 Et là aussi, il y a du symbole.
20:17 Donc, c'est une façon de dire, d'un côté,
20:19 on est d'accord avec vous, on est à vos côtés,
20:21 surtout en présence des cercueils,
20:23 et ça ne passera pas, on sera, etc.
20:25 Et puis, de l'autre côté, montrer des choses qui, elles,
20:27 montrent qu'effectivement, les détenus dans les prisons
20:29 estiment que, oui, Moretti est plutôt leur ministre
20:31 que le ministre de ceux qui les gardent.
20:33 - Michel, on fréquente encore une fois
20:35 les mots "pas de justice sans autorité".
20:37 Qu'est-ce que c'est l'autorité sur un plan philosophique ?
20:39 Qu'est-ce que c'est ? Est-ce que c'est une notion palpable ?
20:41 - Oui, bien sûr.
20:43 C'est la crédibilité, l'autorité.
20:45 D'abord, vous avez des autorités naturelles,
20:47 puis après, vous avez des autorités de fonction.
20:49 L'autorité naturelle, vous avez quelqu'un qui rentre dans une salle
20:51 et d'un seul coup, alors je ne parle pas de,
20:53 je ne sais pas qui, Zinedine Zidane
20:55 ou Gérard Depardieu,
20:57 mais des gens dont on sent qu'ils ont
20:59 une autorité parce qu'ils en imposent,
21:01 comme disait mon père, il en impose,
21:03 quand il parlait de quelqu'un.
21:05 Parce qu'il y a quelque chose dans ce personnage-là.
21:07 Il y a l'histoire, vous avez rencontré
21:09 l'histoire de face, vous avez rencontré le courage
21:11 de face, vous avez rencontré des choses importantes
21:13 qui constituent un être, c'est-à-dire un homme,
21:15 mais je sais que vous m'auriez dit les femmes aussi.
21:17 - Oui, les femmes aussi, vous me connaissez bien maintenant.
21:19 - Et donc, ça, c'est effectivement
21:21 une espèce d'autorité naturelle.
21:23 Puis après, vous avez une autorité qui vous advient
21:25 parce que vous avez été nommé chef de l'État.
21:27 Vous avez été élu, et quand vous êtes chef de l'État,
21:29 vous n'êtes plus vous-même. Vous savez, Kantorowicz
21:31 parlait des deux corps du roi. Donc il y a Emmanuel Macron
21:33 en short qui fait... Mais au-delà de ça,
21:35 il y a le chef de l'État qui est
21:37 plus que lui-même. Et donc, à partir de ce moment-là,
21:39 l'autorité, c'est-à-dire, cet homme
21:41 incarne la puissance de la souveraineté nationale.
21:43 C'est le roi, c'est le monarque.
21:45 C'est celui qui décide. On dit souvent
21:47 il a le bouton nucléaire.
21:49 Encore que, il a envie de le partager, lui.
21:51 Il voudrait que l'Allemagne ait un bouton semblable
21:53 et que, etc. C'est-à-dire que... Ou le porte-avion
21:55 de le général de Gaulle,
21:57 le porte-avion de Gaulle, c'est exactement
21:59 la même chose. Donc il y a cette autorité qui fait que la fonction
22:01 vous l'aura conférée.
22:03 Mais simplement, aujourd'hui, elle est conférée n'importe comment.
22:05 Eh bien, comment les élections sont fabriquées,
22:07 comment on ne respecte pas ce que disent
22:09 les gens. Donc, effectivement, l'autorité étant
22:11 effondrée, on ne peut plus en appeler à l'autorité.
22:13 - Michel Onfray, on fait une petite pause.
22:15 On se retrouve dans un instant pour la deuxième partie de notre émission.
22:17 On évoquera ce qui se passe
22:19 en Israël, contre Israël aussi.
22:21 La Cour pénale internationale
22:23 qui demande un mandat d'arrêt contre Benjamin Netanyahou.
22:25 Et puis, on parlera de choses un peu plus légères.
22:27 Les Jeux olympiques. Quoique, c'est pas si léger que ça.
22:29 - Non. - A tout de suite.
22:31 - Et on se retrouve pour la seconde partie de Face à Michel Onfray
22:33 sur CNews et sur Europe 1.
22:35 Michel, on va évoquer ce qui se passe
22:37 par rapport à Israël. Trois Etats européens
22:39 ont cette semaine décidé de reconnaître l'Etat de Palestine.
22:41 L'Espagne, l'Irlande et la Norvège
22:43 dans le but de promouvoir la solution
22:45 à deux Etats au Proche-Orient alors que
22:47 la guerre se poursuit dans la bande de Gaza.
22:49 C'est une décision qui divise, bien sûr,
22:51 au sein de l'Union européenne, qui est incapable
22:53 de trouver une position commune depuis le 7 octobre
22:55 en dehors d'une demande de cesser le feu
22:57 à Gaza. Évidemment, le groupe terroriste
22:59 du Hamas s'est félicité de cette
23:01 reconnaissance d'un Etat palestinien.
23:03 La France n'a pas encore
23:05 et n'a pas souhaité la reconnaître, cette étape-là.
23:07 Néanmoins, ça fait
23:09 énormément réagir, notamment Benjamin Netanyahou.
23:11 On va écouter ce qu'il dit, parce qu'il dit
23:13 qu'au fond, c'est une récompense
23:15 pour le terrorisme.
23:17 Est-ce qu'il a tort ? Je ne crois pas. On l'écoute.
23:19 - La cabane de plusieurs
23:21 pays européens
23:23 de reconnaître un Etat palestinien
23:25 est une récompense pour le terrorisme.
23:27 80% des palestiniens
23:29 soutiennent le terrible massacre du 7 octobre.
23:31 Nous ne pouvons pas donner un Etat
23:33 à ce mal. Ce sera un Etat terroriste
23:35 qui tentera de commettre encore et encore
23:37 le massacre du 7 octobre
23:39 et nous n'accepterons pas cela.
23:41 Une récompense pour le terrorisme n'apportera pas
23:43 la paix et ne nous empêchera pas de vaincre
23:45 le Hamas.
23:47 - Voilà pour Benjamin Netanyahou. Comment vous voyez les choses,
23:49 vous, Michel Onfray ? - Il a raison.
23:51 On ne peut pas imaginer que
23:53 le fait d'égorger 1200 personnes
23:55 puisse permettre la création de l'Etat palestinien
23:57 en disant "on vous récompense".
23:59 L'expression est fort juste.
24:01 Peut-être faut-il envisager une solution.
24:03 Bien sûr qu'il faut envisager une solution. Sûrement pas
24:05 les deux Etats, mais ce n'est pas le moment.
24:07 Il y a juste un moment de deuil,
24:09 par exemple, où on estime qu'il y a de la vengeance.
24:11 C'est dans la nature humaine.
24:13 Je pense aussi qu'on a le droit à la vengeance.
24:15 Ma directrice de thèse voulait que je fasse une thèse
24:17 sur Mme Simone Goyard-Fabre,
24:19 je vais prononcer son nom pour lui rendre hommage,
24:21 elle voulait que je fasse une thèse
24:23 de philosophie politique et juridique
24:25 et qu'elle travaille sur le droit de la guerre.
24:27 Je lui dis que ça n'existe pas, le droit de la guerre.
24:29 Cette façon d'imaginer qu'on pourrait faire ceci
24:31 mais pas cela, qu'il y aurait des conditions dans lesquelles...
24:33 La guerre, c'est la guerre, c'est donc la suspension du droit.
24:35 C'est un oxymore, comme on dit,
24:37 une opposition, deux termes qui s'opposent.
24:39 Le droit de la guerre.
24:41 Dès qu'il y a une guerre, le droit n'est plus respecté.
24:43 Donc, de part et d'autre,
24:45 quels que soient les belligérants,
24:47 il y a des choses qui ne sont pas belles,
24:49 parce que c'est le propre de la guerre.
24:51 On dit maintenant, on va porter plainte,
24:53 enfin, pour porter plainte, on va attaquer.
24:55 Et aussi bien Israël que les terroristes
24:57 qui ont décidé, qui ont déclenché le feu,
24:59 il y a juste un moment donné, il faut dire
25:01 "mais attendez, il y a toujours des otages,
25:03 vous devez toujours leur nom,
25:05 vous êtes la seule, je crois,
25:07 à donner leur nom tous les jours.
25:09 Et oui, bravo pour ça,
25:11 mais je veux dire qu'il y a eu une époque
25:13 où Marcel Carton, Fontaine, etc.
25:15 C'était tous les soirs, le journal de 20h,
25:17 et c'était très bien. Cette façon de faire
25:19 comme si on n'avait pas eu de morts franco-israéliens.
25:21 On a eu des morts, nous aussi, la France.
25:23 On passe par pertes et profits,
25:25 on dit "bon, il y a eu des morts, c'est pas très grave,
25:27 parce que maintenant le vrai problème,
25:29 c'est la création d'un État palestinien".
25:31 Je pense toujours en termes de jacobinisme
25:33 et de girondisme.
25:35 Les jacobins pensent qu'il faut un État,
25:37 un drapeau, un hymne, etc.
25:39 Et puis, des frontières.
25:41 Alors là, on est sûr, voilà.
25:43 C'est vieux, ça, c'est une vieille chose.
25:45 On peut repenser les choses autrement,
25:47 par exemple, au texte de Camus
25:49 sur la question de l'Algérie et des problèmes algériens,
25:51 quand il fallait penser la question
25:53 "est-ce que l'Algérie doit rester française ?
25:55 Est-ce que l'Algérie doit devenir algérienne ?"
25:57 Et Camus, il dit "ni l'un ni l'autre".
25:59 Il faut qu'elle soit algérienne et française.
26:01 Je pense que les deux États, Netanyahou a raison.
26:03 Si vous avez un État, qui plus est,
26:05 il est piloté par le Hamas, et que le Hamas nous dit
26:07 "il faut détruire Israël", vous ne pouvez pas créer un État
26:09 dont le but est de vous détruire. C'est pas possible,
26:11 c'est pas pensable. Si maintenant, vous pensez en termes de fédéralisme,
26:13 c'est le mot qui importe. Et je lisais des textes de Sartre,
26:15 l'autre jour, sur la question israélienne.
26:17 Il parle, à un moment donné, des solutions,
26:19 et il dit "et pourquoi pas le fédéralisme ?"
26:21 Hélas, il n'en dit pas plus. Parce que d'abord,
26:23 il aurait été obligé de dire "du bien d'Albert Camus",
26:25 et ça ne pouvait pas le faire. Mais cette idée
26:27 de dire qu'on doit pouvoir envisager, non pas
26:29 une solution à deux États, mais une solution
26:31 à deux peuples, dans un même
26:33 espace, ou dans un même État,
26:35 disons-le comme ça, je pèse mes mots.
26:37 Mais il faut que la solution fédérale
26:39 ou fédéraliste puisse être pensée dans un État nouveau.
26:41 Là aussi, comme avec la Nouvelle-Calédonie,
26:43 les grands chefs d'État inventent
26:45 des formes politiques nouvelles.
26:47 Un grand chef d'État dirait "pour la Nouvelle-Calédonie,
26:49 on va repenser la lumière de ça, et de la lumière
26:51 corse, ce qui est susceptible d'être fait
26:53 pour que nous refondions une nation autrement".
26:55 Là, on devrait pouvoir dire exactement la même chose
26:57 en disant "refondons quelque chose là-bas,
26:59 au Proche et Moyen-Orient",
27:01 qui est peut-être compliqué, comme dit le général De Gaulle,
27:03 mais qui peut se trouver simplifié,
27:05 si on a effectivement cette idée en tête
27:07 que les patrons d'Israël
27:09 et de la Palestine ont beaucoup plus
27:11 en commun que les peuples, ensemble,
27:13 palestiniens et israéliens.
27:15 Je crois que les deux peuples ont envie de la paix.
27:17 Et que pas forcément tous les chefs d'État,
27:19 suivant que vous soyez de droite, d'extrême droite, de gauche,
27:21 d'extrême gauche, et que vous ayez des intérêts
27:23 dans la vente des armes ou ce genre de choses.
27:25 Moi, je crois toujours en la démocratie, je crois toujours aux élections.
27:27 Et la possibilité de dire au peuple,
27:29 peuple israélien,
27:31 "que souhaitez-vous ? Voulez-vous garder Netanyahou
27:33 ou voulez-vous quelqu'un d'autre ?".
27:35 Et peuple palestinien, même chose, "voulez-vous toujours du Hamas ?"
27:37 Pourvu qu'on sache faire de telle sorte
27:39 qu'il y ait une souveraineté palestinienne,
27:41 une souveraineté israélienne,
27:43 et que de ces deux souverainetés, on puisse trouver
27:45 l'occasion d'une véritable négociation.
27:47 - Mais pour cela, il faut Michel Envrain que le temps de la guerre
27:49 soit révolu. Et là, on est dans le temps de la guerre.
27:51 - Alors, pour le coup,
27:53 moi je suis contre le cessez-le-feu.
27:55 Le cessez-le-feu, c'est l'occasion de dire aux Palestiniens,
27:57 "réorganisez-vous, réarmez-vous". - Ou Hamas, pas aux Palestiniens.
27:59 - Ou Hamas.
28:01 Vous avez raison.
28:03 Mais ce serait l'occasion de dire,
28:05 "bon, on se donne, je sais pas,
28:07 "huit jours, c'est faisable."
28:09 Vous avez huit jours en disant, "cessez-le-feu total",
28:11 vous aurez des gens qui ne voudront pas respecter
28:13 ce cessez-le-feu, et puis on pose
28:15 les conditions d'une radicalité démocratique.
28:17 On ne sait pas.
28:19 - Une radicalité démocratique, c'est ça ?
28:21 - Oui. Et parce que je pense que vous avez raison
28:23 de me reprendre sur cette question palestinienne.
28:25 - Oui, les Palestiniens ne sont pas le Hamas.
28:27 - Et une élection permettrait de savoir où en sont les Palestiniens
28:29 à l'endroit du Hamas. Sont-ils tous
28:31 défenseurs du Hamas, ou pas tous ?
28:33 - Je pense que les Palestiniens le sont.
28:35 Mais comme on n'a pas envie de ça,
28:37 plein de gens n'ont pas envie de ça.
28:39 On peut toujours dire, on va vous traîner
28:41 devant un tribunal international,
28:43 est-ce qu'on a envie de la paix ?
28:45 Moi j'ai envie de la paix là-bas, pour tout ce qui se passe.
28:47 Rien ne se passe correctement quand la guerre a lieu.
28:49 Je persiste à croire qu'il y a des otages,
28:51 et que ça n'est pas rien, et que nous avons eu
28:53 des morts français, et que ça n'est pas rien non plus,
28:55 et que la France pourrait s'honorer
28:57 en ayant le souci vraiment d'autre chose
28:59 que le gloubi-boulga qui est proposé en permanence,
29:01 quand ça vient d'Elysée, ou de ceux qui soutiennent
29:03 ce projet-là, en disant qu'il y a quelque chose
29:05 à faire pour que la France, on ne va pas faire
29:07 du nationalisme, mais pour que la France retrouve un peu
29:09 un rôle, qu'est-ce qu'il y a d'autre chose
29:11 que ce que nous sommes pour le restant
29:13 de la planète ? On va peut-être parler des Jeux Olympiques ?
29:15 - On y va, juste à peu près.
29:17 - Alors arrêtons-nous là.
29:19 - En tout cas c'était important de parler d'Israël.
29:21 On est en face à Michel Onfray sur CNews et sur Europe 1.
29:23 Les Jeux Olympiques, ça y est,
29:25 on est à quelques encablures de ce grand rendez-vous,
29:27 qui perturbe déjà beaucoup
29:29 la capitale. Il y en a une en tout cas
29:31 qui a déclaré sa flamme au GE, c'est
29:33 la maire de Paris, Anne Hidalgo, qui s'est énervée
29:35 en Conseil municipal, contre
29:37 le bashing des Jeux, c'est-à-dire la critique
29:39 systématique de cet événement
29:41 planétaire que Paris va accueillir. Écoutez-la,
29:43 vous allez me dire ce que vous en pensez ensuite.
29:45 - Ralbole du bashing des Jeux,
29:47 quoi ! Arrêtez, mais
29:49 ralbole !
29:51 Ralbole
29:53 à tous
29:55 ces peines à jouir,
29:57 qui n'ont pas du tout envie
29:59 qu'on puisse
30:01 célébrer quelque chose ensemble.
30:03 Rats la casquette !
30:05 De toute façon, on est là et on le fait.
30:07 À celles et ceux qui n'ont pas encore
30:09 compris ce qui est en train de se passer
30:11 et l'événement populaire
30:13 majeur que représentent
30:15 les Jeux Olympiques et Paralympiques,
30:17 ouvrez vos yeux et vos oreilles
30:19 et laissez-vous surprendre.
30:21 - Voilà, pour Anne Hidalgo.
30:23 J'avoue que je suis surprise par le langage
30:25 et l'expression. Mais peut-être que
30:27 c'est la fougue et la passion, je ne sais pas, Michel Lenfray.
30:29 - Non, c'est un langage de poissonnière,
30:31 mais c'est peut-être choisi à dessein,
30:33 je ne sais pas, ou elle est peut-être emportée,
30:35 je ne sais pas ce qui s'est passé avant,
30:37 elle est peut-être énervée parce que quelqu'un lui a fait
30:39 une remarque juste et que ça l'énerve et qu'elle choisit
30:41 ce registre-là. - Mais c'est vrai qu'on a l'impression que les Français
30:43 ne sont pas contents de voir ces Jeux. - Oui, je dirais
30:45 que cette phrase de Camus, un homme ça s'empêche, une femme aussi.
30:47 Et à un moment donné, on peut peut-être avoir envie
30:49 d'irre à le bol, d'irre à de la cassiette, ou des peines à jouir,
30:51 ou ce genre de choses, mais on se retient, quoi.
30:53 D'abord, on est maire de Paris,
30:55 et ce n'est jamais très honorable
30:57 de tomber si bas.
30:59 Et puis après, on apporte des arguments.
31:01 Il ne s'agit pas de jouir
31:03 et d'avoir de la peine à jouir parce qu'on a juste envie
31:05 de dire qu'il y a quand même quelques problèmes
31:07 dans Paris. Moi, j'utilise
31:09 le taxi pour aller à la gare, etc.
31:11 C'est un bazar total, et les chauffeurs de taxi m'expliquent
31:13 les problèmes que ça représente actuellement.
31:15 Donc, je ne suis pas contre les Jeux Olympiques, je pense.
31:17 - Vous n'êtes pas anti-Jeux Olympiques ?
31:19 - Non, pas du tout. Alors que ça ne m'intéresse pas.
31:21 Mais je pense que ça intéresse beaucoup de gens,
31:23 qu'il faut les faire, que c'est très bien pour la France,
31:25 mais que c'est justement une vitrine planétaire.
31:27 Et qu'il faut aussi avoir un discours.
31:29 Alors, on voit bien le discours, ce qu'on a envie
31:31 de montrer, justement.
31:33 Il faut absolument montrer une France métissée,
31:35 une France transsexuelle, etc.
31:37 En disant qu'il faut absolument qu'au passage de la flamme,
31:39 il y ait celui-ci, puis celui-là. On coche à peu près
31:41 toutes les cases, et alors le handicapé, etc.
31:43 - C'est bien mieux.
31:45 - Non, les gens ne sont pas...
31:47 - Il faut que tout soit représenté.
31:49 - Oui, mais à ce moment-là, les gens ne sont pas représentés
31:51 pour ce qu'ils sont, mais pour ce qu'ils
31:53 véritablement et réellement représentent,
31:55 d'un point de vue de la sociologie.
31:57 On n'a pas le droit aux statistiques ethniques,
31:59 mais il faut toujours absolument qu'il y ait
32:01 ceci, cela, etc. Et puis, ce serait bien
32:03 qu'il y ait parfois aussi quelques vieux blancs
32:05 qui sont là depuis mille ans.
32:07 - Vous parlez pour vous, Michel ?
32:09 - Oui, bien sûr, je ne m'exclue pas de ça.
32:11 Moi, je veux bien porter la flamme olympique.
32:13 Il y a juste un moment donné où cette vitrine,
32:15 c'est pareil, c'est une vitrine idéologique,
32:17 mais ce n'est pas une vitrine française.
32:19 Un chef de l'État, il doit avoir le souci de tout le monde.
32:21 Je crois qu'il y a un moment donné où on doit
32:23 pouvoir imaginer que oui, d'accord, toutes les minorités
32:25 ont leur place, mais pas plus.
32:27 On a un vrai problème aujourd'hui avec les minorités
32:29 qui sont devenues des majorités, que ce soit
32:31 les minorités en Nouvelle-Calédonie,
32:33 les minorités sexuelles,
32:35 les minorités religieuses, elles sont des majorités.
32:37 Et les majorités sont considérées comme rien.
32:39 Ça, ça s'appelle la dictature,
32:41 quand la minorité fait la loi, et quand la majorité
32:43 n'a plus qu'à se taire. Et quand la majorité peut dire
32:45 à un moment donné, écoutez, peut-être que nous aussi,
32:47 on existe, ce serait bien qu'eux, se faire traiter
32:49 de nazis, de fascistes, etc., ce n'est pas être peine à jouir.
32:51 C'est juste dire que quand on a le sens
32:53 de la nation, le sens de la République,
32:55 voilà les problèmes que... Là, ici, les chauffeurs de taxi
32:57 me disent "Oh, si vous saviez, monsieur Onfray", etc.,
32:59 ils me racontent leur vie. - Et je vous fais grâce,
33:01 Michel Onfray, des grèves à répétition
33:03 de toutes les corporations qui ont bloqué
33:05 les transports en commun et qui vont demander
33:07 des primes pour les géants. - Et on a le droit d'être énervé.
33:09 Par exemple, Benoît Duterte est très drôle
33:11 quand il écrit sur Paris, il a des pages
33:13 magnifiques, des livres magnifiques, et il raconte
33:15 bien ce qui se passe. On a le droit de ne pas être d'accord
33:17 avec cette dame, son vérité, ses insultes.
33:19 - Allez, on est en face à Michel Onfray
33:21 sur CNews et sur Europe 1. Il y a un sujet très important
33:23 que vous portez depuis longtemps.
33:25 C'est le projet de loi sur la fin de vie qui arrive la semaine prochaine
33:27 à l'Assemblée nationale. Michel Onfray.
33:29 Il a été totalement dépouillé de ses gardes-fous
33:31 par la commission spéciale de l'Assemblée.
33:33 Ils ont retiré du texte, les députés,
33:35 un certain nombre de conditions qui étaient restrictives,
33:37 qui étaient prévues dans le texte initial.
33:39 Le critère de pronostic vital engagé à court terme
33:41 a disparu.
33:43 Un délit d'entrave au suicide assisté a été introduit.
33:45 C'est-à-dire que vous pourrez être condamné
33:47 si vous refusez, à la demande d'un de vos proches
33:49 ou si vous êtes médecin,
33:51 de faire le geste. Cela inquiète
33:53 énormément les médecins.
33:55 Ça inquiète aussi les députés.
33:57 Je pense à Annie Gennevard, députée LR,
33:59 qui estime que le débat a pris un tournant très inquiétant.
34:01 Le législateur a ouvert la boîte de Pandore
34:03 au détriment de la protection du patient,
34:05 de ses proches et des soignants.
34:07 Je sais que vous êtes favorable à ce geste
34:09 d'aide active à mourir. Mais là,
34:11 on a l'impression qu'il n'y a plus aucun garde-fou
34:13 et que c'est grave, Michel Offray.
34:15 - C'est le problème d'Emmanuel Macron.
34:17 C'est-à-dire que ça ne peut jamais être clair,
34:19 ça ne peut jamais être simple, ça ne peut jamais
34:21 être rectiligne. - Là, ce n'est pas lui.
34:23 C'est la commission spéciale des députés.
34:25 - Oui, mais je ne suis pas spécialiste
34:27 de toutes ces choses-là, mais je pense qu'il y a la possibilité
34:29 de réunir le Congrès et d'avoir une ligne
34:31 extrêmement claire, avec un texte extrêmement clair,
34:33 sans qu'on ait la possibilité pour chacun
34:35 de dire "moi, je vais avoir mis mon petit amendement
34:37 qui va me permettre de dire c'est ça, mais c'est pas ceci,
34:39 là, il y aura ceci, mais pas cela, là, il faut absolument
34:41 qu'on fasse plaisir à la gauche, là, il faut absolument
34:43 qu'on fasse plaisir à la droite, etc." Et c'est de la
34:45 tambouille de politique politicienne.
34:47 Ce n'est pas à la hauteur. Ça fait 30 ans qu'on parle
34:49 de l'euthanasie. Ça fait 30 ans que la gauche prétend
34:51 qu'elle va le faire, exactement comme le droit de vote
34:53 aux immigrés, etc. Et ça fait 30 ans qu'elle ne le fait pas.
34:55 Moi, je voudrais poser la question, pourquoi
34:57 elle ne l'avait pas vous fait plus tôt, d'une part,
34:59 et pourquoi elle le fait aussi mal, aujourd'hui ?
35:01 Alors, je voudrais des vrais débats, moi, d'ailleurs,
35:03 à CNews, on pourrait faire ce genre, des vrais débats
35:05 de fond, pas des trucs du genre "alors,
35:07 les filles, demandez ça, c'est bien, parce que comme ça,
35:09 vous allez voir, j'ai vu qu'il y avait même des
35:11 espèces de combats de coque de gens qui disaient
35:13 "avec cet amendement, je ne sais pas si c'est un amendement,
35:15 avec cette proposition, vous n'allez plus pouvoir,
35:17 etc." Et ça mérite mieux.
35:19 Un peu de décence, un peu de grandeur, un peu
35:21 d'élégance. Il y a des gens qui sont en attente de la mort
35:23 et méritent autrement et autre chose
35:25 que ce genre de petits combats de politique politicienne,
35:27 que ce soit clair, que ce soit net, et
35:29 aurions-nous eu un président de la République
35:31 qui ait quelque autorité, que la chose
35:33 aurait été plus simple, il serait intervenu, il aurait fait
35:35 un vrai discours clair, et il aurait dit
35:37 "soyez derrière moi", comme le président,
35:39 non, c'était Mitterrand, avait aboli
35:41 la peine de mort, avec Jacques Chirac, qui était derrière
35:43 lui, et nombre d'autres députés, parce que sur des sujets
35:45 comme ceux-là, on devrait faire une unanimité.
35:47 Je rappelle que c'est tout de suite que le problème
35:49 existe, c'est pas avec un texte de loi.
35:51 Le libéralisme... - Chaque jour,
35:53 dans nos services hospitaliers... - Le problème, il est
35:55 dans le fait qu'il n'y ait pas de loi. N'importe qui
35:57 fait n'importe quoi, n'importe comment, et c'est vraiment
35:59 à la tête du client, etc. - Et qu'il manque
36:01 des services de soins palliatifs dans de nombreux
36:03 départements en France. - Oui, enfin, moi je suis
36:05 pour les deux, c'est-à-dire que je suis pour le choix.
36:07 C'est-à-dire que cette vieille opposition, les soins palliatifs
36:09 c'est pour la droite parce qu'elle est gâteau, et puis
36:11 l'euthanasie c'est pour la gauche parce qu'elle
36:13 veut la maîtrise sur son propre corps, etc.
36:15 Non, on fait les deux, et puis
36:17 on dit à chacun, on vous éduque, puis après vous avez le droit
36:19 de changer, le fameux droit à la contradiction de Baudelaire,
36:21 et vous pouvez avoir toute
36:23 votre vie le droit d'en appeler
36:25 l'euthanasie, c'était le cas de ma compagne
36:27 Marie-Claude, et puis quand le moment arrive,
36:29 passer à côté, ne pas le voir, et puis vous accrocher
36:31 à la vie, et peut-être saisir
36:33 les soins palliatifs comme une hypothèse, une solution.
36:35 On a le droit de choisir. Vous savez,
36:37 quand on pense une chose et qu'on est en pleine santé,
36:39 on pense pas forcément la même chose quand on n'est pas en pleine
36:41 forme, et qu'éventuellement un médecin vient de vous dire
36:43 "il vous reste trois semaines à vivre". Donc laissons
36:45 ou ouvrons des possibilités,
36:47 n'imposons rien à personne, n'insultons
36:49 pas les uns et les autres en disant
36:51 "vous avez tort d'être pour, vous avez tort d'être contre",
36:53 mais rendons possible quelque chose qui permette
36:55 pour le coup la dignité
36:57 - Et de la sérénité dans les débats. - De la sérénité.
36:59 - Un tout petit mot, Jean-Marc Sauvé, qui est l'ancien
37:01 vice-président du Conseil d'Etat, estime que
37:03 ce serait le stade ultime du libéralisme.
37:05 Il redoute que le fusti d'assister et l'euthanasie
37:07 n'entraînent plus de décès par défaut d'accompagnement
37:09 que de décès authentiquement souhaités.
37:11 - Eh bien je pense exactement l'inverse. Je pense
37:13 que c'est l'état dans lequel nous
37:15 nous trouvons qui permet à chacun
37:17 de faire n'importe quoi, n'importe quand, qui signifie
37:19 vraiment le libéralisme. C'est vraiment
37:21 la liberté du renard libre
37:23 dans le poulailler libre. Vous avez des médecins
37:25 qui font, qui ne font pas, qui se cachent, qui ne se cachent
37:27 pas, ou vous avez 3-4 personnes
37:29 dont on sait qu'ils pratiquent l'euthanasie
37:31 mais il vaut mieux les connaître si vous avez envie, si vous les connaissez pas,
37:33 etc. C'est ça pour l'instant la réalité.
37:35 Moi je souhaite que le législateur puisse
37:37 produire un texte digne de ce nom, pas un texte macronien
37:39 et que ce texte soit vraiment bien écrit,
37:41 que revienne le sénateur
37:43 Cavaillé qui faisait très bien ces choses-là, sur la pilule,
37:45 sur l'avortement, non c'était Neuvirt, la pilule.
37:47 Mais sur l'avortement, etc. Enfin
37:49 tous ces vieux francs-maçons qui faisaient
37:51 des choses magnifiques en disant
37:53 "faisons des textes qui soient républicains,
37:55 qui soient faits pour tous les Français, pas seulement une catégorie"
37:57 en disant "il faut faire plaisir à la droite, il faut faire plaisir à la gauche".
37:59 Ce sujet-là mérite mieux que
38:01 des empoignes politiciennes. - Michel Onfray,
38:03 on va parler quand même, et c'est normal,
38:05 de votre livre qui vient de sortir chez Albin Michel
38:07 en librairie "La foudre gouverne le monde".
38:09 C'est le huitième tome de votre
38:11 journal "Hédonis", encore et toujours
38:13 la chronique d'un esprit libre.
38:15 Vous évoquez beaucoup ces questions de vie ou de mort
38:17 dans ce livre.
38:19 Et vous évoquez la civilisation judéo-chrétienne,
38:21 dont vous dites qu'elle a des défauts, mais que vous les préférez
38:23 à ceux d'autres civilisations.
38:25 - Oui, c'est un peu ça avec sa femme, avec son mari,
38:27 avec ses parents, avec son frère, avec sa soeur.
38:29 Nos proches, personne n'est parfait.
38:33 Et il y a des choses qu'on peut reprocher.
38:35 Moi le premier, j'ai beaucoup reproché au christianisme,
38:37 sa pensée du corps, sa pensée de la chair,
38:39 sa pensée de la culpabilité,
38:41 toute sa théorie de l'érotisme
38:43 qui n'en est pas un, l'imitation de Jésus qui est un cadavre,
38:45 l'imitation de Marie qui est une vierge et qui est mère
38:47 en même temps, tout ça qui interdit un peu l'érotisme.
38:49 J'ai beaucoup dit ça.
38:51 - Et aujourd'hui ?
38:53 - Je le dis toujours, mais je pense que c'est pas prioritaire.
38:55 Que le christianisme a perdu toute sa puissance
38:57 de répression sur la question
38:59 des corps, et qu'on n'y est plus.
39:01 J'ai rappelé il y a quelques temps qu'en 68,
39:03 un jeune homme qui a eu une histoire amoureuse
39:05 avec son enseignante s'en va en prison,
39:07 la jeune femme, et puis se suicide.
39:09 Là aujourd'hui, le président de la République a eu la même histoire
39:11 et personne ne trouve ça anormal, et c'est très bien qu'on ne trouve pas ça normal.
39:13 - Qu'on trouve ça normal ?
39:15 - Qu'on trouve ça anormal, oui bien sûr.
39:17 Et donc,
39:19 on était parti sur quoi ?
39:21 Oui, c'est ça, sur cette idée qu'effectivement aujourd'hui,
39:23 la priorité n'est plus là. C'est-à-dire que notre civilisation
39:25 est en péril. Elle est attaquée en tant que telle.
39:27 C'est-à-dire que je ne pensais pas qu'un jour
39:29 je défendrais l'Occident, qui était à la fin
39:31 une espèce de mot réservé à l'extrême droite.
39:33 Simplement, aujourd'hui, l'Occident, c'est une façon d'être,
39:35 une façon de faire, votre façon de vous habiller,
39:37 de vous comporter, etc. Notre façon de manger,
39:39 moi aussi de m'habiller, entendons-nous bien,
39:41 de manger, de nous comporter,
39:43 le rapport à l'image, le rapport
39:45 aux femmes, le rapport à la liberté, etc.
39:47 Et je me dis, si nous nous comparons
39:49 à d'autres civilisations, et aujourd'hui
39:51 nous avons le choix entre plusieurs civilisations,
39:53 mais il y en a au moins deux qui se proposent,
39:55 et notamment une civilisation arabo-musulmane,
39:57 et qu'on met en face une civilisation jidéo-chrétienne,
39:59 voilà pourquoi la défense du peuple juif
40:01 aujourd'hui est importante,
40:03 ce ne sont pas les mêmes civilisations.
40:05 Et là, je me dis, mettons de côté cette histoire
40:07 du statut des corps dans le christianisme,
40:09 c'est devenu secondaire, c'est vraiment devenu secondaire.
40:11 Le christianisme n'a plus ce pouvoir qu'il avait
40:13 jadis sur le corps des femmes, sur le corps des hommes aussi,
40:15 mais surtout sur le corps des femmes,
40:17 et défendons autre chose,
40:19 un rapport à l'image, un rapport à la lecture,
40:21 je pense que la civilisation iconophile,
40:23 c'est-à-dire qui aime les images, qui est la nôtre,
40:25 a rendu possible l'image, le cinéma, le théâtre,
40:27 la peinture, etc. La civilisation iconoclaste
40:29 de l'islam ne l'a pas rendu possible.
40:31 La civilisation de l'interprétation
40:33 de la Bible, par exemple, a donné tout le génie
40:35 de l'allégorie, de la métaphore, donc la possibilité
40:37 du roman et de la littérature en France,
40:39 mais aussi en Europe, c'est pas exactement
40:41 le cas avec la civilisation islamique,
40:43 il y a d'autres vertus, mais il y a un moment donné
40:45 où on peut, comme avec les personnes,
40:47 préférer quelqu'un à quelqu'un d'autre, et je pense
40:49 que l'heure est venue effectivement de défendre une civilisation
40:51 dans laquelle, finalement,
40:53 on est quand même plutôt pas mal.
40:55 - En tout cas, la foudre au gouvernement, c'est qui la foudre
40:57 aujourd'hui ? - Alors d'abord, c'est une
40:59 jolie phrase de Héraclite,
41:01 un philosophe présocratique, qui lui disait
41:03 "le feu est partout". La foudre aujourd'hui, c'est
41:05 le feu qui embrasse tout et tout le monde et chaque chose.
41:07 - Très bien. En tout cas, je vous recommande,
41:09 chers amis auditeurs et téléspectateurs, la liqueur
41:11 de ce livre de Michel Onfray,
41:13 "La foudre au gouvernement", de l'édition Albin Michel.
41:15 Merci beaucoup Michel. - C'est moi. - On se retrouve la semaine prochaine
41:17 pour un nouveau numéro de Face à Onfray.

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