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Regardez L'invité de RTL avec Amandine Bégot du 03 février 2023

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00:02 RTL Matin
00:06 Il est 7h44, excellente journée à vous tous qui nous écoutez. Amandine Bégaud, vous recevez donc ce matin Noémie Silberg.
00:12 Noémie Silberg, vous publiez "Vivre après Marc", c'est aux éditions Hermann.
00:17 Marc, c'est votre mari que vous avez accompagné pendant huit mois dans son combat contre le cancer, un cancer foudroyant, cancer gastrique,
00:24 qu'il a tenu à garder secret presque jusqu'au bout. Pourquoi ?
00:29 Marc voulait que personne ne soit au courant de sa maladie. Il était avocat
00:33 et il considérait que c'était une mort professionnelle que de dire aux gens qu'il était malade et que personne ne viendrait lui
00:39 confier ses dossiers. Et surtout, il voulait pas qu'on le voit comme quelqu'un de malade. Il voulait pas qu'on ait de la peine, il voulait pas
00:45 qu'on ait pitié.
00:47 Et il a tenu comme ça jusqu'au bout et il a annoncé finalement, seules nos familles respectives étaient au courant et il a
00:54 annoncé sa maladie que
00:56 quasiment à la veille de sa mort aux gens. Et cette promesse, vous l'avez tenue,
01:00 jamais vous ne l'avez dit à vos amis, alors même que vous écrivez que vous êtes plutôt du
01:04 genre à tout dire, à tout raconter à vos amis dans les moindres détails.
01:08 Ça doit être extrêmement difficile
01:10 pour vous, pour lui, dans ces moments-là, il y a forcément un moment où on a besoin de parler à quelqu'un ?
01:16 Alors c'est vrai que c'était un peu "Docteur Jekyll et Mister Hyde",
01:20 mais
01:23 il fallait que je respecte sa parole et c'était important pour moi de
01:27 vraiment de respecter sa volonté.
01:29 Et je l'ai dit, j'avais ma famille pour en parler, qui m'écoutait, qui me soutenait et il m'avait autorisé aussi à le dire à
01:36 une de mes amies qui est psychologue.
01:38 Mais il vous avait demandé de payer la consultation pour qu'elle garde le secret médical ?
01:43 Voilà, pour la contraindre. Je l'ai pas fait, mais c'est ce qu'il m'avait demandé de le faire. Mais elle m'a beaucoup aidée parce qu'elle
01:50 m'a aidée à...
01:52 elle m'a expliqué comment il fallait s'adresser aux enfants.
01:55 Alors vous avez, pardon je vous coupe, mais vous avez deux enfants,
01:58 et tel et Adam, qui avait cinq et trois ans au moment de la disparition de Marc, et c'était tout petit,
02:04 donc quatre et deux ans quand vous avez appris la maladie.
02:07 Il y a quelque chose d'extrêmement frappant parce que c'est aussi le combat d'une maman que vous racontez.
02:13 Vous avez toujours voulu leur expliquer, en tout cas ne jamais leur mentir.
02:17 Je me suis retrouvée face à cette situation,
02:21 évidemment que je n'avais jamais vécu, et je savais que je ne savais pas faire.
02:25 Et mon seul objectif était de me dire "voilà, je vais rester avec mes enfants,
02:29 il faut que je ne commette aucun impair, il faut que je fasse le mieux possible pour eux et pour qu'ils aillent bien".
02:36 Et donc je me suis adressée à... je me suis tournée vers des psychologues.
02:40 Mes enfants n'ont pas vu ces psychologues, mais je leur ai demandé quels mots il fallait employer
02:46 vis-à-vis d'eux. Et ce qu'on m'a appris, c'est qu'il ne fallait rien cacher aux enfants, parce qu'en fait ne pas dire aux enfants,
02:51 c'est susciter le fantasme, l'imaginaire, et c'est très mauvais.
02:56 Et donc je leur ai toujours tout dit, ils voyaient que je ne leur cachais rien, alors il faut faire toujours attention ce qu'on m'a expliqué,
03:02 aux mots,
03:03 au temps aussi, parce qu'ils n'ont pas la même notion du temps que nous.
03:06 Et donc ça s'est fait
03:09 naturellement. Le mot est un peu bizarre, mais
03:12 tous ces faits, d'abord ils voyaient leur père, son état se détériorer,
03:16 et ils ont vu les choses se faire devant leurs yeux, et ils étaient en confiance,
03:20 parce qu'ils savaient que je ne leur mentais pas.
03:23 Très vite, vous avez compris que Marc ne guérirait pas ?
03:25 En fait, je l'ai su quasiment tout de suite, parce que
03:28 quand Marc a appris sa maladie,
03:31 quand on a appris la maladie de Marc, on est allé tout de suite voir l'oncologue,
03:35 et on s'est retrouvés dans le bureau de l'oncologue. Et Marc m'a dit "on n'est pas pareil, toi tu veux tout contrôler,
03:40 moi je veux poser uniquement les questions qui m'intéressent.
03:44 Donc je te demande de respecter ça, et de ne pas poser de questions." J'ai promis,
03:48 et je me suis tue. Et à la fin de la consultation,
03:51 l'oncologue lui a demandé d'aller avec les infirmières faire une prise de sang, et je me suis retrouvée seule face à lui.
03:58 J'ai hésité, mais je n'ai pas pu m'empêcher de poser la question.
04:01 Et quand j'ai posé la question,
04:04 là j'ai compris à travers ses réponses que
04:07 qu'il ne pouvait pas guérir, et qu'il était condamné, et que les traitements qu'on allait lui donner ne feraient que
04:13 prolonger sa vie. Et j'ai compris que ça risquait d'aller très très vite.
04:17 - Ça a été très très vite, en huit mois.
04:20 Mais ça vous a aidé de savoir finalement, vous dites "vous écrivez, j'ai commencé à faire le deuil de mon mari vivant."
04:26 - Oui, je me suis rendu compte de ça en écrivant d'ailleurs.
04:29 En fait je me suis préparée à sa mort.
04:33 Quand j'ai su qu'il ne guérirait pas, d'abord je l'ai gardé pour moi, puisque j'ai demandé à l'oncologue de ne jamais lui dire.
04:39 Donc j'ai tenu ce secret jusqu'au bout, mais ça m'a permis de me préparer
04:43 d'anticiper les choses, de profiter de lui au maximum. Et je crois que sur le moment si je m'en suis voulue
04:50 de poser cette question, je me suis dit "mais je suis dingue, pourquoi est-ce que j'ai été chercher cette réponse ?"
04:54 Finalement, ça m'a énormément aidée.
04:57 - Lui, il y croyait.
04:59 Vous racontez notamment cet été 2020, que vous avez passé dans le Luberon. Au moment de partir, Marc discute avec la propriétaire de la maison.
05:05 Il est très affaibli, mais il réserve pour l'été suivant.
05:08 Et vous savez qu'il n'y aura pas d'été suivant.
05:11 - Oui, mais je le laisse faire.
05:13 J'en suis convaincue. Je suis convaincue que l'année suivante, on ne retournera pas dans cette maison.
05:19 C'était ma façon de
05:22 l'aider à combattre,
05:24 d'espérer de le faire tenir le plus longtemps possible et dans les meilleures conditions si je puis dire.
05:30 Vous nous disiez "j'ai jamais menti à mes enfants, jamais sauf une fois". C'est vous qui le racontez.
05:35 Ce jour-là, vous comprenez que c'est bientôt la fin. Marc est chez vous. Il tenait à
05:39 partir chez vous, et pas à l'hôpital. Dans le coma depuis plusieurs jours, les enfants rentrent de l'école.
05:47 Et là, vous vous dites "il faut que j'avance, il faut que je leur dise". Et vous leur dites "Marc,
05:52 papa ne se réveillera sans doute jamais. Le petit corps des tels stress ailles, je la rassure, écrivez-vous".
05:59 On va pouvoir aller le voir, lui parler, lui dire qu'on l'aime, l'embrasser, pourquoi pas lui apporter un dessin.
06:03 C'est bouleversant et rien que d'en parler, j'en ai les larmes aux yeux.
06:06 Vous lui dites aux enfants, qui je le rappelle ont
06:10 cinq et trois ans, ce sont de tout petits enfants, vous leur dites "on va aller voir papa".
06:14 Mais attendez deux secondes, je vais voir. Vous rentrez dans la chambre et là vous découvrez que Marc est mort.
06:18 Et vous vous dites "je ne peux pas ne pas tenir ma promesse aux enfants, il faut qu'ils aillent dire au revoir à leur papa".
06:25 Comment vous faites Noémie pour ne pas vous écrouler à ce moment-là ?
06:28 J'avais pas le choix et je savais que
06:30 le deuil commencerait par là, par lui dire au revoir et qu'il pourrait pas se construire de la même manière s'il lui disait pas au revoir.
06:38 Donc c'était fondamental pour moi, il fallait trouver quelque chose.
06:41 Donc j'ai éteint les lumières, ça faisait pas une telle différence avec ce qui s'était passé, ce qui se passait 100 minutes avant.
06:46 J'ai éteint les lumières, je les ai approchées au pied
06:49 de Marc qui était recouvert par un drap.
06:53 Et là je leur ai dit "vous pouvez lui dire au revoir, vous pouvez l'embrasser, vous pouvez déposer un dessin".
06:58 Et je crois que ça a été fondamental pour eux et
07:02 j'aurais pas pu me regarder dans la glace après si j'avais pas fait ça.
07:07 Et tel est Adam aujourd'hui, sept et cinq ans, comment vont-ils deux ans après ?
07:11 Jusque là ils vont bien, ils vont bien, on forme une équipe
07:14 solide parce que ce drame nous a évidemment encore plus rapprochés et on a beaucoup de choses à notre disposition.
07:22 Marc avait une peur, il le répétait souvent, c'était que
07:26 les enfants ne se souviennent pas de lui. Et donc c'est fondamental pour moi
07:32 de parler de lui et on parle de lui en permanence. Je le cite tout le temps, on regarde tout le temps des vidéos.
07:38 Marc avait énormément d'humour, c'est comme ça d'ailleurs que je suis tombée amoureuse de lui.
07:44 Je leur montre des vidéos qui sont drôles,
07:49 on regarde en permanence des photos. Il me demande tous les soirs avant de se coucher
07:53 que je leur raconte une histoire de papa. On a une boîte avec plein de souvenirs donc on le fait vivre à travers tout ça.
07:59 Et on a l'impression, en tout cas c'est comme ça que j'essaye de les élever parce que c'est mon sentiment
08:04 qu'il vit à travers nous en permanence.
08:06 "Vivre après Marc", vous auriez pu aussi appeler ça "Vivre avec Marc" parce que c'est beaucoup "avec".
08:12 Delphine Horviller qui signe la préface écrit "C'est un livre qui raconte la mort et ramène la vie".
08:18 Effectivement, même si on parle de choses qui sont tristes, qui sont douloureuses,
08:23 j'ai voulu montrer dans ce livre que on peut être heureux malgré un drame, qu'on peut
08:30 avoir des moments de tristesse.
08:33 Mais être heureux, et c'est ce que je dis aux enfants, il ne faut pas s'empêcher de pleurer, il ne faut pas s'empêcher d'être triste.
08:39 Mais on peut quand même être heureux. Votre père a été heureux, il a été heureux
08:43 chaque jour de sa vie. Et nous, on aura des moments difficiles, on a tous les jours des moments difficiles et il nous manque
08:48 mais on est heureux.
08:49 Merci beaucoup Noémie Silberg. Et je rappelle, ce livre "Vivre après Marc" s'est publié aux éditions
08:54 Hermann et ça parlera sans doute à beaucoup d'auditeurs. Je donnais les chiffres
08:58 tout à l'heure, 400 000 nouveaux cas de cancer diaglossique et chaque année en France 4 millions de malades.
09:03 - Marc Avetis.
09:04 - Ah, qu'elle vait !

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