Dans certaines communes, les services marchands s’organisent par un curieux ballet de camions itinérants...
Retrouvez "En toute subjectivité" sur https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/anne-rosencher-en-toute-subjectivite
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00:00 Toute subjectivité avec la directrice déléguée de la rédaction de L'Express, Anne Rosancher.
00:05 Ce matin, Anne, vous nous parlez donc de ces communes où les services marchands s'organisent
00:11 par un curieux ballet de camions itinérants.
00:14 Oui, par exemple, je vous parle de Nathalie.
00:16 Avant le Covid, elle était assistante maternelle, puis elle a retapé un ancien camion de pompier
00:21 en salon de coiffure itinérant à bord duquel elle arpente les routes du Nord et de l'Aisne.
00:26 Bien sûr, elle n'a pas failli à la tradition du jeu de mots capillaires.
00:30 Son camion, nommé Betty Coupe, est floqué à l'image de la fameuse héroïne.
00:35 Et chaque semaine, Nathalie, son camion et ses ciseaux s'arrêtent en fonction des jours,
00:39 à Roquigny, face la mairie, à Lécy, devant l'église ou encore à Buironfos, en face
00:45 du café chez Sandrine.
00:46 Dans ce coin des Hauts-de-France, la coiffure est loin d'être le seul service pourvu
00:50 par le ballet des camions.
00:52 Ainsi, au cœur de la Vénoie, une communauté de communes regroupant 43 villages, il est
00:57 fréquent de rencontrer un bus France Service pour les démarches administratives, mais
01:01 aussi le MUMO ou Musée Mobile qui propose aux écoliers de découvrir des œuvres originales
01:07 d'artistes contemporains.
01:08 On y croise également un potager et un café itinérant.
01:12 Enfin, un projet de book truck, comprenez un bibliobus, est à l'étude pour ravitailler
01:19 en bouquin les 30 000 âmes qui vivent dans le pays.
01:22 Je suis allée piocher ces exemples dans un excellent article d'un excellent journal
01:26 nommé L'Express, vous connaissez peut-être ?
01:28 Ça dit quelque chose, vaguement !
01:30 Mais il existe bien d'autres endroits où la vie sociale se fait désormais en partie
01:36 par camion.
01:37 Ouest-France, le Midi-Libre ou encore la Nouvelle-République regorgent de ces histoires de bahuts retapés
01:42 et de nouveaux marchands ambulants.
01:44 Et cela dit quoi de la France selon vous ?
01:46 Eh bien, ça illustre un sens de la débrouille face à la désertification que connaissent
01:50 depuis des décennies les centres des communes rurales.
01:53 Difficile de trouver un chiffre global et récent.
01:56 Mais l'INSEE documente par exemple qu'entre 1980 et 2021, 40% des communes du Grand-Est
02:03 ont perdu leur dernier service de proximité.
02:06 Dans la région, le nombre de communes possédant une supérette ou une épicerie est passé
02:11 de 2 242 à 604 sur la période et celle comptant une boucherie de 1300 à 607.
02:19 Alors je ne vais pas vous faire le topo, les Français sont désormais bien conscients
02:23 de la chose.
02:24 La désindustrialisation et la concentration des richesses dans les métropoles ont creusé
02:30 de sacrées fractures au sein de notre nation.
02:33 Et le système D, aussi méritant soit-il, ne résout pas le sentiment de déclassement
02:38 ni la rancœur qui en découle.
02:40 Dans son dernier livre « La France d'après », le politologue Jérôme Fourquet analyse
02:45 le fort impact électoral que peut avoir la désertification sur le vote.
02:50 Il rappelle notamment que l'absence d'une épicerie dans une commune faisait augmenter
02:55 de 2,5 points en moyenne le vote RN aux européennes de 2014.
02:59 Décidément, ces 40 dernières années, quelque chose s'est passé qui ne passe pas et que
03:04 la débrouille ne suffit pas à réparer.
03:06 Anne Rosancher, merci et à jeudi prochain.
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