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Réponses au quiz de fin :

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Quelles sont les deux familles au sein du néo-libéralisme ?
Ultra-libéralisme anti-état. (Tatcherien.)
Puissance néo-libérale très invasive qui passe par l'état et les politiques publiques.

A quoi est comparable la démocratie pour Tocqueville ?
Enfant des rues, mal élevée et violente, à canaliser par la compétence.

Quel est le régime politique de notre pays ?
Gouvernement représentatif.

#stiegler #démocratie #pouvoir #politique #elucid #berruyer #représentatif #élu #giletjaune #RIC #conventioncitoyenne #interview #extrait #ethiqueettac
Transcription
00:00 Quand on parle de néolibéralisme, on voit que finalement, assez rapidement, on ne parle
00:13 pas que d'économie, mais aussi de gouvernance.
00:17 On se demande, mais dans ce système-là, au long cours, est-ce que le néolibéralisme
00:26 peut-il être compatible avec la démocratie ?
00:27 Est-ce qu'on est en démocratie, selon vous ?
00:32 Oui.
00:33 Effectivement, le néolibéralisme, je rappelle deux familles, l'ultralibéralisme anti-État,
00:41 libertarien, etc., tachérien, Tacher n'étant pas exactement libertarienne, mais vous voyez
00:47 ce que je veux dire, et un autre néolibéralisme beaucoup plus prégnant dans nos pays, où
00:52 on a une puissance publique néolibérale très invasive, qui passe par l'État et les politiques
00:56 publiques.
00:58 Ce deuxième libéralisme, c'est vraiment une théorie du gouvernement.
01:04 Et je combats la notion de gouvernance, qui est un mot néolibéral, qui précisément
01:10 vise à rendre la question du gouvernement, à dépolitiser la question du gouvernement,
01:17 en faisant de cette question une question technique.
01:19 La gouvernance, ce serait quelque chose qui relèverait de la déontologie, des bonnes
01:24 manières, des bonnes pratiques, de l'efficience.
01:27 C'est une théorie du gouvernement.
01:29 Donc, c'est une théorie politique.
01:31 C'est une théorie politique de la démocratie, on l'a dit, je viens de le dire, qui est
01:35 en fait une théorie politique de la démocratie anti-démocratique.
01:39 Et ça, John Dewey, le philosophe américain que j'ai rencontré sur ma route grâce
01:45 aux néolibéraux, le montre extrêmement bien.
01:47 Parce que la théorie de Lippmann, si on revient sur ce que je dis tout à l'heure, la théorie
01:53 des néolibéraux, consiste à dire que le démos, c'est rien d'autre que la population.
02:01 Ce n'est pas forcément la populace, ce n'est pas forcément la plèbe, ce n'est
02:06 pas forcément la foule haineuse des écrits de la fin du 19e siècle qu'on connaît,
02:13 qui vilipende.
02:14 Mais c'est quand même une masse irrationnelle.
02:16 Mais pour Lippmann, c'est une matière plastique malléable, très intéressante, comme un
02:23 sculpteur.
02:24 On va la conduire dans la bonne direction.
02:26 Et donc, le démos n'est absolument pas un acteur.
02:29 Or, le démos, quand surgit le mot démocratie à Athènes, parce que c'est les Athéniens
02:38 qui ont inventé ça, c'est précisément celui qui gouverne.
02:41 Demos kratos, le démos, c'est le collectif des libérants athéniens, l'ensemble des
02:48 citoyens, en tant qu'ils se gouvernent eux-mêmes et qu'ils n'ont aucun gouvernant au-dessus
02:53 d'eux.
02:54 Pendant deux siècles, à Athènes, je travaille beaucoup sur la démocratie athénienne, c'est
02:58 pour ça que j'ai écrit un ouvrage qui s'appelle "Démocratie manifeste", que j'ai co-signé
03:06 avec Christophe Pébarde, qui est un spécialiste de la démocratie athénienne.
03:09 Mes travaux se nourrissent beaucoup de son livre, paru l'année dernière, qui s'appelle
03:14 "Athènes, l'autre démocratie", qui est un ouvrage paru au J'ai passé composé et
03:19 qui est le résultat de 15 ans de recherche de sa part.
03:22 Donc, c'est vraiment un livre très important pour mes propres réflexions sur la démocratie.
03:27 En fait, ce que Christophe Pébarde montre très bien dans "Athènes, l'autre démocratie",
03:35 c'est que, il retrouve d'ailleurs les thèses de Castoriadis, on a clairement un collectif
03:43 délibérant qui se gouverne lui-même.
03:45 Il n'y a pas de gouvernant au-dessus.
03:49 Périclès, par exemple, n'est pas le président des Athéniens ou le ministre des Athéniens.
03:53 C'est un stratège qui a son rôle parmi d'autres, mais il n'y a pas de chef.
03:58 Le seul chef, si vous voulez, absolument qu'il y ait un chef, je ne suis pas sûre que ce
04:02 soit le président des Athéniens, mais c'est le démos qui est le chef de lui-même.
04:05 Et contrairement à ce qu'on enseigne souvent, une démocratie ratée, sous l'influence
04:10 de Platon, etc., cette démocratie dure deux siècles.
04:13 Alors, elle a des problèmes, elle rencontre des difficultés, bien sûr, mais elle tient
04:19 pendant deux siècles.
04:20 Et pendant deux siècles, le démos est l'acteur politique majeur qui est le seul qui se gouverne
04:25 lui-même.
04:26 Il y a partout une propagande très forte qui, évidemment, vise à nous dire "non, attention,
04:28 on est bien en démocratie".
04:29 C'est quelque chose qu'on n'arrive pas à remettre en question.
04:34 C'est-à-dire, dans un média, on va dire "attention, on n'est pas en démocratie".
04:36 C'est quand même une évidence, si on revient à la notion de démocratie.
04:39 Comment on peut lutter contre ça ? Pourquoi on en est là ?
04:43 Je crois qu'il faut revenir à l'histoire politique de la France.
04:46 La question de la démocratie en France, elle surgit pendant la Révolution française.
04:50 Elle ne surgit pas immédiatement en 1789.
04:56 En 1789, une extrême minorité des acteurs de la Révolution croient en hypothèse démocratique
05:05 athénienne.
05:06 Mais dès 92, 93, ça devient vraiment quelque chose de très important.
05:13 Je rappelle que la deuxième constitution qui a été rédigée n'est jamais appliquée
05:20 et qui a inspiré tous les mouvements sociaux révolutionnaires qui ont suivi, en France
05:26 et ailleurs d'ailleurs, c'est la notion de république sociale et démocratique.
05:31 République démocratique, qui n'est pas seulement une lubie de Robespierre.
05:36 Ça devient quelque chose vraiment qui traverse les révolutionnaires.
05:39 Au départ, ce qui surgit en 89, c'est le peuple.
05:41 Le peuple comme acteur.
05:42 Ça se fait en quelques semaines, quelques jours.
05:45 D'un seul coup, dans Paris notamment, surgit quelque chose comme le peuple.
05:51 C'est extrêmement bien raconté dans le magnifique livre d'Éric Vuillard, 14 juillet.
05:55 Il y a des pages, des phrases absolument magnifiques sur ce surgissement.
06:00 Avant, le peuple existait comme peuple asservi, peuple dominé, peuple des classes pauvres.
06:07 Voilà.
06:08 Il n'existait pas comme acteur politique.
06:10 C'est en 89 qu'il surgit.
06:13 Et comme acteur.
06:14 Mais on n'est pas encore dans l'idée d'un pays qui est gouverné par le peuple.
06:17 Et assez vite se pose la question de la démocratie.
06:19 Le problème, c'est que très vite, les révolutionnaires comme Robespierre notamment,
06:26 vont se dire qu'il va être en tension contre les sans-culottes, par exemple, qui eux sont
06:31 pour une démocratie.
06:32 Parce qu'il y a des problèmes d'insurrection, etc.
06:37 Donc, beaucoup de révolutionnaires démocrates en France, pendant la Révolution,
06:43 essayent de faire quelque chose de mixte entre un gouvernement par les classes populaires,
06:48 par le peuple, et un rôle majeur des représentants, des élus qui sont porteurs d'une certaine
06:56 vertu et qui sont en fait une forme d'aristocratie.
07:00 Donc, il va y avoir une sorte de compromis pendant la Révolution française entre une
07:04 dimension aristocratique liée à la représentation, l'élu vertueux républicain,
07:10 le quinte-carde Robespierre.
07:12 Un compromis permanent entre ça et d'autre part, le peuple vertueux, le peuple naturellement
07:20 vertueux.
07:21 Et c'est très compliqué.
07:22 Ce qui se joue entre les sans-culottes, par exemple, et Robespierre est extrêmement compliqué
07:27 et mal connu.
07:28 Donc, petit à petit, on a ça déjà, qui n'est pas simple.
07:31 Et ensuite arrivent les libéraux et les contre-révolutionnaires au XIXe siècle,
07:36 qui vont réécrire complètement l'histoire de la Révolution et nous expliquer qu'au
07:41 mieux, on peut avoir que le gouvernement représentatif et le peuple est violent, inapte et dangereux.
07:46 Donc, on va appeler, avec Tocqueville par exemple, la démocratie, ça va devenir quelque
07:51 chose qu'il faut absolument domestiquer par des élus, par des gens qui sont compétents.
07:58 La démocratie, dit-il, de la démocratie en Amérique, elle est irréversible d'après
08:03 lui, mais il faut absolument la domestiquer parce qu'elle est dangereuse.
08:06 Et il compare la démocratie à une enfant des rues, mal élevée, violente, qui fait
08:12 n'importe quoi.
08:13 Et donc, il faut la canaliser par l'aristocratie fondée sur la compétence, pas sur la naissance,
08:20 sur la compétence.
08:21 Donc, petit à petit, on va se mettre à appeler démocratie quelque chose qui n'a rien
08:24 à voir avec la démocratie et qui est en gros un système dans lequel tous les deux,
08:31 trois ou cinq ans ou sept ans, vous allez tout seul dans un lieu secret déléguer votre
08:40 pouvoir aux autres.
08:41 Donc, vous avez un moment de liberté qui dure quelques instants et puis vous êtes
08:45 censé délibérer avec vous-même parce que de plus en plus, l'espace public est détruit.
08:50 Donc, il n'y a même plus de délibération collective, plus personne ne regarde la télévision
08:54 pour se demander comment on pourrait faire de la politique ensemble puisque c'est devenu
08:58 un spectacle abject.
08:59 Donc, on a quelque chose qui n'est pas la démocratie, qui est le gouvernement représentatif.
09:04 Nous pensons avec Christophe Pébart, et on l'a mis en toute lettre dans notre manifeste,
09:08 dans "Démocratie manifeste".
09:10 Nous pensons que la théorie du gouvernement représentatif, c'est une théorie extrêmement
09:16 puissante, politiquement extrêmement forte, à laquelle nous, nous ne souscrivons pas.
09:21 Nous souscrivons à l'hypothèse démocratique.
09:24 On croit que c'est possible, puisque historiquement, ça a été possible dans un monde qui était
09:29 déjà en voie de mondialisation, l'Empire athénien.
09:32 Il y avait déjà une très grande complexité sur le cours du blé, l'inflation, l'import-export,
09:38 etc.
09:39 On était déjà dans un monde hyper compliqué.
09:40 On n'était pas dans un petit village avec des petites questions locales de peau de fleur
09:44 ou de signalisation boutière.
09:46 On était déjà dans des choses extrêmement difficiles et ça a tenu.
09:48 Donc, on y croit et on propose, on prend parti, c'est pour ça que c'est un manifeste,
09:55 on prend parti pour l'hypothèse démocratique, mais on ne peut défendre cette hypothèse
09:59 que si on est au clair sur le fait que le gouvernement représentatif, c'est un autre
10:02 modèle.
10:03 Et donc, quand on est dans un pays où jamais le peuple ne peut gouverner, parce qu'il
10:07 est considéré comme inapte à gouverner, parce que les gens, s'ils sont assemblés
10:10 en masse, sont incapables, soi-disant, de prendre des décisions, etc.
10:13 À ce moment-là, ce n'est pas la démocratie.
10:15 Donc, il faut arrêter d'appeler "démocratie" nos régimes qui n'en sont pas.
10:18 Ça ne veut pas dire que ce n'est pas des États de droit, ça ne veut pas dire que
10:21 ce n'est pas respectueux des droits humains, ça ne veut pas dire que c'est la dictature.
10:24 C'est-à-dire, ce n'est pas démocratie ou dictature.
10:27 - Oui, c'est ça, ces gens, on pose souvent "démocratie" ou "dictature".
10:28 - Oui, on fait comme si soit vous êtes en démocratie, soit vous êtes en dictature.
10:31 Mais c'est se moquer du monde.
10:33 L'histoire politique nous montre qu'il y a toutes sortes de systèmes politiques.
10:36 Entre la dictature moderne contemporaine et la démocratie, il y a des dizaines et des
10:42 centaines de régimes politiques possibles.
10:44 En tout cas, on est dans un mode de gouvernement très autoritaire, très stratifié dans nos
10:50 pays, avec ceux qui sont censés savoir et puis les autres qui sont censés être guidés
10:56 dans la bonne direction.
10:57 Voilà, on n'a qu'à compter sur la vertu des élus.
11:01 Bon, c'est compliqué vu le niveau de corruption, etc.
11:05 Et donc, oui, faisons le diagnostic lucide que nous ne sommes pas dans un système démocratique.
11:10 Et c'est peut-être très bien, peut-être que la démocratie, ce n'est pas possible.
11:13 Mais arrêtons d'appeler ça la démocratie.
11:14 [Musique]
11:44 [Musique]

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