• il y a 6 mois
Dans Destins de femmes, Judith Beller reçoit Elise Fabing, avocate en droit du travail et auteure de "Ça commence avec la boule au ventre" - Ed. Les Arènes

"Destins de Femmes" nous raconte les parcours des femmes extraordinaires qui tissent le lien de notre République. Nous explorons des thèmes universels tels que la lutte pour l’Egalité des genres, la liberté d’expression, la diversité culturelle, le droit à disposer de son corps. Emission tirée du livre de Valérie Perez-Ennouchi, "Destins de Femmes", sorti chez Ramsay, prix Edgard Faure 2021.

Une émission de Judith Beller.

Merci au Groupe Connect Travail Temporaire !

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##DESTIN_DE_FEMMES-2024-05-11##

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Transcription
00:00Le groupe Connect, expert en recrutement intérimaire.
00:03Rejoignez les 35 agences du groupe Connect pour des opportunités de carrière partout en France.
00:08Le groupe Connect présente...
00:10Sud Radio, Destin de Femmes, Judith Beller.
00:14Bienvenue à toutes et à tous dans Destin de Femmes sur Sud Radio.
00:18Comme tous les samedis à 13h30, vous allez pouvoir découvrir le destin d'une femme française extraordinaire.
00:23Et tout cela pour que le combat pour le droit des femmes devienne une cause commune aux femmes et aux hommes.
00:28C'est inspiré par le livre, au même titre, de Valérie Perez-Enouchi.
00:32Alors aujourd'hui dans Destin de Femmes, on va découvrir ensemble le destin de l'avocate Élise Fabing.
00:36Et Élise Fabing est en colère. Alors je dis Fabing, mais c'est peut-être Fabin.
00:39Ah non, c'est Fabing.
00:40C'est Fabing, donc je ne me suis pas trompée.
00:41Élise Fabing, vous êtes cofondatrice du cabinet alchimiste avocat.
00:44Et je le disais, vous êtes en colère parce que vous êtes spécialisée dans la défense des salariés de tout genre,
00:49surtout des femmes évidemment.
00:50Et vous nous le racontez ça dans votre livre.
00:53Ça commence par la boule au ventre.
00:54C'est sorti aux éditions des Arènes.
00:57C'est un destin haut en couleur que vous vous façonnez.
00:59C'est une évidence.
01:00Bienvenue sur Sud Radio, Élise Fabing.
01:01Sud Radio, Destin de Femmes, Judith Beller.
01:04Alors pour commencer, les quatre questions des invités de Destin de Femmes.
01:08La première, quel destin de quelle femme vous inspire le plus, Élise?
01:11Évidemment, je dis à la limite.
01:13Ah, sans grande surprise, je ne suis pas très originale.
01:17Mais quand on est avocate et qu'on défend la cause des femmes, forcément, c'est un modèle, une héroïne.
01:23Et c'est même elle qui m'a donné envie de devenir avocate quand j'étais enfant.
01:29D'accord, parce que vous l'avez découverte enfant.
01:31Oui, c'est les livres, etc.
01:34Et elle m'a toujours fascinée.
01:36Et puis plus tard, j'ai trouvé qu'elle était d'une audace incroyable.
01:40Elle a réussi à se servir de grands procès pour faire évoluer la législation, par l'exemple.
01:48Et ça, c'était très fort.
01:49Elle n'a pas hésité à transformer son métier en outil.
01:52Exactement, au service de la cause des femmes.
01:56Il n'y a pas meilleure ambassadrice, du coup, de ce combat pour le droit des femmes.
01:59Absolument pas.
02:01Alors, votre plus grand succès, Élise Fabing?
02:04Mon plus grand succès, c'est difficile, mais je pense que c'est d'avoir une vie professionnelle qui est parfaitement alignée avec qui je suis.
02:15Si vous voulez, quand on parle de vie pro, vie perso, je suis celle que je suis parce que je suis avocate et je suis l'avocate que je suis parce que je suis celle que je suis.
02:26Et le fait de se lever tous les matins en se disant qu'on se sent utile et alignée et que notre job correspond à nos valeurs, c'est à mon sens inestimable.
02:35Et surtout que je croise beaucoup de femmes salariées qui n'ont pas cette chance là.
02:39Donc, je mesure ma chance tous les jours.
02:41Mais les frontières sont quand même très poreuses, non?
02:43Du coup, entre votre vie professionnelle et votre vie privée, on imagine.
02:46Évidemment.
02:47Donc, ce n'est pas toujours simple à gérer, non plus.
02:48Ce n'est pas simple à gérer.
02:50Quand on est maman, vous êtes maman.
02:52Tout à fait. Quand on est maman, c'est difficile.
02:55Et puis, c'est un métier extrêmement exigeant, très prenant, à la fois en temps, mais aussi émotionnellement.
03:02Donc, évidemment, en concentration.
03:04Donc, évidemment, la frontière est compliquée et on ne peut pas faire ce boulot si on ne l'aime pas passionnément.
03:10C'est sûr.
03:11Et alors, alignement, c'est un mot qui revient beaucoup chez les femmes que je reçois.
03:14Être alignée, c'est un mot important.
03:16Est-ce que c'est un mot que vous entendez beaucoup dans votre profession aussi, justement, de ces femmes qui cherchent l'alignement?
03:20Bien sûr, bien sûr.
03:22Il y en a beaucoup qui vivent des pertes de sens, des pertes de valeur au travail.
03:27Et je défends notamment beaucoup de DRH qui ont ce gros problème d'alignement.
03:34Ils choisissent une entreprise pour les valeurs affichées et qui se rendent compte que ce n'est pas forcément exactement ça quand elles sont en poste.
03:41Donc, ce n'est pas le poste lui-même qui leur pose souci, c'est comment il est inscrit, écrit par l'entreprise.
03:48Exactement.
03:49Alors, votre plus grande déception, Elisa Heng ?
03:52Ma plus grande déception, alors, il y en a pas mal parce que, évidemment, à chaque fois que je perds un dossier, c'est une immense déception
04:01parce que je pense que c'est une déformation pro, mais je suis extrêmement mauvaise joueuse.
04:06Et cette injustice, parfois, est très, très, très difficile à vivre.
04:11Mais il y a également ma déception du gouvernement actuel et de la façon dont il traite les femmes.
04:18Vous trouvez que ça ne va pas ?
04:20Non, ça ne va pas.
04:21Ce n'est pas assez ?
04:22Ce n'est pas assez.
04:23C'est la grande cause du quinquennat et je vois des réformettes.
04:28Mais sur les femmes au travail, sur l'égalité au travail, il n'y a pas grand-chose.
04:34Et puis, surtout, il y a une vraie casse sociale pour les salariés de façon générale,
04:38avec le plafonnement des indemnités prud'homales en fonction de l'ancienneté,
04:43qui sort du scope de la justice sociale toutes les boîtes à fort turnover et les start-up.
04:48Et puis, des indemnités toujours très faibles en cas de harcèlement moral ou sexuel.
04:54Et ça, ça ne fonctionne pas.
04:56Ça n'a pas évolué ?
04:58Non, ça n'a pas évolué, plutôt défavorablement.
05:02Ça a mal évolué ?
05:03Ça a mal évolué.
05:04Et puis, on a, à côté de ça, des indemnisations France Travail qui sont en baisse constante.
05:10Là, c'est encore annoncé pour juillet.
05:12On a un âge de départ à la retraite qui a été reculé.
05:17Donc, moi, je me retrouve avec des femmes qui ont des années sans rémunération.
05:21Et il n'y a pas de réforme un peu macro sur comment on s'occupe de ces victimes,
05:27comment on s'occupe de ces salariés qui ont été cassés par leur boîte, qui payent.
05:31Et il y en a beaucoup plus qu'on croit, en fait.
05:33C'est ça que vous nous dites aussi.
05:35Moi, j'ai forcément un prisme particulier parce qu'on ne vient pas me voir quand tout va bien.
05:39Bien sûr.
05:40Pourtant, ça me ferait du bien.
05:41N'hésitez pas à m'appeler si tout va bien.
05:43Je le ferai.
05:44Tous les jours.
05:46Donc, évidemment, j'ai une vision un peu pessimiste du monde du travail
05:55et qui n'est pas forcément complètement objective.
05:58Mais ce que je vois, c'est que j'ai de plus en plus de dossiers absolument dégueulasses, désastreux, révoltants.
06:07Et peu d'action.
06:10Les placards sont pleins.
06:12Pleins, pleins, pleins à craquer.
06:14Votre plus grande joie ?
06:16Ma plus grande joie, je pense que ce sont les moments passés avec mes enfants.
06:20Et puis aussi, évidemment, c'est ce coup de fil qu'on passe à la cliente ou au client
06:27quand on gagne un dossier, quand on a une supernego.
06:30Ça, c'est le meilleur moment de la journée.
06:32Alors, tout de même, pour revenir un petit peu sur cette place des femmes dans le monde du travail,
06:38c'est une évidence, chères auditrices,
06:41les femmes sont moins bien payées que les hommes sur leur site de travail respectif.
06:45Alice Fabing, vous nous donnez les chiffres INSEE de 22,3% de moins en 2022
06:51pour tout poste confondu, ce qui est quand même assez énorme.
06:56Et puis aussi, elles sont quand même souvent plus mal traitées.
06:58C'est ça que vous dites.
06:59En fait, les femmes sont beaucoup plus vulnérables dans le monde du travail
07:03parce qu'il y a la grossesse, il y a le harcèlement sexuel, évidemment.
07:08Ça fait 14 ans que je fais ce boulot, j'ai jamais eu un mec harcelé sexuellement.
07:12Ça arrive, il paraît pourtant.
07:14Ça arrive, mais alors je n'ai pas vu ça.
07:16Et paradoxalement, j'ai plus de clients hommes que de clientes
07:20parce que les femmes ont plus de mal à passer le cap d'aller voir une avocate.
07:25Elles ont tendance à ne pas se défendre.
07:27Pourquoi ? Parce que c'est la position victimaire qui pose un problème aussi, vous pensez ?
07:30Je pense, et puis elles n'ont pas l'habitude de prendre soin d'elles, de se défendre.
07:34Elles ont l'habitude de penser aux autres, elles vont se remettre en question.
07:37Grosso modo, un homme, il va venir me voir quand il a une mauvaise évaluation.
07:41Une femme, quand elle vient au cabinet, elle est au bout du rouleau en larmes
07:45et ça fait des mois qu'elle lutte.
07:47Et c'est que son corps lâche.
07:49Parce que finalement, elles sont plus fortes mentalement aussi, peut-être, non ?
07:52Oui, il faut gérer ce genre de situation.
07:54Évidemment, je pense qu'on est plus fortes que les hommes, de manière générale.
07:57On est plus résilients.
07:59Alors vous dites aussi un autre truc, Alice Fabing,
08:02c'est que seulement 4% de ces femmes qui sont harcelées portent plainte
08:05par peur de conséquences sur leur réputation
08:09quand l'impunité des agresseurs est quelque chose de commun, c'est normal.
08:12Exactement.
08:14Pourquoi elles ont peur de la réputation ?
08:16Parce que derrière, ça leur pose des problèmes ?
08:18Oui, parce qu'elles travaillent dans des milieux
08:21souvent un peu fermés, petits,
08:24avec beaucoup de concurrence,
08:27donc elles ont très peur de se faire blacklister partout.
08:30C'est d'ailleurs la grosse menace qu'on leur fait.
08:32Si tu l'ouvres, tu ne trouveras plus jamais de boulot ailleurs.
08:36Si tu pars en démissionnant avec que dalle,
08:38ou avec une petite rupture conventionnelle,
08:40sans indemnité supralégale,
08:42là on s'arrangera pour que tu puisses retrouver.
08:45Et donc s'il y a des auditrices à qui ça arrive,
08:47qui nous écoutent, c'est quoi le conseil à faire ?
08:49C'est déjà de constituer un dossier ?
08:50C'est-à-dire de bientôt garder toutes les preuves, c'est ça ?
08:52Toutes les preuves, de penser à l'enregistrement,
08:55parce que maintenant l'enregistrement est recevable aux civils.
08:59Donc l'enregistrement, surtout pour les cas de harcèlement sexuel,
09:02est extrêmement utile, parce qu'il n'y a pas forcément beaucoup d'écrits.
09:05Et puis c'est de susciter l'écrit, même avec les collègues.
09:08Et puis c'est d'alerter par écrit aussi son employeur,
09:11parce que ça, on va en avoir besoin dans le dossier.
09:14Donc un maximum de traces écrites ?
09:17Voilà, un maximum de traces écrites,
09:18et puis surtout de ne pas rester seule,
09:20de se faire entourer, d'en parler.
09:22Et de ne pas faire traîner trop longtemps non plus l'histoire ?
09:25Bien sûr.
09:26Après, il faut le temps de constituer le dossier.
09:28Il faut le temps de constituer le dossier,
09:29donc ça, ça prend quand même, je dirais,
09:32entre un et trois mois.
09:35Donc il faut tenir quand même trois mois.
09:36Retenir un petit peu le coup.
09:38Mais souvent, elles ont un problème de diagnostic, ces femmes.
09:42Elles n'osent pas dire, elles ne savent pas dire pourquoi elles sont mal.
09:46Et j'ai des clientes qui arrivent avec des textos.
09:48N'importe qui pourrait leur dire,
09:49ben oui, c'est du harcèlement sexuel.
09:51Mais elles ont besoin, de mon avis, d'expertes
09:54pour se sentir rassurées.
09:56À partir de quand, c'est du harcèlement ?
09:58Alors ça, c'est extrêmement...
10:01C'est une question qu'on se pose tous,
10:02parce que c'est un problème sociétal objectif en ce moment.
10:05Bien sûr.
10:06Alors, le harcèlement...
10:08Enfin, déjà, moi, ce que je dis toujours, c'est que
10:10quand on commence à aller au boulot avec la boule au ventre,
10:12c'est qu'il y a un problème.
10:14Ensuite, le harcèlement, c'est une question de ressenti.
10:18Et ce sont des agissements répétés qui vont,
10:21si vous voulez, détériorer les conditions de travail
10:24et éventuellement porter atteinte à la dignité,
10:27à la santé du salarié.
10:29Pour le harcèlement moral,
10:30donc il faut des agissements répétés.
10:32Mais en fait, c'est un droit qui est...
10:34Enfin, c'est une définition qui est très jurisprudentielle.
10:36Mais par exemple, une mise au placard,
10:38c'est du harcèlement.
10:39Une surcharge de travail, des heures supplémentaires non-stop,
10:42c'est du harcèlement.
10:44Donc ça, c'est défendable devant les prud'hommes ?
10:46Bien sûr.
10:47Après, il faut constituer le dossier,
10:49constituer les preuves.
10:51Mais ça se fait.
10:52Et c'est quoi les discriminations principales
10:54que vous voyez arriver dans vos bureaux ?
10:58Les discriminations sexistes.
11:00Sur les discriminations sexistes,
11:01il y a évidemment la discrimination salariale,
11:03les écarts de salaire.
11:05J'ai des dossiers sur des salariés membres de Comext
11:08avec des différences de 30%
11:10sur des postes équivalents,
11:12voire avec des femmes qui ont un score plus large.
11:1430% ?
11:1530%.
11:16C'est énorme.
11:17La discrimination à la maternité,
11:19parce que ça,
11:21c'est quelque chose que les femmes vivent.
11:23L'absence de promotion sous couverte de bienveillance.
11:26Tu as besoin de passer du temps avec ton bébé,
11:28peut-être que ce n'est pas le bon moment pour toi
11:30de postuler pour ce poste,
11:31pour cette promotion, etc.
11:33Et puis, la discrimination des femmes seniors,
11:35qui est un vrai fléau,
11:36et j'en ai de plus en plus,
11:38des femmes à qui on dit...
11:40Après 50 ans.
11:41Après 50 ans,
11:42t'es ménopausée, tu ne peux plus rien vendre,
11:44il faut que tu dégages.
11:46Un texto, on leur dit ça ?
11:47Un texto, bien sûr.
11:48C'est d'une violence crasse, parfois.
11:51Bon, on parle vrai sur Sud Radio,
11:54c'est « Dessin de femmes ».
11:55On est avec Élise Fabing,
11:57qui a écrit un livre qui s'appelle « Ça commence avec la boule au ventre ».
12:00C'est une avocate qui lève le tabou de la souffrance des femmes au travail.
12:03Et clairement, il y a une grosse souffrance.
12:06Donc, auditrice de Sud Radio,
12:08si jamais vous avez ce genre de soucis,
12:10n'hésitez pas à contacter Élise Fabing.
12:12Et surtout, vous restez avec nous, on revient tout de suite.
12:16Connect, expert en recrutement intérimaire.
12:18Rejoignez les 35 agences du groupe Connect
12:20pour des opportunités de carrière partout en France.
12:23Le groupe Connect présente...
12:25Sud Radio, « Destin de femmes », Judith Beller.
12:28Si vous nous rejoignez, bienvenue les copines, les copains,
12:31dans « Destin de femmes » sur Sud Radio.
12:32C'est l'émission du féminisme positif,
12:34c'est-à-dire le féminisme qui crée le lien,
12:36au lieu de cliver, tout simplement.
12:38Aujourd'hui pour vous, l'avocate Élise Fabing,
12:40qui est cofondatrice du cabinet Alchémiste Avocat
12:42et qui est spécialisée dans la défense des salariés de tous genres,
12:45mais surtout des femmes.
12:47Son livre « Ça commence par la boule au ventre »
12:49est sorti aux éditions Les Arènes.
12:51Alors, un autre des sujets qui vous tient à cœur, Élise Fabing,
12:54quand il s'agit du droit des femmes au travail,
12:56vous avez commencé à en parler un petit peu tout à l'heure,
12:58c'est la discrimination face à la maternité.
13:00Alors, vous le dites dans votre livre,
13:02« Une femme sur dix cache sa grossesse le plus longtemps possible
13:04par crainte de la réaction de son employeur. »
13:06On hallucine complètement quand on lit un truc comme ça.
13:08Alors, nous au cabinet, on a dû devenir des experts
13:11de la robe chasuble, de comment cacher sa grossesse.
13:14Parce qu'évidemment, on n'a pas d'autre choix
13:16que de conseiller à nos clientes, parfois, de planquer.
13:19Parce qu'elles sont en attente d'une promotion, d'une augmentation.
13:22Et on sait très bien que si elles annoncent leur grossesse,
13:26il y a de fortes chances pour qu'elles n'aient pas accès au poste.
13:29C'est fou ! Mais c'est quoi ? C'est une chance sur deux ?
13:31On en est là ?
13:32Il n'y a pas de statistiques, mais pareil.
13:35Sur les emplois précaires, par exemple.
13:37Après, pardonnez-moi, je me fais quand même l'avocat du diable.
13:41On est un patron, on a un com'ex, il y a une place qui se libère.
13:45On a besoin de quelqu'un d'engagé dans l'entreprise à 250%.
13:49La femme qu'on engage est enceinte.
13:52On se dit qu'elle va quand même planter le poste
13:54dans pas longtemps, pendant un certain nombre de mois.
13:56Pas très longtemps quand même.
13:57Combien de temps ?
13:583 mois et demi.
14:00C'est que dalle à l'échelle d'une boîte par rapport à un talent.
14:03C'est ça que vous lui répondriez au patron ?
14:06Bien sûr.
14:07Il y a un problème de performance pour l'entreprise en question aussi.
14:10Il y a un problème de performance.
14:11Mais après, on peut remplacer quelqu'un, mettre quelqu'un en intérim.
14:14On peut s'organiser, surtout dans une grosse boîte dans laquelle il y a un com'ex.
14:18Et puis, un poste de com'ex, c'est un poste de vision.
14:21Un intérimaire en com'ex, on n'a jamais vu, je pense, pour l'instant.
14:23Non, mais un intérimaire, je veux dire quelqu'un qui va occuper le poste en intérim.
14:28Mais bien sûr, on peut s'organiser et ça ne doit pas être une absence.
14:33Donc, ce n'est pas valable.
14:34Non, mais évidemment que ce n'est pas valable.
14:36Et puis, moi, je suis pour un congé paternité qui serait de durée égale.
14:43Évidemment, pour gommer cette différence de carrière.
14:48Qui se retrouve en fait à la fin, au moment de la retraite.
14:50Mais bien sûr, qui se retrouve au moment de la retraite.
14:53Et puis surtout, qui crée déjà une inégalité, à mon sens, au sein du couple.
15:00Puisque c'est la femme, la mère qui ne va pas travailler, qui va s'occuper du nourrisson.
15:05Et le père qui retourne au boulot assez rapidement et qui a moins de liens.
15:11Et qui ne va pas forcément rattraper ensuite la charge mentale qu'a sa conjointe
15:17sur l'éducation, le soin de l'enfant.
15:20Alors, il y a aussi cette réelle pression sociale, sociétale, sur le statut de la jeune mère
15:25qui doit rester productive, c'est-à-dire trois mois et demi.
15:28C'est quand même assez court quand on vient d'enfanter.
15:30Moi, je peux témoigner.
15:33C'est une vision de laquelle il est difficile de se détacher.
15:37Vous-même, vous en avez fait l'expérience d'ailleurs.
15:41Comment on fait pour gérer cette pression justement
15:43et réussir à quand même faire les choses de manière plus ou moins correcte ?
15:47On s'épuise.
15:48Moi, personnellement, je me suis un peu épuisée.
15:51Pour mon deuxième enfant, ça a été une période extrêmement épuisante.
15:58Mais c'est surtout que je pense qu'on se met la pression aussi toute seule parfois.
16:03Et puis, on a tellement peur de montrer nos faiblesses.
16:08Parce que quand on est une femme et qu'on est arrivé à un certain point de notre carrière,
16:14on est presque reconnaissante.
16:17Et donc, montrer toute faiblesse, ce serait reconnaître qu'on ne la mérite pas vraiment notre place.
16:23Et ça, c'est compliqué.
16:25Parce que les hommes, ils ne sont pas reconnaissants ?
16:27Beaucoup moins.
16:28Beaucoup moins, je pense.
16:30Et puis, il y a beaucoup de...
16:32Je vous parle évidemment de ce que je peux observer.
16:34Il y a moins de remise en question.
16:36Il n'y a pas de sentiment d'imposture ?
16:38Bien sûr que non.
16:39Alors qu'une femme, elle a beaucoup plus le syndrome de la bonne élève.
16:43Cette volonté d'être une wonder woman, elle va se remettre en question en permanence.
16:49Et elle a beaucoup plus de mal à accepter que parfois,
16:52le mauvais traitement qu'elle subit, il est systémique.
16:54Oui.
16:55Pas lié à elle, ni à sa performance.
16:57Mais c'est difficile de dire que ce n'est pas de notre faute.
16:59Bien sûr.
17:00Oui.
17:01Alors, pour revenir à votre propre expérience, vous, Élise Fabing,
17:04vous êtes avocate.
17:07Avocate, c'était vraiment sans savoir la spécialité.
17:09Depuis le départ, vous le dites, vous avez élu à l'IMI très jeune.
17:11Bravo, parce que moi, je n'ai pas élu à l'IMI à 8 ans.
17:14C'est votre chemin évidence.
17:17Oui.
17:18Votre chemin évidence depuis...
17:19Vous jouiez à l'avocat, au juge, tout ça.
17:21Avec les Playmobiles, avec les Barbies.
17:23Et toujours quelqu'un qui allait en taule.
17:25Vous avez essayé le conservatoire, mais finalement, non.
17:27Et puis, avocate.
17:28Oui, avocate.
17:29On vous a quand même montré un peu un autre chemin, en vous disant
17:31il y a ça aussi, et puis c'était...
17:33Oui, mais...
17:34Et même, je n'arrête pas d'accompagner des femmes
17:37qui sont en reconversion, qui réfléchissent.
17:40Et à chaque fois, je me dis, moi, qu'est-ce que je pourrais faire d'autre ?
17:43Et je n'ai pas d'idée.
17:44D'accord.
17:45Vous êtes heureuse là où vous êtes.
17:46J'adore.
17:47Et alors, c'est un stage qui a révélé le début de votre voie.
17:49Et alors, c'est un stage de votre voie.
17:51Alors, de votre voie pour la défense des salariés au travail.
17:54Quand la maître de votre distage vous a insultée carrément,
17:57quand vous lui a apporté votre arrêt de travail,
17:59parce qu'elle ne voulait tout simplement pas que sa responsabilité soit engagée
18:02si elle vous force à travailler, ce qu'elle allait faire en fait.
18:04Bien sûr, évidemment.
18:05Et là, tout d'un coup, boum, révélation.
18:07Voilà ce que je vais faire dans la vie.
18:09Oui, oui, oui.
18:10Parce que le travail, ça touche à tous les domaines de la vie privée.
18:16Moi, je peux l'observer.
18:17Je suis une cliente victime.
18:19Elles peuvent divorcer.
18:21Ça peut avoir un impact énorme sur la santé.
18:24C'est quelque chose de quotidien et d'essentiel.
18:28Et il fallait un peu de justice là-dedans.
18:31J'avais envie que ce soit mon combat.
18:33D'être une combattante de la lumière.
18:34Bien sûr, je suis une combattante.
18:36Et je suis une révoltée.
18:38Et en colère.
18:39Et en colère, toujours.
18:41Avec le sourire.
18:42Avec le sourire, parce que sinon, c'est épuisant, c'est fatigant.
18:45C'est fatigant pour les autres aussi.
18:47Et c'est important.
18:48Je suis en colère, mais je suis optimiste.
18:50On peut être en colère et optimiste, c'est intéressant.
18:52On peut être en colère et optimiste, évidemment.
18:54Et il faut être optimiste pour faire mon métier.
18:57Sinon, c'est trop dur.
18:59Quand on raconte cette histoire de cette maître de stage qui est une femme,
19:02qui est une avocate installée, etc.
19:04On a envie de dire qu'il coûte de la sororité.
19:06Parce qu'on n'arrête pas de nous bassiner avec la sororité.
19:08La sororité, j'adorerais.
19:13J'ai heureusement un réseau de femmes très, très aidant.
19:17J'ai aussi beaucoup d'alliés hommes.
19:20Les hommes sont féministes, il faut le dire.
19:22Oui, pas tous.
19:23Non, mais ils peuvent.
19:24Ils peuvent.
19:25Et heureusement.
19:26Et heureusement, parce que je ne vois pas comment un homme pourrait être contre l'égalité femmes-hommes.
19:31Surtout que ça fait avancer ses propres droits à lui.
19:33Il ne faut pas oublier ça aussi.
19:34Voilà.
19:36Mais non, la sororité, c'est compliqué dans le milieu professionnel,
19:39parce qu'on est aussi élevés pour être des rivales.
19:43C'est la compétition.
19:45Et puis, il y a aussi cette tradition, particulièrement aux barreaux,
19:49de j'en ai bavé pour y arriver.
19:51Je ne te laisse pas, je vais te faire baver.
19:53Je ne te laisse pas la place aussi facilement que ça.
19:55C'est un petit rite initiatique.
19:56Est-ce que ce n'est pas comme ça dans tous les métiers très exigeants ?
19:59Peut-être.
20:00Je ne suis pas sûre que ce soit tellement lié aux femmes.
20:02Qu'est-ce que vous en pensez ?
20:04Alors, j'ai l'impression que pour les femmes, c'est particulièrement prégnant.
20:11C'est un truc vraiment plus évident.
20:14Je pense qu'elles sont plus, parfois, plus sensibles à la pression
20:19et à l'emprise qu'on peut leur mettre.
20:21Ce fameux mentor tout puissant.
20:25Et il y a aussi le regard qu'on porte sur nous-mêmes, nous, en tant que femmes.
20:29Nous, les femmes, sur l'argent.
20:31Ça, ça m'intéresse aussi.
20:32Vous dites que notre rapport à l'argent, il est souvent faussé
20:35quand il s'agit de nous faire payer.
20:37C'est vrai.
20:38C'est quand même très bizarre, ça aussi.
20:39C'est-à-dire qu'on ne négocie pas nos salaires en arrivant.
20:41Extrêmement peu de femmes le font.
20:42Et d'ailleurs, c'est une des réponses des entreprises
20:45lorsqu'elles viennent demander à ce que leur salaire soit aligné
20:49sur celui de leurs homologues masculins.
20:51Oui, mais lui, il a négocié son départ, pardon, son salaire à l'arrivée.
20:56Alors que toi, non.
20:58Donc, il a plus.
20:59Donc, c'est difficile de rattraper le gap, maintenant.
21:02Donc, mesdames, négociez vos salaires.
21:05Mesdames, négociez vos salaires.
21:06Et même sur la négociation de départ,
21:08autant un homme va en vouloir toujours plus.
21:10Quand j'ai des femmes,
21:11quand je finis de rédiger leur requête,
21:13qui me disent,
21:14ah non, mais là, ils disent,
21:15on demande trop, je ne suis pas à l'aise.
21:20Donc, en fait, il faut devenir à l'aise
21:22avec ses propres prétentions, quoi.
21:24Parce qu'on sait qu'on connaît nos capacités
21:26et on sait combien ça vaut, en fait, tout bêtement.
21:28Exactement.
21:29C'est les faits, quoi, qui changent.
21:31Quand vous êtes avocate, c'est sur les faits que vous vous basez.
21:34Sur les faits et aussi sur le risque réputationnel.
21:39Évidemment, c'est quelque chose qui permet
21:42de transiger un bon nombre de dossiers.
21:45Alors, destin de femmes, chers auditeurs,
21:47vous le savez, puis je l'expliquais à Elise Fabing aussi,
21:49c'est un féminisme d'un nouveau genre,
21:51mais pas si nouveau que ça.
21:52On enfonce un peu des portes ouvertes
21:53parce que tout simplement,
21:54on dit que c'est avec les hommes
21:55que le combat pour le droit des femmes avancera,
21:57en le faisant devenir une cause commune.
21:59Qu'est-ce que ça vous évoque à vous, ça ?
22:02J'ai eu dans ma vie beaucoup d'alliés masculins.
22:05À la soirée de lancement de mon livre,
22:07beaucoup de mes clients sont venus.
22:09D'accord.
22:10Bon, il y en a quand même certains qui me demandent
22:12pourquoi j'écris pas sur eux aussi.
22:17Je vais le faire, mais...
22:19Vous allez écrire sur la souffrance des hommes au travail ?
22:21Non, non, non.
22:22Vous allez faire autre chose ?
22:23Je vais faire autre chose.
22:24Un petit roman ?
22:25Je sais pas, on verra.
22:26On a rendez-vous la semaine prochaine,
22:28comme toutes les semaines, évidemment.
22:30Destin de Femmes, le samedi, 13h30.
22:32Et c'est excellent.
22:3419h le dimanche.
22:35Je vous embrasse, chers auditeurs.
22:36À très vite.

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