Albert Guay était horloger et vendait des montres mais ce jour-là, pour cinq minutes de trop, il a échoué à commettre le crime parfait. Et quel crime ! A l'été 1949, au Canada, il n'a pas hésité à faire sauter un avion de ligne pour se débarrasser de son épouse. Elle n'a effectivement pas survécu à l'explosion en plein vol tout comme les 22 autres passagers et membres d'équipage qui se trouvaient à bord. Une tragédie inexplicable, source de supputations les plus diverses, jusqu'à imaginer un attentat politique en pleine guerre froide.
Retrouvez tous les jours en podcast le décryptage d'un faits divers, d'un crime ou d'une énigme judiciaire par Jean-Alphonse Richard, entouré de spécialistes, et de témoins d'affaires criminelles.
Regardez L'heure du Crime avec Jean-Alphonse Richard du 16 avril 2024
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00:00 14h30, 15h30, l'heure du crime sur RTL.
00:05 Jean-Alphonse Richard.
00:07 16 minutes après le décollage, l'avion, un DC3,
00:11 après avoir traversé le Saint-Laurent,
00:13 explose et s'écrase au lieu dit poétiquement
00:16 "le son du cochon".
00:17 On dénombre bientôt 23 cadavres.
00:19 Sans aucune difficulté, les enquêteurs établissent
00:21 que la catastrophe a été provoquée par une explosion dans la soutavagage.
00:24 Bonjour, Albert Guay était horloger.
00:28 Il vendait des montres, mais ce jour-là,
00:31 pour 5 minutes de trop, il a échoué à commettre le crime parfait.
00:35 Et quel crime ?
00:36 À l'été 1949, au Canada,
00:38 il a fait sauter un avion de ligne pour se débarrasser de son épouse.
00:42 Celle-ci n'a pas survécu à l'explosion en plein vol,
00:45 tout comme les 22 autres passagers et membres d'équipage
00:49 qui se trouvaient à bord.
00:51 Une tragédie inexplicable, source de supputations les plus diverses
00:55 jusqu'à imaginer un attentat politique en pleine guerre froide.
00:58 Les enquêteurs vont suivre, patiemment,
01:01 la trace de la dynamite et d'un bien mystérieux colis
01:04 pour arriver à un scénario rocambolesque.
01:07 Celui de ce mari qui voulait effacer sa femme.
01:10 Un époux volage et cynique
01:12 qui avait presque tout prévu pour ne jamais être inquiété.
01:15 Mais un grain de sable s'est glissé dans cette mécanique diabolique.
01:19 Comment ce personnage est-il devenu un tueur de masse
01:22 au nom d'une vengeance personnelle ?
01:24 Comment est-on remonté à lui ?
01:26 Et qui sont ses complices ?
01:28 Question posée aujourd'hui à nos invités.
01:30 L'affaire Albert Guay, 5 minutes de trop pour un assassinat en plein ciel.
01:35 C'était affreux, le sol est jonché de débris,
01:38 de bagages, de corps écrasés et de membres sectionnés.
01:42 L'enquête de l'heure du crime, la seule émission radio 100% fait d'hiver.
01:45 A tout de suite sur RTL.
01:48 Jean-Alphonse Richard sur RTL.
01:50 L'heure du crime.
01:52 14h30, 15h30, Jean-Alphonse Richard sur RTL.
01:58 L'heure du crime.
02:00 Dans l'heure du crime aujourd'hui, la spectaculaire affaire Albert Guay.
02:03 A l'été 1949, ce jeune horloger bijoutier du Québec
02:07 va apparaître derrière une catastrophe aérienne qui secoue le Canada.
02:11 23 morts dans le crash d'un avion de ligne,
02:14 en vol depuis seulement 10 minutes, aucun survivant.
02:17 Vendredi 9 septembre 1949, autour de 10h45,
02:23 les frères Patrick et Paul Simard campent en bordure de la voie ferrée
02:28 qui traverse une épaisse forêt de sapins,
02:30 non loin de leur village de Sault-aux-Cochons, à 65 km de la ville de Québec.
02:36 Au-dessus de leur tête surgit brusquement un avion de ligne qui vole à basse altitude.
02:41 C'est le DC-3 de la Canadienne Pacific Airlines
02:45 qui trois fois par semaine assure la liaison de Montréal jusqu'à la petite ville de Baie-Comeau.
02:50 Les frères remarquent de la fumée blanche s'échapper côté gauche de la carlingue,
02:55 puis entendent une violente explosion.
02:58 L'avion pique du nez, disparaît au milieu des arbres et s'écrase 2 km plus loin.
03:03 Trois quarts d'heure plus tard, le DC-3 est ventré et découvert dans la rocaille
03:07 et les arbres afflant de montagne, l'avion n'a pas pris feu.
03:10 C'était affreux, le sol était jonché de débris, de bagages, de corps écrasés et de membres sectionnés,
03:16 raconte un des frères Simard.
03:18 Aucun survivant, le lieu est isolé, accessible seulement par chemin de fer.
03:23 Les premiers policiers et un légiste arrivent sur place dans l'après-midi.
03:26 Bilan, 23 morts, dont trois enfants de 14 ans, 13 ans et 11 mois qui voyageraient avec leur mère.
03:35 Samedi 10 septembre, les secours dégagent les corps.
03:38 Les experts de la Canadienne pacifique et les policiers examinent la carcasse et les moteurs.
03:43 On leur a rapporté une forte odeur de poudre à fusil qui flottait après le crash.
03:48 Un vêtement en est imbibé.
03:51 Les spécialistes notent une trace d'explosion dans le compartiment à bagages numéro 1, à l'avant gauche.
03:57 Le plancher a volé en éclat.
03:59 13 septembre, quatre jours après la catastrophe, les autorités écartent l'accident.
04:04 Il s'agit d'un acte criminel.
04:06 Une bombe était à bord.
04:09 Des résidus de dynamite ont été retrouvés, ainsi que les restes d'un système de mise à feu actionné par un réveil.
04:15 Les experts disent avoir eu de la chance.
04:17 Tout d'abord parce que l'avion n'a pas brûlé, ses indices auraient été détruits.
04:22 Ensuite parce que l'appareil a décollé de l'aéroport de Québec à 10h25, avec cinq minutes de retard.
04:30 Si l'horaire normal avait été respecté, le DC-3 se serait écrasé dans le Saint-Laurent et aurait sombré.
04:38 Il aurait alors été impossible de trouver une preuve de l'attentat.
04:41 L'acte criminel agite les imaginations.
04:43 La bombe était-elle destinée à tuer trois hauts dirigeants d'une influente compagnie minière qui se trouvait à bord ?
04:50 À moins qu'il s'agisse, en pleine guerre froide, du premier attentat communiste sur le sol américain.
04:58 Les policiers de la Sûreté de Québec planchent sur la liste des passagers.
05:02 Dans le compartiment numéro un, il y avait onze bagages, des valises et trois colis embarqués lors de l'escale à Québec.
05:12 L'un est rempli de pièces auto, le deuxième de lingerie, le troisième a un contenu non identifié.
05:18 Surprise, le destinataire de ce paquet, un certain Albert Plouffe, n'existe pas et son adresse est fictive.
05:26 Le nom de l'expéditeur est lui aussi fictif.
05:29 L'employé du service des colis est interrogé. Il se souvient que ce paquet a été apporté par une femme brune et rondelette.
05:35 Elle n'était ni nerveuse ni pressée. Un chauffeur de taxi l'accompagnait.
05:40 Il l'a aidé à porter le colis et l'a posé sur la balance.
05:43 12,8 kg. Le chauffeur est retrouvé. Il confirme avoir pris cette cliente le 9 septembre à la gare du Palais.
05:50 Elle lui a dit de rouler doucement car elle craignait pour son colis une statuette.
05:54 Au retour, il l'a déposé dans le Vieux-Québec.
05:57 En attendant de retrouver la mystérieuse femme, la liste des passagers est passée au crible.
06:02 Les enquêteurs découvrent que le mari d'une victime du crash, Albert Gay, un bijoutier,
06:08 a passé récemment une nuit en prison pour avoir menacé avec un revolver une serveuse d'un restaurant.
06:14 Il est décrit comme un homme violent. La serveuse, Marie-Ange Robitaille, 18 ans, est entendue.
06:20 Pas très rassurée, elle confesse qu'Albert Gay est en fait son amant.
06:25 Elle sait que son épouse a péri dans l'avion.
06:28 Avant de partir, le policier la questionne à tout hasard sur la femme de l'aéroport.
06:33 Ce descriptif lui dit aussitôt quelque chose.
06:36 Cette femme s'appelle Marguerite Pitre.
06:39 Elle habite le quartier Saint-Roch au numéro 49 de la rue Monseigneur Gauvreau.
06:46 Et pour un coup de chance, et bien c'est un coup de chance, puisque les policiers sont allés très vite dans cette histoire.
06:52 Dès dans les heures qui suivent, les jours qui suivent le drame, ces policiers de Québec, la Sûreté de Québec,
06:59 a une bonne piste à creuser. Ils sentent évidemment que tout tourne autour de cette femme.
07:04 Marguerite Pitre, c'est la porteuse, ou ce serait la porteuse du colis piégé.
07:09 Mais pourquoi aurait-elle détruit un avion en tuant 23 personnes ?
07:12 Ça c'est un tout autre mystère. Bonjour Luc Bertrand.
07:16 Bonjour Monsieur Richard.
07:18 Merci infiniment d'être avec nous au Téléphone de l'heure du crime.
07:21 Vous êtes écrivain canadien, vous vivez au Québec, et vous êtes auteur du livre "Un crime sans nom"
07:28 "L'affaire de Sceaux aux cochons" publié aux éditions Sylvain Harvey.
07:32 C'est évidemment tout un livre très détaillé, une enquête très détaillée sur cette affaire extraordinaire.
07:38 Alors, on n'est là qu'au début, évidemment, de ce mystère. Il y a cet avion qui explose en plein vol,
07:43 ce 9 septembre 1949. Il y avait une bombe à bord.
07:49 La paix est revenue depuis quelques années déjà dans le monde occidental.
07:53 Tout de suite, c'est la stupéfaction, cet accident.
07:57 Oui, le fait que c'était un attentat, d'abord c'était une première en Occident.
08:02 Et donc le choc a été d'autant plus fort à ce moment-là, parce que personne n'aurait pu imaginer
08:10 qu'un cerveau humain pouvait concevoir une chose aussi horrible que celle-là.
08:16 23 personnes sont décédées, dont 4 membres d'équipage.
08:20 Il y avait des enfants en bas âge, donc c'est quelque chose de complètement immonde et odieux.
08:26 Les hypothèses, elles vont se succéder, Luc Bertrand.
08:30 La mort de personnes importantes à bord, ça pourrait être aussi un attentat politique, qui sait ?
08:36 Au tout début, on s'est demandé, parce qu'il y avait des hommes d'affaires importantes des États-Unis,
08:41 dans l'avion, si ce n'était pas une question de guerre froide.
08:45 Aussi, les Russes ne pouvaient pas être impliqués, mais c'était assez loufoque comme postulat.
08:52 Et finalement, ces pistes-là ont été abandonnées très vite.
08:58 Les policiers, d'ailleurs, très vite aussi, abandonnent la piste d'un problème technique de l'avion.
09:03 Pourquoi vont-ils éliminer cette piste ?
09:07 La police va montrer beaucoup d'efficacité dès le départ.
09:11 On va soupçonner, dès le début, qu'il ne s'agit pas d'un accident, pour deux raisons.
09:17 D'abord, les réservoirs d'essence de l'avion n'ont pas tous brûlé,
09:23 ce qui montre qu'à ce moment-là, il ne s'agissait pas d'une défectuosité de l'avion, d'une part.
09:29 D'autre part, les premiers secouristes qui vont arriver sur le site de l'écrasement
09:34 vont découvrir une forte odeur de dynamite.
09:38 Une odeur qui n'a aucune mence raison d'être dans le cas d'un accident "normal".
09:45 Et c'est justement dans ce contexte-là que la police va orienter ses recherches très vite.
09:52 - Bonjour Stéphane Bertome. - Bonjour.
09:54 - Merci infiniment d'être au téléphone aujourd'hui, de l'heure du crime.
09:57 Vous êtes ancien policier et vous aussi vous vivez au Canada.
10:01 Vous êtes créateur et réalisateur de podcast, votre dernier podcast "Contre-enquête".
10:05 On le trouve sur toutes les plateformes d'écoute, avec chaque jeudi un nouvel épisode,
10:09 sur une affaire criminelle. C'est tout à fait passionnant.
10:11 Il faut aller écouter ce podcast "Contre-enquête", signé Stéphane Bertome.
10:15 Stéphane Bertome, je l'ai dit en préambule, vous êtes ancien policier.
10:19 La Sûreté du Québec travaille très bien dans cette affaire.
10:22 Et très précisément, tout d'abord il y a la liste des colis.
10:26 Ça c'est évident, on va l'examiner tout de suite cette liste.
10:30 - Oui, on va l'examiner. Ils ont fait un travail d'enquête classique.
10:33 Il faut dire qu'ils ont quand même joué de chance,
10:37 ce qui n'est pas toujours courant dans les affaires criminelles.
10:39 - Et tant mieux, ça existe. - Oui, ça existe de temps en temps.
10:42 Il faut le souligner. C'est-à-dire que l'avion ne s'est pas désintégré,
10:45 il n'a pas pris feu, comme vous l'avez dit, il n'est pas tombé dans le Saint-Laurent.
10:48 Il y a une liste de passagers qui a été établie et une liste de bagages
10:52 qui est quand même déjà à l'époque assez avant-gardiste.
10:55 Et puis il y a ces traces d'explosifs qui sont découvertes rapidement,
10:58 et le dispositif.
10:59 Donc bien sûr que la police fait très bien son travail,
11:02 ils sécurisent la zone d'écrasement,
11:06 et tout de suite ils font de façon très méticuleuse le début de l'enquête.
11:10 Ils sont accompagnés du laboratoire de médecine légale
11:12 et de police de technique scientifique de Montréal,
11:16 qui était déjà très en avance à l'époque.
11:18 - Oui, c'est innovant, j'ai vu ça. Il y a déjà des experts à l'époque,
11:21 je ne savais pas, je l'ignorais.
11:23 - Exact. On souligne Jean-Marie Roussel et le chimiste Robert Péclet
11:26 qui étaient vraiment des avant-gardistes dans le domaine,
11:28 qui ont fait avancer cette enquête aussi.
11:30 Donc l'enquête est partie très rapidement dans une très bonne direction,
11:34 nonobstant le fait, comme vous le disiez, qu'il y a eu des suspicions
11:37 sur la guerre froide, on était en pleine guerre froide,
11:40 donc on était dans la crainte du communisme absolu.
11:44 - Alors, il y a la liste des passagers, vous l'avez dit, qui existe aussi,
11:47 elle est très précise. Ils regardent le profil de tous ces passagers,
11:50 et puis ils regardent leurs proches, évidemment.
11:52 Dans cette liste, il y a un bijoutier, Albert Guay.
11:55 Alors lui, il retient l'attention parce qu'il a passé une nuit en prison,
11:59 il est réputé violent. C'est pour ça finalement qu'on s'intéresse un peu plus à lui ?
12:04 - On s'intéresse à lui comme le mari de l'une des victimes,
12:07 à partir du moment où on commence à considérer qu'il ne s'agit peut-être pas
12:11 d'un attentat politique ou autre, on penche vers une thèse un peu plus
12:17 de droit commun, comme on dit en Europe, et partant de là,
12:21 on s'intéresse à toutes les personnes qui ont partie prenante avec les victimes.
12:25 Et effectivement, Albert Guay, tout de suite, il a un profil qui retient l'attention
12:28 parce que c'est un individu qui a attiré déjà un petit peu le regard sur lui,
12:34 il fait beaucoup parler de lui, il a effectivement eu des problèmes.
12:38 On découvre très vite qu'il a une maîtresse, comme on avait dit.
12:42 Donc là, le tableau commence à se noircir un petit peu pour lui et ça va s'aggraver.
12:47 - Autant de témoins intéressants qui vont se changer en suspects de tout premier ordre.
12:52 L'affaire Albert Guay, 5 minutes de trop pour un assassinat en plein ciel.
12:56 Pourquoi aurais-je tué ma femme ? C'était terminé depuis bien longtemps entre nous.
13:01 L'enquête de l'heure du crime, on se retrouve dans un instant sur RTL.
13:05 14h30, 15h30, l'heure du crime sur RTL.
13:09 Jean-Alphonse Richard.
13:11 14h30, 15h30, l'heure du crime sur RTL.
13:16 - Au programme aujourd'hui de l'heure du crime, l'affaire Albert Guay,
13:19 ce bijoutier de Québec n'a rien d'un terroriste.
13:22 En septembre 1949, son nom apparaît pourtant derrière l'explosion d'un avion commercial.
13:27 23 morts, dont sa femme est-il lié à cette catastrophe ?
13:32 Jeudi 15 septembre 1949, les policiers de la Sûreté québécoise
13:36 commencent à planquer devant le 49 de la rue Monseigneur Gauvreau.
13:40 Ils surveillent le domicile de Marguerite Pitre, soupçonnée d'avoir apporté à l'aéroport le colis qui a fait exploser l'avion.
13:48 Mais la femme ne se montre pas.
13:50 Les enquêteurs ont appris qu'on la surnomme le corbeau, car elle est toujours vêtue de noir.
13:55 Elle est souvent décrite comme menteuse, manipulatrice, autoritaire, prête à tout pour empocher un peu d'argent.
14:01 20 septembre, Marguerite Pitre est hospitalisée.
14:04 Elle aurait fait une tentative de suicide.
14:06 Trois jours plus tard, la police l'interroge.
14:09 On lui dit qu'on l'a reconnue comme étant la femme au colis.
14:12 Elle dément, puis finit par s'expliquer.
14:15 C'est le bijoutier albergué qu'elle connaît très bien qui lui a remis ce paquet le 9 septembre au matin.
14:21 Elle a accepté cette course jusqu'à l'aéroport car elle lui devait beaucoup d'argent, 600 dollars.
14:26 Il lui a promis d'effacer la dette en échange de ce service.
14:29 Elle jure qu'elle ignorait tout du contenu du colis.
14:33 Marguerite Pitre ajoute qu'il y a quelques jours, le bijoutier gay est revenu chez elle.
14:38 Il lui a montré un article de journal indiquant qu'on recherchait une femme.
14:43 Il lui a alors dit qu'elle allait finir à la potence.
14:46 Elle n'a pas compris pourquoi, mais il lui a ordonné de se suicider.
14:49 Il avait apporté des pilules.
14:51 Il lui a fait écrire une lettre d'adieu où elle disait avoir posé une bombe dans l'avion pour tuer le bijoutier albergué.
14:58 A qui elle devait beaucoup d'argent, elle ignorait qu'il n'avait pas pris l'avion.
15:03 "Je ne comprenais rien à tout ça", dit la femme.
15:06 Vendredi 23 septembre, jour de ses 31 ans, albergue est interpellé.
15:12 Face au policier, il apparaît hautain.
15:14 Il déclare qu'il n'a rien à voir avec cette catastrophe.
15:17 Il n'a jamais remis aucun colis à Marguerite Pitre et ne lui a jamais demandé de se suicider.
15:23 Il assure être en deuil de son épouse Rita, avec qui il était marié depuis 8 ans et qui était la mère de leur fille.
15:29 A propos de sa relation adultère avec la serveuse, il affirme que sa femme était au courant.
15:34 "Il y avait bien longtemps que tout était terminé entre nous", affirme-t-il.
15:39 Si Rita a pris cet avion le 9 septembre, c'est effectivement à sa demande car il vend des bijoux.
15:46 Il s'approvisionne à Bécomo.
15:48 On lui fait remarquer que le jour du départ, il a acheté une assurance.
15:51 10 000 dollars en cas d'accident de l'avion.
15:54 Après 24 heures d'interrogatoire, albergue est inculpé d'assassinat.
15:58 Les policiers sont persuadés que le suspect avait l'intention de refaire sa vie avec la serveuse.
16:03 Le coût d'un possible divorce étant exorbitant à l'époque, il aurait choisi d'en finir avec son épouse,
16:10 quitte à faire exploser l'avion.
16:12 Le bijoutier dément un tel scénario.
16:16 Mardi 4 octobre 1949, albergue est amené au Palais de Justice de Québec
16:21 pour le début de l'enquête préliminaire.
16:23 Un millier de curieux l'attendent pour le conspuer et l'insulter.
16:27 23 témoins défilent au fil des jours.
16:29 Marguerite Pitre confirme que trois semaines avant le drame,
16:32 Gueye lui a demandé de lui procurer de la dynamite.
16:35 Il lui a dit qu'il voulait défricher un terrain.
16:38 Le frère de Marguerite, généreux, rué, la cinquantaine,
16:42 un handicapé qui se déplace avec des béquilles, est également appelé à témoigner.
16:46 C'est lui, dans son atelier, qui a fabriqué la bombe équipée d'un détonateur ?
16:51 C'était à la demande du bijoutier.
16:53 Rué explique qu'on lui a dit que la bombe était destinée à détruire un arbre
16:59 sur un terrain qu'il venait d'acheter.
17:01 Après, il m'a dit de ne pas parler de tout ça, a surgir une erreur rué, en parlant du bijoutier.
17:07 Le frère et la sœur répètent qu'ils n'étaient pas au courant du projet funeste d'Albert Gueye.
17:14 Mais est-ce qu'ils disent la vérité, ce frère et cette sœur ?
17:19 C'est la question que se posent les juges.
17:21 Ces complices ignoraient-ils tout de l'utilisation de cette bombe ?
17:24 On leur a dit que c'était pour défricher un terrain.
17:26 Mais qu'y faut-il croire dans cette histoire ?
17:28 On va voir dans la suite de l'honneur du crime que le bijoutier,
17:32 qui risque la peine de mort, va être jugé.
17:35 Il risque la pendaison et on va voir ce qu'il va raconter lors de ce procès spectacle.
17:40 Alors, évidemment, dans cette affaire, le maillon faible, c'est Marguerite Pitre.
17:44 Cette femme qui a porté le colis jusqu'à l'aéroport.
17:48 Stéphane Bertomé, vous êtes l'un de nos invités aujourd'hui dans l'heure du crime.
17:51 On vous retrouve ancien policier, aujourd'hui créateur et réalisateur de podcast.
17:55 Et vous vivez au Canada, vous connaissez bien ces dossiers criminels canadiens.
17:59 Vous en faites souvent, d'ailleurs, des podcasts.
18:01 Marguerite Pitre, celle qui porte le colis, elle ne peut pas inventer tout ça à propos d'Alberguet.
18:06 Elle est forcément impliquée dans cette histoire ?
18:09 Oui, oui, elle est impliquée dans cette histoire.
18:12 Vous savez, ça sent un petit peu la misère sociale, tout ça.
18:15 C'est-à-dire que ce sont des gens extrêmement... qui sont dans la pauvreté,
18:18 qui ne sont pas très instruits non plus.
18:20 On est dans un contexte particulier, qu'on n'a peut-être pas le temps d'expliquer.
18:24 Mais la population francophone, à l'époque, est encore en retard par rapport au milieu anglophone,
18:33 particulièrement riche et aisé.
18:35 Donc on est vraiment dans un contexte, un tissu social, beaucoup plus pauvre,
18:38 beaucoup moins éduqué, avec des gens qui, finalement,
18:43 oui, se rendent compte peut-être qu'ils font quelque chose d'illégal,
18:46 mais qui ne mesurent peut-être pas complètement la portée de leurs gestes.
18:49 C'est un peu bizarre de dire ça aujourd'hui.
18:51 Mais il y a un mélange d'amateurisme et d'incroyables idées de la part d'Albert Gay
18:58 à faire cette bombe, mais de l'amateurisme derrière,
19:00 d'envoyer des gens qu'il connaît, qui sont des proches à lui et qui lui doivent de l'argent.
19:03 - Alors c'est intéressant ce que vous racontez Stéphane Bertomé,
19:06 parce que ça veut dire, en quelque sorte, et je traduis un petit peu votre pensée,
19:09 c'est que Albert Gay, le bijoutier qui lui est instruit,
19:12 il a un commerce, il a même de l'argent, les affaires marchent plutôt pas si mal.
19:18 Albert Gay, il est totalement machiavélique,
19:21 il se sert de ces pauvres personnes pour arriver à ses fins, c'est ça ?
19:24 - Oui, il est assez manipulateur.
19:26 Ça sortira d'ailleurs pas mal au procès,
19:29 puisqu'on voit qu'il ne veut pas partir à la potence tout seul.
19:33 Mais oui, il est assez manipulateur.
19:35 Et puis, vous savez, il y a aussi tout le contexte de l'époque,
19:38 le contexte journalistique, où on aimait bien diaboliser les auteurs d'actes criminels,
19:43 et en particulier les femmes.
19:45 Marguerite Pietre, dite "le corbeau",
19:48 déjà, ça, on dit long,
19:50 Marguerite Pietre, dite "le corbeau",
19:52 va passer pour une femme machiavélique, etc.
19:55 Moi, j'ai l'impression, en connaissant un petit peu le dossier,
19:57 que c'est malheureusement quelqu'un qui s'est retrouvé embarqué dans une situation qui la dépassait.
20:02 Elle était peut-être consciente de ce qu'elle faisait, c'est difficile à dire,
20:05 mais elle devait de l'argent, Albert Gay,
20:08 et elle a peut-être vu là une occasion de se libérer de cette dette qui était très lourde,
20:12 600 dollars à l'époque, c'était vraiment beaucoup.
20:14 Luc Bertrand, on vous retrouve dans cette heure du crime,
20:16 vous êtes écrivain canadien, vous vivez là-bas, dans votre pays,
20:20 auteur du livre "Un crime sans nom, l'affaire de Sceaux-au-Cochon",
20:25 c'est l'endroit où l'avion s'est écrasé,
20:28 livre publié aux éditions Sylvain Harvey,
20:31 qu'est-ce qu'il raconte Albert Gay lorsqu'il est arrêté ?
20:34 En fait, il nie, il ne dit pas grand-chose.
20:37 Sa ligne de défense, c'est qu'à l'encontre des faits,
20:41 il va dire qu'il n'y a rien à voir là-dedans,
20:44 que sa relation avec Marie-Ange Robitaille était déjà terminée,
20:49 mais ce n'est rien de très solide.
20:53 Alors, ce n'est rien de très solide, vous nous dites Luc Bertrand,
20:58 mais il fait disparaître son épouse, mais aussi, il pense déjà à la suite.
21:04 Effectivement, Albert Gay va prendre une assurance de 10 000 dollars
21:10 sur la vie de son épouse, il va beaucoup insister
21:13 pour que son épouse prenne cet avion-là ce matin-là, du 9 septembre 1949,
21:19 et ce qu'il espérait, c'était de faire la belle vie ensuite avec sa maîtresse.
21:25 Ceci dit, c'est important de le mentionner,
21:28 on va se découvrir très vite que la maîtresse en question,
21:32 qui s'appelle Marie-Ange Robitaille, n'était pas impliquée du tout dans le complot,
21:36 et que même elle avait mis fin à sa relation avec Albert Gay
21:41 avant l'attentat du 9 septembre 1949.
21:45 Stéphane Berthomé, juste un mot, non pas technique, mais c'est un point de droit,
21:50 au Canada, il y a cette espèce d'enquête préliminaire qui est publique,
21:54 qui est un pré-procès finalement, ça sert à confirmer
21:57 que les personnes doivent être bien renvoyées devant un tribunal, c'est ça?
22:01 Oui, ça sert en fait à s'assurer que la couronne,
22:04 puisque ici, pour aller au procès, il faut que le procureur,
22:08 la couronne en l'occurrence, puisqu'on est dans un système de la commande west,
22:11 du système anglo-saxon, estime qu'il y a toutes les chances d'obtenir une condamnation.
22:18 Et donc, cette enquête, qui est à la fois une enquête policière,
22:22 elle est menée par la Sûreté du Québec, qui est le service provincial,
22:25 elle est destinée à collecter des preuves et à assurer les procureurs
22:29 qu'ils vont avoir la capacité à faire condamner les individus.
22:33 Un petit élément intéressant dans ce dossier, c'est que vous le constaterez,
22:37 il n'y a pas clairement, comme aujourd'hui, de preuves techniques, scientifiques,
22:42 il n'y a pas d'empreintes digitales, il n'y a pas d'ADN,
22:45 il n'y a rien qui relie Albert Guay scientifiquement au crime,
22:53 et pourtant, il va être condamné par un faisceau d'éléments.
22:56 Oui, qui relie au crime et au colis en tout cas, c'est vrai qu'il n'y a pas d'empreintes,
23:02 il n'y a pas effectivement, ça c'est intéressant, j'avais pas vu ça sous cet angle,
23:05 mais il n'y a pas de preuves matérielles de son implication.
23:09 Luc Bertrand, on sait qu'il n'est pas très fréquentable, ce bijoutier Albert Guay,
23:14 on va apprendre qu'il a essayé de tuer sa femme, mais avant la vie, en demandant à quelqu'un, c'est ça ?
23:21 C'est une très bonne question, il va essayer effectivement de convaincre quelqu'un,
23:27 autour de 500$, d'empoisonner son épouse, la personne va refuser,
23:33 il va d'ailleurs témoigner plus tard au procès, ce qui n'aidera pas Guay,
23:37 mais lui il pense que ça va camoufler son acte, le fait de tuer 23 personnes plutôt qu'une seule,
23:45 et comme on va le voir au procès, son dossier n'est pas très solide du côté de la défense.
23:54 Le bijoutier continue à plaider non coupable, mais c'est effectivement l'heure du procès, il joue sa tête.
24:00 L'affaire Albert Guay, 5 minutes de trop pour un assassinat en plein ciel,
24:05 entre la haine de votre épouse et le vice pour votre maîtresse,
24:08 vous avez choisi le vice pour un crime diabolique.
24:11 L'enquête aujourd'hui de l'heure du crime, le mari est-il le seul coupable ?
24:15 On se retrouve dans un court instant sur RTL.
24:19 14h30, 15h30, l'heure du crime sur RTL.
24:23 L'heure du crime, Jean-Alphonse Richard, jusqu'à 15h30 sur RTL.
24:28 Ce qu'il s'agit de savoir, ce n'est pas tant que Mme Petre ait transporté le paquet
24:32 qui devait provoquer la tragédie clancée, mais bien de savoir si elle a volontairement et si à main participé.
24:37 Et je tremble à l'idée que cette femme, qui dénonçant elle-même Albert, faisant confiance à la justice,
24:43 je tremble à l'idée que cette justice l'envoie un jour à l'échafaud.
24:47 Retour, aujourd'hui, dans l'heure du crime, sur l'affaire Albert Guay.
24:50 Cet horloger bijoutier est accusé d'avoir fait sauter un avion de ligne 23 morts,
24:54 dans lequel se trouvait son épouse.
24:56 Un assassinat maquillé en catastrophe aérienne, février 1950, presque 6 mois après le crash, il est jugé.
25:04 Jeudi 23 février 1950, Albert Guay, 32 ans, cravate noire et complet sombre,
25:10 est devant le tribunal de la ville de Québec.
25:12 Il plaide non coupable pour l'assassinat de Rita Morel, son épouse.
25:17 Pendant de longues journées, les débats se perdent en expertise technique.
25:20 Marguerite Pitre, la porteuse du colis piégé et généreux heureux, et son frère qui a fabriqué la bombe,
25:26 répètent qu'ils ignoraient tout du projet criminel de l'accusé.
25:30 On s'interroge toutefois sur leur bonne foi, innocents ou complices ?
25:34 Un témoin vient raconter que Guay, 5 mois avant l'accident, lui avait offert 500 dollars pour empoisonner sa femme.
25:40 Il avait refusé.
25:42 14 mars, après 3 semaines de procès et 17 minutes de délibérés, Albert Guay est condamné à mort.
25:49 Entre la haine que vous aviez contre votre épouse et le vice qui vous attachait à une jeune fille,
25:54 vous avez choisi le vice pour exécuter un crime diabolique, indique le juge.
25:59 La date de l'exécution par pendaison est fixée au 23 juin, mais Albert Guay est bien décidé à gagner du temps.
26:07 Il dénonce des preuves, remplies de fausses témoignages.
26:10 Il accable Marguerite Pitre et son frère en laissant entendre que ce sont eux qui ont tout manigancé.
26:16 « Ils croyaient que j'étais à bord de l'avion, c'est moi qu'ils voulaient tuer », laissent-ils entendre.
26:21 « Si d'autres personnes doivent être recherchées par la justice, elles le seront, soyez sans crainte », assure le procureur.
26:27 Le frère et la sœur vont finir par être arrêtés.
26:33 Et on retrouve dans cette heure du crime Luc Bertrand.
26:37 Vous êtes écrivain, vous vivez au Canada, écrivain canadien, auteur du livre « Un crime sans nom »,
26:41 « L'affaire de Sceaux-Cochon », « L'endroit où s'est écrasé l'avion »,
26:44 livre publié aux éditions Sylvain Harvey.
26:47 Vous êtes le meilleur connaisseur de cette affaire Luc Bertrand.
26:50 Quelle attitude est-ce qu'il a à son procès, Albert Guay, le bijoutier ?
26:54 Il a une attitude très désinvolte.
26:57 Il agit de façon à faire croire qu'il n'a strictement rien à voir dans cette histoire-là.
27:03 Il ne sait pas trop pourquoi il se retrouve dans un tribunal.
27:07 C'est une attitude arrogante.
27:10 On l'entend chanter dans sa cellule.
27:12 Il prend du poids, il mange beaucoup.
27:15 Il n'a pas l'air de réaliser exactement l'énormité des accusations qui pèsent sur lui,
27:21 et surtout l'énormité de son crime.
27:23 En fait, ce que vous nous dites, c'est qu'il est persuadé qu'il va s'en sortir, ce bijoutier.
27:29 Oui, effectivement. Ça a toujours été un peu comme ça dans sa vie.
27:32 C'était un enfant qui était très gâté.
27:36 Il a toujours obtenu pas mal de ce qu'il voulait dans la vie.
27:40 Il a courtisé Rita Morel, qui était une très belle femme, dont il veut maintenant se débarrasser.
27:46 Donc, maintenant qu'elle est morte, il ne voit pas pourquoi sa bonne étoile l'abandonnerait.
27:53 Le système judiciaire va en décider autrement.
27:57 C'est quand même incroyable cette attitude de cet homme, qu'il faut bien le dire.
28:01 Là, il est condamné à mort.
28:03 À l'époque, c'est la pondaison au Canada, mais il continue à nier, à être assis sur ses certitudes.
28:09 Stéphane Berthomé, vous êtes ancien policier, vous vivez au Canada,
28:13 vous êtes réalisateur de podcasts criminels qu'on peut retrouver sur toutes les plateformes d'écoute.
28:19 Stéphane Berthomé, il y a une surprise dans cette histoire.
28:23 Les deux complices, il n'y a pas d'autre terme,
28:27 puisque la femme a transporté la bombe, peut-être elle n'y aurait, mais en tout cas, elle n'y pas les fait.
28:32 Son frère a fabriqué la bombe.
28:35 Ils disent que tout ça était à la demande de Dalberguet, ça on peut bien les croire.
28:39 Mais ils ne sont cités que comme témoins à ce procès, ce qui est étonnant.
28:42 Oui, en fait, c'est effectivement une particularité de l'époque qu'on voit plus reproduire aujourd'hui.
28:47 C'est qu'on les a envoyés devant les tribunaux en deux étapes.
28:52 Ça se fait aujourd'hui dans certains très, très grands procès,
28:56 où on considère qu'un nombre de 200 ou 300 suspects prévenus, c'est trop important.
29:02 On est d'accord, bien sûr.
29:03 Par étapes, mais là, c'est vraiment une particularité.
29:07 On envoie d'abord Albert Guay en cours et ensuite, on va s'intéresser à ses complices.
29:13 Alors, je n'ai pas eu d'explication, malgré les recherches sur le pourquoi de ces deux étapes.
29:19 J'ai l'impression qu'on a décidé, compte tenu du fait qu'on avait des éléments très clairs contre Albert Guay,
29:24 de l'envoyer en jugement et de voir après ce que ça allait donner avec les autres complices.
29:30 Ce qui est vraiment assez étonnant, c'est une particularité,
29:33 puisque ce frère et cette sœur, on va les retrouver dans, on va le voir dans la suite de l'or du crime, dans d'autres procès.
29:38 Luc Bertrand, encore une question pour vous.
29:40 Les aveux tardifs du bijoutier, évidemment, c'est pour retarder son exécution,
29:46 mais on a l'impression qu'il y a pris goût à ce spectacle et qu'il veut qu'on parle encore de lui.
29:53 Effectivement, c'était quelqu'un de profondément narcissique, profondément vaniteux.
30:00 Il a probablement retiré un certain plaisir de voir à quel point son nom était imprimé dans les journaux.
30:08 Il faisait la manchette à travers le monde, parce que ça n'a pas juste touché le Québec.
30:13 Il y a eu une attention journalistique qui a été portée envers cette affaire-là,
30:19 qui venait de partout, des États-Unis notamment.
30:21 Albert Guay, condamné à être pendu, mais l'affaire n'est pas terminée.
30:27 Deux complices vont eux aussi être jugés.
30:31 L'affaire Albert Guay, 5 minutes de trop pour un assassinat en plein ciel.
30:35 Les mensonges de Madame Corbeau, cette femme maléfique.
30:40 L'enquête de l'heure du crime, on se retrouve dans un instant sur RTL.
30:44 L'heure du crime, Jean-Alphonse Richard, jusqu'à 15h30 sur RTL.
30:48 L'heure du crime, consacrée aujourd'hui à l'affaire Albert Guay.
30:58 À l'hiver 1950, cet horloger bijoutier de Québec a été condamné à la pendaison pour avoir fait exploser un avion de ligne.
31:06 23 morts, le but était de tuer sa femme, passagère.
31:10 Deux de ses complices sont rattrapés par la justice.
31:13 Mardi 6 juin 1950, deux mois et demi après la condamnation à mort d'Albert Guay,
31:18 l'horloger et artificier généreux Rué est arrêté par la police.
31:23 Cet homme, paralysé des jambes et qui n'était jusque-là qu'un simple témoin, est accusé d'avoir menti.
31:29 Il ne pouvait pas ignorer à quoi allait servir la bombe qu'il avait fabriquée.
31:34 Rué continue à protester de sa bonne foi, mais les juges considèrent qu'il ment.
31:39 Il est accusé de complicité de meurtre.
31:41 Six mois après son arrestation, il est condamné lui aussi à la pendaison.
31:46 La justice de Québec réserve le même sort à sa sœur, Marguerite Pitre, la porteuse du col immortel.
31:52 Au mois de mars 1951, son procès ne va durer qu'une dizaine de jours.
31:56 Les témoignages négatifs vont s'accumuler sur cette femme décrite comme maléfique.
32:01 "Les mensonges de Madame Corbeau dévoilés", écrit un journal.
32:05 Condamnée elle aussi à la peine de mort.
32:09 Vendredi 12 janvier 1951, le bijoutier albergué ne peut plus retarder l'heure de son exécution.
32:15 À minuit 26, prison de Bordeaux à Québec.
32:19 Le bourreau actionne la trappe et le condamné glisse corde au cou dans le vide.
32:24 Généreux Rué et Marguerite Pitre subiront le même sort en 1952 et 1953.
32:31 Quelques jours auparavant, Marguerite Pitre avait lancé au journaliste.
32:36 "Ils n'ont pas le droit de me faire ça !"
32:39 Et pourtant, elle a été condamnée, Marguerite Pitre.
32:44 Elle avait des enfants, elle avait une famille, mais les jurés ne l'ont pas vraiment tenu compte.
32:49 Stéphane Bertomé, ancien policier, vous vivez au Québec et au Canada, vous connaissez bien cette affaire.
32:54 Vous réalisez de nombreux podcasts criminels,
32:57 et vous avez plongé dans ce dossier pour nous, pour l'heure du crime.
33:02 Alors, il y a le frère et la sœur qui sont désignés comme des complices.
33:07 On ne peut pas dire que la justice canadienne-québécoise est faite à l'époque dans la dentelle dans cette histoire.
33:15 Non, la clémence ne faisait pas vraiment partie du profil de l'époque.
33:21 Il apparaît quand même qu'ils ont participé aux faits d'une façon ou d'une autre.
33:27 Ils se défendent en disant pour le concepteur de la bombe qu'ils pensaient que c'était pour faire exploser du matériel, des souches,
33:36 pas du tout pour un attentat.
33:38 Et elle a dit finalement qu'elle ne pensait pas que c'était pour aller faire exploser cet avion.
33:44 Il reste quand même qu'il y a des éléments un peu à leur encontre, mais tout ça c'est très subjectif.
33:48 Vous savez le témoignage du chauffeur de taxi qui dit qu'elle l'a demandé de rouler doucement parce que son colis...
33:54 La statuette là.
33:57 Tout ça c'est très très très fragile quand même, ce qui va d'ailleurs enclencher un débat après.
34:03 C'est aussi la personnalité d'Alberguet qui écrase un petit peu cette affaire, vous l'avez dit, ça désinvolture son côté un petit peu perdant radical.
34:12 Quand il sait qu'il est condamné, il va essayer d'entraîner tout le monde avec lui dans sa perte.
34:17 Après ça a soulevé quelques questions dans l'opinion publique.
34:21 Les éléments sont quand même là, ils ont participé indirectement ou directement au fait.
34:25 Oui parce que très franchement Stéphane Bertomé lui, il n'avait plus rien à perdre, il était condamné à la pendaison.
34:30 On sent bien qu'il ne veut pas y aller seul, ce que vous dites, il ne veut pas être le seul à avoir l'accord de coup.
34:35 Et il dénonce ses complices, mais est-ce qu'il faut croire cet homme qui a déjà beaucoup menti ?
34:41 C'est tout l'enjeu de la discussion qui va suivre et d'une tentative un peu de certains de réagir peut-être Mme Pitre en disant qu'elle n'avait pas conscience de la participation à un acte criminel.
34:59 Parce qu'il faut savoir que dans la qualification d'un acte criminel, il y a trois éléments essentiels, la participation matérielle, etc.
35:07 Mais il y a aussi l'élément qui est d'avoir conscience qu'on commet un acte criminel.
35:11 Il faut savoir que ce qu'on fait participe d'une opération criminelle d'une façon ou d'une autre.
35:16 Et ça c'est toujours le plus difficile évidemment à démontrer et c'est ce qui va faire débat ensuite.
35:21 Effectivement et Marguerite Pitre et Généreux-Rué, ils ont toujours nié l'effet.
35:26 Luc Bertrand, on vous retrouve écrivain canadien, auteur d'un livre sur cette affaire, vous la connaissez parfaitement.
35:32 Marguerite Pitre et Généreux-Rué, on en parlait à l'instant, condamnée aussi et à la peine de mort et pendue.
35:38 Tout ça aussi à cause de la médiatisation de l'affaire, il faut bien le dire.
35:42 Dans le contexte de l'époque, c'est certain que l'appareil judiciaire a voulu démontrer qu'on n'allait pas rigoler avec un meurtre de cette ampleur-là.
35:53 Il faut dire qu'au Québec, il y avait un premier ministre qui s'appelait Maurice Duplessis, qui était ministre de la Justice et qui était un homme qui était très autoritaire.
36:03 Et lui, voyant qu'il y avait des hommes d'affaires américains qui étaient décédés dans l'avion, a certainement voulu montrer aux États-Unis que le Québec ne rigolerait pas avec ce genre d'événement.
36:15 Il y a un contexte psychologique qui a fait en sorte qu'on a voulu, selon moi, trois condamnés plutôt qu'un.
36:25 - C'est extrêmement intéressant ce que vous dites, Luc Bertrand, parce que même la politique s'est mêlée de cette histoire.
36:32 J'ignorais l'histoire du ministre de la Justice, mais c'est tout à fait éclairant sur ce qui a pu motiver cette condamnation à mort de ces deux complices.
36:40 Encore une question pour vous, Luc Bertrand, Alberguet, il apparaît ici vraiment démoniaque, il n'y a pas d'autre mot, parce qu'on l'a dit, mais il ne voulait pas être pendu tout seul, cet homme.
36:49 - Je pense que tant que condamné à mort, c'était un homme qui était devenu probablement désireux de se venger.
36:59 Et lui qui avait fait tuer 23 personnes, ne voyait aucun inconvénient en faire tuer deux de plus.
37:06 - Oui, effectivement, c'est tout à fait cynique et glacial. Stéphane Berthaud, mais encore un mot, Marguerite Pitre, au Canada, on connaît très bien cette affaire,
37:14 mais on connaît d'autant plus que c'est la dernière femme à être pendue, c'est ça ?
37:18 - Oui, c'est la dernière femme à être condamnée à mort au Canada, ce qui n'est pas rien.
37:24 Vous savez, les derniers condamnés à mort, il y a toujours quelque chose autour du sujet, vous le connaissez en France aussi.
37:32 On revient là-dessus en se demandant, est-ce que ce dernier condamné l'a été légitimement ?
37:38 Là, ça fait partie du débat, comme le disait votre invité, le contexte de l'époque extrêmement rigide, pour ne pas dire psychorigide,
37:49 on était dans une époque d'un Québec soumis à la religion catholique de façon encore très ferme, donc la rigueur morale, etc.
37:57 Donc on condamnait sans aucune inquiétude, sans aucun remords.
38:02 - Après 4 ans d'enquête et de procès, le dossier est définitivement clos.
38:07 L'affaire Albert Guay, 5 minutes de trop pour l'assassinat en plein ciel.
38:11 Un seul visage intact parmi les victimes du crash, celui de l'épouse.
38:15 L'enquête de l'heure du crime, je vous retrouve tout de suite sur RTL.
38:18 L'heure du crime, présentée par Jean-Alphonse Richard sur RTL.
38:23 L'heure du crime, Jean-Alphonse Richard, jusqu'à 15h30 sur RTL.
38:28 - Dans l'heure du crime aujourd'hui, la spectaculaire affaire Albert Guay, un horloger de Québec condamné à mort et exécuté pour avoir fait exploser un avion en septembre 1949.
38:38 Il voulait assassiner sa femme, passagère du vol. Deux complices, un frère et une sœur, ont également été pendus.
38:45 En se présentant à son bourreau le 12 janvier 1951, Albert Guay aurait lancé « Au moins, je meurs célèbre », propos invérifiables.
38:56 Un autre fait, frappant, parmi les cadavres retrouvés dans le crash de septembre 1949, seule une victime avait conservé un visage quasi intact, c'était Rita, l'épouse de l'horloger.
39:10 - Quatre ans après son exécution, Albert Guay fait un émule, un américain fait sauter un avion au-dessus du Colorado pour récupérer l'assurance vie de sa mère, mais lui aussi sera exécuté.
39:24 - Il y a eu trois pendaisons, et des juges et des avocats vont longtemps se poser la question de savoir si celle de Madame Pitre et celle de son frère étaient vraiment justifiées.
39:33 - Effectivement, c'est une question qui va continuer à se poser avec de nombreux livres qui vont sortir sur cette histoire, beaucoup d'articles de journaux.
39:42 Stéphane Bertomé, on vous retrouve dans cette heure du crime ancien, policier, créateur et réalisateur de podcasts criminels, et je suis sûr que vous vous consacrerez un jour ou l'autre un de vos podcasts à cette histoire, Albert Guay.
39:54 - Alors, il y a quelque chose d'étonnant, en tout cas, j'ai été surpris, mais peut-être que vous allez me contredire, c'est que ces trois personnes, Albert Guay évidemment, l'auteur principal, et puis ses deux complices, ont été jugées et condamnées à mort pour le seul meurtre de l'épouse.
40:09 - Je ne sais pas si ces personnes, elles n'ont jamais été inculpées pour les 22 autres morts de l'avion, parce qu'aujourd'hui, ça serait le cas.
40:16 - En fait, ils ont été condamnés pour l'ensemble de leur oeuvre, même si ça n'apparaît pas très clairement dans les éléments du dossier.
40:25 Il est clair qu'ils ont été condamnés pour l'attentat qui a causé la mort de 23 personnes.
40:32 Donc, l'un en portant les autres, ils ont été condamnés, entre guillemets, pour l'ensemble de leur oeuvre.
40:39 - Luc Bertrand, vous êtes écrivain canadien, vous vivez au Québec, vous êtes auteur du livre "Un crime sans nom, l'affaire de Saut au cochon", publié aux éditions Sylvain Harvey.
40:49 "Saut au cochon", c'est là où on a retrouvé la carcasse de l'avion avec ses 23 victimes.
40:55 Alors, il y a quelque chose de très frappant, on en parle un petit peu depuis le début de l'heure du crime, mais ce sont ces fameuses 5 minutes de retard.
41:03 J'ai envie de dire presque les 5 dernières minutes pour parodier une série télé. 5 minutes de retard pour le vol fatal.
41:10 Sans ces 5 minutes de retard, l'horloger aurait signé le crime parfait parce qu'on l'a dit, l'avion serait tombé dans le Saint-Laurent et là, adieu l'épreuve.
41:19 - L'avion devait quitter l'aéroport de l'ancienne Lorette près de Québec à 10h20 et pour une raison quelconque, il va quitter à 10h25.
41:31 Donc, c'est seulement 5 minutes, mais 5 minutes qui vont être cruciales dans l'enquête.
41:36 Effectivement, si l'avion avait quitté à 10h20, ce serait retrouvé au-dessus du fleuve Saint-Laurent à la hauteur de baie Saint-Paul.
41:45 Et avec les moyens de l'époque, il aurait été absolument impossible de retracer quelconque indice pouvant mener à l'arrestation du coupable.
41:53 Alors que là, à cause de ce retard de 5 minutes, l'avion s'est écrasé sur la terre ferme, ce qui a fait une différence immense dans l'enquête.
42:03 - C'est quand même incroyable ce que vous racontez. 5 minutes, 5 minutes à peine de retard. Est-ce qu'on sait ce qui a causé ce retard de l'avion?
42:11 - Il y a eu des thèses à cet effet-là parce que Guy s'est un peu engueulé une fois de plus avec son épouse,
42:18 juste au moment où elle devait prendre le taxi qui devait l'amener à l'aéroport de l'ancienne Lorette.
42:23 D'autres thèses ont voulu, par exemple, que 5 minutes pouvaient s'expliquer parce que des hommes d'affaires sont arrivés un petit peu en retard.
42:34 Ça n'a jamais été très, très, très clair la raison de ce retard de 5 minutes. 5 minutes, ce n'est pas énorme de toute façon.
42:41 Lorsqu'on prend l'avion, on est régulièrement plus en retard que ça. Mais dans ce cas-ci, ça a été crucial.
42:48 - Oui, ça a été crucial et ça a changé même la face des investigations, on peut le dire comme ça, Luc Bertrand.
42:54 Stéphane Bertomé, autre question pour vous. Histoire vraiment très cynique parce que j'ai l'impression qu'au cours de ces procès,
43:01 on n'a pas vraiment de compassion pour les victimes en général. Il n'y a pas de mots à l'époque.
43:06 Ce sont les victimes, elles sont d'un côté. Ce qui intéresse les gens, c'est les coupables, c'est ça ?
43:11 - Oui, on est encore dans ce schéma-là. L'importance qu'on accordait aux victimes est bien moindre que la place qu'on leur donne aujourd'hui et c'est tant mieux.
43:20 Il faut quand même souligner que cette affaire a été une affaire extrêmement connue au Québec.
43:27 Elle a fait l'objet, vous l'avez dit, de plusieurs livres. - Bien sûr.
43:30 - Mais elle a fait l'objet d'un film qui s'appelle "Le crime d'Ovid Plouf" de Denis Arcan, qui est un peu le truffeau québécois.
43:36 J'espère qu'on ne m'en voudra pas de faire cette comparaison. - Pas du tout.
43:39 - En 1984 et donc qui est un film qui a énormément été populaire, qui a été très populaire et qui reprend le personnage, en fait, d'Ovid Plouf, finalement, fictif de gay.
43:50 - C'est ça, effectivement. C'est le pseudo qu'il employait pour envoyer ce colis.
43:55 Luc Bertrand, dernière question pour vous. Une affaire qui est vraiment ancrée dans les mémoires au Québec.
44:00 - Il y a eu un film inspiré de l'affaire de Saulteau-Cochon qui s'appelle "Le crime d'Ovid Plouf". - C'est ça.
44:08 - Il y a des articles assez fréquemment qui paraissent sur l'affaire de Saulteau-Cochon et cette année, 2024, c'est le 75e anniversaire de l'affaire de Saulteau-Cochon.
44:19 Donc, les gens habituellement savent de quoi il s'agit et c'est l'événement le plus important, je crois, dans les années judiciaires du Québec et même, je dirais, du Canada.
44:32 - Merci beaucoup, Luc Bertrand et Stéphane Bertomé d'avoir été les invités de "L'heure du crime".
44:36 Merci à l'équipe de l'émission, rédactrice en chef Justine Vignot, préparation Marie Bossard, réalisation Nicolas Godet.
44:42 - Jean-Alphonse Richard sur RTL. - "L'heure du crime".