Mis en examen pour l'empoisonnement volontaire de trente patients entre 2008 et 2017, l'anesthésiste de Besançon, Frédéric Péchier, est l'invité exceptionnel de Amandine Begot.
Regardez L'invité de RTL du 05 mars 2024 avec Amandine Bégot.
Regardez L'invité de RTL du 05 mars 2024 avec Amandine Bégot.
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00:02 RTL matin
00:06 RTL 7h44, Amandine Bégaud, vous recevez ce matin Frédéric Péchier, ce médecin anesthésiste soupçonné de 30 empoisonnements.
00:13 Bonjour Frédéric Péchier. Bonjour madame Bégaud. Les auditeurs ont sans doute tous entendu parler au moins une fois de votre histoire.
00:20 On vous a en revanche très peu entendu depuis sept ans, une seule fois en interview audiovisuel. Vous êtes médecin anesthésiste
00:28 soupçonné d'avoir empoisonné 30 patients dans deux cliniques de Besançon. Des patients qui une fois endormis pour leur opération ont été victimes d'arrêts cardiaques
00:35 inexpliqués.
00:37 12 d'entre eux sont morts et vous êtes donc mis en examen pour ces 30 cas, 30 soupçons d'empoisonnement. L'instruction est en phase de clôture.
00:44 Vous risquez aujourd'hui après sept ans d'instruction la cour d'assise. Est-ce que vous espérez encore échapper à un procès ? Tout est encore possible.
00:52 Il y a des questions
00:54 qui restent
00:55 à poser, notamment nous avons des éléments qu'il faut faire étudier.
01:00 Maintenant
01:03 très clairement, oui je m'attends à un procès. Oui je veux un procès pour pouvoir sortir de là définitivement
01:11 blanchi.
01:13 Vous voulez un procès ? Oui. Ça peut paraître surprenant ? J'ai toujours demandé ça à mes avocats depuis le départ.
01:18 Il y a quelque chose qui montre par A+B que il n'y a pas d'empoisonnement, il n'y a pas d'empoisonneurs. Enfin je ne suis pas
01:25 la personne qui est décrite dans cette instruction. Vous êtes soupçonné d'avoir pollué, c'est à dire pour faire simple,
01:31 trafiqué les poches de réhydratation des patients en y injectant à la seringue des anesthésiques ou du potassium à dose létale.
01:38 Jamais vous n'avez fait ça ? Non absolument pas, jamais. Sauf que ces poches visiblement elles ont bien été
01:45 polluées. Ça a été montré en tout cas
01:47 dans les analyses pour au moins trois cas. Il se trouve que pour les autres poches elles n'avaient pas été gardées donc on n'a pas
01:52 pu les analyser. Qui a pu faire ça ?
01:55 Alors je ne sais pas qui a pu faire ça.
01:57 Dans deux cas je pense que c'est ma théorie et je pourrais médicalement m'en expliquer. Cette pollution a eu lieu
02:06 après
02:08 l'intervention, donc pour couvrir la personne qui était anesthésiste à ce moment là. Et le dernier cas
02:14 c'était le cas dont je m'occupais. La pollution a eu lieu
02:17 par contre je ne sais pas quand.
02:19 Et si j'avais su que si c'était moi le pollueur, il est évident que j'aurais fait moi-même le diagnostic.
02:25 Rapidement. Les enquêteurs disent que vous auriez fait ça pour démontrer vos talents de réanimateur et/ou pour
02:30 discréditer certains de vos collègues avec qui vous étiez en conflit. Vous étiez en conflit Frédéric Féchier avec
02:34 certains de vos collègues ? Non absolument pas.
02:37 Pas plus que
02:39 ce qu'on peut avoir dans une boîte, c'est à dire des gens qui
02:42 travaillent ensemble pour travailler, d'autres qui ont plus d'affinité. Mais je n'avais pas de conflit aigu avec
02:48 mes collègues. J'ai vu des conflits aigus entre collègues jusqu'à
02:53 certains qui fracassaient le
02:55 casier de là en disant la prochaine fois c'est pour ta gueule.
02:59 Enfin ce genre de choses. Il y a eu des commissions de fait par la clinique
03:03 parce qu'il y avait une mésentente
03:05 entre deux médecins anesthésistes à un point que c'est passé par une commission de conciliation.
03:11 Donc l'ambiance elle était quand même vraiment pas favorable dans ce service on est d'accord ?
03:14 L'ambiance n'était pas favorable dans ce service. Mais vous n'aviez pas vous de problème ? Moi j'avais pas de problème avec personne. Je me suis
03:20 jamais engueulé avec quelqu'un. On n'est pas
03:22 dans un tribunal ici et la justice fait son travail, elle fera son travail.
03:26 Malgré tout, et vous le reconnaîtrez sans doute, dans cette affaire il y a un certain nombre d'éléments troublants, un faisceau d'indices graves et concordants comme on dit.
03:34 Par exemple, et je cite un exemple au moment où ces incidents ont lieu, vous étiez soit toujours au bloc soit dans le bloc d'à côté
03:41 sauf pour trois cas, trois cas sur trente.
03:44 Mais l'accusation dit que vous avez tout à fait pu polluer ses poches avant justement
03:49 peut-être pour tenter de vous disculper. Polluer ses poches avant
03:52 concernant la polyclinique de Frange-Comté, il a été montré que c'était pas possible.
03:56 Mais vous étiez là à chaque fois ou presque ? Non, j'étais pas là à chaque fois. A la polyclinique j'étais pas là pendant
04:01 deux cas sur trois. A la clinique Saint-Vincent j'étais absent
04:06 plusieurs fois, c'est à dire présent dans les murs, quelques fois en consultation, autre chose. Mais j'étais pas là si vous voulez en permanence.
04:14 La chose qu'il faut savoir c'est que depuis
04:18 on va dire
04:20 2012, 2013, j'avais en charge les plannings et la coordination un petit peu de l'anesthésie.
04:28 Et pour ça j'avais un téléphone personnel interne.
04:31 J'étais le seul anesthésiste à l'avoir. Et dans toutes les auditions qui sont faites par les chirurgiens, par
04:39 les anesthésistes eux-mêmes, il est dit à chaque fois dès qu'il y a un problème de toute manière on appelle Péchier.
04:46 On vous voit surgir dès qu'il y a un problème ? Non, c'est pas qu'on me voit surgir, c'est qu'on m'appelle. Je n'ai jamais surgi au dernier moment.
04:53 Ça c'est pas vrai. Frédéric Péchier, je le répète, sept ans d'enquête c'est extrêmement long. Comment vous expliquez qu'en sept ans on n'ait pas réussi à
05:01 démontrer votre innocence ?
05:03 Je crois surtout qu'en sept ans ils n'ont pas réussi à démontrer ma culpabilité.
05:06 C'est surtout ça le problème. Il n'y a aucun élément
05:09 qui puisse de façon formelle prouver ma culpabilité.
05:16 Mais aucun élément non plus qui puisse prouver de façon formelle que vous êtes innocent ?
05:21 Mais en fait si, si.
05:23 Tout simplement,
05:25 tout ce qui a été fait,
05:27 notamment en termes de recherche d'ADN,
05:30 recherche papillaire, etc. Enfin bref, tout ce qui a été fait par la police scientifique ne montre que dans aucun cas je suis...
05:38 je suis...
05:40 on retrouve mes empreintes où aucune personne
05:44 a dit "moi j'ai vu Péchier manipuler dans un autre bloc
05:48 des poches ou emmener des poches ou avoir une attitude bizarre".
05:53 Vous avez une lettre ?
05:54 Oui.
05:56 Qui est au dossier ?
05:57 Qui est une lettre anonyme que les enquêteurs ont reçue en 2021 ?
06:01 Oui, c'est une lettre effectivement qui est anonyme d'une dame qui
06:05 explique qu'elle était en train de faire du rangement
06:09 dans une salle dédiée et que deux personnes sont entrées, un homme et une femme,
06:14 et ils disent que tout avait bien fonctionné, que Péchier aurait du mal à se défendre
06:21 et qu'il serait bientôt débarrassé de ce salopard.
06:26 Ça veut dire qu'il y a des gens qui voulaient vous faire tomber ?
06:28 Manifestement, c'est ce que le courrier veut dire.
06:32 Vous demandez à la justice d'enquêter aujourd'hui sur cette lettre ?
06:35 Évidemment, c'est une lettre qui est primordiale.
06:36 Il n'y a pas eu d'enquête sur cette lettre faite versée au dossier.
06:39 On n'a jamais retrouvé l'auteur et si l'auteur pouvait se manifester maintenant,
06:43 ce serait le bon moment.
06:45 Ça peut changer votre vie ?
06:46 Ça changera ma vie, oui, parce que ce sera le début d'une preuve concrète.
06:50 Frédéric Péchier, ça fait plusieurs minutes qu'on parle.
06:53 Vous n'avez pas eu un mot pour les victimes ou pour leur famille ?
06:56 Je suis profondément attaché à ce que les victimes puissent avoir des explications formelles.
07:08 C'est-à-dire qu'il arrivera à la fin du procès un non-lieu,
07:12 mais ces victimes-là, on ne leur donnera plus un pseudo empoisonneur.
07:16 On leur dira "voilà, on n'a pas de preuves, on n'a rien, il y aura un non-lieu".
07:21 Mais ça sera très perturbant pour eux et je le comprends,
07:24 et je comprends leur souffrance parce qu'à ce moment-là,
07:27 il va falloir qu'elles aient un diagnostic.
07:30 Et là, elles se retourneront contre la clinique forcément.
07:33 Vous pensez à elles ?
07:34 Bien sûr.
07:35 Souvent ?
07:35 Bien sûr.
07:36 Il n'y a pas une journée sans que je pense aux dossiers.
07:38 J'aurais d'ailleurs, je l'ai déjà dit en audition, aimé leur parler directement,
07:44 pour pouvoir leur expliquer certains dossiers qui sont uniquement médicaux.
07:49 Quand je vous écoute, vous le répétez, vous voulez un procès en cours d'assise ?
07:54 Oui, oui, parce que c'est la seule façon,
07:58 hormis s'il y avait un retournement de situation,
08:00 c'est la seule façon pour moi d'être innocenté.
08:03 Vous comprenez que ça puisse choquer les familles de victimes
08:07 que vous preniez la parole comme ça ce matin ?
08:09 Non, je ne pense pas.
08:11 Je pense que j'ai le droit de m'exprimer aussi, si vous voulez.
08:16 Les familles des victimes ont aussi parlé dans la presse.
08:22 Leurs avocats abondamment, le procureur a abondamment aussi.
08:26 Et donc, j'ai le droit de moi aussi me défendre.
08:30 Pour moi, le fait d'être présent ici n'est pas quelque chose de choquant.
08:37 Merci beaucoup Frédéric Péchet.
08:38 Merci.
08:39 [SILENCE]