• il y a 9 mois
Michel Onfray passe en revue l’actualité de la semaine dans #FaceAMichelOnfray. Présenté par Laurence Ferrari.

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Transcription
00:00 Bonjour à tous et bonjour à toutes, bienvenue dans Face à Michel Onfray, notre nouveau rendez-vous chaque week-end avec vous Michel Onfray.
00:07 Bonjour Michel.
00:08 Bonjour.
00:08 Très heureuse de pouvoir échanger régulièrement avec vous, de pouvoir éventuellement ferrailler, parce que nous ne sommes pas d'accord sur tout, loin s'en fout.
00:16 Vous êtes docteur en philosophie, écrivain prolixe, plus de 150 livres, c'est ça ?
00:21 Oui.
00:21 Dont la Nef des Fous 4 qui vient de sortir aux éditions bouquins essais.
00:24 Vous êtes surtout un libre penseur et on aime la liberté d'expression sur Seigneux.
00:28 Nous allons essayer donc chaque semaine, si vous le voulez bien, avec vous de prendre de la hauteur sur l'actualité, d'analyser les mouvements qui traversent notre société.
00:37 On va parler aujourd'hui par exemple Michel de la colère paysanne.
00:40 Qu'est-ce que cette grande profonde de nos agriculteurs recouvre exactement pour vous sur le plan sociétal, historique et philosophique ?
00:47 On va parler aussi de la grande peur des Français face au spectre d'un conflit, d'une guerre mondialisée, à la lueur des propos d'Emmanuel Macron,
00:54 n'excluant pas d'envoyer des troupes au sol en Ukraine et de la réponse glaçante de Vladimir Poutine,
01:00 nous menaçant d'une destruction de la civilisation.
01:03 Quel est le sens de la guerre ? Quelle est la figure de l'ennemi ? Que pèsent nos démocraties face au régime autoritaire ?
01:09 Et puis, nous évoquerons aussi cette époque du trouble amoureux que nous vivons, avec d'un côté la parole des femmes qui se libère,
01:17 notamment dans le cinéma français, mais aussi le nouvel ordre qui se met en place sur le terrain, justement, de ces rapports amoureux.
01:25 Voilà pour le programme aujourd'hui.
01:26 On va commencer, Michel Onfray, par ce premier thème incontournable, la colère paysanne qui continue de sourdre,
01:32 alors que le Salon de l'agriculture se poursuit avec son défilé incessant d'hommes et de femmes politiques,
01:37 puisque évidemment ils sont en campagne pour les élections européennes.
01:40 Vous avez été choqué, je crois, de la façon dont les agriculteurs ont été traités depuis le début de leur révolte, de leur colère.
01:47 Il y a quelques semaines.
01:48 Oui, parce que la paysannerie, je dirais, c'est la France sans Paris.
01:52 C'est-à-dire non pas la France des territoires, comme on dit dans un mot qui m'effraie.
01:56 Territoire, c'est quand même un mot d'éthologue.
01:57 Les éthologues s'occupent des animaux en disant voilà, le mal dominant, il a un territoire.
02:01 Et puis, il met de l'urine, des matières fécales.
02:05 Il dit c'est chez moi, c'est mon territoire.
02:07 Et quiconque va passer dans ce territoire va montrer que soit ils m'obéissent, soit on va se battre, etc.
02:12 Je n'aime pas ce mot territoire.
02:13 Ce sont les provinces qui sont en jeu et qui disent ça suffit, ça commence à bien faire, on ne peut plus.
02:19 Et comme ils ont de la dignité, le sens du travail, qu'ils sont virgiliens, c'est-à-dire dans l'esprit de Virgile,
02:25 qui lui racontait le paysan à l'époque romaine et qui nous disait voilà, il regarde le ciel, la nature, il comprend,
02:29 il est en face directe avec la terre, avec l'eau, avec la pluie, avec la lumière, avec le soleil, etc.
02:35 Et ce paysan, on nous dit, laissez-les dans leurs coins.
02:39 Il y a une espèce de vieux logiciel gauchiste qui suppose que la révolution se fait par l'avant-garde déclarée de la classe ouvrière.
02:46 C'est-à-dire les ouvriers des usines syndicalisées sous-entendues marxistes.
02:50 Pendant que les paysans, eux, sont des conservateurs, des réactionnaires, sont des gens qui sont toujours opposés à la révolution, etc.
02:56 Ce sont des gens de bon sens qui, à un moment donné, disent ça commence à bien faire.
03:00 Un peu comme avec les Gilets jaunes, souvenez-vous de Jacqueline Moureau qui, d'un seul coup, pique une petite crise en se disant "mais enfin c'est pas possible".
03:07 Avec des choses de bon sens, du genre "c'est bientôt Noël, on ne va pas pouvoir acheter des cadeaux à nos enfants".
03:13 Là, les paysans disent "mais on ne va pas pouvoir survivre, on a des compagnons et des copains qui sont endettés,
03:19 on a des agriculteurs tous les jours qui se pendent, qui se suicident, ça n'est plus possible, si vous vouliez bien nous écouter, ce serait bien quand même".
03:25 Et il y a une façon de dire "on va vous embobiner, comme les autres, ça marche très bien, le discours, le blabla, la parole, ça ne marche pas chez ces gens-là".
03:33 On va écouter justement un extrait d'un dialogue saisissant entre un agriculteur et le président Macron,
03:38 ça s'est passé au salon de l'agriculture le jour de l'inauguration, et ce sont vraiment deux mondes qui sont face à face.
03:45 "Si on s'était rencontré deux heures plus tôt, on n'en serait même pas là aujourd'hui".
03:48 "Mais quoi deux heures plus tôt ? Moi j'ai rencontré l'intersyndical, pardon, là je vous rencontre, parce que moi j'ai rencontré l'intersyndical.
03:54 En bas, il y a eu des violences, c'est le bordel, il y a des trucs qui ont été détruits".
03:57 "Mais bien sûr, on attend, on attend, on tourne en reprend deux heures".
03:59 "En bas, moi je veux bien parler à tout le monde, c'est un moment où tout le monde siffle".
04:03 "Attends, je ne suis pas en train de dire que vous faites de la gratte, c'est la France qui bosse".
04:06 "Mais on va aussi arrêter tous collectivement de dire que l'agriculture est foutue, parce que sinon ce n'est pas la peine d'aller chercher des jeunes".
04:12 "Si le discours ambiant, c'est de dire que l'agriculture est foutue et il ne faut que des aides de trésor,
04:16 il n'y a pas la peine de faire une loi d'orientation, il n'y a pas la peine de s'emmerder, on ferme tout de suite le magasin".
04:22 "Il y a un agriculteur qui se suicide tous les deux jours en France, et des jeunes.
04:27 Donc il faut aller très vite, on a besoin de respirer dans nos exploitations, il nous faut de la trésorerie, rapidement".
04:33 "Je veux parler du suicide, vous savez, nous on travaille à peu près 100 heures par semaine".
04:38 "Moi ça fait trois ans que je travaille 100 heures par semaine, que je ne sors pas à Héros-Lune".
04:42 "C'est ma femme qui me fait vivre".
04:44 "Au mois d'août, j'ai failli passer à la cause".
04:47 "J'ai un gamin de 15 ans et une gamine de 10 ans".
04:50 "Vous croyez que ça me fait plaisir de monter au salaud ? C'est mon père qui a 72 ans qui s'occupe de la ferme".
04:56 Voilà pour ces échanges entre les agriculteurs et Emmanuel Macron.
04:59 Qu'est-ce que ça dit pour vous de l'état du monde paysan face à notre pouvoir exécutif ?
05:05 D'abord j'ai été choqué de la façon qu'a le président de la République de s'adresser aux paysans.
05:10 C'est d'une grossièreté, d'une vulgarité, avec des gros mots en permanence, un tutoiement dans ces scènes-là.
05:16 On le voit tutoyer les gens, mais est-ce qu'il parle comme ça au patron des GAFAM quand il les reçoit ?
05:20 Est-ce qu'il leur fait des colères comme ça en disant "emmerder" ? Est-ce qu'il parle de "négo" ?
05:25 C'est de la condescendance pour vous ?
05:26 C'est du mépris, c'est même pas de la condescendance.
05:28 J'arrive, je suis en bras de chemise, j'ai demandé un ring, on a parlé à une époque d'un ring,
05:33 et puis ils viennent et je me les prends tous les uns après les autres, puis je leur parle,
05:36 puis je leur dis "vous êtes comme ça", etc. Ils font des signes, déjà on parle pas comme ça.
05:39 J'ai souvent parlé des deux corps du roi de Kantorowicz qui nous dit qu'un roi c'est effectivement une personne privée,
05:45 puis c'est aussi quelqu'un qui est investi de la souveraineté nationale et populaire, théoriquement.
05:49 C'est-à-dire normalement on pèse, on a le poids de la souveraineté sur soi-même.
05:53 Et le roi personnel, il peut être grossier, il peut être vulgaire, il peut dire "négo" à la place de "négociation",
05:59 il peut... J'ai pas fait un bilan de tout ce qu'il a raconté, mais enfin tout le monde a pu entendre,
06:04 utiliser des gros mots, des grossièretés, mais quelle image donne-t-il de la France ?
06:08 Quelle image donne-t-il de la fonction ?
06:10 Quelle image donne-t-il également de la relation qu'il entretient avec les paysans ?
06:13 C'est une espèce de sachant, un instituteur qui donne des leçons en disant "je vous méprise, je vous déteste,
06:18 vous êtes nuls, je vous maltraite, je vous parle mal, et en même temps vous n'avez rien compris,
06:22 moi je sais, je trouve ça inadmissible".
06:24 C'est pas ici que la politique se fait, c'est pas devant des caméras, c'est-à-dire qu'on rencontre des gens,
06:28 on discute véritablement.
06:29 Maintenant le vrai non-dit de cette affaire, c'est effectivement la question européenne.
06:33 C'est ça qui sous-tend toute cette colère de des agriculteurs dans toute l'Europe en réel.
06:37 Mais bien sûr, ils le savent bien, ça a été beaucoup dit, et tant mieux, ils vivent ces news qui ont rendu possible
06:41 la visibilité de ce qu'était vraiment l'Europe, enfin !
06:44 C'est-à-dire qu'en 92, moi j'étais contre le Maastricht à l'époque,
06:48 c'était deux civilisations qui s'opposaient, mais deux images, ça n'existait pas encore.
06:52 Aujourd'hui ce ne sont plus deux images, ce sont deux réalités.
06:55 C'est-à-dire maintenant les Maastrichtiens, ils sont au pouvoir depuis 1992,
06:58 ils ont fait cette France-là.
06:59 Les paysans ne font pas des grandes théories, ils vous disent juste "nous, on nous dit vous allez produire des poulets,
07:04 on n'avait pas le droit de les produire n'importe comment,
07:06 on n'avait pas le droit de ne pas tenir compte du bien-être animal".
07:09 Et puis en même temps, d'autres, qui ne sont même pas européens, des Ukrainiens,
07:12 on a l'impression que la France fait plus la politique de l'Ukraine que de la France aujourd'hui,
07:16 des poulets ukrainiens qui ont été quasiment nourris à la dioxine
07:19 et qui ont été congelés pendant trois ans vont arriver sur le marché.
07:22 Il est bien évident que quand les grandes surfaces vont les acheter,
07:24 ils vont plutôt acheter ces produits-là pas très chers,
07:26 et les produits des paysans français ne seront pas achetés.
07:29 D'où la misère, d'où la pauvreté, l'Europe c'est ça.
07:31 Évidemment c'est la chose à ne pas dire.
07:33 - Le projet de l'Europe c'est industrialiser la paysannerie pour vous Michel Onfray ?
07:36 - Oui, je pense qu'on ne fait pas assez de perspectives, de longues vues, de longues visions,
07:41 en disant "mais il y a un projet de société dans l'Europe de Maastricht, c'est évident,
07:44 il y a un projet d'hommes, il y a un homme nouveau, il y a un homme déconstruit,
07:47 ce que veut Sandrine Rousseau c'est un homme déconstruit,
07:49 ce que veut l'Europe c'est une Europe post-nationale.
07:52 C'est une Europe aussi post-chrétienne, on commence à voir toutes ces obsessions
07:55 sur la question de l'avortement, du mariage homosexuel, de la gestation pour autrui etc.
08:00 Ce sont les premières lois anti-chrétiennes, je ne dis rien de ces lois,
08:03 peut-être qu'on aura l'occasion d'en reparler un jour,
08:05 mais juste dire "avançons, cette vieille société, cette vieille civilisation elle est morte".
08:08 Les vieux paysans à l'ancienne, comme mon père qui était ouvrier agricole par exemple,
08:12 je le dis beaucoup, tout ça c'est fini.
08:14 Tout ça c'est fini, il va falloir aller vers une industrialisation de l'alimentation.
08:18 C'est-à-dire que vous êtes évidemment contre les mauvais traitements infligés aux animaux,
08:21 vous êtes soucieux du bien-être animal, tout le monde évidemment est d'accord,
08:24 qui plus est les jeunes aujourd'hui, et on fait voir des images d'animaux en batterie,
08:27 on se dit "oh là là c'est terrible" etc.
08:28 On dit "mais aujourd'hui on peut cultiver un laboratoire de la viande cellulaire,
08:31 on peut à partir de prélèvements de cellules fabriquer un biftec
08:35 qui n'aura jamais vu d'animal, vous avez de la viande de bête sans bête,
08:38 et on va vous fabriquer une tumeur, c'est ça, c'est véritablement ça la viande tumoral qu'on nous propose là.
08:44 Et on industrialise l'alimentation, plus besoin de paysans, plus besoin de vaches qui ne vont pas souffrir,
08:48 qui ne vont pas émettre de gaz dans l'atmosphère,
08:51 qui ne vont pas boire de l'eau qui va être problématique parce que les nappes phréatiques sont vides etc.
08:55 On dit "vous avez vu la solution c'est ça".
08:57 Maintenant évidemment quand vous avez des centrifugeuses, quand vous avez de l'informatique etc.
09:01 ça coûte très cher de fabriquer cette viande là, et c'est extrêmement polluant,
09:04 mais ça ça ne les gêne pas les écologistes, puisque ça économise la souffrance animale.
09:08 Et on nous dit après ça, l'alimentation sera entre les mains de quelques industriels
09:11 qui de manière planétaire vont vous obliger à manger ça plutôt qu'autre chose.
09:16 Donc globalement on ne le dit pas, mais il faut euthanasier la paysannerie française.
09:19 Ça va prendre du temps, mais c'est le projet d'un Emmanuel Macron qui bien sûr ne va pas le dire,
09:24 et de tous les maastrichtiens qui bien sûr ne vont pas le dire non plus.
09:26 - Alors il y a aussi une autre question, c'est est-ce que les français, Michel Onfray,
09:29 sont prêts à payer plus cher pour leur alimentation ?
09:31 Et est-ce qu'ils peuvent tout simplement payer plus cher aujourd'hui ?
09:35 Est-ce que ce n'est pas l'inflation en réalité qui guide leur choix alimentaire ?
09:39 - Mais bien sûr, c'est-à-dire on pourrait même imaginer un système d'étiquetage en disant
09:43 "voilà ça c'est français, ça c'est européen et ça c'est mondial par exemple".
09:46 Je vous assure qu'avec les contraintes qui sont imposées aux paysans,
09:50 ce qui serait français serait beaucoup plus coûteux que ce qui serait mondial.
09:53 Maintenant évidemment il y aurait probablement un meilleur produit français
09:57 s'il était fabriqué comme les paysans savent le faire,
09:59 plutôt que des produits industriels qui sont fabriqués, la viande en Argentine,
10:03 je ne sais pas quoi, les escargots en Roumanie, enfin tout ce qu'on voudra.
10:05 Donc on sait bien que de toute façon quand les gens font leur commission,
10:09 il y a des gens qui, quand ils font les courses, prennent ce qu'ils ont envie de manger.
10:11 "Ah tiens ça me plaît bien", etc. Moi je peux me le permettre,
10:15 parce que mon pouvoir de l'achat me le permet.
10:17 Mais pour beaucoup de gens c'est "je regarde le prix d'abord, je ne peux pas, je repose".
10:21 Et vous avez des gens qui aujourd'hui n'achètent pas un certain nombre d'aliments
10:24 parce qu'ils ne peuvent pas se le permettre.
10:25 Donc évidemment le bio c'est formidable, c'est très bon à manger, mais c'est très cher.
10:29 Ou des produits de qualité, c'est très cher.
10:31 Il vaut mieux des mauvais poissons fabriqués, je ne vais pas donner de marque,
10:34 mais enfin des poissons rectangulaires avec de la panure,
10:36 plutôt que d'avoir un bar de ligne pêché par un pêcheur.
10:40 Ceci dit, cet ancien nous fait savoir qu'il vaut mieux un dauphin qu'un pêcheur.
10:43 On nous a fait savoir que pour préserver quelques dauphins de la pêche,
10:46 il valait mieux mettre à quai des propriétaires de bateaux qui sont ultra endettés,
10:50 et qui disent "mais nous on a notre dignité, on ne veut pas être désassisté,
10:53 on ne veut pas un chèque, on veut juste travailler,
10:55 et être payé de notre propre travail".
10:57 Mais il faut en finir avec les pêcheurs comme il faut en finir avec la paysannerie.
11:00 L'alimentation c'est aussi un des signes de la civilisation.
11:03 Vous aviez à l'époque fondé l'Université populaire du goût,
11:07 pour célébrer non seulement les produits, mais aussi la gastronomie.
11:11 Aujourd'hui on n'éduque plus au goût une civilisation qui ne sait plus ce qu'elle mange,
11:15 et qui est une civilisation qui se laisse dépérir.
11:18 Oui, parce que, alors je ne vais pas dire que c'était un modèle idéal,
11:21 mais jadis il y avait la mère au foyer qui cuisinait,
11:23 on mangeait des bons produits, on allait chercher...
11:25 Ce n'est pas un modèle idéal.
11:25 Je n'ai pas... J'ai bien pris soin de le dire.
11:28 Mais je veux dire, aujourd'hui les couples travaillent,
11:32 ils n'ont pas le temps de cuisiner,
11:33 ça coûte cher d'aller faire ses courses sur le marché,
11:35 ça coûte cher d'acheter des produits frais, etc.
11:37 Et c'est vite fait de prendre une barquette, de la mettre dans le micro-ondes,
11:39 et de la servir parce qu'on n'aura pas eu le temps de le faire.
11:42 Donc évidemment on n'a plus le goût,
11:44 et même si aujourd'hui vous faites goûter...
11:47 Mes petits-enfants par exemple, vous leur faites goûter du beurre
11:49 qui a été fabriqué dans une ferme, ils vont dire "c'est pas bon".
11:52 Parce que les enfants aujourd'hui sont éduqués à une espèce de matière grasse
11:55 qui n'a pas de goût.
11:56 C'est la même chose avec le lait,
11:57 c'est la même chose avec un certain nombre de produits qui ont de la saveur.
11:59 Si vous dites "moi je suis un instituteur,
12:01 professeur des écoles comme on dit désormais,
12:03 et je vais faire goûter des beurres dans mon école",
12:05 vous n'avez pas le droit.
12:06 - Pourquoi ?
12:07 - Parce que vous avez tout de suite les inspections d'hygiène qui arrivent
12:10 avec des motards, des voitures de police, avec des drones,
12:13 et qu'ils sont en train de regarder ce qu'il y a dans l'assiette
12:14 et qu'ils emmènent l'instituteur quasiment en prison ou en garde à vue
12:17 pour savoir quelle idée lui a pris pour avoir fait un gâteau d'anniversaire
12:21 avec les enfants.
12:22 D'où vient votre beurre, d'où vient votre farine ?
12:24 Avez-vous utilisé les plats qu'il faut utiliser
12:27 dans les températures qui sont les bonnes ?
12:28 Si vous avez une petite gastro-entérite,
12:30 vous avez trois psychologues qui sont envoyés
12:32 pour pouvoir vérifier si quand même ils vont pas être trop traumatisés, etc.
12:35 Et les instituteurs ils disent "non, non, non, je vais pas faire ça moi".
12:37 Et l'université populaire du goût que j'avais créée à Argentan
12:40 avec quelques amis,
12:41 c'était dans un jardin de réinsertion sociale,
12:42 et je disais "mais apprenez à cuisiner les carottes, les pommes de terre,
12:46 les betteraves, des choses très simples,
12:47 et quand vous les aurez cuisinées, arrangées, etc.
12:50 vous verrez d'abord que ça coûte pas cher,
12:51 500 grammes de carottes râpées quand vous les fabriquez vous,
12:55 regardez le prix quand vous l'achetez,
12:57 d'ailleurs on n'avait pas que de la carotte râpée
12:58 dans la carotte râpée sous un truc cellophane,
13:00 avec les perturbateurs endocriniens qui vont avec,
13:02 et regardez le goût que vous allez découvrir,
13:05 parce que d'un seul coup vous allez découvrir que ça a une saveur la carotte.
13:08 Qui fait ça ? Ça ne se fait plus à l'école,
13:10 ça ne se fait plus dans les familles,
13:11 ça ne se fait plus nulle part,
13:12 et puis les gens n'achètent que ce qu'ils peuvent acheter
13:15 en fonction de leur porte-monnaie.
13:16 Donc effectivement ils vont chercher au moins cher,
13:18 et si c'est le moins cher c'est souvent le moins bon.
13:19 - Il y a aussi à l'occasion de ce salon international de l'agriculture,
13:22 ce défilé des hommes et femmes politiques,
13:24 classique évidemment depuis des dizaines d'années,
13:27 ce qui est frappant dans le cadre de la campagne des européennes,
13:30 parce qu'on a bien compris qu'elle a été lancée
13:31 pendant ce salon d'agriculture,
13:33 c'est l'âge des têtes de liste des candidats pour les européennes.
13:37 Quand on prend tous ces candidats,
13:39 Valérie Aillard pour Renaissance, 37 ans,
13:41 Léon Desfontaines pour le Parti Communiste, 27 ans,
13:44 Jordan Bardella, Rassemblement National, 28 ans,
13:46 Marie Toussaint, écologiste, 37 ans,
13:48 François-Xavier Bellamy, LR, 38 ans,
13:50 Marion Maréchal, 32 ans,
13:52 si on met ça aussi en regard de l'âge du Premier ministre,
13:55 Gabriel Attel, 34 ans,
13:57 cela donne une forme de jeunisme politique.
14:00 Qu'est-ce que ça vous dit ?
14:01 Est-ce que c'est un argument politique d'abord,
14:02 l'âge pour vous Michel Offray ?
14:03 - Non, non, non, il vaut mieux un jeune compétent,
14:05 un vieux incompétent, ça me paraît évident,
14:07 mais ça dit des choses,
14:09 parce qu'effectivement l'histoire ayant progressivement disparu,
14:11 j'ai à 10, moi j'ai 65 ans,
14:13 j'ai connu des hommes qui avaient rencontré l'histoire,
14:16 des hommes politiques qui avaient rencontré l'histoire,
14:17 ils avaient été résistants,
14:18 certains avaient été collabos,
14:20 d'autres avaient connu la guerre d'Algérie,
14:21 certains avaient connu etc.
14:23 Ils avaient connu l'histoire,
14:24 aujourd'hui ils ont connu l'école,
14:26 c'est-à-dire ils sont brillants, ils sortent,
14:27 ils sont formatés et ils ont fait, je ne sais pas,
14:29 l'ENA, Sciences Po ou je ne sais quoi,
14:30 et ils sont brillantissimes sur tous les sujets.
14:32 Manon Aubry, on aurait peut-être pu ajouter aussi,
14:34 qui est assez jeune, je pense, pour la France Insoumise,
14:37 qui sont tous des gens brillants,
14:39 j'enlève le fond, je regarde juste sur la forme,
14:41 brillant, incollable, sophiste,
14:43 disposant des dossiers etc.
14:45 Moi je ne suis pas contre ça,
14:46 simplement quand on a l'histoire derrière soi
14:49 ou quand on a l'école derrière soi
14:50 et qu'on a un projet de carrière,
14:52 ce n'est pas exactement la même chose.
14:54 Je me souviens d'une histoire,
14:55 peut-être d'ailleurs pourrait-on faire de cette date
14:57 le début de la fin ou le commencement de la fin,
14:59 d'un Laurent Fabius brillantissime comme on le sait,
15:01 avec les diplômes du moins,
15:03 c'est-à-dire l'école normale supérieure je crois,
15:06 l'agrégation de lettres, peut-être même classique,
15:08 l'ENA, Sciences Po, il avait tout quoi.
15:10 Et on a dit à une époque, qui s'était dit,
15:12 "bon alors à droite ou à gauche ?"
15:13 Certains lui avaient dit,
15:14 "ah c'est peut-être plus rentable d'investir dans la gauche",
15:16 il a dit "allons-y dans la gauche".
15:17 Puis il a fait de cette gauche la gauche de droite que nous savons.
15:20 Mais je veux dire que vous avez des gens qui font carrière.
15:22 Et je ne suis pas bien sûr qu'il y ait derrière des vraies convictions.
15:27 C'est-à-dire qu'on voit bien que Jordan Bardella,
15:28 il a une feuille de route et puis on lui dirait
15:30 "on change de feuille de route, on change de feuille de route".
15:33 C'est la vieille logique de Machiavel,
15:35 c'est-à-dire la question c'est comment arriver au pouvoir
15:37 et quand on y est comment s'y maintenir ?
15:38 Même réponse de Machiavel,
15:40 "voyez la force du lion et la ruse du renard et puis vous verrez,
15:43 ce sera très bien".
15:44 Sauf qu'il y a la France et personne ne parle de la France,
15:47 sauf au faire-semblant.
15:48 Mais normalement quand on fait de la politique,
15:50 on ne fait pas de la politique pour avoir des postes,
15:51 mais pour porter et sauver la France.
15:53 - On vous parle et Jordan Bardella,
15:55 il y a quelque chose qui est à l'œuvre depuis quelques semaines
15:58 à la faveur de cette campagne des européennes,
16:00 c'est les attaques en règle du gouvernement
16:02 contre le Rassemblement National.
16:04 On va écouter notamment Gabriel Attal,
16:05 cette semaine à l'Assemblée Nationale,
16:07 qui répondait à Marine Le Pen
16:09 sur la question de l'envoi éventuel de troupes au sol en Ukraine.
16:13 Écoutez ses arguments,
16:14 puis on va voir ce que vous en pensez ensuite.
16:17 - Madame Le Pen, quand on regarde les positions qui sont les vôtres,
16:21 qui ont été les vôtres,
16:23 Madame Le Pen,
16:25 vous défendiez une alliance militaire avec la Russie,
16:28 pas il y a 10 ans, pas il y a 5 ans,
16:31 il y a seulement 2 ans,
16:32 c'était dans votre programme pour l'élection présidentielle.
16:34 (Applaudissements)
16:41 Si vous aviez été élue en 2022, Madame Le Pen,
16:45 on ne serait pas en train de fournir des armes aux Ukrainiens
16:47 pour se défendre,
16:47 on serait en train de fournir des armes à la Russie
16:50 pour écraser les Ukrainiens.
16:51 C'est ça la réalité, c'était dans votre programme.
16:54 (Applaudissements)
16:58 Alors Madame la députée, Madame la présidente Le Pen,
17:02 Madame la présidente Le Pen, vous m'interrogez sur...
17:04 - S'il vous plaît !
17:06 - Vous m'interrogez sur une hypothèse de soldats français ou européens
17:09 sur le sol ukrainien,
17:11 mais je vais vous le dire Madame Le Pen,
17:13 quand on lit les enquêtes qui sont réalisées,
17:15 encore celles du Washington Post le 30 décembre dernier,
17:17 il y a lieu de se demander si les troupes de Vladimir Poutine
17:20 ne sont pas déjà dans notre pays.
17:21 Je parle de vous et de vos troupes Madame Le Pen.
17:24 - Voilà pour Gabriel Attal, on va parler de la grande peur des Français
17:26 face à la perspective d'une guerre mondialisée.
17:28 Qu'est-ce qui est à l'œuvre là, dans ce que dit Gabriel Attal,
17:30 dans ce que disait aussi Emmanuel Macron,
17:32 il y a quelques jours, l'URN ne fait pas partie de l'arc républicain.
17:35 - Oui, puis il en fait partie quand même,
17:36 sans en faire partie, tout en en faisant partie,
17:38 ça dépend du moment, c'est-à-dire que
17:39 il peut nous dire, lui quand même, Attal, que
17:42 il ne faut pas dire tout est son contraire,
17:44 je rappelle quand même qu'il y a quelques temps,
17:45 on a des belles images d'Emmanuel Macron recevant Poutine
17:49 dans le Palais des Glaces à Versailles,
17:50 où ça se passait très bien, mon cher Vladimir,
17:52 comment vas-tu ?
17:53 - Avant la guerre en Ukraine.
17:54 - Ah oui d'accord, enfin...
17:55 Il faut historiser tout, c'est-à-dire qu'il y a un moment donné
17:59 où toutes les banques se disent, il n'est pas question
18:00 de prêter de l'argent à Marine Le Pen,
18:02 parce que si on dit, la campagne de Marine Le Pen
18:04 est financée par je ne sais quelle banque,
18:05 d'un seul coup tout le monde s'en va,
18:06 on a vu ça récemment avec Boursorama je crois,
18:09 et Marion Maréchal Le Pen qui est intervenue,
18:11 elle a fait une réponse à des questions
18:12 qui sont posées à plein de gens,
18:14 et on a dit d'un seul coup, hop, on retire de l'argent.
18:16 Évidemment on dit, vous n'aurez pas de banque française,
18:17 vous allez chercher des banques à l'étranger,
18:19 on dit, vous faites partie du parti de l'étranger,
18:20 je veux bien, mais je veux dire qu'il y a un moment donné
18:22 où on peut penser de manière chronologique
18:24 et puis arrêter de renvoyer en permanence à Poutine
18:28 en disant qu'elle est Poutine,
18:29 ça me rappelle l'époque où on parlait des chars russes
18:31 à Paris sur la place de l'étoile,
18:34 si la coalition socialo-communiste était élue.
18:37 Donc une espèce de jurisprudence de la deuxième guerre mondiale
18:39 perpétuelle, c'est-à-dire qu'on ne peut pas penser le présent
18:42 sans aller chercher des justifications dans le passé,
18:45 invoquer Hitler, invoquer Staline, invoquer Lénine,
18:48 invoquer Pétain, invoquer Lachoie,
18:50 invoquer l'Horadour-Surglane,
18:52 il y a un moment donné où on dit,
18:53 mais est-ce qu'on ne pourrait pas penser vraiment ?
18:54 Quand je disais tout à l'heure que cette jeunesse brillante
18:56 avait été formatée à la rhétorique et à la sophistique,
18:59 ils ont toujours ça en tête,
19:01 on peut toujours instrumentaliser Marine Le Pen.
19:03 C'est-à-dire, où elle est antidémocratique et antirépublicaine
19:06 et à ce moment-là on fait un procès,
19:08 on regarde ses condamnations,
19:09 j'aimerais qu'on me dise pourquoi elle a été condamnée,
19:12 pourquoi elle aurait été condamnée,
19:13 et puis on lui interdit d'exister une bonne fois pour toutes,
19:15 ou alors elle existe une bonne fois pour toutes,
19:17 mais on arrête de dire à cette femme qu'elle est antirépublicaine
19:20 si rien n'en fait la démonstration.
19:23 Au-delà de ce cas-là, il y a, selon vous,
19:25 une instrumentalisation de l'histoire
19:27 qui est permanente dans notre pays ?
19:29 En permanence, c'est-à-dire que,
19:31 moi je ne suis pas juif, mais j'ai toujours été étonné
19:33 qu'aucun juif ne trouve normal
19:35 qu'on puisse utiliser Horadour-Surglane
19:38 ou utiliser la Choua,
19:39 pour justifier un vote contre Marine Le Pen,
19:42 un second tour de présidentiel,
19:43 alors que les présidentiels sont déjà gagnés
19:45 le soir du premier tour.
19:46 Il y a un moment donné où on pourrait séparigner l'obscénité.
19:49 Emmanuel Macron sait bien qu'il était élu au soir du premier tour,
19:51 puisqu'il a fêté ça à la Rotonde,
19:52 je crois que c'était la première fois qu'il a été élu,
19:54 ou à un autre bistrot, café, je ne sais pas, peu importe.
19:57 - C'était à la Rotonde.
19:59 - Pardon ?
19:59 - C'était à la Rotonde.
20:00 - Et donc il dit "ben voilà, j'ai gagné, j'ai bien compris",
20:02 donc on fait une petite fiesta, etc.
20:03 Sous-entendu, dans 15 jours,
20:05 il n'y a pas de problème, c'est Marine Le Pen.
20:06 Que fait-il entre ces deux dates-là ?
20:08 Il s'en va à Horadour-Surglane, tout de même.
20:11 Et il s'en va au musée de la Choua, tout de même.
20:14 Il y a un moment donné où, quand on sait qu'on a gagné les élections,
20:16 on ne va pas instrumentaliser les millions de morts de la Choua,
20:19 on ne va pas instrumentaliser non plus la mémoire d'Horadour-Surglane.
20:22 Il y a un moment donné où, vous savez, c'est l'histoire des petits cochons,
20:24 ou c'est l'histoire non plutôt du berger qui crie aux loups,
20:27 c'est-à-dire qu'il y a un moment donné, quand le loup est vraiment là,
20:29 eh bien plus personne n'y croit,
20:31 c'est-à-dire qu'on crie au fascisme partout, tout le temps, en permanence,
20:33 on crie au retour du nazisme en permanence.
20:35 Mais il y a un moment donné où le vrai nazisme ré-arriverait,
20:38 que ferait-on ?
20:39 Le vrai fascisme ré-arriverait, que ferait-on ?
20:41 La véritable extrême droite arriverait, que ferait-on ?
20:44 Parce que tout le monde est d'extrême droite aujourd'hui.
20:46 Je pense même au patron du CRIF,
20:47 si j'en juge par ce que disait Mélenchon en son temps.
20:50 Je ne sais pas, moi j'ai lu "Rebattez, les mémoires d'un fasciste",
20:52 j'ai lu "Brasillac", j'ai lu "Les procès de Brasillac",
20:55 j'ai lu toutes ces choses-là, enfin j'ai lu de la littérature,
20:57 j'ai lu "Brett Drieux-Larochelle",
20:58 à une époque où je travaillais sur ces questions-là,
21:00 notamment la période justement d'extrême droite de François Mitterrand,
21:04 la personne n'en parle de cette période-là,
21:06 mais on voit bien ce que c'est que l'extrême droite.
21:08 Alors si vraiment Marine Le Pen, c'est l'extrême droite,
21:10 alors il faut qu'on fasse la démonstration qu'elle est contre la démocratie,
21:13 qu'elle organise des mouvements de foule dans la rue,
21:14 des mouvements violents, qu'elle refuse les résultats des élections.
21:17 Il y a des gens qui refusent les résultats des élections,
21:19 plutôt du côté de la France insoumise.
21:21 Donc il y a juste un moment donné où il faut faire de l'histoire
21:24 et arrêter de faire du commentaire idéologique sur de l'histoire,
21:26 parce que comme les enfants sont de moins en moins éduqués à ces choses-là,
21:29 qu'ils sont de plus en plus endoctrinés
21:31 avec tous ces éléments de langage et toutes ces idéologies,
21:34 on finit par trouver des fascistes partout,
21:36 des gens d'extrême droite partout, des antisémites partout.
21:38 Moyennant quoi, si vous avez éventuellement dit
21:41 qu'il y avait quand même dans le Coran quelques problèmes avec les Juifs,
21:44 vous allez tout de suite au tribunal.
21:45 Donc il y a un moment donné où l'instrumentalisation de l'histoire, c'est trop.
21:48 Il faut l'arrêter. On va faire une petite pause, Michel.
21:50 Mais on se retrouve dans un instant avec vous,
21:52 pour, face à Michel Enfray, la suite.
21:54 On va évoquer cette grande peur des Français
21:57 face à la perspective d'un conflit mondialisé.
22:00 76% des Français se disent opposés à l'envoi de troupes au sol en Ukraine.
22:04 A tout de suite sur CNews.
22:06 On se retrouve sur CNews, face à Michel Enfray,
22:09 notre nouvelle émission hebdomadaire.
22:11 Merci d'être avec nous, Michel Enfray, deuxième partie de cette émission.
22:14 On a évoqué l'Ukraine avec la grande peur des Français
22:18 face à la perspective d'un conflit mondialisé.
22:20 Emmanuel Macron, cette semaine, lors d'une conférence de presse à l'Élysée,
22:23 n'a pas exclu l'envoi de troupes au sol.
22:26 Il était entouré de ses partenaires européens
22:29 qui ont d'ailleurs très très vite dit à quel point ils n'étaient pas d'accord avec lui.
22:33 76% des Français se disent opposés à l'envoi de troupes en Ukraine,
22:37 selon un sondage CSA, CNews Europe 1 pour le JDD.
22:41 On va écouter peut-être d'abord ce qu'a dit précisément Emmanuel Macron,
22:45 puis on entendra la réponse de Vladimir Poutine,
22:46 glaçante évidemment, implacable, mais comme il sait l'être.
22:51 Et on va écouter d'abord le président français.
22:54 Tout a été évoqué ce soir de manière très libre et directe.
22:58 Il n'y a pas de consensus aujourd'hui pour envoyer de manière officielle,
23:02 assumer et endosser des troupes au sol.
23:06 Mais en dynamique, rien ne doit être exclu.
23:11 Nous ferons tout ce qu'il faut pour que la Russie ne puisse pas gagner cette guerre.
23:15 Tout ce qu'ils inventent en ce moment, en plus d'effrayer le monde entier,
23:18 est une menace réelle de conflit avec l'utilisation de l'arme nucléaire
23:24 et donc de destruction de la civilisation.
23:29 Ils doivent comprendre que nous avons aussi des armes capables
23:32 d'atteindre des cibles sur leur territoire.
23:35 Il menace l'Occident de destruction, de destruction de la civilisation,
23:41 une guerre de civilisation, a-t-il dit Vladimir Poutine en réponse à Emmanuel Macron.
23:44 Comment vous analysez ces propos Michel Onfray ?
23:47 Moi, je souscris à ça depuis longtemps.
23:48 Je pense qu'il faut penser en termes de civilisation.
23:51 Vous ne souscrivez pas à l'annihilation de la civilisation par la menace nucléaire ?
23:55 Si, nous sommes deux menaces nucléaires l'un l'autre.
23:58 C'est-à-dire que d'un seul coup, quand on envisage d'envoyer les troupes françaises,
24:03 parce qu'il n'a pas dit de l'OTAN,
24:04 Poutine ment quand il dit les troupes de l'OTAN.
24:06 L'OTAN n'a pas dit ça.
24:07 Il ment aussi quand il dit qu'on lui a imposé une guerre en Ukraine.
24:09 C'est très très sérieux.
24:10 Après, il faudrait rentrer dans les détails.
24:11 Je ne veux pas réfléchir sur la question de "on lui a imposé",
24:15 mais ce serait bien qu'on fasse la généalogie de cette guerre.
24:17 Comment est-elle née ?
24:18 Elle aurait pu ne pas avoir lieu.
24:21 Là, il nous faut vraiment du temps.
24:22 Je veux dire que si vraiment on veut penser les choses,
24:25 il ne faut pas dire "il y a trois jours, il a dit que".
24:27 Que s'est-il passé depuis 30 ans pour que nous soyons arrivés là ?
24:31 J'ai dit il y a quelques temps que nous avions fabriqué ce monstre, Poutine.
24:34 Nous l'avons fabriqué.
24:35 Un temps, il ne l'était pas,
24:36 et un temps, il était tellement sympathique qu'on le recevait à Versailles,
24:40 je l'ai déjà dit,
24:40 et il était tellement sympathique que le même Macron, il y a deux ans,
24:43 disait "il ne faut pas blesser Vladimir Poutine".
24:45 Il s'est passé quoi entre "il ne faut pas le blesser, il ne faut pas le froisser"
24:48 et le "nous allons lui envoyer nos troupes".
24:49 Qu'est-ce qui s'est passé dans la tête d'Emmanuel Macron ?
24:51 C'est la question que je pose, j'ai la réponse.
24:53 Mais on n'a pas le temps probablement d'entrer sur ce sujet-là.
24:55 Je dis simplement que faire de la politique,
24:58 ce n'est pas juste lutter contre le rassemblement national dans les médias.
25:02 Ce n'est pas ça.
25:02 C'est porter la France, porter le message de la France,
25:05 faire de telle sorte que la France puisse exister
25:07 de manière souveraine, autonome et indépendante.
25:09 Il faut arrêter de nous dire que la souveraineté européenne,
25:12 c'est aussi la souveraineté de la France.
25:13 Mais ce n'est pas ce qu'il fait en disant "on n'exclut rien, la France existe".
25:17 On peut aussi ne pas s'aplatir devant le tyran.
25:20 Les présidents des États d'Europe, des États-Unis d'Europe, Emmanuel Macron…
25:23 Est-ce qu'il y a un leader ?
25:24 Il y a Olaf Scholz qui regarde tout ça en disant quoi ?
25:26 Il a moqué Olaf Scholz en disant "je rappelle que quelques-uns,
25:29 il n'y a pas très longtemps, disaient on va leur envoyer des casques
25:31 et des sacs de couchage et puis en même temps des gilets Barbal".
25:34 C'était l'Allemagne qui l'insultait, Emmanuel Macron, dans ces cas-là.
25:37 C'est-à-dire qu'il parle comme un petit garçon,
25:39 il insulte une fois les Israéliens, il insulte une fois les Palestiniens,
25:43 il insulte une fois le Maroc, il insulte une fois l'Algérie,
25:45 il insulte une fois les États-Unis, parfois il insulte même nos mémons.
25:49 On n'insulte pas tout le monde comme ça quand on est chef de l'État.
25:53 D'abord, quand on est chef de l'État, on mène des guerres d'intérêt national.
25:56 Est-ce qu'il y a intérêt national pour la France
25:58 à faire une guerre qui n'est pas forcément la nôtre ?
26:00 On n'est pas sur le chemin de la guerre pour l'instant Michel.
26:02 Mais si on est dedans, c'est pas qu'on n'est pas sur le chemin de la guerre,
26:04 on est dedans.
26:05 Tous ces gens qui disent "j'ai vu deux types qui étaient en train de s'agresser,
26:08 j'ai donné un couteau" qui disent "je ne suis pas belligérant".
26:10 Ils se donnaient des coups de poing, mais je leur ai donné un couteau,
26:11 je ne suis pas colbelligérant.
26:13 Mais bien sûr que si, dès qu'on a pris son parti et qu'on a aidé quelqu'un
26:16 quand il y a un début de guerre, on est dedans.
26:20 Cette idée, quand est-ce qu'on va nous dire "ça y est, on est vraiment entrés"
26:22 quand on va mettre des soldats français dans des avions
26:25 et qu'on va les amener directement en Ukraine pour aller se battre,
26:27 là on dirait un volénier.
26:28 Mais bien sûr que nous sommes déjà dans cette guerre.
26:30 Et que pour l'instant, il est en train de faire comme s'il ne connaissait rien
26:34 à l'histoire de France, ce que je crois un peu,
26:36 parce qu'il est en train de faire tout ce qu'il faut
26:37 pour que la Troisième Guerre mondiale ait lieu.
26:39 - Quand même, vous ne pouvez pas dire qu'Emmanuel Macron
26:42 souhaite entraîner la France dans une Troisième Guerre mondiale.
26:44 - Je ne sais pas s'il souhaite l'entraîner, mais il le fait.
26:46 Je ne sais pas s'il est conscient de ce qu'il fait.
26:48 On ne parle pas un dictateur, Poutine est un dictateur,
26:50 Poutine est un impérialiste, Poutine est dans une logique
26:52 d'impérialisme fasciste, je le dis tout de même.
26:54 On s'entend bien sur ce sujet-là.
26:57 Est-ce qu'on répond comme ça ?
26:58 - Mais il faut s'applâtir devant Poutine ?
27:01 - Alors là, il y a plein de choses qu'il aurait fallu ne pas faire.
27:03 C'est facile aujourd'hui de dire « y'a qu'à ».
27:04 Moi, je rappelle que quand les journalistes ont commencé à dire
27:07 « il y a une guerre en Ukraine », il y avait déjà depuis 10 ans
27:09 cette guerre en Ukraine.
27:10 Depuis 10 ans.
27:11 - Depuis la Crimée.
27:11 - Voilà.
27:12 C'est-à-dire que d'un seul coup, les journalistes disent
27:14 « on arrive avec nos caméramans, on fait des photos et la guerre commence ».
27:17 Non, ça fait 10 ans qu'elle est là.
27:18 Qu'a-t-on fait pendant ces 10 années ?
27:20 On a méprisé Poutine, on a dit, on fait...
27:22 Souvenez-vous de Hollande qui dit « non, on a fait un petit truc,
27:24 un petit machin de droit, un petit traité,
27:27 mais c'était pour le faire patienter,
27:28 il n'était pas question qu'on respecte ce traité-là ».
27:30 Vous vous rendez compte comment on fait ?
27:31 On l'a fabriqué cet homme-là.
27:33 Et à un moment donné, il dit « bon, on va peut-être pouvoir s'entendre ».
27:35 On dit « non, pas du tout ».
27:36 Et qui nous a dit que la Russie allait rentrer en Ukraine ?
27:39 On avait des images satellitaires, on voyait tous les chars qui étaient là.
27:43 Et on nous disait « mais non, il ne va pas rentrer ».
27:44 - C'était les Américains.
27:45 C'était les renseignements américains.
27:46 - Non, mais les Français le disaient aussi.
27:47 - Et les Français aussi.
27:48 - Il y a un moment donné où quand on est tellement incompétent
27:50 pour faire de telle sorte que la guerre n'est pas lieu,
27:52 on ne peut pas devenir compétent pour faire de telle sorte que quand la guerre a lieu,
27:55 elle n'est plus lieu, encore moins quand on demande que cette guerre puisse vraiment avoir lieu
27:58 et avec une puissance au-dessus.
28:00 On envoie des troupes, l'autre dit « attention, j'ai de l'arme nucléaire,
28:02 je vous ai dit que je pouvais m'en servir ».
28:03 Et on va dire quoi, là ?
28:04 Nous ? Nous aussi ?
28:06 - Que nous aussi on a l'arme nucléaire,
28:07 ça permet la dissuasion nucléaire et l'ambiguïté stratégique.
28:09 - Sauf que nous, on n'est pas crédibles.
28:10 - Ah, pourquoi ?
28:11 - C'est ça que sur le terrain...
28:12 - Parce que notre armée n'est pas prête.
28:13 - Je pense que tout le monde a compris qu'Emmanuel Macron
28:15 n'était pas plus crédible à l'international que de manière intérieure.
28:18 - C'est votre jugement et c'est d'ailleurs le principe de face à Michel Montrel.
28:20 - Bien sûr.
28:21 - Pour revenir à cette idée de s'aplatir ou pas devant les dictateurs,
28:24 j'aimerais qu'on écoute le général de Gaulle.
28:25 C'était en 1961, lors d'une conférence de presse à l'Elysée.
28:28 C'était au plus fort des tensions à Bérin avec les soviets.
28:32 Écoutez ce qu'il disait.
28:34 - Si tout cela fait multiplier les actes hostiles des soviets,
28:39 acte auquel il faudrait répondre,
28:42 on pourrait en venir à la guerre générale.
28:47 Mais alors,
28:52 c'est que les soviets l'auraient délibérément voulu.
28:58 Et dans ce cas, tout recul préalable de l'Occident
29:04 n'aurait servi qu'à l'affaiblir et à le diviser,
29:10 et sans empêcher l'échéance.
29:15 Un certain point de menace de la part d'un impérialisme ambitieux,
29:23 tout recul a pour effet de surexciter l'agresseur,
29:32 de le pousser à redoubler sa pression,
29:36 et finalement, facilite et hâte son assaut au total.
29:48 Actuellement, les puissances occidentales
29:54 n'ont pas de meilleur moyen de servir la paix du monde
29:59 que de rester droites et fermes.
30:03 - Ce que dit De Gaulle, tout recul a pour effet de surexciter l'agresseur.
30:06 Ça ne vaut pas aujourd'hui ?
30:09 - Quand il parle d'impérialisme ambitieux,
30:11 on peut aussi tout à fait faire fonctionner la grille
30:13 sur l'impérialisme ambitieux de l'Europe maastrichtienne.
30:17 Ça peut aussi énerver d'autres en face.
30:20 J'ai vu cette phrase plusieurs fois utilisée
30:23 dans la même page du Figaro par deux personnes il y a quelques temps,
30:26 elle est sortie du contexte et c'est effectivement une extrapolation.
30:30 Je rappelle que quand le général De Gaulle parle de l'Union soviétique,
30:32 ce n'est pas Emmanuel Macron qui parle de Vladimir Poutine.
30:35 Il était dans le programme de l'Union soviétique
30:39 d'être impérialiste et planétaire,
30:40 comme il est dans le programme du Hamas de détruire l'État d'Israël.
30:45 Il n'est pas dans le programme de Vladimir Poutine
30:48 d'étendre sa puissance sur la planète entière.
30:50 Je ne le sache pas.
30:52 Je sais en revanche qu'il veut l'étendre sur un certain...
30:55 - Il veut restaurer le grand empire russe.
30:56 - Il veut restaurer un certain empire en imaginant effectivement
31:00 qu'au-delà de cet empire, ça ne le concerne plus.
31:03 Donc cette idée que nous pourrions avoir la guerre, théoriquement non.
31:06 Mais si effectivement nous devenons des combattants,
31:09 pratiquement oui, de manière dynamique,
31:11 comme dit notre chef de l'État.
31:12 Donc je crois que quand il pense de cette manière-là,
31:15 le général De Gaulle, il parle de manière pratique,
31:17 sortir cette phrase en disant l'impérialisme,
31:19 c'est une notion platonicienne.
31:21 Non, ce n'est pas une notion platonicienne.
31:23 Impérialisme russe et impérialisme de l'OTAN
31:26 ou impérialisme de l'Europe de Maastricht.
31:27 Et ça marche dans les deux cas.
31:28 C'est-à-dire que ça énerve les gens, nous dit le général De Gaulle.
31:31 Il a raison.
31:32 L'impérialisme de l'Europe maastrichtienne, elle énerve Poutine.
31:34 L'impérialisme de Poutine énerve l'Empire maastrichtien.
31:38 Je dis simplement quel est l'intérêt de la France,
31:40 puisque nous parlons du général De Gaulle.
31:41 Quel est l'intérêt de la France ?
31:42 Est-ce que l'intérêt de la France, c'est de faire la guerre de l'Ukraine ?
31:45 Si oui, expliquons-nous.
31:46 L'Ukraine est européenne.
31:48 J'ai déjà bien compris que la France n'existait plus
31:50 et qu'il fallait être européen.
31:51 Mais maintenant, il ne faut plus seulement être européen.
31:52 Il faut aussi que des pays qui sont susceptibles
31:54 de devenir européens comme l'Ukraine, ce soit des pays...
31:56 À qui on a promis d'entrer dans l'Union Européenne ?
31:58 Qui a promis ?
32:00 Je sais bien que quand on fait...
32:01 Oui, j'entends bien.
32:02 Mais quand on fait en 2005 un référendum pour demander au peuple
32:05 ce qu'il pense de l'Europe, il nous dit non.
32:07 Et on dit en 2008, vous l'aurez tout de même.
32:09 Donc, on a bien vu que le peuple, aujourd'hui, on l'économise totalement.
32:11 Et dans ce beau papier de Jean-Pierre Chevènement,
32:13 il faut toujours lire, relire et méditer.
32:15 Figaro.
32:15 Figaro.
32:16 Eh bien, Jean-Pierre Chevènement nous dit,
32:18 consultez les peuples.
32:20 Demandez au peuple.
32:21 Un débat aura lieu au Parlement dans les prochains jours.
32:23 C'est pourquoi il ne faut pas...
32:23 Oui, oui.
32:24 Non, mais pas pour savoir si nous devons envoyer des troupes sur place.
32:27 Ce n'est pas ça.
32:27 Je pense que tous ces gens qui se réclament aujourd'hui du général de Gaulle
32:31 devraient savoir que le général de Gaulle pensait qu'on gouvernait avec des référendums,
32:34 qu'on gouvernait avec des élections et qu'on obéissait aux élections.
32:38 C'est-à-dire que le général de Gaulle ne se serait pas contenté
32:39 de 50 % de gens qui votent pas forcément pour lui et pour d'autres
32:43 et de 50 % de gens qui ne votent pas.
32:44 Il ne se serait pas contenté d'une assemblée nationale
32:46 dans laquelle il n'aurait pas une majorité.
32:48 Donc qu'on n'aille pas chercher le général de Gaulle parce que c'est mon héros.
32:51 Et si vraiment on veut savoir comment fonctionnerait le gaullisme aujourd'hui,
32:54 ce n'est sûrement pas comme le macronisme fonctionne.
32:56 J'ai encore une question, Michel, mon frère, avant de passer à un autre thème.
32:58 Que pèsent réellement les démocraties face au régime autoritaire ?
33:02 On voit bien que nous, le cycle de la politique s'accélère,
33:06 les dirigeants se succèdent.
33:08 Les régimes autoritaires, eux, évidemment, ils ont des dictateurs quasi à vie.
33:12 Oui, nous, on a aussi des régimes tellement bien faits
33:14 qu'on a des mastriciens au pouvoir quasiment à vie.
33:16 C'est-à-dire qu'on fait semblant d'avoir des élections,
33:18 on dit "ah, vous allez choisir celui-ci, celui-ci, il a un ruban rose,
33:20 celui-ci, il a un ruban bleu, celui-ci, il a un ruban arc-en-ciel, etc."
33:23 Vous avez vu la différence quand même ?
33:25 Et au bout du compte, au bout du compte, c'est toujours un client mastricien.
33:28 Je vous rappelle qu'à chaque fois qu'il y a des élections présidentielles en France,
33:31 tout est fait pour qu'il y ait une espèce d'entonnoir,
33:32 tout le monde est censément capable d'y accéder, du moins aux élections.
33:38 Et puis après, ça se passe comment ?
33:39 Vous finissez toujours par avoir un personnage, c'est toujours le même.
33:42 Et de l'humanité au Figaro, en passant par Libération, Politis et autres,
33:47 ils finissent tous par vous dire "votez pour le client mastricien".
33:50 Les uns en nous disant "c'est le meilleur",
33:51 d'autres en nous disant "c'est un beau programme"
33:53 et d'autres en nous disant "on vote pas pour, mais on vote contre celui qui est en face".
33:56 Mais finalement, le MEDEF et Mélenchon finissent par voter la même chose.
34:00 La Libre Pensée, les francs-maçons, les athées, les curés, etc.
34:04 finissent par voter la même chose en nous disant "votez pour ça".
34:07 Des démocraties dans lesquelles avant d'aller voter, on sait quel sera le résultat.
34:11 Moi, j'en ai gagné des caisses de champagne en disant "je peux vous dire qui sera élu".
34:14 "Ah bah t'es bien malin, t'es un client mastricien".
34:16 - On voudrait aller à Paris pour 2027 et pour les élections européennes.
34:21 - Mais je pense que même si c'est Le Pen,
34:23 la pensée mastricienne mettrait 6 mois à s'imposer.
34:25 Et encore 6 mois en étant large.
34:27 - Je vois qu'on parle maintenant, Michel Amfray, du trombe-l'amour.
34:30 Parce que nous vivons en vérité une époque de grand désordre dans les relations amoureuses.
34:34 C'est tout autre chose, mais c'est ça qui fait le charme de cette émission face à Michel Amfray.
34:37 Aujourd'hui, on se rend compte à la fois que les Français font de moins en moins l'amour.
34:40 76% des Français, selon une étude de l'IFOP,
34:43 ont eu un rapport sexuel au cours des 12 derniers mois.
34:46 Les femmes, comme les hommes, moitié disent qu'ils pourraient vivre avec quelqu'un dans une relation platonique.
34:51 Les jeunes sont extrêmement touchés par cette baisse de la sexualité.
34:56 Et puis il y a la concurrence des écrans.
34:58 Aujourd'hui, on a un Français sur deux qui dit qu'il préfère regarder une série sur My Canal
35:03 ou jouer à un jeu vidéo plutôt que d'avoir un rapport sexuel.
35:05 Il y a ce contexte-là.
35:07 Et puis il y a les hommes qui peut-être se sentent dévalorisés,
35:11 qui se sentent peut-être menacés avec la libération de la parole des femmes.
35:16 Comment est-ce que vous analysez les rapports,
35:20 cette mise en place des nouveaux rapports amoureux dans la société ?
35:24 Il faudrait faire une large sociologie.
35:26 Il y a des choses qu'on ne dit pas beaucoup,
35:27 mais je veux dire que beaucoup de couples finissent par renoncer à une vie sexuelle
35:30 parce qu'il y a une espèce d'usure qui fait que...
35:33 D'ailleurs, il y a des couples qui explosent pour ça.
35:34 On va voir ailleurs et puis le couple explose, puis on divorce, puis on se remarie, etc.
35:39 Mais le couple...
35:40 C'est pas ce qui est en jeu, là.
35:40 C'est aussi ça.
35:42 Je dis, on ne dit pas beaucoup ça.
35:43 C'est-à-dire qu'on fanfaronne beaucoup, les garçons entre eux disent des choses,
35:46 puis après, quand on est à deux avec un copain, on pose des questions,
35:49 puis on s'aperçoit que c'est pas ce que vraiment chacun raconte.
35:52 Donc il faudrait raconter qu'effectivement,
35:54 la sexualité n'est pas l'horizon indépassable d'un couple.
35:56 On peut avoir une sexualité avec quelqu'un avec qui on ne vivrait pas,
35:58 vivre avec quelqu'un avec qui on n'a pas de sexualité,
36:00 avoir une sexualité avec quelqu'un qui...
36:01 En fait, tout est possible.
36:02 Toutes les configurations sont possibles.
36:04 Donc il y a cette première chose comme un événement sociologique susceptible d'être pensé.
36:08 Il y a quelque chose que moi j'avais aimé chez Benoît Hamon en son temps,
36:10 quand il avait fait une campagne présidentielle pour les socialistes,
36:14 et il était pour le revenu universel, moi j'étais contre le revenu universel,
36:19 mais il avait parlé des perturbateurs endocriniens.
36:21 J'ai fait, consacré une partie d'un livre qui s'appelle
36:23 "Le fétiche et la marchandise" à ce sujet-là.
36:25 C'est terrible.
36:26 - Qui ont un impact sur ?
36:27 - Sur la sexualité des gens.
36:30 Notre sexualité, c'est hormonal.
36:31 Vous avez aujourd'hui des déconstructionnistes qui disent,
36:33 non, non, l'anatomie n'existe pas, elle n'est pas un destin,
36:36 nous n'avons pas un corps d'homme, un corps d'enfant, de fin.
36:38 J'ai lu d'ailleurs la semaine dernière un texte intéressant,
36:42 c'est que l'intelligence artificielle est capable de distinguer
36:44 les cerveaux d'hommes et les cerveaux de femmes désormais.
36:47 Ça veut dire que d'un point de vue anatomopathologique,
36:49 même anatomique on dira plutôt,
36:51 d'un point de vue anatomique, il y a donc des cerveaux d'hommes, des cerveaux de femmes.
36:54 - Cerveaux de femmes étant bien plus puissants que ceux des hommes, évidemment.
36:57 - Ça reste à prouver.
37:00 Donc il y a un moment donné où tout ce que nous mangeons,
37:02 tout ce que nous ingérons éventuellement,
37:04 là je touche cette table, éventuellement...
37:06 Effectivement il y a des particules qui se détachent,
37:08 je bois quelque chose, je mange quelque chose,
37:09 il y a des particules qui se détachent, etc.
37:11 Et j'avais lu un livre extrêmement intéressant,
37:13 je reviendrai avec, je suis désolé j'ai oublié le nom de l'auteur,
37:16 mais un livre très intéressant qui nous montrait comment du petit déjeuner,
37:20 la brosse à dents, le dentifrice, le verre d'eau, l'eau, etc.
37:24 le savon, le maquillage, l'après-rasage,
37:28 le truc qu'il y a sur la lame de rasoir que vous utilisez, etc.
37:31 Tout ça rentre dans votre corps et perturbe,
37:33 d'un point de vue hormonal, votre identité sexuelle.
37:36 C'est pourquoi, assez vraisemblablement,
37:37 il y a autant d'enfants perturbés dans les jeunes années
37:41 et qui ne sont pas très sûrs de leur identité,
37:42 qui plus est quand des gens jouent ce jeu-là en vous disant "trouble dans le genre".
37:47 - Et je crois qu'on y reviendra au cours de nos émissions,
37:49 parce que c'est un sujet qui est absolument passionnant.
37:50 J'aimerais vous faire écouter...
37:52 - Ça génère aussi je pense des maladies,
37:53 vous savez toutes les épidémies de cancer,
37:55 les épidémies de maladies, Alzheimer,
37:56 les PDI, toutes ces maladies-là ont à voir avec les perturbateurs endocrinaires.
38:00 Ce serait bien effectivement qu'on y passe un peu plus de temps.
38:02 - J'aimerais juste qu'on écoute l'actrice Judith Godrej,
38:05 parce qu'elle a secoué le cinéma français depuis plusieurs jours
38:08 en révélant les agressions et violences qu'elle a subies
38:10 lorsqu'elle avait 14 ans par le réalisateur Benoît Jacot,
38:14 qui avait 25 ans de plus qu'elle.
38:15 On va écouter ce qu'elle a dit au Sénat cette semaine,
38:17 et puis on va voir comment vous voyez la lumière qu'elle porte
38:22 et sur le cinéma et sur l'intelligentsia française.
38:26 - Combien de petites filles, de petits garçons,
38:29 combien de petits pieds dans la porte seront nécessaires
38:33 avant que cette société réagisse pour toujours,
38:37 afin que nous puissions jouer les rôles de notre vie
38:40 sans nous faire voler notre enfance, abuser, frapper.
38:46 Sans que nous soyons réduits à un pâle souvenir,
38:50 l'image douloureuse d'une jeune femme en robe noire pailletée,
38:54 qui ressort aujourd'hui dans la presse, sur Internet.
38:57 Elle est assise sur un canapé, un verre à la main.
39:01 - Judith Gaudrech qui dénonce les abus qu'elle a subis
39:03 lorsqu'elle avait 14 ans contre Benoît Jacot.
39:05 C'est aussi une époque, Michel Onfray,
39:09 celle de ces hommes, de cette génération de 68ards
39:12 qui s'est cru tout permis,
39:13 notamment sur le corps des femmes et des enfants.
39:16 - Oui, il me vient à l'esprit une formule qui est un peu violente.
39:20 Je parle d'un Nuremberg de cette période.
39:23 On pourrait parler du tribunal Russell si on préfère.
39:25 Mais toutes les sottises qui ont été dites
39:27 en matière de sexualité à cette époque-là
39:29 mériteraient d'être analysées.
39:31 On vient de voir ce qui se passe avec Gérard Miller
39:34 et la psychanalyse, les freudiens.
39:36 Quand j'ai publié mon freudo, on m'a traité de nazi, d'antisémite.
39:40 C'est tous ces gens-là qu'on retrouve maintenant.
39:42 On pourrait faire une espèce de droit d'inventaire en disant
39:44 "mais où sont les parents de la pauvre Judith Gaudrech ?
39:48 Où sont ces parents qui étaient psys, les deux ?
39:51 Où sont les parents de cette jeune fille
39:54 qui a été abusée par Gabriel Matzneff ?
39:56 Où sont les parents de ceux qui ont été abusés par un Duhamel ?
40:00 Toutes ces gens qui ont toute cette sexualité avec des enfants
40:04 qui ont été activés par des gens de gauche
40:05 qui se réclamaient évidemment de l'égalitarisme.
40:08 Tous les Tony Duver qui défendait cette théorie-là dans les années 70,
40:11 aux éditions de Minuit, l'œuvre complète.
40:13 Toutes ces théories-là nous disaient "égalité totale".
40:16 Un homme, un enfant, c'est pareil.
40:18 Un homme, une femme, c'est pareil.
40:19 Un noir, un blanc, c'est pareil, etc.
40:20 Donc nous on a une sexualité, les enfants aussi.
40:23 C'est Freud qui dit ça.
40:24 C'est toute la théorie freudienne qui nous dit
40:25 "les enfants ont des désirs, les enfants sont dans la séduction,
40:29 nous consentons pour des raisons d'égalité à cette sexualité qu'ils nous demandent".
40:33 C'est toute la théorie de Matzneff.
40:35 Lisez "Les moins de 16 ans", lisez Tony Duver.
40:37 Plus cette espèce de criminalisation de la société.
40:39 On disait "mais la société n'a rien compris,
40:41 c'est une société bourgeoise, patriarcale, matriarcale, etc."
40:44 Et donc c'est nous qui sommes des résistants.
40:46 Le début, il y a un livre terrible
40:48 qui s'appelle "La beauté du métis" de Guy Hockengame
40:50 qui nous dit en gros, nous les homosexuels,
40:53 et puis il défendait aussi la cause pédophile,
40:55 nous sommes les résistants d'aujourd'hui.
40:57 Les autres sont des collaborateurs déjà à cette idée.
41:00 Cette idée qu'on était un nazi quand on disait "ne touchez pas aux enfants"
41:04 et qu'on était un libérateur du genre humain
41:06 quand on avait une sexualité avec les enfants.
41:07 Je rappelle que Tony Duver disait que la sexualité avec les enfants
41:10 devait commencer à l'âge de 6 ans.
41:12 - Ce qui est absolument monstrueux.
41:13 - Oui, mais donc Judith Gaudrech,
41:15 elle a été plusieurs fois la victime de plusieurs personnes,
41:17 dont ses parents, dont l'idéologie de ses parents,
41:20 dont l'idéologie de ses parents psy, freudiens, etc.
41:23 Y compris Miller aujourd'hui,
41:24 qui nous fait le coup effectivement de "je n'ai jamais fait qu'hypnotiser".
41:27 - Gerard Miller accusé par de nombreuses femmes de viols sous le cou.
41:30 - Absolument, une soixantaine de témoignages,
41:31 plus plusieurs viols qui, etc.
41:33 qu'on dise aujourd'hui,
41:34 "ben oui, on s'est fait abuser par cette théorie de l'enfant sexualisé".
41:38 Non, les enfants ne sont pas des proies sexuelles.
41:40 Pour les adultes, ça n'est jamais défendable.
41:42 Et non, tout le monde ne pensait pas comme ça.
41:44 Oui, peut-être à Saint-Germain-des-Prés, beaucoup pensaient comme ça.
41:47 Mais dans les campagnes, personne n'acceptait ce genre de choses.
41:49 Tous les gens censés n'ont jamais accepté ce genre de choses.
41:52 Un adulte avec des relations sexuelles avec des enfants,
41:54 on n'en a jamais appelé à Sparte, à Athènes ou au modèle grec
41:58 pour dire que c'était tout à fait défendable,
41:59 qu'il y avait les "rastes" et les "romanes",
42:01 c'est-à-dire l'actif et le passif,
42:03 et qu'il y avait l'adulte qui savait, celui qui ne savait pas,
42:05 et que tout ça était tout à fait défendable.
42:07 Je vous rappelle que ça, ça a fonctionné pendant très longtemps
42:09 et qu'il serait peut-être temps qu'on fasse effectivement
42:11 un procès de cette idéologie.
42:13 - Est-ce que notre époque est plus claire sur le sujet ?
42:15 Vous trouvez qu'en 2024, on est plus au clair là-dessus ?
42:17 - Oui, je pense qu'effectivement, les gens ont compris
42:18 qu'on ne touche pas à des enfants.
42:20 Je pense qu'ils ont heureusement compris ça
42:22 et qu'il n'y a pas aujourd'hui de discours de défense du pédophile.
42:26 J'ai travaillé un peu sur cette question pour un livre en cours.
42:28 Je vous assure que la défense des pédophiles,
42:31 c'est terrible de voir ce qu'étaient les défenses à cette époque-là.
42:33 Plus personne n'ose ça aujourd'hui.
42:35 Plus personne, il n'y en a pas un, heureusement.
42:36 Alors, sauf les vrais pédophiles actifs qui, eux, sont sur le Darknet
42:39 et qui continuent à exister, qui continuent à visionner des vidéos
42:44 dont la France est l'un des pays les plus consommateurs
42:46 de ce genre de vidéos pédocriminelles.
42:49 Il n'y a pas que la pédophilie, il y a aussi des crimes d'enfants.
42:51 Il y a aussi des crimes qui sont commandités sur le net.
42:53 C'est-à-dire que vous payez des gens, et parfois ce sont des mères de famille,
42:57 qui infligent la violence à leurs propres enfants
43:00 pour des trucs en direct et vous payez ça 15 euros, 20 euros.
43:03 Ça existe encore aujourd'hui parce qu'en France,
43:05 ça s'est relativement calmé, mais je veux dire que de manière
43:08 industrielle, planétaire et via le net, ça continue.
43:12 - Il y a quand même des raisons d'espérer, Michel Onfray.
43:14 On termine cette émission, peut-être serait-on un peu plus optimiste
43:18 dans les relations amoureuses ?
43:19 - Oui, parce que je pense que ce que dit Judith Godrej,
43:21 c'est aussi le mouvement de balancier.
43:23 Elle fait bien et ils font toujours bien ceux qui poussent
43:25 peut-être le bouchon parfois un peu loin, ce qui n'est pas son cas.
43:28 Je pense qu'il y a sa souffrance, il y a sa douleur,
43:30 et qu'elle fait bien ce qu'elle fait.
43:31 Mais il y a un moment donné où on conscientise,
43:33 on dit "Regardez ce que vous avez été, ce que vous avez fait.
43:36 Ce serait peut-être bien qu'on avance et qu'on progresse, etc."
43:38 Mais qu'on voit aussi du côté des parents.
43:39 Tous ces parents qui ont envoyé leurs enfants dans les bras des adultes
43:43 sans rien faire, sans rien dire, en trouvant que tout ça était défendable.
43:46 Je trouve que ces parents sont criminels.
43:48 Et rappelons que ces parents criminels sont des gens qui légitimaient tout ça
43:51 avec des grandes bibliothèques de psychanalyse.
43:54 - Merci beaucoup, Michel Onfray, pour cette première émission face à Michel Onfray.
43:57 On se retrouve avec grand plaisir la semaine prochaine sur CNews.
44:01 L'info continue dans un instant.
44:02 Merci.

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