• il y a 7 mois
Michel Onfray passe en revue l’actualité de la semaine dans #FaceAMichelOnfray. Présenté par Laurence Ferrari.

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Transcription
00:00 *Générique*
00:03 Et c'est un plaisir de vous retrouver aujourd'hui pour Face à Michel Onfray sur CNews et sur Europe 1.
00:08 Bonjour Michel !
00:09 Bonjour Laurence.
00:10 Une heure en votre compagnie pour vous entendre sur les sujets de l'actualité de la semaine.
00:14 A commencer par la situation en Nouvelle-Calédonie après l'instauration de l'état d'urgence,
00:18 ce qui vous interpelle Michel, dans ces violences liées au départ aux indépendantistes,
00:22 c'est que l'on puisse remettre en cause les trois référendums lors desquels la population a clairement dit non à l'indépendance.
00:29 Il y a aussi le choc et la violence de cette attaque sanglante contre un fourgon pénitentiaire dans l'Eure,
00:34 après l'évasion d'un narcotrafiquant, la mort aussi de deux agents pénitentiaires abattus par des armes de guerre.
00:40 Un symbole de la violence désinhibée du narcotrafique.
00:44 On s'intéressera aussi à cette France qui consomme de plus en plus de stupéfiants,
00:48 mais aussi à la politique pénale qui n'arrive pas à stopper ces parcours criminels qui commencent dès le plus jeune âge.
00:54 On évoquera les élections européennes bien sûr, scrutin dans trois semaines désormais.
00:58 Voyez-vous un intérêt dans un débat éventuel ?
01:01 Emmanuel Macron, Marine Le Pen, comme il en a été question à un moment pas sûr que l'invitation soit finalement envoyée par l'Elysée.
01:07 Enfin, dans un registre un peu plus léger, les nouveaux mots du dico, du dictionnaire.
01:12 Tiktoker, sapiosexuel, décolonialisme, afro-descendant,
01:17 quelles significations ont ces nouveaux mots ?
01:19 Que disent-ils de notre époque ?
01:20 C'est aujourd'hui, dans Face à Michel Oncray.
01:22 Et Michel, on va commencer par la gravité des événements qui se déroulent en Nouvelle-Calédonie,
01:27 où la violence s'est déchaînée, l'état d'urgence a été décrété par Emmanuel Macron.
01:31 C'est une révision constitutionnelle votée par l'Assemblée nationale
01:35 pour élargir le corps électoral aux natifs et aux résidents présents depuis au moins dix ans dans l'archipel,
01:41 qui a provoqué cette flambée de colère des indépendantistes au départ, et puis ensuite des délinquants.
01:46 Eux veulent rester sur les accords de Nouméa de 1998 avec un corps électoral restreint.
01:52 On va écouter les revendications de ces manifestants.
01:55 Et d'abord, on va écouter Gabriel Attal, Premier ministre, instaurer l'état d'urgence.
01:59 La violence n'est jamais ni tolérable, ni justifiable, en aucune circonstance.
02:06 Et c'est la raison pour laquelle le ministre de l'Intérieur a annoncé l'envoi de renforts sur place
02:14 pour garantir la sécurité.
02:16 Et je veux rendre hommage à l'ensemble des forces de sécurité,
02:19 les policiers, les gendarmes qui sont engagés actuellement.
02:22 Pour assurer l'ordre.
02:28 Je le dis et je le redis, la priorité c'est de retrouver l'ordre, le calme et la sérénité.
02:36 Nous avons toujours été dans le dialogue avec l'ensemble des parties prenantes.
02:41 Et nous resterons toujours dans le dialogue.
02:43 Voilà pour Gabriel Attal, qui a donc instauré l'état d'urgence à l'Assemblée nationale.
02:47 Quelques mots quand même des indépendantistes.
02:49 Que disent-ils ? Quelles sont leurs revendications ?
02:50 On leur a posé la question au début du conflit.
02:53 L'autorisation nous a été donnée par notre conseil.
02:56 Et nous voilà ici aujourd'hui pour venir installer les drapeaux,
03:00 pour dire non au dégel du corps électoral.
03:03 On espère que notre voix, notre dignité, notre fierté d'être un peuple,
03:08 le peuple de Kanaki, soit écoutée au niveau de l'Assemblée nationale.
03:14 Que l'état nous entende, qu'il prenne en compte que nous on n'est pas d'accord avec ça.
03:18 On n'est pas d'accord avec cette loi-là, avec ce texte qu'ils ont pendu.
03:22 On n'est pas d'accord du tout.
03:23 Voilà pour ces revendications des manifestants, des indépendantistes.
03:27 Michel Onfray, qu'est-ce que vous pouvez répondre face à cette flambée de violence ?
03:31 Il y a beaucoup de choses à dire parce que ça ressemble à une espèce de répétition générale
03:36 de ce qui pourrait se passer sur le reste du continent, je dirais.
03:41 Moi, je suis girondin.
03:42 C'est-à-dire que vraiment, ce sont des moments où effectivement,
03:45 on pourrait montrer ce qu'est l'organisation girondine de la France,
03:49 prendre en compte la spécificité des peuples.
03:52 Moi, je ne suis pas gêné par le fait de parler d'un peuple Kanak, d'un peuple Corse,
03:55 d'un peuple normand, ça ne me gêne pas du tout.
03:56 D'un peuple martiniquais, savoyard, j'avais oublié.
04:02 Parce qu'il y a des identités et que la République peut être forte
04:04 de ses propres identités intérieures, puisque ça ne menace pas la République
04:09 de pouvoir exister aussi comme Savoyard, comme Breton.
04:13 Et donc là, il y aurait des choses à faire.
04:14 Et je pense que ces choses ont été déjà faites.
04:16 C'est-à-dire que déjà, cette idée qu'il aurait fallu trois référendums
04:20 au lieu d'un seul, normalement.
04:21 – Il y en a eu trois.
04:22 – Trois, qu'est-ce que ça veut dire ?
04:23 – Les trois, c'était non à l'indépendance.
04:25 – Alors non, on dit, on va recommencer, non, on va recommencer, non.
04:28 Puis après, les gens disent, c'était non, mais ce sera quand même oui.
04:31 Donc il y a un moment donné où effectivement, il n'y a plus aucun respect
04:33 de ce qu'est la démocratie, d'une part.
04:34 D'autre part, il y a cette idée que, jadis, il y avait des citoyens actifs
04:38 et des citoyens passifs.
04:39 Alors d'abord, je ne parle même pas des femmes.
04:40 Les femmes ne faisaient pas partie des citoyens actifs.
04:43 Mais dans les citoyens actifs, il fallait être suffisamment imposé,
04:45 pour le dire dans le vocabulaire d'aujourd'hui,
04:46 pour avoir le droit de s'exprimer sur le destin de la France.
04:49 Et puis heureusement, il y a un moment donné, on a dit suffrage universel.
04:52 Puis heureusement, à un moment donné, on a dit suffrage universel,
04:53 y compris pour les femmes.
04:55 Et moi, ça fait longtemps que je défends l'idée d'un suffrage universel
04:58 élargi même aux étrangers domicilés, ce qu'on appelait les métèques, jadis.
05:02 Ce n'était pas une insulte, mais enfin, dans l'Athènes démocratique.
05:05 Et puis là, d'un seul coup, on se retrouve avec des gens qui nous disent
05:09 "mais non, mais nous, la démocratie, ça ne nous intéresse pas du tout.
05:11 Les indépendantistes ne veulent pas de la démocratie.
05:13 Ils ne veulent pas de la République.
05:14 Ils ne veulent pas de la France.
05:16 Et ils nous proposent rien moins qu'un État racial, un État raciste.
05:19 Ils nous disent très précisément "vous avez tout fait pour nous,
05:23 il n'y a pas de problème.
05:23 Vous avez même écarté des gens en disant "vous, vous n'aurez pas le droit de voter.
05:26 Vous êtes blanc, vous n'êtes pas là depuis assez longtemps, etc."
05:28 Ce qui est très anti-républicain.
05:29 On n'a pas entendu tous ces gens, les Fabius et autres,
05:32 qui visent à la constitutionnalité des textes,
05:35 dire que c'était inadmissible de dire "vous, vous votez, mais vous ne votez pas".
05:39 – Donc c'est un homme, une femme, un vote pour vous.
05:41 – Voilà.
05:41 – C'est la démocratie.
05:42 – Ça s'appelle la démocratie.
05:42 Pouvoir du peuple, par le peuple, pour le peuple, et pas
05:44 pouvoir de quelques-uns, choisi par les hommes politiques,
05:47 pour faire de telle sorte que le résultat du référendum soit connu.
05:49 Et quand il est connu, on le refait quand même.
05:51 Quand il est connu, on va le faire une troisième fois, etc.
05:53 Quand on nous parle de mondialisation heureuse du côté du libéralisme,
05:57 on a de l'autre côté Mélenchon qui nous parle de la créolisation heureuse.
06:00 On voit une créolisation malheureuse.
06:02 Je ne sais pas si Mélenchon a lu Édouard Glissant,
06:04 les textes du philosophe Édouard Glissant qui théorise cette histoire de la créolisation.
06:08 J'ose espérer que oui.
06:09 Mais il nous dit, Glissant, qu'il n'y a jamais eu de créolisation sans violence.
06:14 Il dit "ça peut se faire sans violence, mais ça ne s'est jamais vu.
06:16 À chaque fois que ça a eu lieu, il y a eu violence".
06:18 Et il nous dit d'ailleurs, modèle de réussite d'une créolisation, le Brésil.
06:22 Il ne faut vraiment jamais être allé au Brésil
06:24 pour imaginer que c'est formidable comme modèle de société.
06:27 Et là, voilà ce qu'on nous propose.
06:28 C'est-à-dire que Mélenchon crie au fascisme partout,
06:30 surtout dès qu'il voit Marine Le Pen arriver.
06:32 Et il soutient des gens qui ne sont pas des démocrates,
06:35 qui ne sont pas des républicains, qui sont des racistes,
06:37 qui veulent un État raciste et racial,
06:39 qui veulent mettre des gens à la porte en disant "vous n'êtes pas chez vous".
06:42 Mais attendez, je suis là depuis un siècle et demi.
06:44 Ma famille est là depuis un siècle et demi.
06:46 Mais vous allez tout de même rentrer chez vous.
06:48 Et on estime que tout ça est susceptible d'être dit sans problème et sans difficulté.
06:52 – Sonia Bakess, qui est ancienne secrétaire d'État, qui vit en Nouvelle-Calédonie,
06:55 parle même de racisme anti-blanc.
06:57 Elle dit qu'il y a une chasse aux blancs qui est lancée.
06:59 – Je crois qu'elle a raison, parce qu'il y a un moment donné
07:01 où le concept pouvait être un petit peu flou,
07:03 parce qu'effectivement le racisme anti-blanc pouvait être flou aussi.
07:06 Et c'était facile de la part de certains extrémistes
07:09 de voir du racisme anti-blanc dès qu'il y avait quelque chose,
07:11 de voir un féminicide dès qu'il y a une femme.
07:13 Une femme peut être tuée non pas parce qu'elle est femme,
07:16 mais se faisant, elle est femme.
07:18 Et donc il y a un moment donné où,
07:19 moi je défends le mot féminicide, attendons-nous bien.
07:22 Mais il y a un moment donné où effectivement,
07:23 on doit pouvoir réfléchir sur les mots.
07:25 Et là il me semble que le mot peut fonctionner.
07:27 On peut parler de racisme anti-blanc parce que,
07:29 vous avez des gens qui vous font une catégorie entière en disant
07:31 "vous êtes blanc, je vous ai vu, je vous ai regardé,
07:32 je ne sais pas ce que vous pensez".
07:34 Mais il y a un moment donné où on se dit
07:36 "mais monsieur Mélenchon vous êtes blanc aussi,
07:37 ce serait bien que vous sachiez que dans la logique de ces gens,
07:41 qui s'en vont chercher à l'étranger ?
07:42 C'est le parti de l'étranger le parti de Mélenchon.
07:44 – Pourquoi ?
07:45 – C'est le parti de l'Azerbaïdjan, c'est le parti de la Russie,
07:48 c'est le parti de la Chine.
07:49 – Qui intervient d'ailleurs en Amérique du Nord.
07:50 – Ce n'est pas le parti du restant de la France,
07:52 il pourrait dire "bon la France c'est ceci, la France c'est cela".
07:54 Pas du tout, lui il a pris le parti de l'étranger.
07:57 Mais c'est vieux ça chez les communistes, chez les trotskistes.
08:01 – D'ailleurs dans leur discours, les communistes ou la France insoumise
08:04 renvoient beaucoup à la colonisation bien sûr, la colonie française.
08:08 Et ça c'est quelque chose de très récurrent dans leur discours.
08:10 – Mais qui colonise qui ?
08:11 Il y a un moment donné où quand on voit la place qui est donnée au canin
08:14 qui est surévaluée par rapport à ce qu'il représente réellement
08:17 simplement pour acheter la paix sociale,
08:19 on leur disait "on va vous donner une autonomie, une indépendance etc."
08:22 Pour ce que je sais, quand les canins qui ont eu la possibilité de gérer les affaires,
08:26 ils ont mal géré, ils ont détruit ce qu'on leur a donné.
08:30 C'est-à-dire que les zones économiques qui sont gérées par eux dans le pays,
08:33 ce n'est pas terrible, ça a plutôt tendance à s'effondrer.
08:35 On a vu d'ailleurs, comparaison n'étant pas raison,
08:37 mais ce qui s'est passé avec l'Algérie,
08:38 quand ils font les Algériens de leur indépendance depuis 1962,
08:41 eux aussi sont allés chercher à l'étranger, l'Union soviétique à l'époque,
08:44 les armes qui arrivaient de Yougoslavie, ça ressemble étrangement.
08:49 À cette époque sinistre de la vie, ou de l'époque de l'histoire de France,
08:53 où des gens ont dit "c'est la valise ou le cercueil".
08:56 À l'époque, souvenez-vous, on a dit, vous avez connu ça par les livres d'histoire,
09:01 mais ça y ressemble étrangement, et ça ne suffira pas de dire
09:05 "on supprime TikTok et on déclare l'état d'urgence".
09:08 – Justement, à propos de TikTok, il y a un réseau social très utilisé,
09:11 non seulement par les jeunes, mais aussi par les émotifs,
09:13 ça leur permet de se rassembler très rapidement.
09:16 Le gouvernement a décidé d'interdire TikTok,
09:18 c'est aussi une façon de contrer l'influence de la Chine,
09:20 c'est un réseau social chinois qui est extrêmement présent en Nouvelle-Calédonie.
09:25 Michel, en fait ?
09:26 – Oui, quand on a derrière une espèce d'idéologie qui consiste à présenter la France
09:31 comme méchante, mauvaise, colonisatrice depuis des années.
09:34 C'est au moins depuis après mai 68,
09:37 on a commencé à déconstruire l'histoire de France,
09:39 et la déconstruire, ça n'était pas détruire des mythes,
09:42 c'est tout le travail que je fais moi en philosophie, la destruction des mythes,
09:45 mais simplement supprimer l'histoire pour la remplacer par des mythes.
09:49 Donc le mythe, effectivement, des méchants colons,
09:51 dès qu'ils sont arrivés, du méchant blanc parce qu'il est un blanc,
09:53 et du bon noir parce qu'il est noir, ou du bon colonisé, etc.
09:57 Quand je fais savoir à des gens que 1492 c'est un peu ancien quand même,
10:01 et que peut-être c'est difficile de reprocher à quelqu'un
10:03 d'avoir été du bon ou du mauvais au quai de l'histoire,
10:05 en 1492 on me dit "en fait, on va voir votre arbre généalogique",
10:08 c'est Adolf Hitler qui demandait les arbres généalogiques,
10:10 pour voir s'il n'y avait pas un peu de sang juif,
10:12 et là on dit "ah mais il y a un peu de sang blanc",
10:14 et puis "ah il y a un peu de sang noir",
10:16 "ah du sang noir c'est bien",
10:18 "du sang blanc, ah bah ça c'est pas bien du tout".
10:20 J'ai vu par exemple en Martinique, dans des librairies,
10:22 on n'a pas ça sur le continent,
10:25 mais des ouvrages qui sont publiés par des gens
10:27 qui s'appuient sur la psychanalyse en nous expliquant
10:29 qu'on transmet le traumatisme de la colonisation.
10:33 C'est-à-dire que vous dites "bah oui mais c'est loin ça".
10:35 Oui mais non, ça se transmet, ça se transmet même par les gènes.
10:37 De génération en génération, c'est-à-dire par les gènes,
10:40 vous vous rendez compte, on est dans des thèses racialistes du XIXe siècle
10:42 qui ont rendu possible pour le coup le nazisme.
10:45 On va rechercher des théories qui sont tombées totalement en désuétude
10:49 et qui sont défendues par des gens sous prétexte de modernité.
10:52 Michel, on va passer à la situation en métropole
10:54 parce que la semaine a aussi été marquée
10:56 par une sanglante attaque contre un foron pénitentiaire
10:59 par des criminels armés de fusils automatiques.
11:02 Ils ont tué deux agents pénitentiaires, blessés trois d'entre eux.
11:05 Tout cela pour faire évader un délinquant multi-condamné âgé de 30 ans
11:09 au pédigree judiciaire long comme le bras.
11:11 Il se nomme Mohamed Amra.
11:12 Deux pères de famille dont l'un avait une épouse enceinte de cinq mois.
11:16 Leurs collègues ont dit évidemment leur émotion.
11:18 Ils ont déclenché un mouvement de grève dans les prisons.
11:21 On va écouter l'un de ces agents pénitentiaires.
11:24 Vous comprendrez, je pense très fortement, l'émotion qui règne dans nos rangs.
11:28 Ce genre d'attaque ne s'était pas vue depuis 1992
11:33 où d'autres collègues étaient décédés lors d'une évasion.
11:37 Et donc, ce nouvel incident qui est malheureusement très extraordinaire
11:45 de par son dramatisme, nous sommes vraiment tous abattus.
11:49 Voilà pour l'émotion d'un des collègues de ces agents pénitentiaires
11:52 qui ont trouvé la mort dans cette attaque.
11:53 Michel Lepré, qu'est-ce que ça dit pour vous, de notre société,
11:56 en dehors de l'ultra-violence, la violence désinhibée désormais des narcotrafiquants ?
12:01 Ça dit que la guerre civile à bas bruit se poursuit
12:03 et qu'il y a une espèce de juridiction d'exception pour les délinquants
12:08 et une aussi juridiction d'exception pour les policiers
12:11 qu'on présente aujourd'hui comme des gens qui tuent, je le rappelle.
12:13 Quiconque dit de la police qu'elle tue devrait quand même se retrouver rapidement au tribunal.
12:17 Il y a un moment donné où il faut faire la démonstration de ce genre de choses.
12:20 Et là, on voit bien que finalement, quand vous êtes délinquant,
12:24 vous vous échappez toujours plus ou moins à la justice
12:26 puisque vous êtes une pauvre victime de cette méchante société.
12:28 Et on estime qu'un policier, un gendarme, je ne parle pas des militaires,
12:34 mais enfin, ou un gardien de prison qui doivent tirer quelques balles dans l'année
12:37 et encore, si on leur donne l'autorisation, et dans leur vie peut-être, oui,
12:41 et on leur dit "allez, armes égales, allez-y,
12:43 alors vous, il va falloir demander l'autorisation de tirer,
12:45 il va falloir remplir un formulaire avant de demander aux délinquants
12:48 qui sont en train de vous viser avec une Kalachnikov
12:51 s'il veut bien poser son arme, etc.
12:53 Il y a l'administration, il y a la police des polices,
12:55 il y a tout ça qui rend impossible.
12:56 Et puis la politique qui fait que ces métiers qui sont nécessaires
13:00 ne peuvent pas être pratiqués comme il le faudrait
13:03 puisque ce sont des gens mal payés.
13:05 Je veux dire, vous vous réveillez le matin
13:06 et vous ne savez pas si vous allez rentrer le soir pour des salaires de misère
13:09 et vous êtes dans des voitures banalisées pour emmener des gens…
13:12 - Ou siglés, bien pire.
13:13 - Ou encore mieux, vous avez eu la cible.
13:15 Donc effectivement, je trouve inadmissible qu'on considère notre police,
13:20 mais en même temps, il faudrait dire nos infirmières, nos infirmiers,
13:23 nos médecins, nos enseignants, nos pompiers, etc. de cette manière-là.
13:26 Et s'il n'y a pas de réponse autoritaire à ce défaut d'autorité,
13:30 parce qu'on ne peut pas continuer à dire "ça ne se passera pas comme ça".
13:33 En fait, le chef de l'État fait des tweets en disant "nous serons intraitables",
13:36 "ça ne peut pas durer", etc.
13:37 Il y en a assez des nounours, il y en a assez des bougies,
13:39 il y en a assez des marches blanches.
13:41 Il y a un moment donné où quand l'autorité violente,
13:44 l'autorité non légitime est ce qu'elle est devenue,
13:46 il faut une autorité légitime pour la contrer.
13:48 Sinon, ce n'est pas compliqué, ils auront raison.
13:50 La violence, elle en porte toujours la mise
13:54 s'il n'y a pas une contre-violence en face,
13:55 qui pour le coup est une violence d'État, qui est une violence légale.
13:58 Et qui, je pense, les Français derrière elle,
14:00 les Français, ils ont envie de cette sécurité.
14:02 Ils savent bien que la police ne tue pas.
14:04 – Bien sûr, au-delà de cette attaque sanglante,
14:06 il y a la question des prisons françaises,
14:09 qui est un véritable tabou.
14:10 On ne veut pas entendre parler des prisons,
14:11 on ne veut pas savoir ce qui s'y passe,
14:13 on ne veut pas de construction de prison à côté de chez soi,
14:15 ça il faut le dire.
14:16 Je vous propose d'écouter ce que disait,
14:17 il y a quelques jours sur notre antenne, Pierre Botton,
14:20 ancien homme d'affaires, détenu pendant plus de 600 jours
14:22 dans plusieurs maisons d'arrêt,
14:23 sur la réalité de ce qui se passe dans les prisons.
14:26 On l'écoute.
14:27 – Ce que j'ai vu, ce que j'ai vécu pendant des jours et des jours.
14:31 – C'est-à-dire ?
14:31 – La drogue de partout.
14:32 – La drogue de partout ?
14:33 – De partout.
14:34 Les téléphones, j'ai vu Monsieur le garde des Sceaux
14:38 dire qu'il avait fait une opération cellule nette,
14:41 il a dit "on a récupéré 117 téléphones".
14:45 Vous savez combien ils en ont retiré l'année dernière,
14:47 l'administration pénitentiaire ?
14:48 40 000.
14:49 – Juste l'année dernière.
14:50 – 40 000.
14:51 Il y en a de partout.
14:52 La violence de partout, la corruption, madame.
14:55 Vous savez ce à quoi sont soumis ces surveillants ?
14:58 Vous savez ce que c'est que de se faire cracher dessus 3, 4, 5 fois ?
15:00 – Par jour ?
15:01 – Oui, et puis il y a une organisation au sein de la…
15:06 Je vous raconte une petite…
15:06 – Parallèle, une organisation parallèle.
15:08 – Mais il y a une organisation, tous les détenus se connaissent.
15:11 – Voilà, pour Pierre Botton, ancien détenu, Michel Enfray,
15:13 qu'est-ce qui vous frappe dans son témoignage,
15:16 qui est vraiment la réalité de ce qui se passe
15:17 dans les maisons d'arrêt et les prisons ?
15:19 – Vous me permettrez d'avoir moins le souci de Pierre Botton
15:21 que de Michel Foucault.
15:22 – On est d'accord.
15:23 – Et je pense que par exemple, quand Robert Badinter nous dit
15:26 "Ah, j'ai rencontré Michel Foucault, c'était tellement formidable, etc."
15:28 Michel Foucault, il écrit un livre qui s'appelle "Surveiller et punir"
15:31 qui est la théorie 68 ardes de la prison.
15:35 – C'est à dire ?
15:36 – C'est à dire, j'allais vous le dire.
15:38 C'est à dire qu'effectivement, il y a un moment donné où on dit
15:40 "à l'intérieur de la prison, il n'y a que des victimes
15:43 et de l'autre côté, il n'y a que des coupables".
15:45 La société est dangereuse, les prisonniers,
15:48 c'est le sel de la terre, c'est à partir de,
15:50 ça c'était la théorie de Bakounine, qu'on va pouvoir faire la révolution,
15:53 c'est celle de Mélenchon aujourd'hui, c'est à dire ouvrons les prisons,
15:57 ce sont des pauvres victimes de la société
15:59 et ce sont des gens tellement bien, etc.
16:02 Et Robert Badinter écrit des textes…
16:05 – "Paix à son âme" ?
16:06 – Oui, "Paix à son âme" mais il a laissé une œuvre,
16:09 il a laissé des livres, il a laissé des discours
16:11 et puis il a laissé une espèce de mythologie derrière lui
16:13 et puis il est au Panthéon, bientôt.
16:15 Enfin il y a un moment donné où la chose vous est clairement dite,
16:18 eh bien il faut arrêter avec cette philosophie pénale,
16:21 ça ne marche pas, il y a dans les prisons trop de gens
16:23 qui ne devraient pas s'y trouver.
16:25 – Par exemple ?
16:25 – Un certain nombre de gens qui relèvent de la psychiatrie par exemple,
16:29 il y a un certain nombre de gens vraiment fous,
16:31 avec des consommations d'alcool, de drogue, etc.
16:34 ou des problèmes de nature psychiatrique en relation avec la société,
16:37 l'éducation, le milieu, l'enfance, etc.
16:40 Ces gens n'ont pas leur place là, ça me paraît évident,
16:42 vous avez des gens qui sont là parce qu'ils ont fait quoi ?
16:44 Un petit trafic de rien du tout,
16:45 ils ont conduit trois fois avec un taux d'alcoolémie trop élevé, etc.
16:50 Et puis vous avez des islamistes dangereux,
16:52 et puis vous avez des gens du grand banditisme
16:54 et vous vous dites tout ce monde-là ne peut pas fonctionner ensemble,
16:57 ce n'est pas possible, tout le monde contamine tout le monde.
16:59 Vous avez des jeunes aussi, on ne s'adresse pas de la même manière
17:02 à des gamins qui ont fait deux ou trois sottises,
17:04 et puis il y a des gens qui sont ce type qui a des amis
17:08 qui eux rafalent comme ça en s'en sommant des gens en disant
17:11 on va mettre tout ça avec des gamins de 13 ans etc.
17:13 Donc il faut repenser la politique pénale,
17:15 il faut dire Foucault ça a eu son temps,
17:17 mais il faut que des gens pensent,
17:19 et pas seulement vocifères et éructes à la Mélenchon,
17:22 en disant la prison ce n'est pas bien,
17:23 ou d'autres disant encore des places de prison,
17:24 encore des places de prison.
17:26 La gauche a tort d'estimer qu'il ne faudrait plus de prison,
17:28 et la droite a tort d'imaginer qu'il faudrait plus de prison, point à la ligne.
17:32 Non, il faut d'autres prisons, des prisons différentes.
17:34 – Est-ce qu'il faut Michel Onfray des prisons pour les jeunes ?
17:36 – Oui, bien sûr, mais bien sûr,
17:38 il y a des gens qui n'ont pas été socialisés, jamais.
17:41 Vous avez des mères de famille, on transforme leur voix
17:43 dans l'impression que c'est le père qui parle,
17:45 et qui n'ont jamais rencontré de surmoi,
17:47 c'est-à-dire d'opposition, c'est-à-dire de civilisation.
17:50 On leur a dit "il faut faire ceci",
17:51 ils ont dit "j'en ai rien à faire, je n'utilise pas les gros mots etc."
17:55 Et puis il y a cette idée que ce sont des enfants rois
17:57 qui ont été fabriqués comme des enfants rois à l'école,
17:59 et puis dans un monde arabo-musulman, disons-le comme ça, c'est le petit mâle.
18:03 Et le petit mâle il a raison sur tout,
18:04 et quoi qu'il fasse de toute façon c'est un signe de virilité.
18:07 - Dans de nombreuses civilisations quand même aussi.
18:09 - Pardon ?
18:10 - Dans de nombreuses civilisations aussi.
18:11 - Mais presque toutes les civilisations qui ne sont pas les civilisations occidentales.
18:14 Vous avez totalement raison.
18:15 Donc c'est comme ça que ça fonctionne,
18:17 c'est-à-dire que fabriquer des enfants qui sont des délinquants,
18:20 vous vous demandez pourquoi, vous dites juste "vous n'avez jamais dit non".
18:22 Et puis il y a aussi un père absent.
18:24 Il y a des pères qui font des enfants qui s'en vont, on ne sait plus où est le père,
18:28 le père d'un seul coup il réapparaît et dit "ah bah oui le terroriste c'était mon fils,
18:31 mais ça fait 20 ans que je ne le vois plus" ou ce genre de choses.
18:33 Donc il y a un moment donné où il faut une affection sévère.
18:37 Pour ces enfants, qu'ils sachent ce qu'est la loi.
18:39 C'est-à-dire qu'ils sachent que quand on les réprimande,
18:41 ce n'est pas parce qu'on a envie de leur nuire,
18:44 mais c'est simplement pour leur dire qu'il faut un mode d'emploi,
18:47 qu'il faut une règle du jeu, on ne joue pas à un jeu sans règle du jeu,
18:50 la société a une règle du jeu aussi,
18:52 et ils ne peuvent pas faire ce qu'ils veulent quand ils veulent comme ils veulent.
18:54 Donc bien sûr qu'il faut des endroits comme ceux-là,
18:57 dans lesquels il y aurait pas mal de profs de sport, si vous voyez ce que je veux dire.
19:00 Moi j'ai fait les classes de mon service militaire dans un endroit
19:03 où effectivement on se levait tôt, on se couchait tard,
19:05 on se réveillait dans la nuit, on faisait du sport, et on n'en est pas mort.
19:07 Et il y a un moment donné où on a compris que peut-être si on voulait fabriquer une communauté,
19:11 je n'appelle pas ça vivre ensemble, je déteste ça, mais fabriquer une communauté,
19:14 en latin ça s'appelle "res publica", ça s'appelle la chose publique, ça s'appelle la république,
19:18 eh bien il faut que de temps en temps on prenne en main,
19:20 c'est même pas les reprendre en main, mais qu'on prenne en main ces jeunes-là,
19:23 et pour le coup pas des prisons, mais des espèces de collèges d'éducation...
19:28 - Renforcés. - Renforcés.
19:29 - Michel Onfray, il y a aussi quelque chose sur lequel vous avez attiré mon attention,
19:32 c'est la magistrature. Vous pensez qu'il y a un problème aujourd'hui avec la magistrature,
19:37 et vous proposez pourquoi pas qu'on élise les juges comme aux Etats-Unis ?
19:40 - Écoutez, je me suis renseigné depuis sur cette question,
19:43 et le magistrat à qui j'ai posé la question m'a dit "oui, mais ça deviendrait franchement politique pour le coup".
19:48 Je dirais "et alors ?"
19:50 D'une certaine manière, si on nous dit que la loi elle est donnée au nom du peuple, ce qui est dit,
19:56 c'est pour rire, c'est évidemment pas au nom du peuple que ça se fait, alors faisons-le !
20:00 Et faisons de telle sorte qu'à diplôme égaux, les Français puissent voter, et qu'on dise "oui, voilà".
20:06 Et si la France, elle veut des juges qui soient plutôt sympathisants du Rassemblement National,
20:09 ou plutôt sympathisants de la France Insoumise, eh bien les gens le disent.
20:13 Alors que là, on sait très bien qu'on nous parle d'une magistrature qui serait évidemment juste.
20:19 Enfin, nous c'est la justice, etc. Pas du tout !
20:21 On sait très bien que le syndicat de la magistrature a clairement son idéologie
20:25 quand elle va à la fête du Parti Communiste pour expliquer que les policiers tuent et qu'on connaît l'histoire.
20:31 Pas sûr que les Français moyens, ou le Français tout court, le citoyen, il ait envie de ce genre de justice.
20:37 Donc je voudrais réfléchir, je ne suis pas président de la République, mais réfléchir à la possibilité d'agir comme ça.
20:42 Et la personne en question à qui je proposais mon idée me disait "mais il faudrait juste reprendre la magistrature en main".
20:49 Donc je pense qu'il faudrait reprendre...
20:50 - Baste de programme !
20:51 - Oui, mais c'est ça la politique.
20:52 Parce que sur un certain nombre de sujets, on sait très bien qu'il y a des gens qui sont des têtes de Turcs
20:56 et qui sont, quand il s'agit de faire fonctionner la justice, contre telle ou telle ou telle...
21:00 On sait que ça fonctionne dans ces cas-là.
21:02 - Bon, on va faire une petite pause Michel.
21:04 En vrai c'est toujours bien de réfléchir, avec vous en tout cas.
21:06 On se retrouve dans un instant sur CNews et sur Europe 1.
21:08 J'aimerais juste qu'on tire le fil de la consommation de stupéfiants,
21:11 parce qu'on en a parlé sur le narcotrafic.
21:14 Qu'est-ce que ça veut dire ?
21:15 Pourquoi notre pays est un des pays qui consomment le plus en Europe ?
21:18 La question de la drogue au niveau philosophique, très intéressante à aborder.
21:21 A tout de suite sur CNews et sur Europe 1.
21:23 Et on se retrouve dans la deuxième partie,
21:26 la seconde partie de face à Michel Onfray sur CNews et sur Europe 1.
21:29 Michel, un tout petit mot sur la consommation de stupéfiants,
21:31 parce que le narcotrafic est une pieuvre qui désormais est en train de submerger la France,
21:35 avec ses lois, avec ses barbares qui agissent en plein jour.
21:40 Il y a un véritable problème de consommation aussi.
21:42 Il faut parler des consommateurs, pas seulement des dealers.
21:44 Nous sommes quasiment le premier pays en Europe qui consomme de la drogue.
21:48 Pareil pour les psychotropes, pour les neuroleptiques, pour les antidépresseurs.
21:53 Qu'est-ce que ça dit de notre société en réalité, pour vous Michel Onfray ?
21:56 Je dirais un malaise au sens étymologique, un malaise.
22:00 Des gens qui ne sont pas bien dans leur peau, qui ont envie de s'échapper,
22:03 de partir d'eux-mêmes, de ne pas habiter leur propre existence.
22:07 Cette façon de demander aux anxiolytiques, aux antidépresseurs, à l'alcool,
22:11 ou à un certain usage de l'alcool, ou à la drogue, ou à un certain usage de la drogue,
22:15 ce genre de compensation existentielle, je dirais, de réponse à des souffrances mentales ou morales.
22:22 - Psychiques, oui. - Psychiques, oui.
22:24 Tout ça va de pair avec l'effondrement de la civilisation.
22:27 C'est-à-dire qu'on ne vous a pas enseigné l'ordre, la loi, le bien, le mal, ce qu'il faut faire,
22:32 comment on peut construire sa vie, des hypothèses religieuses, des hypothèses philosophiques,
22:35 en disant "Voilà, on fait une cartographie, on vous donne une boussole,
22:38 et construisez votre existence, on vous jette au monde, comme ça,
22:40 et vous vous retrouvez dans un monde violent, brutal,
22:42 on vous a appris éventuellement un peu de morale, puis vous dites "Mais ça sert à rien d'être moral,
22:46 il y a des prospérités aux vices et des malheurs à la vertu, comme disait Sade,
22:49 et pourquoi être vertueux ? Je ne serais pas remercié d'avoir été vertueux,
22:53 peut-être même que le fait d'être vicieux, ce serait plutôt pas mal."
22:56 Et donc cette tension entre ce qu'on exige de nous et ce que finalement la société nous rend possible,
23:02 ça donne une souffrance qu'on compense avec ce genre de choses.
23:04 Alors le fonctionnement de la...
23:06 - Donc c'est pas forcément un signe de décadence, c'est parfois aussi un signe de désespoir ?
23:09 - Oui, je pense. - Pour vous ?
23:11 - Mais en même temps, désespoir au sens étymologique, ça veut dire cesser d'espérer.
23:14 Quand vous avez, je sais pas, 15 ans, en quoi pouvez-vous espérer ?
23:18 Il y a une époque... - En des millions de choses.
23:20 - Bah lesquelles ? C'est-à-dire il y a une époque où... - Chacun porte son idéal.
23:23 - Oui, mais oui, il y a des gens qui veulent, par le djihadisme, instaurer le califat,
23:28 et je ne fais pas de jugement de valeur, je comprends beaucoup que des jeunes puissent...
23:32 C'est Diams, j'ai vu un reportage récemment sur cette jeune femme qui...
23:36 - Qui était une rappeuse. - Qui était une rappeuse,
23:38 qui du jour au lendemain a dit "mais l'argent, le sexe, la drogue, le business, tout ça,
23:44 ça ne m'intéressait plus, je me suis arrêté, et voilà, je porte le voile maintenant, etc."
23:48 J'ai compris chez cette femme ce qu'il pouvait faire la loi, chez elle, justement,
23:53 c'est la loi qui fait la loi. Et là, d'un seul coup, elle a trouvé un sens à sa vie.
23:56 - Et un cadre. - Elle a un enfant, elle a laissé tomber, tout ça.
23:58 Et alors ? Elle est heureuse, et je pense pas qu'elle ait envie de faire du prosélytisme
24:02 à l'endroit des autres, alors tant mieux.
24:04 Et je trouve que quand les gens trouvent un sens à leur existence, c'est bien.
24:06 Moi, je travaille pour que ce soit la philosophie qui donne un sens à l'existence.
24:09 Mais peu de gens ont l'occasion de rencontrer la philosophie,
24:12 alors que beaucoup ont l'occasion de rencontrer la drogue,
24:15 et même un certain usage de l'alcool.
24:17 Je vois à Caen, par exemple, le jeudi soir, le vendredi soir,
24:20 comment des étudiants descendent de l'alcool très rapidement
24:22 pour être ivres morts dans l'heure qui suit, et ça dure pendant 3 ou 4 heures.
24:26 Qu'est-ce qui se passe dans la tête d'un étudiant qui n'étudie pas pendant ce temps-là,
24:29 et qui n'est pas en état d'étudier pendant au moins la moitié de sa semaine ?
24:32 Qu'est-ce qui se passe dans son cerveau ?
24:34 - En même temps, il y a toujours eu, depuis le début de l'humanité,
24:37 l'utilisation de substances hallucinogènes, Michel.
24:39 La divination, les prophéties, toutes les civilisations ont fait le même usage.
24:43 - La religion, vous allez dire aussi.
24:45 - Je n'ai pas dit la religion, mais les civilisations.
24:47 - La divinisation, c'est pareil.
24:48 - J'entends.
24:49 On a toujours utilisé ces états altérés de la conscience
24:52 pour accéder à un niveau peut-être supérieur, ou pas ?
24:55 - Si, il y a même un anthropologue un jour qui a dit
24:57 qu'on avait cru avoir trouvé une société dans laquelle ces produits n'existaient pas,
25:01 et il dit qu'on a découvert qu'ils soufflaient sur les braises,
25:04 en hyperventilant, en hyperoxygénant,
25:07 on fait ça quand les gamins soufflaient dans les matelas plomatiques,
25:09 il y a un moment donné où il y a la tête qui tourne, etc.
25:12 Et ils avaient cette espèce de possibilité d'échapper à eux-mêmes
25:15 et de partir, justement, en se camant l'oxygène.
25:18 Et donc, effectivement, toutes les civilisations ont connu ça.
25:21 Je pense que quand les fruits ont tombé, qu'ils ont pourri,
25:23 qu'il y a eu un peu d'eau dedans et que les hommes préhistoriques ont goûté,
25:26 que ça avait fermenté, ils ont découvert qu'il y avait une formidable puissance.
25:29 Puis ça renvoie à un autre monde,
25:31 ce que Michaud a appelé de la connaissance par l'égouffre.
25:33 Et d'un seul coup, on n'est pas loin d'égouffre,
25:35 il y a une espèce de jouissance à s'oublier ou à se perdre.
25:38 Mais la logique bêtement matérielle,
25:40 elle suppose qu'on puisse voir qu'il y a des pays producteurs,
25:43 et qu'il y a des consommateurs, et qu'entre deux, il y a des dealers.
25:46 Donc c'est bien, c'est facile politiquement de braquer le projecteur sur des méchants dealers.
25:51 Les gamins des banlieues, on dirait "Oh là là, ils sont pas bien, etc."
25:53 Très bien, mais allons voir quels pays sont des pays producteurs.
25:56 Le Maroc, par exemple.
25:57 Le roi de Maroc, c'est un gentil, lui, qui laisse faire ce genre de choses.
26:00 Et puis à l'autre extrémité, les consommateurs.
26:02 Tous les gens du business, on est à Cannes, là, ces temps-ci,
26:05 je ne suis pas très sûr que s'il y avait un petit chien policier là,
26:07 renifleur, pour voir un peu s'il y a des consommations de drogue ici, là ou ailleurs,
26:11 je pense que le chien, lui aussi, à force d'hyperventiler, il pourrait tomber sur le dos.
26:15 Mais il y a un moment donné où on se dit "Il y a aussi ça."
26:17 Il y a une consommation qui est très culturelle.
26:20 Dans des films, on se roule un pétard.
26:21 - C'est célébré, vous avez raison, par la culture.
26:24 Mais qu'on arrête d'attaquer, enfin bon, il faut quand même régler les problèmes dans les bons lieux,
26:27 mais qu'on arrête de braquer le projecteur sur ces gamins,
26:30 sur les gamins qui font du trafic, parce que, je vous dis,
26:34 du président d'un État producteur, il y a l'Afghanistan, il y a le Maroc,
26:39 il y a des pays d'Amérique du Sud, il y a le Mexique, etc.
26:41 Alors là, on ne touche à rien, on ne touche à personne.
26:43 On sait, on a des satellites aujourd'hui, on sait où sont les productions agricoles.
26:46 On ne fait rien.
26:47 On pourrait, là, pour le coup, plutôt que d'envoyer des bombes sur des musulmans
26:50 en Afghanistan, en Libye, en Irak ou en Syrie, etc.,
26:54 envoyer des bombes incendiaires sur des endroits où il y a des cultures de pavots,
26:56 ce serait facile à faire.
26:58 Et on dirait, voilà, il n'y a plus de culture de pavots.
26:59 On laisse faire, on ne dit rien.
27:01 Et puis après, vous avez machin, bidulintel, MeToo ceci, MeToo cela,
27:04 qui se dirige entre deux pétards, deux lignes de coke, etc.,
27:06 ou des animateurs de télé qui ont fait commerce de la consommation de cocaïne, etc.
27:10 Eux, jamais aucun problème, si de temps en temps, on dit, voilà,
27:13 on a trouvé quelqu'un dans la rue...
27:14 – Sur MeToo, je me permets de dire que ce n'est pas absolument légitime
27:17 et qu'il faut entendre la parole des femmes et les hommes victimes de violences sexuelles.
27:20 Non, c'est juste pour dire qu'il y a des combats qui sont légitimes.
27:23 Et c'est tant mieux, MeToo est un combat légitime.
27:25 Mais le combat contre la droite n'est pas légitime ici, dans ce même milieu, je veux dire.
27:29 Supprimons MeToo et puis parlons du milieu culturel, si vous voulez,
27:32 ce sera la même chose avec le milieu des, je ne sais pas quoi, des écrivains,
27:35 avec le milieu du théâtre, si l'on veut, enfin des milieux culturels
27:39 où, effectivement, ça passe pour quelque chose de plutôt défendable.
27:41 Vous aviez Thomas de Quincer, vous aviez Henri Michaud,
27:43 vous aviez, il y a Baudelaire, les paradis artificiels,
27:47 donc il y a une espèce de tolérance,
27:48 il y a une jurisprudence de la tolérance pour la drogue dans ces milieux-là.
27:52 Les paradis artificiels de Baudelaire, ça peut s'étudier en cours.
27:55 Moi, j'avais lu ça...
27:55 - Heureusement que ça peut s'étudier en cours.
27:57 - Comment ? - Heureusement que ça peut s'étudier en cours.
27:58 - Oui, mais après, c'est difficile.
27:59 Vous découvrez que le hashish, ça se tartinait à l'époque, etc.
28:03 Vous ne pouvez pas dire, il y avait Thomas de Quincer, il y avait Baudelaire,
28:06 il y avait un certain nombre d'autres individus.
28:08 Mais vous, ce n'est pas bien.
28:09 Il y a juste un moment donné où il faut penser ces questions-là.
28:11 Et je pense que plutôt que de moraliser,
28:13 juste faire de telle sorte que des enfants aient autre chose dans la vie
28:16 comme espoir ou comme horizon que de se perdre.
28:19 - On est en face à Michel Onfray sur CNews et sur Europe 1.
28:21 Michel, on a souvent parlé dans cette émission de l'antisémitisme,
28:24 de l'explosion des actes antisémites depuis le 7 octobre.
28:27 Cette semaine, le mur des Justes du mémorial de la Shoah,
28:30 qui porte les noms de plus de 3 900 hommes et femmes
28:32 qui ont contribué à sauver des Juifs pendant la Seconde Guerre mondiale,
28:36 a été tagué à Paris avec des mains rouges, un symbole pro-palestinien,
28:40 un sigle qui renvoie au massacre de deux soldats israéliens à Ramallah en 2000,
28:44 au début de la seconde identifada.
28:46 Ce qui se passe à Gaza n'en finit pas d'avoir des répercussions chez nous.
28:49 Vous m'avez signalé un mouvement de boycott sur Internet,
28:53 un boycott des célébrités qui n'auraient pas suffisamment pris partie
28:58 pour la cause palestinienne et qui auraient soutenu Israël.
29:01 Ça s'appelle "blockout".
29:02 Ça consiste à bloquer ces stars sur les réseaux sociaux,
29:06 où elles sont gourmandes de "followers", comme on dit,
29:09 Beyoncé en a été victime, Kim Kardashian également.
29:13 Derrière cette initiative, il y a le BDS, Boycott, Désinvestissement, Sanction,
29:18 qui est mené par des militants qui disent vouloir boycotter les marques aussi
29:22 qui sont liées à Israël et qui seraient, selon les Israéliens,
29:26 liées au Hamas ou au Front populaire de libération de la Palestine,
29:29 deux organisations terroristes, notamment pour la France.
29:31 Qu'est-ce que ça dit, ce mouvement de boycott sur les réseaux sociaux pour vous, Michel ?
29:34 Moi, ça fait très longtemps que je pense que le boycott
29:36 est un instrument anticapitaliste par excellence.
29:38 C'est-à-dire que le capital n'en a pas grand-chose à faire,
29:41 qu'on puisse faire des manifestations en disant
29:44 "le fascisme ne passera pas" ou je ne sais quoi.
29:45 Si en revanche, vous dites "on n'achète plus vos produits",
29:47 alors là, d'un seul coup, ça les inquiète.
29:49 Parce qu'ils veulent bien vendre à n'importe qui,
29:51 à n'importe quel prix intellectuel ou culturel.
29:53 Mais donc là, je me dis, effectivement, ils vont toucher aux porte-monnaies.
29:57 On touche aux porte-monnaies.
29:58 Et c'est important, le porte-monnaie des acteurs, des comédiens.
30:02 Il y a des gros cachets.
30:03 Et puis, si d'un seul coup, votre carrière s'effondre,
30:06 parce qu'on dira "ah, celui-là, on n'en parle plus",
30:09 et bien, vous avez des gens qui vont probablement se trouver des ailes idéologiques
30:13 en disant "je vais attaquer Israël", etc.
30:16 C'est une espèce de guillotine sèche qui fonctionne
30:19 pour les gens du business qui sont pronts à donner des ordres intellectuels.
30:24 "Il faut ceci, il ne faut pas cela",
30:25 "il faut descendre dans la rue pour expliquer pour qui il faut voter",
30:29 "il y a des méchants, puis il y a des bons".
30:31 "In fine, Macron, ce n'est pas bien,
30:32 mais au bout du compte, c'est toujours pour Macron qu'il va falloir voter".
30:35 L'orbre de Maastricht, on n'y touche pas, etc.
30:37 Parce que sinon, ma carrière, ma carrière.
30:39 – Je me doutais que vous alliez placer le mot "Maastricht"
30:41 dans cette émission, Michel Onfray.
30:42 – Je pense que vous ne trouverez aucune émission
30:43 dans laquelle je n'ignorerais pas le mot.
30:45 Je ne le fais pas à dessein, simplement, c'est une conception du monde.
30:48 C'est un petit peu comme si vous disiez,
30:50 comparaison des paraisons, je ne suis pas Solzhenitsyn,
30:52 mais à Solzhenitsyn, vous parlez beaucoup du goulag.
30:54 Mais oui, c'est quand même ce qui structure notre époque,
30:57 cette civilisation nouvelle dans laquelle, effectivement,
31:00 il y a un nouveau bien, un nouveau mal, un nouveau peuple,
31:04 une nouvelle civilisation, un nouvel horizon,
31:06 un nouveau rapport à la culture.
31:07 Donc évidemment, on est obligé de parler de Maastricht.
31:09 – Pour faire le lien avec ce qu'on disait auparavant,
31:11 vous avez été aussi interpellé par ce qui s'est passé à l'Eurovision.
31:14 Alors certes, c'était le week-end dernier,
31:15 mais c'était extrêmement marquant ce qui s'est passé
31:17 dans cette grande compétition organisée par l'Union européenne de radio-télévision,
31:21 vue par 160 millions de personnes à travers le monde,
31:24 37 pays qui participaient, notamment autour des manifestations
31:28 entourant la candidate israélienne, Eden Golan,
31:31 dont les gens voulaient qu'elle ne chante pas,
31:34 dont ils appelaient au boycott, là encore.
31:37 Il y a eu toutes ces manifestations assez violentes autour de cette candidate.
31:43 Là encore, on est dans un phénomène qui sort de la culture
31:46 pour aller vers la politique, pour vous ?
31:47 – Non mais la culture est politique, et on sait très bien
31:49 que vous avez des façons de faire de la politique
31:54 qui sont des façons de faire de la culture,
31:55 ou de la culture, des façons de faire de la politique.
31:56 On a beaucoup parlé du Gramsci, vous savez Gramsci était ce philosophe italien
32:00 qui estimait qu'il fallait d'abord prendre le pouvoir par les idées,
32:02 quand on avait pris le pouvoir par les idées,
32:03 il suffisait presque de se pencher pour le ramasser parce qu'il était prêt.
32:07 Et il y a plein d'endroits dans notre société
32:09 qui sont des instruments idéologiques, des instruments de propagande idéologique.
32:13 Madame Ernotte, je crois, fait partie du dispositif de l'Eurovision.
32:17 – La patronne de France Télé. – Pardon ?
32:19 – Delphine Ernotte, la patronne de France Télé,
32:20 je ne sais pas si c'est pour nos auditeurs et téléspectateurs.
32:22 – Oui, vous avez raison, et j'aimerais bien avoir les critères,
32:25 pourquoi celui-ci et pas celui-là,
32:27 et pourquoi on nous présente toujours à peu près les mêmes.
32:31 C'est la même chose avec les Jeux Olympiques, c'est toujours la diversité.
32:34 Mais moi j'aimerais que la diversité l'intègre aussi les majorités,
32:37 que de temps en temps il y ait quelques blancs,
32:39 que de temps en temps il y ait quelques gens qui chantent en français,
32:42 des chansons françaises, etc.
32:44 Je ne suis pas contre, je ne suis pas contre le fait
32:47 qu'il y ait des rappeurs qui chantent dans cette langue nouvelle,
32:50 je n'ai rien contre ça, mais pourquoi est-ce que c'est systématique ?
32:53 Donc il y a un moment donné où vous regardez de la publicité,
32:55 on doit vous vendre des voitures, on doit vous vendre du café,
32:57 pas du tout, on vous vend de l'idéologie.
32:59 Oh le métissage comme c'est formidable,
33:01 oh la créolisation comme elle est heureuse,
33:03 oh les français comme ils sont crétins les blancs.
33:05 Vous avez vu dans les publicités, dès qu'on a un blanc on a un crétin,
33:07 c'est pas Versailles ici, ou alors Chaussée aux moines, ou ce genre de choses.
33:10 Dès que vous avez un costaud, etc. c'est rarement, c'est toujours les mêmes.
33:13 Le cinéma c'est la même chose, il y a beaucoup d'argent dans le cinéma,
33:16 il y a beaucoup d'avances sur recettes, c'est toujours les mêmes films,
33:19 qui d'ailleurs ne font pas beaucoup de vues, vous direz, ou d'entrées.
33:24 Et vous avez le fils de Philippe de Villiers qui fait un film
33:28 qui est assez peu subventionné, et puis au contraire là ça marche.
33:30 Donc effectivement il y a une idéologie, c'est l'idéologie de l'État,
33:35 il y avait ça à l'époque soviétique,
33:37 où on vous dit ce qui est le bien, ce qui est le mal,
33:39 et là pour le coup en France on avait choisi effectivement,
33:41 garçon fort sympathique, ma femme, enfin, on se dit...
33:45 - C'est la Suisse qui a gagné, c'est ça ?
33:47 - Alors moi j'ai regardé parce que c'était devenu un phénomène de société,
33:50 je regarde jamais ça, parce que pour moi c'est un festival de mauvais goût,
33:54 je me suis dit je vais quand même regarder.
33:55 - Ça s'appelle NEMO le gagnant ?
33:56 - Oui, personne, en latin, le type, oui ça veut dire NEMO, capitaine NEMO.
34:01 - C'est bien de mettre la philosophie dans l'Eurovision.
34:02 - Oui mais chez...
34:03 - On le fait nous, dans Face à Michel Ancel.
34:04 - Absolument, NEMO ça veut dire personne,
34:06 donc c'est le capitaine NEMO de Jules Verne par exemple,
34:09 ce type il dit je suis personne, ouais mais c'est une personne qui prend beaucoup de place,
34:12 et quand j'ai vu ce type là en jupe, je me suis dit,
34:15 alors ça c'est vraiment ce qu'il y a de plus bas dans le truc,
34:17 cette espèce de ridicule.
34:19 - Ne le jugeons pas sur son apparence.
34:21 - Si on peut, mais si on peut, mais attendez,
34:23 on a le droit, les gens ont le droit de se mettre des plumes derrière
34:25 pour faire des manifestations à deux minutes,
34:29 mais on a le droit aussi d'avoir un avis là-dessus.
34:31 Moi je pense que la sexualité est une affaire privée,
34:34 et j'ai le sens, je suis un homme de l'ancien temps probablement,
34:37 - Donc il ne doit pas s'exposer.
34:38 - De la pudeur, non, je veux dire,
34:40 moi il m'arrive d'être tout nu sous ma douche,
34:42 et je ne vais pas me mettre tout nu dans la rue,
34:44 parce que je pense que chez soi, sous sa douche,
34:46 dans son lit, sous sa couette, il y a une vie privée,
34:48 et qu'on n'a pas de fierté à exhiber sa vie privée.
34:51 Mais maintenant c'est la vie privée qui est devenue formidable.
34:55 Donc si vous dites, moi je suis blanc, catastrophe,
34:58 j'ai passé 50 ans et depuis longtemps, catastrophe,
35:00 je suis hétérosexuel, catastrophe, pardonnez-moi, etc.
35:03 Alors qu'on met un peu de blanc,
35:05 pas forcément dans des publicités débiles,
35:07 mais dans des publicités où parfois on a peut-être...
35:09 - Voilà l'appel de Michel Onfray aujourd'hui sur nos entreprises.
35:11 - Non, parce que je réponds à votre question sur le fait que
35:13 on a l'impression d'être dans la distraction,
35:15 dans le loisir ou dans la culture, et on est dans l'idéologie.
35:17 Et on est passif, en train de regarder quelque chose,
35:20 et d'un seul coup, dans votre tête,
35:22 vous savez, Édouard Bernays, qui est apparenté à Freud,
35:25 a théorisé le problème du formatage intellectuel pour les États-Unis,
35:30 sur la fabrication de la pensée.
35:31 Et on fabrique la pensée avec le cinéma, avec la télévision,
35:34 avec les séries, avec Netflix,
35:35 avec les gens qu'on choisit pour représenter la France,
35:37 parce que c'est l'image de la France dans le monde entier qui est proposée.
35:42 C'est une carte postale de la France.
35:43 Le chef de l'État dit "Voilà, la France, c'est ça".
35:45 - Alors, vous menez à la transition avec Emmanuel Macron,
35:48 le chef de l'État, qui a réuni cette semaine à Versailles
35:51 des patrons, 180 patrons étrangers,
35:55 pour le sommet Choose France,
35:57 avec à la clé plus de 15 milliards d'euros d'investissement
35:59 pour 56 projets.
36:00 Est-ce que, voilà, c'est une démonstration de force ?
36:03 Est-ce que vous vous en félicitez,
36:04 que la France soit attractive sur le plan international ?
36:07 Ou est-ce que vous dites "non, c'est d'abord
36:10 les petites entreprises françaises qu'on devrait soutenir ?"
36:12 Michel Onfray.
36:13 - Bien sûr. D'abord, Choose France, on a tout dit, quoi.
36:15 Choisissez la France, c'est possible aussi.
36:17 Mais d'un seul coup, on va voir le monde anglo-saxon
36:19 et on va voir Elon Musk, etc.
36:21 On communique. Il faut quand même qu'à un moment donné,
36:23 le chef de l'État serre la main d'Elon Musk.
36:25 Et Elon Musk, il va dire "Bon sang, c'est bien sûr,
36:28 pourquoi n'ai-je pas pensé à installer des usines Tesla
36:31 partout en France ? J'aime tellement la France,
36:33 le président Macron est tellement fantastique, etc."
36:35 Les productions de richesse chez ces gens-là,
36:37 qui sont vraiment des serpents,
36:40 ce sont des gens qui sont sans foin ni loin.
36:43 Ils ont la planète comme terrain de jeu.
36:44 Et ce n'est pas en France, avec la fiscalité française,
36:47 qu'on va leur proposer un paradis.
36:50 Ce n'est pas comme ça que ça fonctionne.
36:51 Les gens qui produisent la richesse aujourd'hui,
36:53 ce sont des artisans, ce sont des commerçants.
36:55 Ce ne sont pas des grosses boîtes qui arrivent,
36:56 qui mettent une usine, puis qui après disent
36:57 "Finalement, on va décentraliser tout ça."
36:59 - Qui prennent les aides et qui s'en vont.
37:00 - Bien sûr. C'est comme ça que ça fonctionne.
37:02 Et on défait le tissu social.
37:04 Moi, j'ai vu dans ma bonne ville d'Argentan
37:05 comment on a détruit le tissu social.
37:07 Parce qu'effectivement, je ne veux pas rentrer dans le détail,
37:09 mais il y a un moment donné où on se dit
37:11 quand on laisse des groupes prospérer,
37:14 ce sont des artisans qui disparaissent,
37:15 ce sont des petits commerçants qui disparaissent.
37:16 Ils travaillent beaucoup, ils n'ont pas beaucoup d'argent,
37:18 ils n'ont pas beaucoup de vacances, etc.
37:20 Et est-ce qu'on s'adresse à eux ?
37:21 Alors, choose les commerçants français,
37:24 Monsieur le Président de la République, il y a un moment donné.
37:26 - Michel Lombre, est-ce que vous êtes intéressé
37:28 par un débat Marine Le Pen-Emmanuel Macron ?
37:29 C'est ce que je disais en début d'émission.
37:31 L'idée a été lancée par l'entourage, visiblement, du chef de l'État
37:34 pour que ce soit l'idée d'incarner deux figures
37:37 qui ont une vision opposée de l'Union européenne.
37:39 On est à trois semaines des élections européennes.
37:41 Visiblement, Marine Le Pen a accepté, mais plutôt en septembre,
37:45 ce qui évidemment intéresse beaucoup moins l'entourage du chef de l'État.
37:48 Vous intéresse ce débat ?
37:50 - Alors, ce qui m'intéresse, c'est que le débat est prétexte
37:53 à débat sur le débat.
37:54 C'est fait pour et c'est de la communication.
37:56 Donc, je propose un débat pour qu'elle le refuse.
37:59 Mais il faut qu'elle le refuse tout en l'acceptant.
38:01 - Mais en ne le proposant pas ?
38:02 - Alors, je ne le propose pas, mais je le fais proposer.
38:04 Il est dit que les oreilles qui traînent là font savoir que,
38:07 dans un bon journal où on fait la proposition,
38:09 sans la faire tout en la faisant.
38:10 Et Marine Le Pen dit, je ne vais pas prendre de risques sur l'Europe.
38:13 Elle est assez fluctuante.
38:15 Elle sait très bien que si elle accepte un débat, ça va être.
38:17 Mais Mme Le Pen, vous avez dit ça à telle époque,
38:19 vous avez dit ça à telle époque, vous avez dit ça à telle époque.
38:21 Vous nous dites ça aujourd'hui, ce n'est plus exactement la même chose.
38:23 Ce qui nous dit que demain, vous n'allez pas changer d'avis à nouveau.
38:26 Ça, c'est problématique. Elle n'a pas envie qu'on le dise.
38:28 Après ça, quand on va aller la chercher sur des débats vraiment très concrets,
38:32 du genre, mais nous, nous avons vu vos députés qui ne sont pas venus,
38:34 absenteeïsme, monsieur machin, etc.
38:36 Il y a beaucoup à perdre pour Marine Le Pen d'accepter un débat comme ça
38:39 avant les européennes.
38:40 Des gens qui diraient, ah oui, c'est vrai, c'est un peu fluctuant comme ligne.
38:43 Et puis, ah oui, ils n'ont pas fait grand-chose quand ils étaient députés.
38:45 Pourquoi de nouveaux députés, etc.
38:47 - Et les Français ne sont pas tout à fait favorables à ce débat.
38:48 Ils n'ont pas très envie, pour leur majorité d'entre eux,
38:51 de revoir cette affiche qu'on a déjà vue en 2007 et en 2022.
38:54 - Mais parce que c'est du cirque.
38:55 C'est du cirque où chacun prend la France en otage,
38:58 les Français en otage, la politique en otage pour dire
39:01 si on peut prendre trois points, si on peut perdre trois points,
39:03 si elle peut trébucher là-dessus, si je peux faire une bonne punchline
39:07 qui nous permettra d'être pendant trois jours dans les médias,
39:10 alors ce sera très bien.
39:11 C'est le degré zéro de la politique. C'est la politique spectacle.
39:14 Les gens savent bien qui fait quoi, qui veut quoi, comment ça marche.
39:17 Moi, je pense que le vrai débat, c'est pourquoi n'y a-t-il pas
39:20 de vrais candidats qui soient pour le Frexit, de candidats sérieux
39:25 et qui ne soient pas non plus défenseurs des médecines douces,
39:29 complotistes, etc.
39:30 Ça aussi, c'est un débat.
39:32 Pourquoi est-ce qu'on ne peut pas interroger véritablement
39:36 le sujet européen ?
39:38 - J'aimerais terminer par un petit sujet un peu plus léger, Michel,
39:41 et je sais que ça vous plaît aussi.
39:42 Les nouveaux mots du Dicot, ceux qui sont rentrés dans le Robert
39:45 et le Larousse, avec notamment l'entrée de "tiktoker",
39:48 "sapiosexuel", "afro-descendant", "neuro-atypique",
39:53 il y a beaucoup de nouveaux mots comme ça.
39:55 Qu'est-ce que ça dit, en réalité, de l'évolution de notre langage ?
39:59 Ça l'enrichit ou c'est la pauvrie pour vous, Michel ?
40:02 - Alors, les deux en même temps, parce que je crois qu'un dictionnaire,
40:05 il ne grossit pas d'année en année, il fait toujours le même poids,
40:08 le même volume.
40:08 - Donc, il y a des mots qui sortent.
40:09 - Oui. Et ce serait ça qui serait intéressant, je pense, de faire aussi
40:13 une espèce de contre-théorie de ça, en disant, bon, d'accord,
40:16 "sapiosexuel", on voit bien, mais qu'est-ce qui a disparu ?
40:20 Quel mot a disparu ? Je pense que le langage évolue,
40:24 la vie évolue, la cité évolue, etc.
40:27 Il est normal qu'on crée des mots, qu'on les fasse rentrer
40:30 dans le dictionnaire, c'est la vie d'une langue,
40:32 mais je pense qu'on gagne en mots d'actualité, ce qui n'est pas terrible,
40:37 et on perd probablement en mots de précision.
40:39 Il y a probablement des mots très techniques que plus personne n'utilise.
40:42 Vous prenez un livre, par exemple, il y a six ou sept mots
40:44 pour qualifier le dos, la tranche, etc.
40:47 Enfin, bon, ces mots-là, vous prenez un tonneau,
40:49 c'est la même chose, la douelle, la bonde, etc.
40:51 Les gens, ils savent plus les choses là, parce qu'un tonneau,
40:54 vous savez vaguement ce que c'est.
40:55 Donc, je pense qu'on appauvrit un vieux fond et qu'on modernise
41:00 avec le vocabulaire du jour.
41:02 Mais en même temps, ce sont des idées intéressantes,
41:04 les idées qu'une femme puisse être intéressée sexuellement
41:06 par un homme intelligent, par exemple.
41:08 Il n'y avait pas de mots pour dire ça.
41:09 - Il y a souvent des contractions de mots aussi.
41:12 On met deux mots en un seul. - Par exemple ?
41:14 - Sapiosexuel, afrodescendant, voilà.
41:17 En fait, on contracte.
41:18 - Oui, mais ça, vous savez, toutes l'étymologie, c'est ça.
41:20 C'est un mélange de grec, de latin, et on fabrique des mots comme ça.
41:25 L'aristocratie, par exemple, c'est le pouvoir des meilleurs.
41:28 Ce sont deux mots grecs.
41:30 On fabrique des collisions.
41:31 Alors aujourd'hui, on fabrique des collisions avec de l'anglais,
41:33 assez probablement, parce que, évidemment,
41:35 quand vous avez du grec ou du latin,
41:37 c'est qu'il y a eu un empire grec, un empire romain.
41:39 C'est qu'il y a eu une puissance grecque hélénistique.
41:41 Aujourd'hui, vous avez une puissance anglo-saxonne,
41:42 puisque ce sont eux qui font la loi planétaire.
41:45 Et je ne pense pas qu'il y ait vraiment beaucoup de mots russes ou chinois,
41:47 par exemple, qui entrent dans le dictionnaire.
41:49 Mais en revanche, beaucoup de mots qui procèdent du vocabulaire anglo-saxon.
41:52 - Bon, écoutez, en tout cas, vive la francophonie,
41:54 vive le français, cette langue vivante, si belle.
41:56 - Bien sûr, bien sûr. - À écrire, à parler.
41:57 - Que vous parlez si bien.
41:59 - Merci, Michel Onfray, d'avoir été aussi brillant dans cette émission,
42:03 face à Michel Onfray, sur CNews et sur Europe 1.
42:05 Merci à vous chers amis auditeurs et téléspectateurs. L'info continue sur nos antennes.