• il y a 7 mois
Avec Ruben Rabinovitch, psychologue et l'historien Pierre Vermeren

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##EN_TOUTE_VERITE-2024-04-14##

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News
Transcription
00:00 En toute vérité, 11h30 sur Sud Radio, Alexandre Devecchio.
00:04 En toute vérité, chaque dimanche, entre 11h et midi sur Sud Radio,
00:08 sécurité, économie numérique, immigration, écologie.
00:11 Pendant une heure chaque semaine, nous débattons sans tabou
00:14 des grands enjeux pour la France d'aujourd'hui et de demain.
00:16 Et ce dimanche, nous avons le plaisir de recevoir le psychologue et psychanalyste
00:20 Ruben Ravinovitch, qui a reçu dans son cabinet de nombreux jeunes
00:24 condamnés pour braquage, violence et viol.
00:26 Avec nous également, en direct de Bordeaux, l'historien et essayiste Pierre Vermeuren,
00:31 auteur de nombreux livres tels que "La France qui déclasse"
00:33 ou encore "Le choc des décolonisations".
00:36 Ensemble, nous parlerons de cette semaine marquée par la violence meurtrière,
00:40 en particulier chez les jeunes adultes.
00:42 A Montpellier, la jeune Samara tombe dans le coma après avoir été rouée de coups
00:46 à la sortie de l'école.
00:47 A Viery-Châtillon, quelques jours plus tard, Shemzeddine, 15 ans, victime lui aussi
00:52 d'une expédition punitive à la sortie du collège,
00:55 ne survivra pas à ses blessures.
00:57 La semaine s'est conclue par deux nouveaux drames,
00:59 le meurtre d'un Algérien poignardé à Bordeaux parce qu'il buvait de l'alcool
01:03 et enfin, de nouveau, la mort d'un adolescent de 15 ans après un coup de couteau meurtrier
01:08 à Romont-sur-Isère, dans la fameuse cité de la monnaie,
01:11 d'où étaient venus les responsables de l'attaque au couteau de Crépole,
01:14 il y a cinq mois.
01:15 Doit-on continuer à parler de faits divers ?
01:17 Quels sont les ressorts de cette ultra-violence ?
01:19 Quels liens avec la montée de l'islamisme sommes-nous face à un phénomène
01:23 de décivilisation ou face à un choc de civilisation ?
01:27 Tout de suite, les réponses de Ruben Ravinovitch et Pierre Vermoren, en toute vérité.
01:31 - Ruben Ravinovitch, Pierre Vermoren, bonjour.
01:40 - Bonjour.
01:41 - Ravi de vous recevoir sur Sud Radio,
01:45 pour parler de cette actualité assez lourde,
01:48 la multiplication des faits d'ultra-violence.
01:53 Pendant une heure, on va essayer de comprendre
01:56 quels sont les ressorts de cette ultra-violence,
02:00 ultra-violence chez les jeunes, notamment,
02:04 avec une gamine de 15 ans dans le coma,
02:08 puis deux enfants, deux adolescents tués par d'autres adolescents.
02:15 Ruben Ravinovitch, vous avez reçu, justement,
02:20 dans votre cabinet, des adolescents violents ou ultra-violents,
02:24 également des victimes de ces agresseurs.
02:30 Comment vous expliquez cette montée de la violence,
02:33 et en particulier, chez les jeunes ?
02:37 - Alors, si vous me permettez, je ferai un petit détour.
02:42 La première chose que je voulais vous dire, c'est que
02:45 ce à quoi notre société n'est plus en mesure de faire face,
02:48 c'est à la part de destructivité, de violence et de haine
02:53 qui est au fondement du cœur humain.
02:57 Et que, dans une sorte de roussoïsme mal digéré,
03:00 qui consiste à penser que l'homme est bon et la société le rend mauvais,
03:05 il y a un aveuglement et un déni.
03:07 Et je pense qu'on va arriver sur les causes,
03:10 et il y aura beaucoup de causes qui seront évidemment très intéressantes,
03:12 mais dans la tentative permanente d'aller chercher des causes,
03:16 qu'elles soient la pauvreté, qu'elles soient la discrimination,
03:21 qu'elles soient l'islamisme lui-même,
03:23 il y a une tentative d'évitement de cette part de destructivité humaine.
03:28 - Ce que vous voulez dire, c'est que l'homme a toujours été peut-être violent,
03:34 et là on cherche des explications, voire des excuses, un peu trop ?
03:37 - En tout cas, on est dans l'évitement de cette part fondamentale du cœur humain.
03:42 Et la civilisation, elle repose et elle s'érige sur la répression pulsionnelle,
03:52 sur la répression de la violence, sur la répression des instructions meurtriers.
03:57 Soit en les soumettant, soit en les écrasant,
04:01 soit en les organisant, soit en les sublimant.
04:04 Cette part de haine, elle est propre à vous, à moi, à notre invité, à tout le monde.
04:09 Il m'arrive de prendre un exemple pour illustrer ça,
04:14 c'est que pour la sublimation d'une part de violence,
04:18 c'est qu'un grand chirurgien, il lui faut une très grande part de sadisme.
04:23 Un grand chirurgien, il ouvre des corps, il plonge ses mains à l'intérieur,
04:28 il coupe des organes, mais il l'a fait au service de la vie.
04:32 Donc je pense que c'est très important de revenir à une anthropologie véritable,
04:36 qui est une anthropologie où la destructivité a une place.
04:40 Ça c'est une première chose.
04:41 Alors maintenant, pour en revenir directement aux questions que vous posiez,
04:45 ce sont des jeunes gens, moi je n'ai pas reçu d'adolescent en tant que tel,
04:48 j'ai reçu des jeunes hommes et leur famille par ailleurs.
04:52 Ils ont pour caractéristique, si vous voulez, d'abord de ne pas avoir accès à la culpabilité.
05:00 Parce que pour avoir accès à la culpabilité, il faut pouvoir se mettre à la place de l'autre.
05:05 - Une forme de déshumanisation ?
05:07 - Oui.
05:09 Enfin, ou en tout cas, qui ne correspond pas à ce que nous pensons être un critère fondamental de l'humanité.
05:14 - Plus d'empathie ?
05:15 - Il n'y a plus d'empathie, absolument.
05:17 Et l'empathie, c'est le lien inaugural à autrui.
05:23 Ça se met en place autour de 2 et 3 ans.
05:25 Malheureusement, ça ne se rattrape pas avec des cours au collège,
05:31 à raison d'une heure par semaine, comme la physique-chimie ou la guitare, si vous voulez.
05:35 Donc, pas de culpabilité, pas d'empathie,
05:41 une impulsivité que rien ne contient.
05:45 Il n'y a plus d'enveloppe psychique.
05:47 J'ai vu dans la nuit qu'il y avait un jeune homme,
05:51 parce qu'il était très en colère,
05:54 je ne sais pas si vous avez vu passer ce truc-là,
05:56 il avait eu une dispute avec son père,
05:58 il était très en colère et il a massacré jusqu'à la mort deux retraités.
06:02 Parce qu'il était très en colère.
06:04 Après les émeutes, il y a eu un rapport de l'inspection de la justice,
06:08 qui a interviewé les jeunes émeutiers,
06:13 qui racontait que les réponses les plus fréquentes étaient
06:16 "Pourquoi avez-vous participé à ce genre de choses ?"
06:19 "Par curiosité, par plaisir et par goût de l'adrénaline."
06:24 La jouissance de détruire est au fondement de ces attitudes-là.
06:31 Après, je vais laisser votre invité dire quelque chose.
06:36 - Évidemment !
06:38 Tout le monde va pouvoir parler tranquillement.
06:41 - Ce que je voulais vous dire, c'est que...
06:45 Il n'y a plus de butée fondamentale.
06:52 Pourquoi est-ce que je commençais sur cette part de destructivité ?
06:58 C'est parce que cette part de destructivité est en chaque être.
07:01 Si elle n'est plus contenue, si elle n'est plus muselée,
07:05 elle monte en violence, toujours plus fort, toujours plus jeune.
07:09 - Ce que vous nous décrivez, c'est une crise totale de l'autorité
07:14 qui était propre à notre civilisation,
07:18 mais peut-être à toutes les civilisations.
07:20 Il faut une part d'autorité pour contenir cette violence
07:24 qui est en tout être humain.
07:26 Pierre Vermeulen, j'ai commencé par dire la montée de la violence,
07:30 notamment la montée de la violence chez les jeunes.
07:33 J'ai fait un peu comme si c'était un phénomène nouveau.
07:35 Est-ce que ça l'est vraiment ?
07:37 Est-ce que ça vous a surpris ?
07:40 Qu'est-ce que vous pensez de ceux qui répètent
07:44 que ce sont des défaits divers ?
07:49 - Je crois que le rousseauisme, malheureusement,
07:52 comme vient de le dire M. Rabinovitch,
07:55 a fait beaucoup de dégâts dans cette société,
07:58 puisqu'on impute les violences à la société et non aux individus.
08:04 Que par ailleurs il y ait des problèmes d'éducation,
08:07 de transmission, à la fois dans les familles, dans les institutions,
08:10 et j'ajoute, chez les personnes qui arrivent de l'extérieur,
08:15 et notamment d'un théâtre comme l'Afghanistan,
08:17 parce que si vous voulez on ne peut pas mettre...
08:19 On a à la fois dans ces violences des gens qui sont des produits
08:22 de la société française ou des familles françaises telles qu'elles existent aujourd'hui,
08:26 et puis on ajoute à ça des personnes qui viennent des théâtres de guerre,
08:31 puisqu'on s'honore à juste titre de recevoir des réfugiés
08:35 ou des migrants qui viennent des pays en guerre,
08:38 que ce soit la Syrie, l'Afghanistan, l'Erythrée, le Soudan, etc.
08:43 Et là on est dans des mondes qui sont toujours le monde et la terre,
08:47 parce qu'il n'y en a qu'une, mais qui viennent de sociétés en guerre,
08:50 qui viennent de sociétés complètement dérégulées,
08:53 des sociétés qui sont brises en main par des groupes ultra-violents,
08:56 que ce soit des groupes idéologiques ou des groupes criminels.
08:59 Et donc l'ensemble effectivement fait un cocktail,
09:01 c'est-à-dire un cocktail explosif qui explique en partie des violences.
09:06 J'entendais cette semaine que parmi les émeutiers du mois de juillet l'année dernière,
09:12 il y avait près de 20% d'étrangers, je crois, de mémoire.
09:17 Peut-être un peu plus, mais enfin disons à peu près un quart, un petit quart.
09:21 Ça veut dire qu'on a effectivement des gens qui viennent de la société française,
09:25 auxquels s'agrègent pour des raisons très diverses.
09:29 L'islamisme peut en être une, mais enfin la délinquance d'opportunité en est une autre.
09:34 Effectivement l'excitation du feu, si je puis dire, se surajoute,
09:39 et on a ainsi l'intrication de problèmes très divers les uns les autres,
09:43 mais qu'on doit gérer ensemble, puisqu'au fond ils s'attaquent aux mêmes personnes, à la même société.
09:48 Donc je suis assez sceptique pour répondre à votre question,
09:50 sur le fait que ce soit uniquement des faits divers, bien évidemment.
09:53 Il y a des faits divers, mais il y a aussi des faits qui ont une logique, une cohérence,
09:58 notamment quand on essaye par exemple de faire appliquer de force,
10:03 selon les idées mal ficelées qu'on a dans le crâne, la charia,
10:07 parce qu'on pense qu'elle doit s'appliquer comme ça pendant la période du ramadan, par exemple.
10:11 Là effectivement le fait de société laisse la place à un fait,
10:15 peut-être pas de civilisation, mais en tout cas à des faits idéologiques,
10:18 et à des faits construits, même s'ils sont très mal construits.
10:22 Merci beaucoup Pierre Wermeren, merci beaucoup Ruben Radinovitch.
10:26 On se retrouve après une courte pause pour continuer à parler de cette ultra-violence
10:30 qui détruit peu à peu la société française.
10:34 Nous allons essayer d'analyser ces causes.
10:38 Est-ce que ce sont des causes endogènes, exogènes ?
10:41 Tout de suite les réponses de Ruben Radinovitch et Pierre Wermeren,
10:44 après une courte pause sur Sud Radio.
10:47 Nous sommes de retour sur Sud Radio avec le psychologue et psychanalyste Ruben Radinovitch,
11:00 qui a reçu notamment dans son cabinet de nombreux jeunes condamnés pour violences, viols, braquages.
11:05 Vous aviez fait un superbe papier dans Marianne au moment des ébeutes, Ruben Radinovitch.
11:13 On en reparlera.
11:15 Et bien sûr Pierre Wermeren, historien, essayiste, auteur de nombreux livres
11:21 comme "Le choc des décivilisations", "Des décolonisations"
11:28 - Oh, pardon, c'est dimanche matin !
11:31 "La décivilisation" est au cœur du sujet,
11:36 mais Pierre Wermeren, je vous avais un peu interrompu avant la pause,
11:41 ou on avait été interrompu par la pause,
11:43 on revenait sur l'accumulation de ce qui ne sont pas des faits divers,
11:49 mais de faits de violences extrêmes en France,
11:53 notamment l'affaire Samara, tabassée à la sortie de l'école
11:57 parce qu'elle ne portait pas le voile et voulait s'habiller à l'européenne,
12:01 à Vierichatillon quelques jours plus tard,
12:03 Shem Zeddin, 15 ans, victime lui aussi d'une expédition punitive
12:07 parce qu'il avait parlé à une jeune femme,
12:11 brisant finalement la séparation des sexes
12:14 qui existe malheureusement dans certains territoires de la République,
12:19 et enfin ces deux Algériens agressés,
12:24 dont l'un a succombé, attaqué au couteau dont l'un est mort par un afghan
12:29 le jour de l'Aïd parce qu'il buvait de l'alcool.
12:35 Vous avez parlé vous-même de charia avant la pause,
12:40 est-ce qu'on est face à des musulmans pas intégrés,
12:46 radicaux sur le territoire qui tentent d'imposer une forme de charia ?
12:51 On a beaucoup parlé des réseaux sociaux, on y reviendra ces dernières semaines,
12:57 mais est-ce que l'un des points communs entre ces différentes affaires
13:00 n'est tout simplement pas l'islam radical ou l'islamisme ?
13:04 Alors effectivement ce qui est très compliqué c'est que beaucoup de choses se mêlent.
13:09 Encore une fois le fait d'avoir un afghan,
13:12 je ne connais pas son parcours mais on sait qu'il vient d'un pays en guerre depuis 45 ans,
13:17 dans lequel les talibans sont au pouvoir,
13:20 il n'a probablement jamais vu une femme les membres nus dans son existence
13:25 avant d'arriver en France,
13:27 et donc il est saisi d'un vertige à tout point de vue,
13:31 puisqu'il a un certain nombre de repères très simples,
13:35 il n'a jamais non plus vu de musulmans boire de l'alcool dans son pays,
13:38 et là tout d'un coup sur les quais dans une région,
13:41 dans une zone très touristique et très conviviale de Bordeaux
13:46 où les jeunes se retrouvent long de la Garonne pour boire des bières et danser,
13:50 ou s'amuser, ou discuter,
13:52 tout d'un coup il est pris d'un coup de folie,
13:55 et il trouve deux musulmans buvant une bière et ça le rend manifestement fou.
13:59 Alors est-ce que c'était prémédité ou pas, peu importe,
14:02 il est saisi d'un vertige identitaire et il se dit
14:06 "je vais rétablir l'ordre de Dieu tel que je l'imagine,
14:11 ou tel qu'on me l'a inculqué".
14:13 Et c'est pour ça qu'on ne peut pas se rapprocher,
14:17 alors peut-être qu'il est très construit,
14:19 peut-être qu'il est dans des réseaux, notamment internet,
14:22 peut-être qu'il est pris en charge, je n'en sais strictement rien,
14:25 mais on ne peut pas se rapprocher de petits enfants ou de jeunes adolescents
14:30 qui sont insérés dans des familles musulmanes vivant en France depuis des générations,
14:35 qui sont nés ici, qui sont allés à l'école depuis la maternelle,
14:39 et qui eux ont un tout autre vécu.
14:44 Alors c'est vrai que dans les migrations françaises,
14:47 et notamment dans les familles musulmanes,
14:49 il y a des gens qui sont français depuis plus d'un siècle,
14:52 parce qu'en Algérie, les Algériens, les musulmans étaient français,
14:56 il y a des gens qui sont devenus délaïcs,
14:59 il y a des gens qui sont totalement sortis de la religion,
15:01 il y a des républicains.
15:03 Ensuite il y a des vagues de migration qui sont arrivées,
15:05 par exemple pendant la décennie noire, la guerre civile algérienne des années 90,
15:08 qui fuyaient l'Algérie,
15:10 parce que justement ils étaient accusés d'être laïcs,
15:13 professeurs de français,
15:15 kabiles laïcs ou autres, je n'en sais rien.
15:18 Et puis en même temps on a accueilli aussi des islamistes,
15:21 parce qu'au moment où ils ont perdu la guerre,
15:22 un certain nombre ont été exfiltrés ou sont venus s'installer,
15:25 et sont dans une dynamique de revanche.
15:27 Donc tout ça fabrique un patchwork très complexe,
15:30 c'est pour ça qu'on ne peut pas dire "les musulmans de la société française",
15:34 parce que c'est un patchwork encore une fois,
15:37 c'est une société très éclatée,
15:40 et à l'intérieur de cette société très éclatée,
15:42 on va effectivement trouver des jeunes qui sont pris en main
15:47 par une doxa islamique très basique, très simpliste,
15:51 qui en gros trace une ligne dans une société, on l'a dit,
15:54 où les repères et les transmissions sont très fragilisées,
15:58 que ce soit la transmission à l'intérieur de la société française,
16:00 à l'intérieur de l'école,
16:02 ou la transmission d'ailleurs à l'intérieur des sociétés musulmanes.
16:05 On va trouver des gens, des idéologues très simplistes,
16:08 qui vont tracer une ligne entre le bien et le mal,
16:10 entre le permis et l'interdit,
16:12 entre le haram et le halal, comme ils disent,
16:15 et qui vont éduquer un certain nombre de jeunes,
16:18 qui vont les formater et qui vont leur dire "voilà,
16:20 ça c'est interdit, et donc si c'est interdit par Dieu,
16:23 et bien ça doit être condamné,
16:25 ou bien ça c'est permis, et à ce moment-là il faut l'encourager".
16:29 Et là on a effectivement la question de la relation entre les hommes et les femmes,
16:34 qui doit être étanche, selon une vue très intégriste,
16:37 très fondamentaliste dans la société islamique,
16:40 ou bien la question des interdits alimentaires,
16:43 qui doivent s'appliquer, surtout dans une période de fêtes comme le Ramadan,
16:46 de manière très rigoureuse.
16:48 Mais ça c'est une vision intégrée, si vous voulez,
16:50 il y a des millions encore une fois de musulmans
16:52 qui boivent de l'alcool tous les jours au Maghreb,
16:54 et personne ne va les tuer au couteau.
16:56 - C'est ce que j'allais vous dire, vous avez écrit notamment,
16:59 vous avez répondu à une interview dans le Figaro à ce sujet.
17:04 Vous parliez tout à l'heure de vertige identitaire,
17:08 c'est-à-dire que dans les sociétés justement des pays musulmans,
17:13 il n'y a pas forcément cette ultra-violence-là,
17:17 même dans ceux qui appliquent la chariote.
17:21 Donc est-ce qu'il y a un choc finalement entre notre modernité et des personnes,
17:27 alors soit qui arrivent de pays effectivement en guerre comme l'Afghanistan,
17:30 mais aussi des personnes qui ont été éduquées en France,
17:34 une sorte de schizophrénie qui se met en place
17:37 entre les codes de notre modernité, les codes de notre société,
17:41 et les codes de la société de leurs parents ou de la société d'où ils viennent ?
17:47 - Alors, je ne veux pas monopoliser la parole, je vais laisser parler M. Rabinovitch.
17:54 Très vite. Le malheur veut que cette immigration très importante
18:00 qui s'installe en France depuis une trentaine d'années,
18:03 elle arrive dans une société qui a rompu avec les principes élémentaires de la transmission.
18:08 On voit bien que l'école est en crise,
18:11 qu'on a réussi à passer des premiers rangs de l'Europe pour en s'en tenir à l'Europe,
18:16 ou en tout cas des pays de l'OCDE pratiquement au dernier rang,
18:19 en termes de résultats.
18:21 Donc là, il y a un problème majeur qui est propre à la société française.
18:25 Il y a beaucoup de facteurs, mais on peut citer en 40 ans la division par deux
18:30 du salaire des enseignants, c'est un bon indicateur,
18:32 parce que finalement, si vous voulez vivre une vie de cadre,
18:35 il vaut mieux aujourd'hui ne pas être prof, ce qui n'était pas le vrai il y a 40 ans.
18:40 Donc on n'attire pas forcément les meilleurs, etc.
18:43 Donc il y a cette crise qui concerne l'école, les institutions, la famille aussi.
18:48 La transmission du phénomène religieux, on le voit bien,
18:51 l'effondrement du catholicisme, c'est quelque chose qui le produit,
18:55 de l'absence de transmission.
18:58 Mais ça concerne aussi bien les recettes de cuisine de la grand-mère
19:03 que tous les éléments qui constituent la vie quotidienne, si vous voulez.
19:06 Puisque les jeunes aujourd'hui ne reçoivent pas la transmission,
19:11 mais en fait, ils sont pris en charge par autre chose,
19:14 et notamment par les écrans.
19:15 On le dit assez, quand vous regardez l'écran 8 heures par jour,
19:18 effectivement, il n'y a pas de place pour grand-chose d'autre.
19:21 Donc c'est à ce moment-là, au moment où il y a cette déconstruction
19:24 qui frappe la société française, que des jeunes gens arrivent,
19:28 eux-mêmes de sociétés totalement désintégrées,
19:31 comme les sociétés en guerre dont on a parlé,
19:33 ou des sociétés du Maghreb, par exemple, ou d'Afrique.
19:37 Dans certaines de ces sociétés, l'ordre moral, étatique, patriarcal, religieux
19:44 fonctionnent, mais quand vous échappez à ce pays,
19:47 vous êtes ailleurs, vous n'avez plus de filet, vous n'avez plus de cadre,
19:53 et là, vous tombez dans une société, vous-même vous êtes déstructuré,
19:57 ou en tout cas, potentiellement vous l'êtes,
20:00 et vous arrivez dans une société qui elle-même ne sait plus très bien où elle habite.
20:03 Donc ça fabrique des opportunités pour des gourous, des islamistes,
20:08 des idéologues qui vont faire leur petite cuisine
20:12 et essayer de prendre en main une partie de cette jeunesse.
20:15 Ça pourrait être pour le meilleur, mais c'est aussi parfois pour le pire.
20:18 - Ruben, à Ravinovitch, je crois que vous partagez ce constat
20:22 de déconstruction de la société,
20:26 peut-être de décivilisation, pour reprendre le terme du Président de la République.
20:31 - Alors, je rebondirais sur plusieurs points.
20:35 La première chose, c'est qu'on a eu avec la jeune Samsara
20:43 ce qui ressemble à une affaire de jalousie ou d'envie haineuse,
20:47 avec le jeune Shams Eddin, un crime d'honneur,
20:52 à Bordeaux, une sorte de rigorisme fanatique,
20:57 cette nuit, dans l'Essonne, à une colère immatrisée.
21:02 Toutes ces lectures-là sont des lectures, évidemment, on ne peut plus pertinentes.
21:06 Pour autant, elles ont quand même un dénominateur commun,
21:09 qui est, si vous voulez, que...
21:13 Il y a une phrase de Julius Margolin, qui était un grand philosophe russe,
21:21 qui disait "Quand un haineux a besoin d'expurger, d'étancher,
21:31 de laisser s'écouler sa haine, il trouve toujours un offenseur à portée de main."
21:35 Donc, si vous voulez, il y a des causes plurifactorielles, je suis absolument d'accord,
21:41 mais il y a aussi le fait que cette destructivité-là,
21:45 et cette jouissance de détruire, se jettent sur toutes les opportunités qui se présentent à elle.
21:53 Et ça, je crois que c'est important de ce point de vue-là.
21:56 - Ruben Ravinovitch, merci.
21:58 Je vous redonne la parole après une courte pause.
22:02 On continue à parler de cette ultra-violence en France, de ses causes,
22:06 également avec l'historien et essayiste Pierre Vermoren.
22:10 À tout de suite sur Sud Radio, en toute vérité.
22:13 - En toute vérité, 11h30 sur Sud Radio, Alexandre Devecchio.
22:17 - Nous sommes de retour sur Sud Radio.
22:19 Nous parlons ce matin de l'ultra-violence en France.
22:23 Nous essayons de comprendre ses causes avec l'historien et essayiste
22:27 Pierre Vermoren, qui est notamment spécialiste de l'islam.
22:31 Il est l'auteur de nombreux essais, comme le choc des décolonisations.
22:35 Et avec Ruben Ravinovitch, qui est à la fois psychologue, psychanalyste,
22:40 qui a reçu de jeunes individus violents dans son cabinet.
22:45 Ruben Ravinovitch, avant la pause, on s'interrogeait sur les causes de cette violence.
22:53 Pierre Vermoren nous disait qu'il y avait une forme de choc des civilisations
22:57 et de choc des cultures qui se conjuguaient avec une forme de déconstruction,
23:03 de déstructuration de la société, peut-être de décivilisation.
23:07 Je voulais vous entendre sur ce mot du Président de la République.
23:11 Est-ce que vous partagez cette analyse ?
23:14 - Le mot du Président de la République est de ce que j'avais cru en comprendre,
23:18 un mot qu'il avait repris à Jérôme Fournier,
23:21 lui-même s'inspirant des travaux d'Elias.
23:24 - Exactement.
23:26 - Sur cette question-là, je dirais deux choses.
23:30 La première, c'était une remarque que faisait Maurice Berger,
23:35 le psychiatre, le pédopsychiatre,
23:41 et psychanalyste, je crois, si je puis me permettre.
23:45 - Qui s'occupe vraiment de cette question de la violence
23:47 chez les adolescents ou les jeunes adultes.
23:49 - Il faisait une remarque tout à fait lumineuse et très freudienne,
23:52 d'une certaine manière, qui est que ce n'est pas tant
23:55 que cette jeunesse-là est décivilisée qu'elle n'a pas accédé à la civilisation.
24:02 C'est un peu ce que je disais en démarrage,
24:04 et c'est pour ça que j'avais été un peu long au démarrage.
24:06 Comme la destructivité est au cœur,
24:10 vous voyez sur une plage un petit garçon de 3, 4 ou 5 ans
24:14 le plaisir qu'il a à détruire un château de sable.
24:17 La destructivité, elle est là !
24:20 La société, la famille, l'école le civilisent en lui mettant des buts.
24:30 L'enjeu, je crois, dans cette jeunesse ultra-violente,
24:35 est un problème d'accès aux interdisstructurants de la civilisation
24:40 plutôt qu'une décivilisation.
24:42 La deuxième chose, elle est, je rebondis beaucoup moins doctement que votre autre invitée,
24:49 mais j'avais un patient qui me racontait, un jeune Algérien,
24:53 qui était arrivé en France à 18 ou 19 ans,
24:56 et qui me racontait lors d'un retour en avion en Algérie
25:01 qu'une petite brute française allume une clope en plein aéroport à Alger.
25:13 Et bien, je ne sais plus si c'était un militaire ou un policier,
25:17 lui met un coup de matraque et lui dit, c'est mon patient qui me raconte,
25:22 "Tu t'es cru en France ici ?"
25:24 - C'est-à-dire qu'en Algérie ou dans les pays du Maghreb,
25:27 il y a encore des butées qui n'existent plus ?
25:29 - Absolument !
25:31 L'anthropologue Maurice Gaudelier avait parlé,
25:36 et je rebondissais sur la question de la modernité,
25:39 il avait écrit un livre "Est-ce qu'on peut se moderniser sans s'occidentaliser ?"
25:43 Et je crois que l'enjeu il est plutôt celui-là.
25:45 Ce ne sont pas des populations pas modernes, elles sont très modernes,
25:49 mais ce n'est pas parce qu'elles se modernisent qu'elles s'occidentalisent du même souffle.
25:53 Que y ait des différences culturelles, des montages psychiques et des économies libidinales différentes
26:02 entre les civilisations et les cultures, il n'y a pas de doute !
26:06 C'est le B.A.B. de l'anthropologie !
26:08 Ou alors il faut jeter aux ordures Maurice Gaudelier, qui par ailleurs était un anthropologue marxiste,
26:12 il faut jeter aux ordures Georges Devreux, qui est le père de l'ethnopsychiatrie,
26:19 et allons-y gaiement, Claude Lévi-Strauss.
26:22 Que y ait des économies de jouissance, des structurations familiales, des rapports hommes-femmes
26:28 qui diffèrent entre les civilisations, c'est le B.A.B. de l'anthropologie en fait.
26:33 Donc ça c'est une chose.
26:35 La question de la décivilisation du point de vue de nos sociétés,
26:45 elle se pose à mon avis un petit peu différemment.
26:50 C'est ce que Jérôme Fourquet appelait l'effondrement, je ne sais pas quel terme il employait exactement,
26:59 mais l'effondrement de ce qu'il appelait par contre, ça je m'en rappelle, des matrices structurantes.
27:04 Si vous voulez, l'autorité, je me permets de faire un point,
27:09 parce que c'est un mot qu'on emploie fréquemment, mais dont il faut pouvoir avoir un regard un peu clinique.
27:16 L'autorité c'est...
27:19 Elle se fonde sur une dissymétrie.
27:22 Or aujourd'hui, toute autorité est considérée comme une domination,
27:27 toute dissymétrie est vécue comme une inégalité,
27:30 et toute obéissance est vécue comme une humiliation.
27:32 Mais ça, c'est pas seulement pour les jeunes gens de banlieue, si vous voulez.
27:36 C'est un phénomène qui traverse l'Occident de part en part.
27:40 Alors, par chance, pas toujours avec ce degré de violence,
27:44 mais je veux dire, bon...
27:46 Par ailleurs, moi je reçois des hommes et des femmes,
27:50 enfin là en l'occurrence j'allais prendre l'exemple de plusieurs hommes,
27:52 qui peuvent être hommes du culte,
27:54 qui peuvent être chefs d'entreprise,
27:56 qui peuvent être pères,
27:59 qui peuvent être professeurs d'université ou de lycée,
28:04 et qui racontent non seulement que leurs oies, leurs élèves, leurs employés
28:12 ne respectent pas leur autorité,
28:14 mais il y a quelque chose qui à mon avis me paraît au moins aussi important
28:17 et au moins aussi fondamental,
28:19 qui est qu'ils ne se sentent plus eux-mêmes légitimes d'exercer cette position-là.
28:23 Et que...
28:26 J'avais un patient qui me disait
28:31 "Je ne crois pas à la légitimité de l'autorité,
28:34 je ne sais pas exercer l'autorité,
28:36 je ne crois pas à la légitimité de l'autorité,
28:38 et je ne vois pas comment je pourrais
28:42 imposer ma volonté à une autre personne."
28:49 Or, cette confusion-là,
28:51 croire que l'autorité est l'imposition d'une volonté,
28:55 ça dit bien qu'on ne sait même plus ce que c'est que l'autorité.
28:58 L'autorité ce n'est pas l'imposition d'une volonté,
29:00 l'autorité c'est toujours
29:02 une figure du collectif qui rappelle la loi commune.
29:08 Le problème c'est qu'aujourd'hui il n'y a plus d'autorité
29:10 parce que les individus sont toujours pris dans des relations interpersonnelles.
29:14 Ce n'est pas le professeur qui est le représentant du collectif.
29:19 - Une tendance du bien commun.
29:21 - Exactement, et ça, ça marche, mais ça marche même dans le bus.
29:23 - Ces professeurs, moi j'en fréquente beaucoup,
29:26 ont l'impression que parfois les parents d'élèves,
29:30 et pas forcément des parents d'élèves de banlieue,
29:32 considèrent l'école comme un service.
29:35 Et plus comme justement,
29:37 il fut un temps où les professeurs étaient des notables dans la société,
29:41 ou en tout cas représentaient une forme d'autorité.
29:45 - Je suis cité à leur respect, ce n'est plus le cas aujourd'hui.
29:48 - Je vais vous prendre, pour illustrer ce que vous vous dites,
29:52 je vais vous prendre deux exemples de films, si vous me permettez.
29:56 Il y a un grand chef d'œuvre du cinéma allemand des années 20 ou 30,
30:01 les auditeurs iront vérifier parce que j'ai un peu oublié,
30:04 il s'appelle L'Ange Bleu, qui est avec Marlene Gietrich,
30:08 et qui est de von Sternberg.
30:11 Et c'est un professeur qui a tout l'apparat du professeur,
30:19 qui a la canne, le chapeau,
30:24 les petites lunettes des années 20.
30:31 Et il apprend que certains de ses élèves vont dans un cabaret,
30:36 qui est le cabaret de L'Ange Bleu,
30:38 et il veut aller les prendre sur le fait.
30:40 Quand il arrive dans ce cabaret-là, il y a évidemment les élèves qui déguerpissent,
30:44 mais il y a les parents des élèves qui déguerpissent,
30:47 qui sont pris en faute.
30:50 Le professeur est une autorité sociale.
30:53 C'est pas que cet homme, il est ceinture noire de judo,
30:56 c'est qu'il est une autorité sociale.
30:58 Je prends un autre exemple que je tire d'un ouvrage du psychanalyste et psychiatre Jean-Pierre Lebrun,
31:04 qui est Abemus Papam. Je sais pas si vous vous rappelez de ce film.
31:07 - De Nani Moretti ? - De Nani Moretti, exactement.
31:09 - Qui avait été le salaire. - Qui avait été grand chef d'oeuvre,
31:12 qui avait été à Cannes.
31:14 Qui est... Donc Nani Moretti, enfin le personnage que joue Nani Moretti,
31:19 qui est un cardinal, est élu à la fonction suprême.
31:25 Il est élu à la fonction suprême, mais au moment où il va aller sur le balcon et incarner
31:31 sa position d'exception et sa figure d'autorité, il est pris d'une panique.
31:37 Et il n'est pas en mesure d'incarner cette figure-là.
31:42 La figure du collectif et la figure de l'autorité.
31:45 Alors le film est très drôle, il va voir un psychanalyste qui, évidemment, ne sert à rien.
31:49 Comme souvent les psychanalystes, qui évidemment ne sert à rien.
31:53 - Oui, je vous en prie. - Non, non, non, je plaisantais, je disais
31:58 "Ne dites pas ça des psychanalystes". - Il faut un peu !
32:02 - Il faut faire preuve de tôt-déraison. - Sinon on s'en sort pas.
32:05 Mais juste pour terminer d'un mot, ce que je voulais vous dire, c'est que
32:10 la figure de... Ce n'est pas seulement une jeunesse ou une jeune génération
32:15 qui ne respecte pas l'autorité. Ce sont des adultes qui ont disparu du monde.
32:20 Et la partie d'adultes ne trouve plus preneur.
32:23 - Pierre-Bert Moran, est-ce que vous partagez ce constat ?
32:26 Finalement, est-ce qu'on est dans une société qui a tué tous les pairs au sens propre
32:31 et au sens figuré, et qui perd finalement...
32:34 Qui n'a plus de matrice structurante pour effectivement reprendre les termes de Jérôme Fourquin ?
32:39 - Certainement pas tous. Il y a toujours des pairs, il y a toujours des autorités structurantes.
32:45 Mais après, évidemment, elles n'ont pas forcément un impact sur l'ensemble de la société.
32:49 Pour rebondir sur ce qui a été dit et le prolonger, moi aussi j'ai entendu l'anecdote d'Alger.
32:55 C'était un jeune homme qui arrivait avec sa casquette à l'envers,
32:59 et à peine débarqué de l'avion, on lui dit "si tu n'es pas en France, tu mets ta casquette à l'endroit".
33:04 Cette anecdote, comme bien d'autres que j'ai vécues au Maghreb,
33:08 une fois je me suis fait voler mon permis de conduire, ou je l'ai perdu, je ne sais plus très bien.
33:14 Je suis allé porter plainte à un commissariat, et en entrant dans le commissariat,
33:17 j'ai vu un jeune voleur attaché avec des menottes à un radiateur
33:21 qui se prenait une dérouillée par des fonctionnaires de police.
33:25 Il faut bien comprendre que là, tout à l'heure je parlais de vertige identitaire,
33:30 mais il y a un vertige de sens, et il y a un vertige de la toute puissance de la liberté
33:37 pour un certain nombre de jeunes gens.
33:39 Quand ils circulent entre l'espace, pour parler de l'Afrique du Nord,
33:43 et ça peut être d'autres sociétés du Sud, des jeunes gens qui arrivent en France
33:47 venant d'une société où l'autorité existe, la figure de l'autorité existe,
33:51 elle est respectée, et elle s'impose à coup de matraque, quand il y a un doute,
33:56 en cas de doute, de manière très généreuse.
33:59 Tout d'un coup, certains de ces jeunes gens arrivent en France,
34:03 et effectivement, il n'y a plus de butée.
34:05 Il n'y a plus de butée policière, parce que les policiers sont républicains,
34:09 polis, honnêtes, et ne vont pas embêter les gens dans la rue,
34:12 sauf si vraiment ils vont très loin.
34:14 Il n'y a plus de butée, le juge paraît une butée très lointaine,
34:18 on sait que la justice est très lente.
34:20 Il n'y a plus de butée non plus à l'école,
34:22 et il n'y a plus de butée dans la société, en tout cas,
34:25 elles sont très très loin ces butées.
34:26 J'entendais hier une anecdote intéressante,
34:28 une jeune femme a été cambriolée par des jeunes migrants
34:31 qui lui ont volé, je crois, un préjudice de 18 500 euros.
34:35 C'est une actrice dont j'ai oublié le nom,
34:38 quand elle a appris qu'ils étaient sans papier,
34:40 elle a renoncé à porter plainte, je crois,
34:42 c'est la même anecdote.
34:44 Oui, c'est ça, tout est dit.
34:46 Tout est dit, c'est-à-dire que d'un côté, vous voulez...
34:49 Il faut savoir que si vous voulez une boîte de sardines
34:52 dans un supermarché à Tunis, ou dans une épicerie,
34:55 vous faites un nom de prison, d'accord ?
34:57 C'est une anecdote que je connaissais d'il y a trois ans.
34:59 Et ici, vous voulez 18 500 euros, il n'y a pas de plainte.
35:03 Alors, il faudrait presque réunir tous ces jeunes gens
35:09 qui sont concernés, et puis leur expliquer,
35:11 il faudrait travailler là-dessus.
35:13 Parce que vous passez d'un côté où un ordre extrêmement
35:17 patriarcal, policier, etc., religieux, existe,
35:25 est impitoyable, où vous vous retrouvez dans des prisons
35:29 innommables, si vous passez les lignes.
35:32 Et puis de l'autre, où il y a une autorité extrêmement faible,
35:35 filandreuse, au nom de bon sentiment d'ailleurs,
35:39 cette jeune femme est très généreuse par certains côtés.
35:42 Mais en même temps, les personnes qui sont prises,
35:45 les jeunes migrants notamment, ou les jeunes qui connaissent
35:47 les deux côtés de la Seine, au fond,
35:49 eux, ils le connaissent, et eux, ils connaissent
35:51 les deux côtés de la Seine, ils sont pris, je pense,
35:53 dans un vertige de sens, et ils vont aller chercher
35:56 la butée jusqu'à ce qu'ils la trouvent.
35:58 Et elle est très loin, cette butée.
36:00 - Merci Pierre Wermoran, je suis désolé, je vous coupe,
36:02 mais on a largement dépassé le...
36:04 Mais on continue cette conversation.
36:06 La dernière partie de Dans Toute Vérité,
36:08 consacrée à cette montée des violences.
36:12 Dans quelques instants, on se retrouve avec
36:14 Pierre Wermoran et Ruben Ravinovitch sur Sud Radio.
36:16 A tout de suite !
36:17 - Nous sommes de retour sur Sud Radio,
36:24 avec Pierre Wermoran, essayiste, historien,
36:28 spécialiste notamment de la question de l'islam,
36:31 et plus largement du monde arabe,
36:33 auteur de "La France qui déclasse",
36:35 ou encore du "Choc des décolonisations",
36:38 et avec Ruben Ravinovitch,
36:40 qui est psychologue et psychanalyste,
36:43 qui a traité l'un des cas de jeunes condamnés
36:48 pour violences, braquages, viols,
36:50 et nous tentons de comprendre les ressorts
36:54 de la violence aujourd'hui.
36:58 Pierre Wermoran, avant la pause,
37:01 on parlait peut-être d'une forme de choc
37:04 entre des cultures différentes,
37:06 entre un monde maghrébin,
37:09 qui était parfois hyper autoritaire,
37:12 et notre propre monde,
37:14 où il y avait une forme de permissivité.
37:17 Donc on a vu à la fois que les cas,
37:23 peut-être qu'il y avait une crise d'autorité
37:25 dans notre société,
37:27 qu'en plus on faisait venir des individus
37:29 qu'on n'était pas même d'intégrer.
37:32 J'ai envie de vous demander,
37:34 même si c'est une vaste question,
37:36 comment on sort de cette spirale de la violence,
37:39 comment on peut reconstruire certains cadres,
37:42 et éviter ce type de drame,
37:45 peut-être pas dans un avenir proche,
37:47 mais dans une décennie ou deux ?
37:50 - Écoutez, il faudrait certainement plus de 5 minutes,
37:54 vous avez des invités très bavards,
37:57 on s'en excuse.
37:59 - Je vous laisse 5 minutes,
38:02 je vous ai coupé tout à l'heure,
38:04 donc vous avez du temps pour vous exprimer.
38:07 - Non, mais j'avais fini.
38:09 Vous dites que les États maghrébins
38:12 sont parfois autoritaires.
38:14 Non, ils sont toujours autoritaires.
38:16 On est dans des sociétés autoritaires et patriarcales,
38:19 et qui imposent leurs lois.
38:22 Nous, on a abandonné tout ça.
38:25 On le fut, on a été autoritaire et patriarcal.
38:29 La République, elle était autoritaire.
38:32 Il faut quand même se rappeler qu'au XIXe siècle,
38:35 dans les transports en commun en France,
38:37 il était marqué qu'il était interdit de cracher par terre,
38:40 qu'il était interdit d'avoir un couteau, etc.
38:43 Mais aujourd'hui, on n'oserait plus dire ça.
38:46 Et donc, certaines personnes s'autorisent
38:49 non seulement à cracher, mais aussi à avoir un couteau.
38:52 Alors je pense qu'il faudrait fixer des cadres très clairs,
38:55 parce que pour l'instant, c'est pas le fondément.
38:58 - Si vous voulez fixer des cadres très clairs,
39:00 je suis le premier à être d'accord,
39:02 mais je pense que c'est juste pour vous permettre
39:04 de préciser votre pensée.
39:06 Des cadres très clairs, c'est pas non plus nécessairement
39:09 un modèle qui est le modèle justement
39:11 pour ces pays du Maghreb.
39:13 C'est la singularité des civilisations européennes,
39:17 c'est qu'il y a un équilibre entre l'ordre et la liberté.
39:20 - Mais je suis 100% d'accord.
39:23 Bien sûr.
39:25 Ce que je voulais dire, c'est que si vous voulez,
39:27 pour l'instant, moi je n'y connais rien,
39:29 je ne suis ni juriste ni policier.
39:31 J'entends dire les policiers que le couteau, par exemple,
39:34 on n'a pas le droit de se promener avec un couteau.
39:36 Et d'après la loi, puisqu'on dit que
39:39 si on est porteur d'un couteau, on peut avoir un nom de prison.
39:42 Bon. Alors ça, on a une loi.
39:44 Mais elle ne sert strictement à rien.
39:46 Les Français adorent les lois, mais les lois ne sont pas appliquées.
39:49 Donc il vaudrait beaucoup mieux qu'on ait trois fois moins de lois,
39:51 mais que les lois existantes soient appliquées.
39:53 C'est-à-dire que quelqu'un qui a un couteau,
39:56 dans la rue, qui n'est pas en train de tailler son rosier,
39:59 à priori, il se promène dans un transport en commun
40:02 avec un couteau, il faudrait que cette personne,
40:05 si elle est prise, qu'elle fasse un an de prison.

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