• l’année dernière
Dans ses interviews, Sophie de Menthon, présidente du mouvement patronal Ethic, se met dans la peau des patrons...

Category

🗞
News
Transcription
00:00 Yann Pétiot, bienvenue dans Patron en question.
00:02 Alors vous êtes un patron un peu spécial parce que vous êtes directeur de l'Alliance
00:07 du commerce et c'est quelque chose d'essentiel aujourd'hui en France, mais vous avez commencé
00:13 au Sénat.
00:14 Oui, exactement.
00:15 J'ai un parcours, j'ai commencé dans les institutions parlementaires puis politiques
00:19 avant de rejoindre l'entreprise.
00:20 Alors vous savez quoi, on aimerait exactement le contraire.
00:23 On aimerait que les gens commencent par l'entreprise puis arrivent au Sénat après en politique.
00:29 Je pense que ce serait pas mal.
00:30 Ça peut arriver, j'ai encore quelques années devant moi, peut-être que je ferai le chemin
00:32 inverse.
00:33 Très bonne idée.
00:34 Alors vous avez un secteur qui m'intéresse particulièrement qui est le secteur du commerce,
00:39 mais surtout du textile.
00:40 J'ai l'impression quand même que c'est des montagnes russes un peu le textile en ce
00:43 moment.
00:44 Ça fait quatre ans que ce sont des montagnes russes.
00:46 En réalité, on a eu les deux ans de crise sanitaire où nos produits ont été jugés
00:50 non essentiels, on a fermé nos magasins pendant très longtemps.
00:52 Et depuis deux ans, on se prend de plein fouet la crise inflationniste qui crée une crise
00:57 de pouvoir d'achat extrêmement forte chez les Français.
00:59 Lorsqu'on les interroge, ils nous disent que le textile est leur premier poste de restriction
01:03 budgétaire.
01:04 Dans notre secteur, ça veut dire acheter moins ou acheter moins cher.
01:08 Acheter moins cher, ça veut dire aller vers des bas prix ou aller vers de la seconde main.
01:12 Mais c'est vrai que les acteurs traditionnels de la mode, les enseignes physiques qui sont
01:16 devenues aujourd'hui omnicadales, sont sous beaucoup.
01:19 Vous avez les très grandes enseignes comme les Gary Lafayette, Etam, Camailleux, etc.
01:23 Mais moi, je vois en tant que consommatrice le nombre de boutiques dans mon quartier qui
01:30 ferment.
01:31 Mais je n'ai jamais vu ça de ma vie.
01:33 Bien sûr, elles sont face à une baisse de notre marché.
01:36 Il faut savoir juste un chiffre.
01:38 On est encore en retard.
01:39 On est à moins 5 à 6 % par rapport à 2019.
01:42 On n'a pas rattrapé notre niveau de démarche.
01:43 Et pourtant, vous avez eu quand même beaucoup d'aide.
01:44 On a eu beaucoup d'aide durant la crise.
01:46 Heureusement qu'elles étaient là.
01:48 Il faut souligner l'action du gouvernement.
01:49 C'était important, sinon tout le monde serait mort.
01:51 En même temps, nous n'avons pas demandé à fermer.
01:52 Donc, il était normal aussi que l'État puisse assumer ses décisions et vienne en
01:56 soutien de ses entreprises.
01:57 Mais aujourd'hui, on a quand même une baisse de la consommation sur notre marché qui est
02:01 extrêmement forte.
02:02 Et de l'autre côté, l'inflation joue aussi sur nos charges.
02:05 Elle joue sur les matières premières.
02:06 Elle joue sur nos loyers.
02:07 Les loyers dans les magasins, c'est plus 12 % depuis deux ans.
02:11 Olivier Grégoire n'a-t-il pas prévu une mesure qui consisterait à payer son loyer
02:19 mensuellement pour que ce soit plus facile pour les commerces ?
02:21 Oui, et c'est une excellente mesure.
02:23 C'est une mesure qu'on demandait.
02:24 Il faut savoir, pour ceux qui ne savent pas, qu'aujourd'hui, les commerçants, par tradition,
02:29 par aussi demande des bailleurs, paient trois mois de loyer en avance.
02:32 C'est-à-dire, avant même d'avoir fait un euro de chiffre d'affaires, vous devez sortir
02:35 de votre trésorerie trois mois de loyer.
02:36 Et donc, ça pèse énormément sur la trésorerie de nos commerçants à l'heure où on connaît
02:41 qu'ils ont des difficultés financières.
02:42 Alors, c'est peut-être très bien et c'est certainement très bien.
02:43 Je vais vous dire, ils ne disent pas la même chose du côté des bailleurs.
02:46 Bien sûr, mais c'est un rééquilibrage de la relation qui est nécessaire parce qu'aujourd'hui,
02:52 vraiment, véritablement, les loyers aujourd'hui ont augmenté automatiquement, sans rien faire,
02:57 un bailleur sans rien faire, à une augmentation de loyer de 12 à 13 % sur ces deux dernières
03:02 années, automatiquement.
03:03 Oui, mais rassurez-vous, le secteur immobilier va très très mal.
03:06 Bien sûr, je ne souhaite de malheur à aucun secteur immobilier.
03:09 Mais pour bien comprendre un commerçant, quel que soit le lieu de commerce où il se trouve,
03:14 même s'il perd de la fréquentation, même s'il va mal, de toute façon, son loyer a
03:18 augmenté de 12 à 13 % automatiquement ces dernières années.
03:21 Les charges aussi qui sont refacturées par les bailleurs augmentent fortement parce qu'on
03:24 est dans un moment où il faut qu'on rénove nos magasins pour économiser de l'énergie.
03:28 Il faut que ce soit vert les magasins maintenant.
03:30 C'est ça, il faut des magasins verts.
03:31 On a un objectif, je vous le rappelle, c'est moins 40 % de consommation d'énergie dans
03:35 nos magasins d'ici à 2030.
03:37 C'est extrêmement important et ça coûte cher.
03:39 Donc il faut qu'on réintroduise une négociation, un terrain de négociation entre les locataires
03:46 et les bailleurs sur ces sujets-là.
03:48 Et la mensualisation du loyer, ce n'est qu'une mesure parmi d'autres, mais ça va dans le
03:52 bon sens.
03:53 C'est vrai, c'est vrai.
03:55 Alors moi, c'est mon côté responsable patronal.
03:57 Je ne comprends pas tout parce que le textile ne va quand même pas bien.
04:02 Vous l'avez dit, d'ailleurs, les gens achètent beaucoup moins, y compris renoncent à acheter
04:06 en sol, ce qui est stupéfiant parce qu'ils pensent qu'il faut acheter juste au moment
04:09 où on en a besoin.
04:10 Et qu'est-ce qu'on voit ? Je regarde la télévision et je vois une campagne avec un
04:14 homme comme vous, extrêmement élégant, qui a une veste sur lui et qui veut en acheter
04:19 une autre.
04:20 Et le vendeur qui lui dit "très bien votre veste, vous n'allez quand même pas acheter,
04:25 elle est encore parfaite" et qui le raccompagne à la sortie du magasin.
04:28 Comment est-ce que dans l'industrie textile on a pris ça ?
04:31 On a pris ça de manière très violente.
04:34 Parce que c'est arrivé en plus à un moment de l'année, au mois de novembre, au moment
04:38 où commençaient la période des fêtes de Noël, qui est une période essentielle dans
04:41 l'industrie textile.
04:42 Pour la réussite de toute une année, il ne faut pas rater cette période-là.
04:44 Et donc c'est arrivé comme une gifle à la tête de tous les acteurs du commerce.
04:48 Cette campagne de pub était une mauvaise campagne de pub, on l'a dit, elle se trompait
04:51 de cible, elle stigmatisait un commerce physique en magasin en renvoyant le client chez lui.
04:58 Pourquoi ? Pour qu'il achète demain sur Internet ? C'était totalement ridicule.
05:03 Elle se trompait de cible.
05:04 Aujourd'hui, le ministre l'a retenue.
05:06 C'est une question que je pose puisque vous avez fait un peu de politique.
05:07 Quand il y a une campagne qui sort comme ça, quel ministre voit ça ? Il faut une autorisation
05:14 finale quand même.
05:15 Le ministre Christophe Béchut a dit publiquement qu'il avait validé cette campagne de communication
05:20 et donc qu'il en assumait toutes les conséquences.
05:23 C'est l'ADEME qui est l'opérateur, on peut dire, mais le ministre a assumé, a lancé
05:28 cette initiative par une conférence de presse.
05:29 Il lance beaucoup d'initiatives Christophe Béchut qui sont souvent étranges.
05:33 C'est certain.
05:34 En tout cas, sur ça, on lui a dit, c'est remonté même du côté, on a eu des débats
05:39 interministériels puisque Bruno Le Maire et Le Paul de Bercy avaient pris une position
05:44 contre ce spot de publicité ainsi que Matignon.
05:47 C'est du passé, on ne refera pas le passé.
05:50 Mais on l'a même encouragé parce que si j'ai bien compris, il va peut-être recommencer.
05:52 Il a annoncé que cette campagne de pub avait duré sur plusieurs années.
05:55 Il a annoncé une nouvelle campagne de pub sur ce sujet là au mois de juin prochain.
06:00 Il a la volonté, il exprime la volonté de le faire en association davantage étroite
06:06 avec les entreprises.
06:07 On espère que ce sera le cas.
06:08 En tout cas, on est à sa disposition pour discuter parce qu'il y a des choses à faire
06:11 pour communiquer de manière positive vis-à-vis des clients.
06:14 Le commerce, c'est la vie, c'est des emplois dans les territoires.
06:17 C'est un lien social.
06:18 C'est la création de richesses véritablement locales et qu'on ne délocalise pas.
06:23 Et ça, le gouvernement n'en a pas toujours peut-être assez conscience.
06:25 Après, ce qu'ont fait, c'est vrai, les acteurs ces dernières années, c'est que
06:29 c'est très difficile d'être dans des zones de challenge qui sont réduites et assumer
06:33 les charges sans plus retour à un magasin.
06:35 Et promettez-moi que vous allez essayer et vous battre pour qu'il y ait des commerces
06:39 dans toutes les petites villes.
06:40 En tout cas, c'est l'intention des acteurs de rester dans les territoires où ils sont
06:44 implantés.
06:45 Parfait.
06:46 Merci infiniment et bon courage.
06:47 Merci.
06:48 [Musique]
06:51 [Sous-titres réalisés para la communauté d'Amara.org]

Recommandations