Face à Michel Onfray (Émission du 09/03/2024)

  • il y a 6 mois
Michel Onfray passe en revue l’actualité de la semaine dans #FaceAMichelOnfray. Présenté par Laurence Ferrari.
Transcript
00:00 On se retrouve pour notre nouveau rendez-vous sur CNews avec vous Michel Onfray.
00:06 Bonjour Michel.
00:07 Bonjour.
00:08 C'est donc face à Michel Onfray chaque week-end.
00:10 Ravi de vous retrouver pour reprendre le fil de nos conversations sur l'actualité.
00:14 Michel, l'actualité.
00:15 Cette semaine a été rythmée par l'escalade autour du soutien à apporter à l'Ukraine.
00:20 Le président français Emmanuel Macron a multiplié les déclarations du "rien n'est exclu"
00:25 concernant l'envoi de troupes au sol jusqu'au "la France ne doit se mettre aucune limite
00:30 dans son soutien à l'Ukraine" en passant par "il ne faut pas être lâche" et "être
00:35 au rendez-vous de l'histoire" message adressé à ses alliés européens, notamment les Allemands
00:39 qui l'ont bien compris.
00:40 Tout cela a suscité de nombreuses critiques, notamment celle de son prédécesseur François
00:44 Hollande.
00:45 Il a été reçu par Emmanuel Macron tout comme Nicolas Sarkozy.
00:49 On va écouter François Hollande dans un instant, mais d'abord les mots précis utilisés
00:52 par Emmanuel Macron.
00:53 Cela nous permettra de comprendre sa stratégie.
00:56 Quelle est la stratégie d'Emmanuel Macron face à cette guerre en Ukraine ?
00:59 On l'écoute, c'était à Prague, en République tchèque.
01:01 Nous abordons à coup sûr un moment de notre Europe où il conviendra de ne pas être lâche.
01:09 On ne veut jamais voir les drames qui viennent.
01:13 On ne veut jamais voir ce qui se joue.
01:15 Et je crois que nos deux pays ont conscience de ce qui est à l'œuvre en Europe.
01:23 Du fait que la guerre est revenue sur notre sol, que des puissances devenues inarrêtables
01:28 sont en train d'étendre la menace chaque jour de nous attaquer nous-mêmes davantage.
01:34 Et il nous faudra être à la hauteur de l'histoire.
01:38 Il nous faudra être à la hauteur de l'histoire.
01:40 L'histoire avec un grand H, Michel Onfraie.
01:42 Quel but poursuit le président Macron à vos yeux ?
01:45 Un but personnel, ce qui est assez terrible.
01:48 Il y a une étrange dérive chez ce monsieur vers le pouvoir personnel.
01:51 Vous ne croyez pas du tout au fait qu'il se dresse face à Poutine
01:55 pour être dans le bon vent de l'histoire, dans le bon côté de l'histoire ?
01:59 Il est qui lui pour se lever contre le vent de l'histoire ?
02:00 Le président français.
02:01 Oui mais non, on n'est pas le président parce qu'on a été élu comme on a été élu.
02:05 Ça se mérite.
02:06 Ce n'est pas une étiquette qu'on a un jour en disant je l'ai, je peux m'autoriser tout.
02:09 Il s'autorise tout.
02:10 C'est d'ailleurs un peu ça qu'on le reconnaît.
02:12 Il y a un moment donné où vous avez une fonction et cette fonction elle vous oblige.
02:15 Le peuple n'est pas votre domestique.
02:17 Vous êtes le domestique du peuple quand vous êtes le chef de l'État.
02:20 C'est-à-dire que vous ne décidez pas de la guerre tout seul.
02:21 On dirait je me suis réveillé ce matin et nous sommes en guerre.
02:24 Et il va falloir que nous ayons du courage.
02:26 Vous, vous êtes lâches.
02:27 Il y a une façon de mépriser l'Allemagne, donc les Allemands,
02:31 en disant en présence du chancelier qu'en gros lui s'occupait jadis des casques et des salles de couchage.
02:38 Quel mépris, mais quel mépris cette façon de parler au chancelier allemand
02:42 et de dire il y a un chef ici, c'est moi.
02:44 Non, il n'est pas le chef du monde.
02:46 Il n'est pas le chef de l'Europe, il est à peine le chef de la France.
02:49 Et il n'est même pas le chef de lui-même.
02:50 Donc il y a juste un moment donné où on a envie de dire ne faites pas,
02:53 j'allais tutoyer presque, mais ne faites pas référence à l'histoire.
02:55 Vous ne savez pas ce qu'est l'histoire.
02:57 On ne peut pas dire l'histoire nous attend, l'histoire nous convoque.
02:59 C'est quand même le même personnage qui nous disait jadis avec le Covid, c'est la guerre.
03:03 C'est la guerre.
03:04 On a quelqu'un qui nous a dit que le Covid c'est de la guerre et qui nous dit la guerre revient sur notre territoire.
03:08 Mais à cause de qui ?
03:09 Mais à cause de qui ?
03:10 Ce n'est pas à cause du peuple français.
03:11 Quand on est chef d'État, on demande à la population et on demande sous forme référendaire
03:16 si on veut faire la guerre ou si on ne veut pas la faire.
03:17 On ne se décide pas comme ça le matin en disant j'ai décidé qu'il fallait être courageux et pas linge.
03:21 - Michel Onfray c'est ça la Ve République ?
03:22 - Non.
03:23 - Le chef de l'État peut décider ?
03:24 - Non le chef de l'État ce n'est pas un tyran.
03:26 Le chef de l'État dans la Ve République, dans l'esprit de la Ve République,
03:29 c'est-à-dire avec le général de Gaulle, il ne pense pas par lui-même, il pense par le peuple et pour le peuple.
03:33 C'est-à-dire qu'il sollicite le peuple.
03:35 Il sait ce qui est bien pour la France.
03:36 Est-ce que c'est bien pour la France cette guerre ?
03:38 Est-ce qu'elle est vraiment bonne pour la France ? Est-ce que c'est la guerre de la France, l'Ukraine ?
03:41 Ce sont des questions qu'on peut poser au peuple.
03:42 Le peuple n'est pas gratin, il n'est pas débile, on peut le solliciter.
03:45 On a des chaînes d'information aujourd'hui où on peut avoir des informations
03:48 et se faire son propre jugement et avoir un avis sur ce sujet.
03:52 On ne peut pas décider tout seul comme jadis le faisait Mitterrand vous me direz.
03:55 C'est-à-dire que mes références c'est le général de Gaulle, ce n'est pas Mitterrand ni Macron.
03:57 En disant nous allons faire la guerre en Irak, j'ai décidé.
04:00 Jean-Pierre Chevènement m'avait dit un jour qu'il avait été convoqué par François Mitterrand
04:04 qui lui avait dit en gros je vous informe que vous allez décider ceci ou cela.
04:08 Chevènement a dit le ministre ça ferme sa gueule ou ça démissionne, on connaît l'histoire.
04:11 Mais il y a un moment donné où on ne peut pas dire je vous prends à témoin,
04:15 vous les uns les autres, Poutine, le peuple français, Olaf Scholz et les autres
04:19 en disant j'ai décidé qu'il fallait être courageux etc.
04:22 Je suis désolé il y a encore quelques temps il ne fallait pas blesser M. Poutine,
04:25 nous disait Macron, c'était le même Macron.
04:27 C'est problématique parce que dans la Ve République le chef de l'État c'est plus que lui-même.
04:30 Lui il n'est que lui-même et il n'est pas au-delà de lui-même, c'est ça qui est problématique.
04:33 En convoquant le mot de lâcheté, il fait référence à assez nombreux moments dans l'histoire
04:38 où la lâcheté a conduit à des défaites et à des déguerres aussi.
04:41 Oui alors il est jeune, il ne peut pas le rendre responsable de tout.
04:44 Mais les lâchetés c'est François Mitterrand, c'est le rapport à Gorbatchev,
04:48 c'est le rapport au premier Poutine, c'est le rapport à l'Ukraine et à la relation de la Russie
04:53 il y a une dizaine d'années.
04:54 J'ai déjà eu l'occasion de dire que quand Poutine entre en Ukraine on se dit il y a un problème.
04:59 Non il y a un problème qui est là depuis dix ans, depuis dix ans on se tire dessus là-bas.
05:02 Et depuis dix ans il y a une guerre, c'est pas parce qu'on met les caméras
05:06 que d'un seul coup on crée le réel, c'est pas comme ça la réalité.
05:08 Et qu'avons-nous fait ? Donc lui il n'est pas coupable ni responsable pour une fois, je vais l'épargner.
05:13 Mais je veux dire que c'est l'impéricide d'un certain nombre d'hommes politiques,
05:16 y compris François Hollande.
05:18 Il a beau jeu lui d'aller donner des leçons aujourd'hui
05:20 alors qu'il a été éjecté avec l'assiette au beurre que nous savons,
05:23 alors qu'à un moment donné il a dit les accords de Minsk,
05:25 on n'avait pas du tout l'intention d'y obéir, c'était juste pour gagner du temps.
05:29 Vous vous rendez compte ? Quand un chef d'État dit ça à un type comme Poutine,
05:32 il est fondé à croire que la France c'est pas très crédible.
05:37 Et quand on est représenté par Hollande ou quand on est représenté par Macron,
05:42 d'une certaine manière, on a beau faire semblant d'être méchant, ça fait rire Poutine.
05:45 On va écouter François Hollande, reçu donc cette semaine à l'Élysée par Emmanuel Macron.
05:48 Il n'a pas ménagé ses critiques envers son successeur. Écoutez-le.
05:52 Ma position sur les questions militaires, je l'ai montré quand j'étais président,
05:57 c'est que moins on en dit, mieux on agit.
06:02 Ne pas dire ce que l'on fait, mais faire ce que l'on n'a pas dit.
06:07 C'est ça qui permet d'avoir le plus d'efficacité et de ne rien faire connaître,
06:14 en l'occurrence Vladimir Poutine, de nos intentions.
06:17 C'est intéressant d'entendre les conseils de François Hollande
06:19 à celui qui lui a succédé à l'Élysée.
06:23 En matière militaire, il ne faut pas dire ce que l'on fait, mais faire ce qu'on n'a pas dit.
06:29 Un ancien président ne devrait pas dire ça.
06:31 Il ne se souvient pas qu'avec le...
06:32 L'apparence au livre qu'il a empêché de se présenter.
06:34 Absolument. Il devrait faire attention, en estimant que s'il n'a pas pu se représenter,
06:38 c'est parce qu'il a beaucoup parlé et pas fait beaucoup non plus.
06:41 Alors c'est une belle formule.
06:42 Peut-être qu'il y a 10 personnes qui ont travaillé pour lui faire une petite fiche
06:46 en disant "quand tu sortiras, il faudra que tu places ça,
06:48 ça fera une punchline pour les journalistes et puis allons-y".
06:50 Belle formule, c'est très bien, etc.
06:52 Mais c'est quand même lui qui parlait des opérations homo,
06:54 c'est-à-dire ces opérations qui permettaient au chef d'État de dire
06:56 "vous allez me descendre telle personne, telle personne, etc."
06:58 Des djihadistes, des terroristes.
07:00 Voilà, ce sont des choses qu'on ne dit pas, mais qu'on fait.
07:02 Donc lui, il le disait et il disait qu'il le faisait aussi.
07:06 Enfin bon, peu importe.
07:07 Moi, en tant que président, cette façon toujours de dire
07:09 "quand j'étais président, ce que j'ai fait, c'était formidable".
07:11 J'ai même lu à cette occasion qu'on parlait d'un trou de souris pour lui
07:14 et que peut-être il pourrait revenir, que finalement il était quand même assez désiré
07:17 et que pourquoi pas lui y revenant, etc.
07:19 Tout ça est assez problématique parce qu'il n'y a pas d'histoire,
07:21 il n'y a pas le sens de l'histoire.
07:22 Où est la France ? Où sont les Français ?
07:24 Avec tous ces gens-là qui décident de choses comme ça le matin
07:27 parce qu'ils ont décidé qu'ils avaient la jouissance du pouvoir,
07:30 que la jouissance du pouvoir, c'était effectivement la jouissance de déclarer les guerres.
07:32 Il y a une jouissance à arrêter les guerres aussi.
07:35 Moi, je trouve que les chefs de l'État qui sont capables de faire de la politique,
07:39 vraiment, et qui sont capables de faire de la diplomatie haut de gamme,
07:41 qui sont crédibles, qui ont un crédit, qui ont travaillé à leur crédit,
07:45 ça c'est formidable.
07:46 Et qui disent à un moment donné "Bon, il va falloir envisager la paix".
07:48 Si vous avez un Macron qui vous dit "Il va falloir envisager la paix",
07:51 tout le monde doit lui rire au nez.
07:52 Si vous pensez que le Hamas va écouter Macron,
07:54 si vous pensez que Poutine va écouter Emmanuel Macron,
07:57 c'était la même chose avec François Hollande.
07:59 Donc il y a un moment donné où il faut que le président,
08:02 ou le chef de l'État puisse incarner une volonté,
08:04 et cette volonté, il faut qu'elle soit lisible.
08:05 Il n'y a pas plus illisible qu'Emmanuel Macron sur ce sujet-là.
08:09 – Alors, il a reçu aussi les chefs de parti à l'Élysée
08:12 qui ont tous dénoncé une posture irresponsable du chef de l'État
08:16 avant un débat parlementaire qui aura lieu la semaine prochaine.
08:19 Un débat avec vote, mais sur un accord bilatéral qui est déjà scellé.
08:23 À quoi sert donc ce vote au Parlement ?
08:25 – À communiquer, à dire qu'il respecte la démocratie.
08:27 Voilà quelqu'un qui ne respecte pas la démocratie,
08:30 qui la contourne dès qu'il le peut pour une raison bien simple,
08:32 il n'a pas la majorité qui lui permettait de déclasser le pouvoir,
08:34 c'est ça quand même le problème.
08:36 Avec la Ve République, vous êtes chef de l'État,
08:37 vous nommez un premier ministre, le président en préside,
08:40 le gouvernement gouverne,
08:41 normalement vous fabriquez un gouvernement,
08:43 mais c'est le premier ministre qui le fait,
08:45 et puis vous avez une majorité au Congrès,
08:47 c'est-à-dire Assemblée Nationale et Sénat,
08:49 qui vous permet de gouverner, voilà.
08:51 En cas d'extrême blocage, vous avez le 49-3,
08:53 mais en cas d'extrême blocage, il ne dispose de rien de tout ça.
08:57 Donc il fabrique des commissions, il fabrique des trucs,
08:59 alors beaucoup de 49-3, on l'a vu,
09:01 et puis il essaie de dire "bon, on va prendre 4 ou 5 députés,
09:04 sénateurs, on va faire une petite commission",
09:05 puis ils ont décidé, mais on passe par-dessus la tête du peuple,
09:08 on passe par-dessus la tête de l'Assemblée Nationale,
09:10 on passe par-dessus la tête du suffrage universel.
09:14 Il a été élu avec 50% de gens qui n'ont pas voté pour lui,
09:17 ça devrait rendre modeste.
09:18 Donc il y a un moment donné où on devrait rendre la balle,
09:20 renvoyer la balle en disant "je vais solliciter le peuple
09:23 avec un référendum, avec une question claire",
09:25 pas du tout avec une question macronienne,
09:27 du genre "c'est une question qui n'en est pas une tout en étant une,
09:29 qui vous permettra de répondre par oui mais pas en non en même temps",
09:31 etc. Non, est-ce que vous voulez la guerre, oui ou non ?
09:34 C'est tout, la question est très simple.
09:35 Il n'y a même pas besoin de la poser Michel Onfray,
09:37 on sait très bien comment répondre à les Français.
09:40 Eh bien bien sûr, dans ce cas-là, quand on sait comment répondre
09:42 aux Français, on fait ce que les Français demandent.
09:43 On ne fait pas ce que, soit, on a décidé,
09:45 on ne fait pas ce qu'on a estimé nécessaire de faire pour l'Europe
09:48 et pour Madame van der Leyen, parce que c'est ça qui l'intéresse.
09:52 Van der Leyen.
09:53 Van der Leyen, pardon, oui.
09:54 Il y a aussi la question de l'instrumentalisation
09:57 de cette politique internationale à des visées nationales, évidemment.
10:01 Le Rassemblement National est particulièrement visé par l'exécutif,
10:05 comme étant, entre guillemets, la courroie de transmission
10:07 de Vladimir Poutine en France.
10:09 Poutine est leur banquier, il est maintenant leur suzerain,
10:12 disait notamment Sylvain Maillard, parti Renaissance, sur notre antenne.
10:18 Comment est-ce que vous voyez cette stratégie-là ?
10:21 C'est la stratégie, c'est la jurisprudence miterrande,
10:23 c'est-à-dire qu'on se sert de Le Pen et du nom de Le Pen
10:25 comme d'un épouvantail en disant maintenant,
10:27 vous avez le choix entre le mal et le bien, et moi, je suis le bien.
10:30 Donc, on dit aux banquiers, enfin, on n'avait pas besoin de leur dire,
10:33 si un banquier disait, c'est nous qui... je ne sais pas quoi,
10:36 je ne vais pas donner de nom, mais une banque dit,
10:37 voilà, nous sommes les banquiers de Mme Le Pen
10:39 pour la prochaine présidentielle.
10:40 Elle perd une partie de ses clients.
10:42 C'est un effondrement, c'est un accident industriel,
10:45 peut-être, pourrait-on dire.
10:46 Donc, évidemment, aucun banquier ne finance la campagne
10:49 de Marine Le Pen en France.
10:50 Ça veut dire quoi ? Qu'elle ne faut pas qu'elle ait de campagne ?
10:52 On sait bien que tous ces gens-là n'ont pas envie
10:54 qu'elle puisse être présente aux élections présidentielles.
10:56 Qu'est-ce qu'elle fait ? Elle va chercher de l'argent ailleurs.
10:58 Où est-ce qu'elle va chercher de l'argent ?
10:59 Dans des pays qui sont susceptibles de l'aider.
11:00 Elle va voir des banquiers russes.
11:02 Mon banquier, ce n'est pas Macron.
11:04 Banquier russe, ce n'est pas non plus forcément Poutine.
11:06 Et puis, à un moment donné, on lui dit,
11:07 ah, mais vous avez un banquier russe,
11:08 c'est donc Poutine qui vous finance.
11:10 Évidemment, s'il vous finance, il décide de votre politique.
11:11 C'est donc bien la preuve qu'eux, etc.
11:13 Où la politique de Marine Le Pen est-elle poutinienne ?
11:17 Je ne vois pas.
11:18 C'est-à-dire que, comme Macron dit des choses
11:21 avant cette Ukraine envahie,
11:23 puis elle dit d'autres choses depuis que l'Ukraine est envahie.
11:24 Et tout le monde fait à peu près ça.
11:26 Tout le monde a dit du bien sur Poutine à une époque.
11:29 Et on dit maintenant du mal parce qu'il s'est passé
11:31 quelque chose entre deux.
11:32 Donc, cette façon de criminaliser Marine Le Pen,
11:33 c'est une façon de dire, moi, mon objectif,
11:35 quand je suis président de la République,
11:36 ce n'est toujours pas la France, ce n'est toujours pas les Français.
11:38 C'est de passer devant le Rassemblement national
11:40 aux prochaines élections européennes.
11:41 Ce n'est que ça.
11:42 La dernière fois, souvenez-vous, c'était déjà ça.
11:44 C'était déjà la même stratégie.
11:45 C'était déjà la même technique.
11:47 Et quand il a perdu, qu'a-t-il dit ?
11:48 Oh, mais je pensais qu'on pourrait perdre plus que ça.
11:50 Quand on a perdu si peu, ça s'appelle gagner.
11:52 Et puis, on est passé à autre chose.
11:54 Tout le monde a expliqué que, finalement,
11:55 courte victoire avec une courte victoire,
11:56 ce n'était même pas une victoire.
11:58 Ça a été relayé par la quasi-totalité de la presse.
12:00 Mais on voit bien que le business Le Pen
12:03 est une occasion de ne pas faire de la politique
12:05 ou du moins d'utiliser une espèce de diable pour dire
12:07 "Votez toujours pour nous,
12:08 nous, on est toujours le cercle de la raison, etc."
12:10 Mais s'il y a vraiment des gens qui font le jeu de Poutine,
12:12 c'est plutôt les maastrichtiens.
12:13 Je ne sais pas s'ils se rendent compte, ces gens-là,
12:15 que si on avait vraiment une politique gaullienne-égaliste,
12:18 ça ferait longtemps que, d'abord, ces choses-là n'auraient pas eu lieu.
12:20 Et s'ils avaient eu lieu, elles ne continueraient pas à avoir lieu.
12:22 Alors, justement, Michel, on a fait la comparaison
12:24 la semaine dernière avec le général de Gaulle.
12:26 Il y a encore une vision gaulliste de la France.
12:29 On a entendu récemment Hubert Viedrine,
12:31 ancien ministre des Affaires étrangères.
12:33 Il était l'invité du grand rendez-vous CNews Europe 1,
12:35 animé par Sonia Mabrouk.
12:36 Il a prononcé cette phrase intéressante.
12:38 "Je suis un gaullo-mitterrandien."
12:41 On va l'écouter.
12:41 Vous allez nous dire si ça existe,
12:43 cette race de gaullo-mitterrandiens.
12:46 Comme l'avait dit le président de la Commission,
12:48 Jacques Santer, il y a longtemps,
12:50 au début des guerres yougoslaviennes,
12:52 quand il avait dit "c'est l'heure de l'Europe".
12:54 Non, ce n'est pas que l'heure de l'Europe,
12:56 c'est l'Alliance.
12:57 Mais moi qui suis gaullo-mitterrandien,
12:59 vous le savez, on n'est pas de la même famille politique.
13:01 Je suis gaullo-mitterrandien historiquement,
13:03 mais je sais bien que l'Europe de la défense,
13:05 que j'appelle moi aussi de mes voeux,
13:06 n'existe pas aujourd'hui.
13:08 Il n'y a pas les moyens, il n'y a pas la volonté,
13:10 il n'y a pas le mode de décision.
13:11 - Alors, est-ce qu'évidemment, il y a des gaullo-mitterrandiens ?
13:15 Ça existe, Michel Lomprey ?
13:16 - Ah oui, comme les vichysseaux résistants,
13:18 comme les animaux qui sont faits de partie.
13:21 Enfin, le centaure, ça existe aussi,
13:23 avec une tête d'homme et avec un corps de bœuf ou de taureau.
13:25 - C'est une chimère.
13:25 - C'est une chimère, une chimère totale.
13:27 D'abord, c'est quoi Mitterrand ?
13:28 C'est quel Mitterrand ?
13:29 C'est le Mitterrand fasciste d'extrême droite antisémite
13:32 des années 30 ?
13:33 C'est le Mitterrand qui reçoit la Francisque
13:35 des mains du maréchal ?
13:36 C'est le Mitterrand qui dit du bien de la ministre
13:40 en disant qu'elle pourrait être un peu plus forte que ça
13:41 et qu'il lui manque un peu de peps ?
13:43 C'est le Mitterrand qui soutient Giraud ?
13:45 C'est le Mitterrand ?
13:45 C'est quoi Mitterrand, pour le coup ?
13:48 Ça n'existe pas, Mitterrand.
13:49 C'est une espèce de dandy qui aura utilisé
13:51 tous les costumes chamarrés pour pouvoir arriver au pouvoir
13:54 et s'y maintenir.
13:55 De Gaulle, c'est le contraire.
13:56 C'est un homme qui a une conviction et qui dit
13:57 "Ma conviction, c'est le souverainisme.
13:59 Il faut que la France soit souveraine."
14:00 Et ça s'appelle le 18 juin 40.
14:02 Et jusqu'à la fin, quand il s'agit d'avoir la dissuasion nucléaire,
14:05 il faut que nous soyons autonomes et indépendants
14:06 avec le bloc soviétique, face au bloc soviétique américain.
14:08 Il faut que nous puissions être aussi souverains.
14:10 Donc, on va paraître, alors, gaullo-macroniste,
14:12 gaullo-mitterrandien, c'est macroniste.
14:14 C'est en même temps, quoi.
14:15 En même temps, surtout les contraires.
14:17 Alors, je sais, j'aime beaucoup Hubert Védrine
14:19 parce que je pense qu'il a un esprit fin,
14:21 intelligent, cultivé, etc.
14:22 Il a un passé qui fait que, je pense que son père et Mitterrand
14:25 avaient des passions communes à une certaine époque,
14:28 ce qui fait qu'on a créé aussi, un peu pour eux,
14:30 ce qu'on appelait le concept de vichysto-résistant.
14:33 Il m'est arrivé sur la route de Maréta, il y a quelque temps,
14:35 à Vichy, et de découvrir que,
14:37 on efface tout le maréchal pétain
14:39 et on a parfois des audios dans la rue
14:40 et on nous parle des vichysto-résistants.
14:43 Mais je ris ou quoi ?
14:44 C'est quoi ce truc, les vichysto-résistants ?
14:45 Ou c'est Vichy ou c'est le général de Gaulle.
14:47 C'est le général ou c'est le maréchal,
14:48 mais c'est l'un ou l'autre.
14:49 - On ne peut pas être les deux, mais...
14:50 - Mais pas les deux.
14:50 - Évidemment.
14:51 - Qu'est-ce qu'un vichysto-résistant ?
14:52 C'est quelqu'un qui est vichyste tant que Vichy est au pouvoir,
14:55 c'est quelqu'un qui comprend qu'après Stalingrad,
14:57 la guerre est finie,
14:58 et qu'éventuellement, même avec l'arrivée des troupes américaines,
15:02 c'est vraiment franchement fini,
15:03 et qui deviennent pour le coup résistants.
15:04 Je rappelle que des Mitterrand et autres,
15:06 ils deviennent résistants en 1943,
15:08 que Malraux devient résistant en 1944,
15:10 que les communistes deviennent résistants en 1942.
15:12 40, 41, 42,
15:14 et après 42, 43, 44, donc ça fait loin tout ça.
15:17 Donc les vichysto-résistants sont des gens qui ont été
15:19 du côté de Vichy quand Vichy est au pouvoir,
15:21 du côté de la résistance quand la résistance arrive au pouvoir,
15:23 mais ça n'est pas un concept.
15:24 Quant à de Gaulle, il a une ligne,
15:26 et Mitterrand n'en a eu aucune autre que celle de la haine du général de Gaulle.
15:30 Il n'y a eu que ça de constant chez Mitterrand,
15:31 dans tout ce qu'il a fait, la haine du général de Gaulle.
15:34 Et donc, il a détricoté tout ce que le général de Gaulle a pu faire,
15:38 il a détricoté la Ve République,
15:39 il a détricoté une politique de puissance, etc.
15:42 Enfin, plein de choses.
15:43 Donc ça n'existe pas, le gaullo-mitterrandisme,
15:46 sauf chez des gens qui effectivement estiment
15:48 qu'il faut défendre Mitterrand,
15:49 parce que Mitterrand c'était avec le général de Gaulle,
15:51 et même pas après, l'autre grand homme de la Ve République.
15:54 Ce que je ne crois pas.
15:54 Il y avait un grand homme et un petit homme de la Ve.
15:56 - Bon, on va écouter le général de Gaulle,
15:58 parce que ce qui est intéressant,
16:00 c'est ce qu'il disait sur la gauche et la droite.
16:01 - Ah oui.
16:02 - On va écouter un extrait qui date de décembre 1965,
16:05 c'est un entretien avec Michel Droit
16:07 entre les deux tours de l'élection présidentielle.
16:09 Écoutez ce qu'il dit sur la France, la droite et la gauche.
16:12 - La France, c'est tout à la fois.
16:15 C'est tous les Français.
16:18 C'est pas la gauche, la France.
16:21 C'est pas la droite, la France.
16:23 À droite, on dit, vous faites une politique de gauche au dehors.
16:28 À gauche, du reste, vous le savez bien, on dit, de Gaulle,
16:31 il est là pour la droite, pour les monopoles,
16:33 pour je ne sais pas quoi.
16:35 Le fait que les partisans de droite et les partisans de gauche
16:42 me déclarent que j'appartiens à l'autre côté
16:46 prouve précisément ce que je vous dis.
16:50 C'est-à-dire que maintenant, comme toujours,
16:53 je ne suis pas d'un côté, je ne suis pas de l'autre,
16:55 je suis pour la France.
16:57 - Assez simple, assez limpide comme définition.
16:59 Je suis pour la France.
17:00 - D'abord, merci pour chaque bonheur, à chaque fois.
17:03 - Oui, on ne va pas le faire systématiquement,
17:04 mais c'est vrai qu'on va être un peu nostalgiques de Gaulle.
17:07 - Oui, alors il dit quelque chose d'essentiel.
17:08 C'est-à-dire que la droite et la gauche,
17:09 c'est une métaphore horizontale.
17:11 Au moment de la Révolution française,
17:13 vous avez dans l'hémicycle la droite de l'hémicycle,
17:16 la gauche de l'hémicycle, ceux qui sont pour le roi,
17:18 ceux qui sont contre le roi, ceux qui sont pour le veto,
17:20 la déquipitation, etc.
17:21 Et là, on dit voilà droite et gauche.
17:23 Et le général de Gaulle dit ça, c'est une lecture horizontale.
17:25 Ce n'est pas la mienne, ça manque de hauteur.
17:26 Et il dit, il y a une lecture verticale.
17:28 Il y a la France et les autres.
17:30 Et il dit, ceux qui veulent la France, je suis avec eux,
17:33 y compris les communistes.
17:34 Quand les communistes ne veulent pas de la France
17:36 pendant le pacte germano-soviétique,
17:38 eh bien les communistes ne sont pas avec lui,
17:39 il n'est pas avec les communistes.
17:40 Quand les communistes ont compris
17:41 qu'ils pouvaient devenir des défenseurs de la nation,
17:43 parce qu'effectivement on connaît l'histoire,
17:44 Barbarossa, etc., Adolf Hitler qui a envahi l'Union soviétique
17:48 et rompt unilatéralement le pacte germano-soviétique,
17:51 alors là, il se dit, effectivement, les communistes,
17:52 ils se disent bon, maintenant, on peut rentrer
17:53 dans la résistance nationale.
17:55 Très beau texte d'Aragon, très beau poème d'Aragon
17:56 sur la France, sur le pays, sur la nation, sur le peuple, etc.
18:00 Et le général de Gaulle, il dit ça, il dit,
18:01 vous voulez la France ou vous ne la voulez pas ?
18:03 Et si vous voulez la France,
18:04 vous avez le droit de croire en Dieu, ne pas y croire,
18:06 vous avez le droit d'être de droite ou de gauche,
18:08 ça n'a aucun intérêt de savoir si vous êtes de droite ou de gauche,
18:10 on peut être de droite égaliste, de gauche égaliste,
18:13 chrétien égaliste, athée égaliste, musulman, juif, etc. égaliste.
18:16 Et c'est ça qui est intéressant dans la France,
18:18 c'est de fabriquer une communauté en se disant
18:20 ce qui nous rassemble le plus important,
18:21 ce qui nous divise.
18:22 Et cette façon de dire, bien sûr qu'il existe la droite,
18:24 il y a aussi une archive formidable où il dit,
18:26 la droite, c'est l'ordre, il y a le mari qui ne veut pas
18:29 qu'on mette les pieds sur la table, et puis il y a aussi...
18:32 - On la ressentira pour la prochaine émission.
18:33 - Et puis il dit c'est les deux, et il a raison,
18:36 il faut l'ordre, en même temps il faut la liberté,
18:38 l'ordre sans la liberté c'est la dictature,
18:40 la liberté sans l'ordre c'est la tyrannie,
18:43 c'est la tyrannie des passions ou des émotions,
18:45 il faut un équilibre, un savant équilibre des deux.
18:47 Et l'égalisme c'est ça, c'est une façon de dire,
18:49 personne ne peut dire toute la droite a raison
18:51 et toute la droite a tort, toute la gauche a raison
18:53 et toute la gauche a tort.
18:54 On devrait pouvoir faire ça d'ailleurs,
18:55 prendre Mélenchon, prendre Marine Le Pen,
18:57 prendre les écologistes et dire à chaque fois
18:59 tout ça est défendable, tout ça est bon pour la France
19:01 et c'est bon pour la France que par exemple,
19:03 on va en parler probablement,
19:04 mais sur les perturbateurs endocriniens et les écologistes,
19:07 je trouve qu'ils mènent un bon combat intellectuel
19:10 et qu'à ce moment-là on se dit c'est bon pour la France
19:12 qu'on puisse lutter contre les perturbateurs endocriniens.
19:15 Et c'est comme ça qu'on peut fabriquer un pays
19:16 et qu'on peut fabriquer aussi une nouvelle adhésion sociale.
19:18 On sait très bien que les gens n'adhèrent plus
19:19 parce qu'ils se disent "ouais mais la gauche dit
19:21 la droite a tout le temps tort,
19:22 la droite dit la gauche a tout le temps tort,
19:23 en fait certains ont raison, certains ont tort".
19:26 Mais ce n'est pas suffisant d'être comme Macron
19:27 en disant "on fait en même temps, on fait une espèce de mix,
19:29 on prend le meilleur des deux".
19:30 Non, ce n'est pas ça, ce n'est pas "on prend le meilleur des deux",
19:32 c'est de dire tout ce qui va rendre possible la France,
19:34 l'histoire de France, une présence française,
19:36 une existence française, une identité française,
19:39 alors ça ce sera formidable.
19:40 Et si on a toutes ces énergies mélangées,
19:42 on peut à nouveau refaire de la politique.
19:44 - Qui sont aujourd'hui les gaullistes dans la classe politique ?
19:48 Est-ce que Jean-Pierre Cheminement fait partie des derniers gaullistes ?
19:51 - Jean-Pierre, il est sorti de la politique politicienne,
19:54 je dirais, donc aujourd'hui c'est un vieux sage,
19:58 un peu comme jadis Robert Banninter ou un peu comme jadis Simone Veil,
20:03 ce sont des gens qui sont Valéry Giscard d'Estaing,
20:06 on savait très bien qu'ils n'étaient plus poursuivis
20:09 par le désir de faire carrière, que leur carrière était derrière eux.
20:11 On se disait "bon s'ils parlent, ils parlent le vrai".
20:13 Oui, moi j'ai beaucoup lu Jean-Pierre Cheminement
20:16 et j'ai surtout lu des textes qui ont été un jour réunis
20:18 et il se fait que j'avais lu dans la même semaine
20:20 le même texte qui s'était retrouvé dans un autre endroit.
20:24 Je me suis dit "mais ce n'est pas ce que j'ai lu".
20:26 Et j'avais vu que Jean-Pierre Cheminement avait corrigé
20:28 quelques textes anciens et que la correction
20:31 allait dans le sens d'une espèce d'éloge de Mitterrand.
20:33 Et je me disais "tiens, finalement le gaullisme de Jean-Pierre,
20:36 il n'est pas forcément aussi intégral que ça".
20:39 Et il y avait cette fascination, et il a toujours eu cette fascination
20:42 pour François Mitterrand, qui semble-t-il, pas connu,
20:44 mais avait cette espèce de fascination personnelle,
20:47 cette fascination du serpent, il embarquait des gens,
20:49 il a séduit des gens comme Mélenchon, qui ne l'ont jamais oublié,
20:51 une espèce de Mitterrandisme aussi viscéral chez ceux qui l'ont connu
20:55 et qui en parlent avec des larmes dans la voix,
20:57 ce que je peux comprendre.
20:58 Et il y avait probablement un charme personnel de l'individu.
21:01 Mais il n'y a personne aujourd'hui dans la classe politique
21:04 qui puisse se réclamer de manière honorable de De Gaulle.
21:07 Il y a Dupont-Aignan, monsieur Dupont-Aignan,
21:11 mais il y a un moment donné où on doit comprendre
21:13 quand on a été si souvent candidat et si souvent rejeté
21:16 que la France ne voulant pas de nous, il faut arrêter.
21:18 Si on ne peut pas dire le général De Gaulle,
21:20 il puisse entendre dire à chaque fois "vous pesez 2% de général De Gaulle".
21:23 Quand on s'est entendu dire ça deux ou trois fois,
21:25 il y a un moment donné où il faut se dire "au nom du gaullisme, j'arrête".
21:27 – D'ailleurs Jean-Pierre Chevènement a été très critique
21:29 sur la position d'Emmanuel Macron sur l'Ukraine,
21:31 qu'il décrit comme une fuite en avant irresponsable et très inquiétante.
21:34 – Oui, mais Jean-Pierre a appelé à voter Macron,
21:35 il a dit qu'il voterait Macron et à l'époque,
21:38 il était le monsieur Russie d'Emmanuel Macron.
21:41 Il ne faut pas oublier tout ça,
21:42 c'est-à-dire qu'il faut penser de manière dynamique et dialectique,
21:45 c'est-à-dire ne pas dire "ah, on essentialise Poutine",
21:48 en disant "ah, mais vous avez reçu Poutine, oui, mais quand ?
21:50 Et pour dire quoi ? Et à quelle époque ? Et dans quelle configuration ?"
21:53 Pour éviter de dire "c'est des méchants poutinolâtres, des poutinophiles".
21:57 Et si aujourd'hui vous avez un malheureux qui dit
21:59 "je vote pour Marine Le Pen parce que j'en peux plus de cette société française",
22:01 on dit "ah, les troupes de Poutine sont déjà à Paris,
22:05 et c'est à peu près la même chose,
22:06 moi j'ai connu ça que les chars soviétiques
22:08 qui devaient être sur la place de la Concorde".
22:10 Donc il y a une espèce de fantasme,
22:12 jamais Poutine n'a dit qu'il allait envahir la France,
22:14 ce n'est pas son projet.
22:15 - Bon, on va faire une petite pause Michel Onfray,
22:17 on va se retrouver dans un instant sur CNews
22:19 pour la suite de Face à Michel Onfray,
22:21 on va parler d'Israël, de ce qui se passe en Israël,
22:24 Israël-Palestine, l'introuvable solution,
22:26 on parlera aussi d'Albert Camus avec vous.
22:28 À tout de suite.
22:28 On se retrouve pour Face à Michel Onfray, la deuxième partie,
22:34 toujours avec vous bien entendu.
22:36 On va évoquer maintenant ce qui se passe en Israël,
22:39 avec malheureusement cette absence de trêve
22:41 qui n'a pas été conclue.
22:43 Il y avait des accords pour parler en cours
22:45 qui n'ont pas abouti.
22:46 Il n'y aura pas de trêve,
22:47 il n'y aura pas de négociation autour de la libération des otages.
22:50 130 otages sont encore aux mains
22:52 de l'organisation terroriste du Hamas,
22:53 dont trois otages français, Ofer, Orion et Oade.
22:57 Est-ce que la perspective d'un règlement de ce conflit
23:01 est absolument à exclure,
23:02 tant que le Hamas n'a pas été défait militairement sur le terrain ?
23:07 - Le Hamas, ce ne sont pas X personnes en disant,
23:10 voilà, on a tué X personnes, il en manque encore 10.
23:13 Et puis le Hamas, c'est terminé.
23:14 Ce n'est pas comme ça que ça se passe.
23:16 C'est une idéologie et des gens qui la portent.
23:20 Et il y a ceux qui portent cette idéologie
23:22 en la faisant ce qu'elle est,
23:23 c'est-à-dire les cadres, les dirigeants.
23:25 Et puis, il y a les sympathisants sur ce territoire de Gaza,
23:30 par exemple, de la Cisjordanie.
23:31 Et puis, il y a les sympathisants planétaires.
23:33 Et comme on le fait, ce sont des millions de gens
23:34 qui sont des sympathisants du Hamas.
23:36 Donc, il y a un moment donné où on ne peut pas détruire
23:39 une idéologie avec des fusils et des canons.
23:41 Ça ne suffit pas.
23:43 Et pas non plus avec une bombe atomique.
23:44 C'est n'importe quoi d'imaginer qu'on peut résoudre
23:47 un problème de cet ordre-là.
23:48 Donc, il y a des choses à revoir.
23:52 Je peux comprendre que sous le coup de la colère
23:54 et du 7 octobre, on puisse dire, on se venge.
23:57 Je ne suis pas contre la vengeance dans ces cas-là.
23:59 Ça peut se faire aussi comme ça.
24:00 Mais après, qu'est-ce qui se passe après ?
24:02 - Alors, on va l'évoquer dans un instant,
24:04 mais j'aimerais juste qu'on écoute Benjamin Netanyahou,
24:06 qui a redit aujourd'hui qu'Israël poursuivrait son action
24:09 jusqu'à la destruction du Hamas.
24:11 On l'écoute.
24:12 - L'armée israélienne poursuivra ses opérations
24:15 contre le Hamas dans toute la bande de Gaza,
24:18 y compris à Rafa, le dernier bastion du Hamas.
24:21 Quiconque nous dit de ne pas agir à Rafa,
24:25 nous dit de perdre la guerre, ce qui n'arrivera pas.
24:28 - Et ce ne se fera pas.
24:31 - Voilà pour la détermination de Benjamin Netanyahou.
24:33 Certains le lui reprochent, disant qu'il faut arrêter,
24:35 il faut en cesser le feu,
24:37 il faut que les civils ne soient pas à ce point-là massacrés.
24:40 - Il faut poser la question, parce que lui pose la question
24:42 de la destruction du Hamas,
24:45 mais on pourrait poser la question de la construction du Hamas,
24:47 de la prolifération du Hamas.
24:49 Je pense que quand vous êtes un gamin de la bande de Gaza
24:53 ou de la Cisjordanie et que vous voyez ce qui se passe,
24:55 vous fabriquez du Hamas.
24:56 Vous ne pouvez pas d'un côté dire on va détruire le Hamas
24:59 et en faisant ce qu'il faut pour détruire le Hamas,
25:01 faire de telle sorte que le Hamas dure encore.
25:02 Vous fabriquez des générations.
25:04 Ce n'est pas comme ça qu'on va arrêter l'idéologie du Hamas
25:07 qui continue à progresser.
25:08 Plus on bombarde Gaza, plus on aura de gens qui diront
25:10 finalement radicalisons-nous.
25:13 On n'avait peut-être pas plus de sympathie que ça pour le Hamas,
25:15 mais le Hamas, ils sont de notre côté,
25:17 ils sont avec nous, je ne sais quoi.
25:18 Donc il y a un moment donné où il faut penser en termes de paix.
25:21 Ça ne peut pas être une guerre éternelle.
25:22 Il faut qu'on puisse se dire, mais qu'est-ce qui est envisageable
25:25 pour arrêter de fabriquer des martyrs,
25:27 pour arrêter de fabriquer des familles de martyrs,
25:29 c'est-à-dire pour arrêter de fabriquer des gens qui disent
25:31 "mais plus vous allez nous détruire, plus vous allez nous construire".
25:33 C'est l'hydro de l'erne, finalement, ce que fait Netanyahou.
25:36 Ça n'est pas la bonne solution.
25:38 Il y a un moment donné où il faut dire
25:39 "bon, on ne va pas de toute façon le cesser le feu"
25:41 en disant "cesser le feu et puis on va voir par la suite".
25:43 Non, si le cesser le feu, c'est l'occasion pour le Hamas
25:45 de se réorganiser, sûrement pas.
25:47 Mais de dire "vous grandez tous les otages, tous".
25:50 Et puis on envisage un cesser le feu, c'est envisageable,
25:52 c'est pensable, mais pas à partir de rien.
25:55 On ne va pas dire "on arrête, on fait un cesser le feu
25:57 et puis vous allez pouvoir vous réorganiser
25:58 pour pouvoir mieux nous taper dessus".
25:59 Donc il y a un moment donné, il faut une figure pour ça.
26:01 Ça ne peut pas être Netanyahou.
26:02 Quelle est la figure du Hamas qui est susceptible
26:04 d'entendre ce genre de choses ?
26:06 On a l'impression que les négociations,
26:07 elles se font au Qatar, en Arabie Saoudite et en Égypte.
26:10 Et avec qui et comment et qui dit quoi ?
26:12 Tout ça est éminemment secret.
26:14 Que fait l'Iran ?
26:16 Quelle est la position de l'Iran là-dessus ?
26:17 Ils sont partants pour quoi ?
26:18 Le Hezbollah, ils sont partants pour quoi ?
26:20 C'est difficile pour moi ou pour d'autres
26:22 de pouvoir avoir un avis quand on n'est pas au courant de tout ça.
26:24 On ne sait pas ce qui se passe en Iran,
26:25 on ne sait pas ce qui se passe en Égypte,
26:27 en Jordanie même également.
26:28 On ne sait pas qui est prêt à accepter
26:30 éventuellement d'autres Palestiniens.
26:31 Un peu d'Égypte, un peu de Jordanie ?
26:32 Point d'interrogation.
26:33 On ne sait rien de tout ça.
26:35 Ce qu'on sait juste, c'est qu'on ne peut pas dire
26:36 qu'on veut éradiquer une idéologie en faisant ce qu'il faut
26:38 pour que cette idéologie, elle progresse, elle prolifère.
26:41 Ça n'est pas possible, ça n'est pas pensable.
26:42 Il faut désormais envisager des conditions d'une paix
26:45 dans laquelle on ne laisse pas tout tomber.
26:47 Bon, ça va, je crois qu'il y a eu une espèce d'équivalence,
26:51 même si ce n'est pas une équivalence chiffrée
26:53 et absolument égale, mais dans la terreur.
26:56 Donc on arrête.
26:56 Il y a un moment donné où on se dit
26:57 "est-ce qu'on ne pourrait pas obtenir la sécurité d'Israël ?"
26:59 C'est par ça qu'il faut commencer.
27:01 Et puis quelque chose auquel on ne touche pas,
27:03 c'est qu'on ne peut pas négocier avec des gens qui nous disent
27:06 que leur but, c'est la destruction de l'État d'Israël.
27:08 Ça, ça n'est pas possible.
27:09 Donc on négocie sur ça, on négocie sur les otages.
27:12 Et puis après, plein de choses sont susceptibles d'être entendues.
27:14 Il y a de nombreuses voix en France, je vous le disais,
27:16 qui se montrent de plus en plus critiques
27:17 sur la stratégie choisie par Benjamin Netanyahou.
27:21 On va écouter notamment du côté de la diplomatie française,
27:24 du président et même de son ministre des Affaires étrangères.
27:26 On va écouter Manuel Valls, qui était notre invité cette semaine,
27:29 qui, lui, trouve que cette prise de distance
27:32 est tout à fait regrettable.
27:33 Manuel Valls.
27:34 Je sens une forme de lâcheté dans les chancelleries occidentales
27:39 depuis quelques semaines,
27:41 y compris dans les mots de notre propre diplomatie
27:45 et du ministre des Affaires étrangères français.
27:48 C'est-à-dire, on somme Israël,
27:52 qui est en légitime défense dans cette affaire,
27:55 au fond de ne pas aller jusqu'au bout de ses buts,
27:59 alors qu'Israël est dans une situation vitale.
28:02 On considère que son existence est menacée
28:05 par des organisations islamistes.
28:07 Voilà Manuel Valls, donc, qui dénonce le manque de soutien
28:10 de l'exécutif français face à Israël.
28:12 Il y a quelque chose qui est en train de basculer,
28:14 Michel Onfray, en France.
28:16 Je vous parle simplement d'abord de l'exécutif français,
28:18 après, on parlera de la France insoumise.
28:20 Non, ça ne bascule pas, parce que je pense que Emmanuel Macron
28:22 n'est pas allé à la manifestation contre l'antisémitisme.
28:25 Et on a su par la suite qu'il avait des visiteurs du soir
28:28 qui lui faisaient savoir que sa présence dans une manifestation
28:31 comme celle-ci aurait été extrêmement dommageable dans les banlieues
28:34 et qu'il fallait faire attention aux banlieues.
28:37 Et je pense que Macron, quand il décide de quelque chose,
28:40 n'a pas l'œil sur la France.
28:41 Il a toujours l'œil sur lui-même et sur éventuellement
28:44 les ennuis qu'il pourrait avoir personnellement.
28:45 Il ne veut pas avoir d'ennuis dans les banlieues.
28:47 Et donc, il fait ce qu'il faut pour qu'il n'y ait pas d'ennuis dans les banlieues.
28:49 Donc, un peu de ceci, un peu de cela.
28:51 Et puis, on soutient, on ne soutient pas, on ne soutient plus.
28:54 On dit qu'on soutient, on ne soutient pas, etc.
28:56 J'ai entendu que quand il avait fait cette cérémonie d'hommage
29:00 aux victimes du Hamas, aux victimes françaises du Hamas,
29:02 il avait été aussi question d'une cérémonie en hommage,
29:06 mémorielle aux victimes des bombardements israéliens.
29:09 Mais c'est quoi, ça, cette façon de dire "je ne choisis pas".
29:12 Bien sûr que si, il choisit.
29:13 Cette façon de choisir est une façon qui laisse de côté Israël,
29:18 qui ne soutient pas Israël.
29:20 On peut être critique.
29:21 C'est que je suis sur cette stratégie de l'écrasement d'une hydre
29:25 qui repoussera parce que ce n'est pas comme ça qu'on se débarrasse d'une hydre.
29:29 Et il y a un moment donné où il faut envisager les choses autrement
29:31 sans pour autant dire "donnons quelques concessions à nos amis palestiniens"
29:34 parce qu'il n'y a pas de concession à donner.
29:36 Il y a juste une guerre à arrêter.
29:38 Il y a un état de paix à trouver, puis une formule politique
29:40 de cohabitation, de coexistence à inventer.
29:42 - Vous avez voulu aussi, Michel Enfray, évoquer Albert Camus
29:46 à la lumière de ce conflit en Israël, celui de l'Ukraine également,
29:50 qui lui avait évoqué la possibilité de régler les conflits
29:54 par des états de fédération.
29:57 C'est bien ça ? Expliquez-nous un tout peu.
29:59 - Le livre complet de Camus, c'est 4 volumes de pléiades, c'est 5000 pages.
30:02 Donc j'ai lu tout ça quand j'ai fait mon livre sur...
30:05 ça s'appelle "L'ordre libertaire", sur la politique de Camus.
30:08 Parce qu'on connaît mal sa politique.
30:09 On dit "on est de gauche", mais quelle gauche ?
30:12 C'est pas une gauche marxiste, c'est pas une gauche jacobine.
30:14 Et je voulais vraiment travailler cette question.
30:16 C'est extrêmement intéressant, le Camus politique.
30:18 C'est pas un Camus social-démocrate qui voterait Macron aujourd'hui.
30:21 Ça n'a pas grand-chose à voir.
30:22 C'est plutôt un Camus libertaire, d'un socialisme libertaire.
30:24 Il a dit du bien de Proudhon, il a dit du bien des enragés de la Révolution française,
30:27 parce qu'il était proche du peuple.
30:28 Et j'avais beaucoup apprécié un volume qui s'appelle "Actuel 3".
30:33 Il y a eu un, un, deux et trois.
30:35 Enfin, il y en a un qui a été consacré à l'homme révolté.
30:38 Et celui-ci, le dernier volume, c'est l'ensemble de ses textes consacrés à la guerre d'Algérie.
30:42 Et donc, il y a un texte qui fait 4 pages, qui est magnifique,
30:46 que je me relis en permanence.
30:48 C'est vraiment un truc de journaliste, au sens noble du terme.
30:52 Il écrit rapidement, mais avec sa belle plume, avec son beau style,
30:55 avec cette idée géniale qu'on doit pouvoir envisager une formule
30:59 qui ne soit pas jacobine, qui ne soit pas centralisatrice,
31:02 qui ne soit pas étatique, c'est ce qui fait Camus finalement,
31:05 mais qui soit gérondine et qui prenne en considération la spécificité du terrain.
31:08 Pas l'individu idéalisé, l'individu abstrait de la Déclaration des droits de l'homme,
31:14 mais l'individu qui est un arabe, un juif, un cabyle, un riche, un pauvre,
31:18 un commerçant, un exploitant, un exploité, un ouvrier agricole,
31:22 son père, une femme de ménage, sa mère, etc.
31:24 Il dit "comment peut-on faire habiter tous ces gens-là ensemble ?"
31:26 Et il dit "il faut penser en termes de fédération".
31:29 Il parle du doir commun.
31:30 Alors ça, il en parle dans un autre texte qui s'appelle "Misère dans la cabyle".
31:33 Et le doir commun, c'est le bourg, c'est la communauté.
31:35 Il dit "on doit pouvoir faire une communauté dans laquelle chacun doit pouvoir s'exprimer,
31:38 dans laquelle personne ne prend le dessus sur un autre ou sur autrui".
31:42 Et j'avais vu un jour en Israël, je crois que j'étais chez un éditeur,
31:46 il y avait une carte punaisée au mur et c'était les territoires palestiniens,
31:50 mais comme si c'était des îles dans une mer.
31:52 Il n'y avait plus de territoire israélien, il n'y avait plus que ces petites pointes-là.
31:56 Et je me suis dit "mais c'est un archipel".
31:58 La théorie des deux États, qu'est-ce que ça veut dire ?
32:00 Même Mme Pannot ne sait pas ce que ça peut signifier à l'est ou à l'ouest du Jordan, les deux États.
32:04 Mais faut-il une zone dont on dirait "voilà, c'est une zone étatique avec des frontières,
32:09 position Jacobine, ou la position de Camus qui consiste à dire
32:12 "là où il y a des Palestiniens, il y a où il y a des Israéliens,
32:17 mais il y a aussi des Arabes, Israéliens, Palestiniens, etc."
32:20 Moi je dis souvent à des amis que la première fois que je suis allé à Tel Aviv,
32:23 le matin j'ai été réveillé par l'appel du Muezzin.
32:26 Et que ce n'est pas l'idée qu'on s'en fait.
32:27 Alors en revanche, si vous allez dans des territoires palestiniens,
32:30 il n'y a pas de synagogue, ce n'est pas comme ça que ça se passe.
32:32 Et donc Camus, lui, il faisait cette proposition d'association, de fédération,
32:36 de possibilité pour chacun de se parler, de parlements différents,
32:40 qui déciderait de choses qui pourraient concerner les Palestiniens pour les Palestiniens,
32:43 les Israéliens pour les Israéliens.
32:45 C'est une formule, il renvoyait un professeur de droit de l'époque.
32:48 J'ai regardé un peu qui était ce professeur de droit,
32:50 il n'a pas forcément brillé par la suite.
32:52 Mais c'est une idée intéressante, elle est proudhonienne.
32:54 Elle est chez, on aura peut-être l'occasion d'en parler un jour,
32:56 mais chez l'abbé de Saint-Pierre qui défend l'idée de la paix,
32:58 ce qu'on appelait la "polis in odi", c'est-à-dire des conseils.
33:01 Il y avait des conseils à l'époque de la Régence du roi Louis XV.
33:05 Et on fabriquerait aujourd'hui des conseils, plutôt que de donner le pouvoir à des petits potentats,
33:09 on permettrait des pouvoirs girondins.
33:11 Et je pense qu'il y a quelque chose à jouer là,
33:13 et peut-être aussi quelque chose à jouer pour l'Ukraine et la Russie.
33:16 C'est un peu la Suisse dont vous parliez.
33:18 Complètement, il en parle aussi Camus de la Suisse.
33:20 On est d'accord.
33:21 Et dans ces pages-là, il y a une phrase qui m'a vraiment frappé d'Albert Camus,
33:24 quand il dit "il faut une volonté collective dans la métropole,
33:27 et particulièrement l'acceptation d'une politique d'austérité
33:30 dont le poids devrait être porté par les classes aisées,
33:33 car la classe des salariés porte déjà tout le poids d'une fiscalité scandaleusement injuste".
33:38 Il était prémonitoire.
33:39 Complètement. Il n'a cessé d'être de gauche, Camus.
33:42 C'est un peu comme aujourd'hui,
33:44 où si vous n'êtes pas de la gauche officielle, vous êtes d'extrême droite.
33:46 Il a eu droit à ça, le pauvre Camus, au moment de l'homme révolté.
33:49 Alors là, pour le coup, actuel 1, je crois, ou actuel 2.
33:51 Mais tous les textes d'une grande violence,
33:54 parce qu'il nous disait effectivement que si on était de gauche,
33:57 on ne pouvait pas défendre le goulag, ce n'était pas possible.
33:59 Et Sartre nous disait "mais bien sûr que si, il faut le défendre".
34:03 Et puis Merleau-Ponty, avant que Merleau-Ponty ne revienne un peu là-dessus.
34:07 Et puis d'autres qui ont dit David Rousset,
34:09 grand homme de gauche, gouliste de gauche, qui aussi, David Rousset, qui dit
34:12 "on a combattu Auschwitz, ce n'est pas pour justifier le goulag aujourd'hui,
34:16 ce n'est pas possible, ce n'est pas pensable".
34:18 Et tous ceux qui combattaient le goulag à l'époque étaient des gens d'extrême droite.
34:21 Ils étaient des fascistes.
34:22 La preuve, on disait du bien d'eux dans le Figaro, vous pensez bien.
34:24 On a dit du bien du livre d'Albert Camus,
34:26 du bien de révolter dans le Figaro, c'est donc bien la preuve qu'il est un homme de droite.
34:29 On n'a pas pensé, on a insulté déjà.
34:31 Et aujourd'hui encore, quand on insulte, on ne pense pas.
34:33 Moyennant quoi, on a commis des erreurs en soutenant Marx et pas Proudhon.
34:37 On a commis des erreurs en soutenant Sartre et pas Camus.
34:39 Et encore aujourd'hui, on commet des erreurs en pensant que l'avenir pourrait être
34:43 chez les descendants de Marx ou de Robespierre, on voit de qui je veux parler,
34:47 plutôt que chez des descendants de Brissot, par exemple,
34:50 pour prendre une figure emblématique des Girondins de la Révolution française.
34:53 On n'a pas parlé de la France insoumise d'ailleurs.
34:55 Il y a des attitudes qui bouche-choquent.
34:57 Le fait que Mme Rima Assam soit en politisation éligible sur la liste de Manon Moubry,
35:01 c'est quelque chose qui dit beaucoup de l'état d'esprit de cette mouvance politique.
35:05 Écoutez, moi je suis d'abord sidéré qu'on puisse aujourd'hui faire l'éloge de Robespierre
35:08 sans que ça ne pose aucun problème.
35:10 Quelqu'un qui aujourd'hui ferait l'éloge de Robatté irait tout de suite au tribunal
35:13 et ce serait très bien qu'il aille au tribunal.
35:15 Il y a juste un moment donné, on a les preuves aujourd'hui.
35:18 Il y a des historiens qui ont écrit sur ce sujet-là.
35:20 Le génocide vendéen, c'est quand même Robespierre.
35:22 200 000 morts, 20 000 morts avec la terreur, avec la population d'époque, 1793.
35:30 Donc cette façon de dire "il faut me tuer tout le monde dans la Vendée".
35:33 Je rappelle qu'en Vendée, il y a quand même eu des gens qui ont travaillé,
35:36 un chimiste qui s'appelait Proust, qui ont travaillé sur le gazage des populations.
35:40 On a travaillé, même j'ai l'histoire complète de la Révolution française par Louis Blanc,
35:44 et il y a un moment donné où il est question de crématorium pour supprimer les victimes de la Vendée.
35:49 Donc Robespierre c'est ça.
35:50 Et des gens qui nous disent "l'avenir de la France, c'est Robespierre",
35:52 je songe à Mélenchon pour le dire clairement, et qui n'ont eux aucun problème.
35:56 Je trouve ça assez problématique.
35:57 Mais la présence de cette militante pro-palestinienne sur la liste, c'est la même cohérence.
36:00 Ça va dans le même sens.
36:01 Robespierre et l'islamo-gauchisme, c'est l'avert et le revers de la même médaille.
36:07 Michel, on ferait gêner, on regarde maintenant quelque chose peut-être d'un peu plus léger
36:10 au regard du poids de ce qu'on vient d'évoquer jusqu'à présent.
36:13 C'est une affiche, l'affiche officielle des Jeux olympiques de Paris 2024.
36:19 Alors voilà, c'est foisonnant, il y a beaucoup de couleurs,
36:22 il y a des monuments de Paris qui sont représentés de façon figurative.
36:26 Mais tout de même, on voit bien la tour Eiffel, on voit bien le Dôme des Invalides,
36:30 on voit le Grand Palais, on voit Marseille figurée avec la mer.
36:36 Et il y a eu cette polémique autour du fait qu'on ne voit pas bien le virapeau français,
36:40 même s'il est un peu présent sur la gauche de l'image.
36:42 Et surtout, on a retiré la croix du Dôme des Invalides.
36:46 On va écouter le sénateur Roger Carocci, sénateur français,
36:50 qui a interpellé au Sénat la ministre des Sports, Amélia Castera,
36:54 sur le fait qu'il n'ait pas de croix sur le Dôme des Invalides.
36:56 On va l'écouter, vous allez nous dire ce que vous en pensez.
36:59 Vous pouvez peindre la tour Eiffel dans la couleur que vous souhaitez,
37:03 mais vous ne pouvez pas enlever la croix du Dôme des Invalides qui est là depuis l'août 2014.
37:09 Vous ne pouvez pas changer l'histoire de France.
37:12 Quelles que soient nos positions politiques,
37:19 si nous voulons faire évoluer la nation, nous n'avons pas à l'effacer.
37:23 Parce que si nous l'effaçons, nous disparaîtrons.
37:27 Alors, on ne peut pas effacer la nation, sinon nous disparaîtrons.
37:30 Qu'est-ce que vous en pensez, Michel Onfray ?
37:32 D'abord, vous me posiez tout à l'heure la question du quel figure gaulliste aujourd'hui ?
37:36 Monsieur Carocci, pour ce coup-là. Là, on a tout.
37:40 D'abord, l'élégance du français, le fait qu'il parle sans notes.
37:43 Tous ces gens qui ont des notes, qui lisent leur truc à toute allure,
37:46 et puis qui donnent une gifle au micro avant d'aller se replacer dans les rangs de l'hémicycle.
37:53 Il est calme, il est placide, il est lucide, il parle un français très correct,
37:56 il dit des choses extrêmement intéressantes, extrêmement intelligentes.
37:58 Et gaullienne, c'est complètement gaullien.
38:00 Moi, je souscris absolument.
38:01 Je dis, mais il a raison.
38:02 On ne peut pas dire en permanence, il faut refaire nation,
38:05 et puis défaire la nation et casser la nation.
38:07 Je rappelle que ce qu'on fête avec 1789,
38:10 ce n'est pas tant la prise de la Bastille que la fête de la Nation l'année suivante.
38:14 Et on a oublié la fête de la Nation.
38:17 La prise de la Bastille, c'est quand même la décapitation de deux ou trois personnages.
38:22 On leur met du foin dans la bouche, on met la tête au bout des pics.
38:24 Ce n'est pas terrible.
38:25 La fête de la Fédération, c'est quand même beaucoup mieux.
38:27 Parce que c'est l'année suivante, cette occasion de dire,
38:29 nous allons fêter les Français rassemblés.
38:32 Et c'est ça, faire nation.
38:34 Alors, ce dessinateur, il fait ce qu'il veut.
38:35 Je ne sais pas s'il n'y croit pas.
38:38 - Ganotti.
38:38 - Mais alors, il est dans la figuration.
38:40 - Oui, c'est une œuvre d'art.
38:42 - Oui, mais dans la figuration.
38:44 Alors, c'est une espèce de figuration lyrique.
38:46 C'est-à-dire qu'évidemment, si vous mettez sur un même espace,
38:49 le Paris d'aujourd'hui, le Marseille d'aujourd'hui,
38:51 et puis une vague de Tahiti parce qu'il y aura des surfers, etc.
38:54 Non, mais c'est bien.
38:55 Vous savez qu'Arpaccio, il fait ça dans la légende de Saint-Ursul.
38:58 C'est-à-dire qu'il y a plusieurs époques et plusieurs temps dans une même peinture.
39:01 C'est une vieille tradition de la peinture.
39:02 Ça, ça me paraît très intéressant.
39:04 C'est une histoire qui, en plus de ça, son dessin est un dessin très figuratif.
39:10 Donc, la figuration, ce n'est pas compliqué.
39:12 Ce qu'il y a, on le reproduit.
39:13 Et s'il y a une croix, on met une croix.
39:15 Et si on efface une croix, pourquoi efface-t-on la croix ?
39:17 C'est ça qui est très intéressant, parce qu'après tout, l'aspect un peu infantile,
39:22 c'est quand même un style assez infantile.
39:23 L'art contemporain peut faire des choses autrement.
39:25 Il y avait ça, mais pourquoi pas ?
39:26 Allons-y, on a joué la carte de la chose facile et de la bande dessinée.
39:30 Pourquoi pas ?
39:31 On a joué le jeu de mélangeons plusieurs espaces dans un même temps.
39:34 Pourquoi pas ? Je trouve ça intéressant.
39:36 Mais cette façon d'effacer, et comme par hasard, la croix des catholiques,
39:40 sur un édifice qui reste un édifice catholique,
39:42 on se dit que ça ne peut pas procéder d'une volonté délibérée.
39:45 On voit bien le personnage qui doit travailler avec son petit crayon,
39:47 sa petite gomme, et qui doit travailler très précisément,
39:49 et qui dit "là, je fais sauter la croix".
39:51 C'est très simple.
39:52 Ça correspond au désir walkiste d'Emmanuel Macron.
39:55 Faites-moi sauter tout ce qui fait nation, tout ce qui rappelle l'ancienneté,
39:58 tout ce qui montre que nous sommes un vieux pays judéopathique.
40:00 Aucun rappel de la charte olympique qui précise ni religion ni politique.
40:04 Donc, est-ce que finalement, ce n'est pas ça qui est dans cette affiche ?
40:07 Ni religion, ni politique ?
40:08 Mais ce n'est pas de la religion, ni de la politique.
40:10 À ce moment-là, il faudrait raser toutes les églises dans les villages
40:12 en disant "c'est religieux, c'est politique, c'est fini".
40:15 Non, c'est patrimonial.
40:16 On a bien vu comment les gens ont réagi quand Notre-Dame de Paris a brûlé.
40:20 Personne n'a dit "oh, si, quelques-uns, évidemment".
40:22 Bien fait, c'est des reliques du christianisme, finissons-en avec tout ça.
40:27 Non, il y a un moment donné où c'est culturel, ça fait partie de la culture.
40:30 Les vandales, c'est ça.
40:31 Que sont les vandales ?
40:32 Qui sont les premiers vandales, d'ailleurs, dans l'histoire de France,
40:34 qui fascinent tant les révolutionnaires de chez Mélenchon ?
40:39 Ce sont les gens qui détruisent les œuvres d'art.
40:41 Ce sont les gens qui font des feux, qui font des bûchers,
40:43 tout ce qui est susceptible d'être fondu est fondu et détruit.
40:47 Et puis, qui confisquent les œuvres dans les châteaux, etc.
40:50 Donc, on détruit les tombeaux des rois, on massacre ce qui reste des corps.
40:55 On utilise même, d'ailleurs, des restes de ces cadavres-là
40:57 pour utiliser des pigments pour la peinture ou ce genre de choses.
41:01 Donc, il y a des gens qui sont des barbares et qui sont des vandales.
41:03 Je pense que ce monsieur, avec sa petite croix oubliée,
41:05 s'inscrit, petitement, parce que c'est modeste et c'est léger,
41:08 mais dans la grande logique des barbares.
41:10 Oui, mais c'est un artiste, encore une fois.
41:12 Il a le droit, mais il a le droit aussi qu'on puisse commenter son œuvre d'art,
41:16 en estimant que sa petite BD est faussement subversive
41:21 parce qu'elle est vraiment wokiste et elle est probablement très subventionnée.
41:23 Justement, le wokiste, qu'est-ce que c'est pour vous ?
41:25 Le wokiste, il a des traits très différents.
41:27 Il peut apparaître à la faveur d'une affiche pour les Jeux olympiques.
41:32 Il est présent comment dans notre société française, Michel Monprès ?
41:36 Alors, il faudrait beaucoup de temps pour ça, presque une émission entière.
41:38 Mais je pense que comme itérant les rives-pouvoirs, il a des idées de gauche en 83.
41:42 Les idées de gauche, ça ne marche pas du tout.
41:43 Il n'a pas réussi. La France est en faillite.
41:44 Et il se dit bon, il va falloir qu'on trouve un autre logiciel.
41:47 Le logiciel, c'est l'Europe.
41:48 Mais il se dit, il faut quand même que j'ai un logiciel qui me distingue un peu de Giscard.
41:51 Je me suis longtemps battu contre Giscard et je suis en train d'appliquer la politique de Giscard.
41:55 Et il va opter sur le sociétal, c'est-à-dire non pas le social, mais le sociétal.
41:58 Le social, c'est la classe ouvrière, les pauvres, les gens simples, les gens modestes,
42:01 les gens qui travaillent, la misère ouvrière, etc.
42:04 Ça dit tout ça, on s'en fout.
42:06 Laissons ça de côté.
42:06 En revanche, un nouveau peuple est né, qui est le peuple du métissage,
42:10 de la créolisation, du néo-féminisme, etc.
42:14 Et il y a quelques philosophes très utiles pour ça, ceux qu'on appelle les déconstructionnistes.
42:17 Les gens qui déconstruisent comme on déconstruit un mur.
42:19 - Comme un homme déconstruit ?
42:21 - Eh bien c'est ça, ça vient de là.
42:22 Et les déconstructionnistes, ce sont des Foucault, des Deleuze, des Guattari, etc.
42:26 Tous grands défenseurs de Mitterrand.
42:29 Monsieur Badinter avait des sanglots dans la voix quand il parlait de Michel Foucault
42:34 qu'il recevait à la chancellerie.
42:36 Je dirais que surveiller et punir comme ligne idéologique de la politique de la justice française,
42:42 ce n'était pas forcément terrible.
42:43 Mais effectivement, tous ces déconstructeurs, ça s'appelait aussi le structuralisme en philosophie,
42:48 ont fini par comprendre que c'était une impasse.
42:49 Dans les années 90, ils font à peu près tous marche arrière.
42:52 Sauf ceux qui meurent, Lacan est mort, Althusser a juste étranglé sa femme et il ne prend plus la parole.
42:56 Mais les autres, ils passent à autre chose.
42:58 Ces livres-là sont traduits aux Etats-Unis.
43:00 Alors c'est déjà une époque où la philosophie française est absolument incompréhensible,
43:04 totalement imbitable.
43:05 Donc c'est incompréhensible, c'est traduit en anglais pour les Américains, vous imaginez.
43:09 Et c'est commenté par des Américains qui parlent le français
43:12 et qui rajoutent des sauces incroyables pour commenter l'anti-Édipe, etc.
43:16 Ça donne une idéologie qui est une idéologie prétendue de gauche.
43:20 Et cette gauche française qui a perdu son logiciel dit
43:24 "Bah finalement, c'est pas si mal que ça, cette gauche des campus américains.
43:27 D'abord, elle n'est pas marxiste, c'est formidable.
43:29 On n'a plus besoin d'aller voir du côté de l'Union soviétique.
43:31 Et puis, elle est plutôt sympathique, elle est cool et puis on laisse les beaufs.
43:35 Laissons les beaufs, laissant la France profonde."
43:37 Si tant que socialiste à l'époque qui suivait Strauss-Kahn avait dit
43:41 "laissons ces gens-là à Marine Le Pen",
43:42 ben voilà, ils ont laissé Marine Le Pen et Marine Le Pen dit
43:45 "moi je les prends, je les ai prises et elle les a prises depuis très longtemps.
43:47 Elle est cajole depuis un petit moment."
43:49 Et le wokeisme c'est devenu ça.
43:50 C'est-à-dire cette idée que si vous allez à l'opéra, on va vous dire
43:53 un homme blanc qui est en train de jouer, je sais pas quoi,
43:55 Wotan dans la Valkyrie par exemple,
43:57 eh bien il faudrait que ce soit une femme noire, ce serait quand même mieux.
43:59 Et puis si vous avez quelqu'un qui sera, etc.
44:02 Enfin bon, toutes les minorités visibles, il faut qu'elles soient devenues majoritaires.
44:06 Et cette façon de déconstruire n'épargne plus rien du tout.
44:10 Vous avez aux États-Unis des gens qui disent
44:11 "plus jamais on ne s'occupera de grec et de latin, puisqu'il n'y avait que des blancs."
44:15 Donc Homer, Echil, Eurydice, Sophocle, plus rien de tout ça.
44:18 Et des hommes. La musique classique.
44:20 Vous dites "oh là là, mais Beethoven, Mahler, Wagner, Bruckner, Bach,
44:24 c'était tous des blancs."
44:26 On laisse tout ça de côté.
44:27 La peinture, etc. Que des hommes, que des blancs, etc.
44:29 Et d'un seul coup, au nom de la culture,
44:31 on met un brasier total dans les bibliothèques, dans les musées,
44:36 dans les salles de concert et le wokeisme se suppose qu'on est éveillé.
44:39 La traduction c'est "on est éveillé".
44:41 Merci beaucoup Michel Onfray, on se retrouve évidemment la semaine prochaine.
44:44 L'info continue sur CNews.

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