C’est étrange ce sentiment que l’on a parfois, dans nos sociétés, de ne pas vivre à l’unisson de la même actualité.
Retrouvez "En toute subjectivité" sur https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/anne-rosencher-en-toute-subjectivite
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00:00 7h19, en toute subjectivité ce matin avec la directrice déléguée de la rédaction de L'Express,
00:05 Anne Rosancher, donc, bonjour, ça je vous ai déjà salué ! Mais je vous resalue Anne !
00:10 Re-bonjour !
00:11 Vous nous parlez, Anne, d'une catégorie de Français qui ne vit qu'à l'heure des JO de Paris !
00:16 Oui, c'est étrange ce sentiment que l'on a parfois dans nos sociétés de ne pas vivre
00:20 à l'unisson de la même actualité.
00:22 L'éclatement de l'offre médiatique, la montée en puissance des réseaux sociaux
00:26 qui entraînent les esprits dans des bulles d'affinité, tout cela conspire à un éclatement
00:32 de nos préoccupations.
00:33 Depuis le 7 octobre dernier, une partie des citoyens vit au rythme de l'actualité au
00:37 Moyen-Orient, de ces répercussions en France, on vient de l'entendre dans le Zoom.
00:42 D'autres ressentent cela de loin, ils sont parfois concentrés, voire concernés par
00:46 des problèmes comme la crise du logement ou l'inflation.
00:50 D'autres, enfin, se sont juste détournés de l'actualité qui ne les intéresse pas.
00:54 Dans cette archipélisation des centres d'intérêt, un îlot traverse tous les événements en
00:59 restant focalisé sur un unique souci, que les Jeux Olympiques de 2024 soient réussis.
01:06 Ça m'avait frappé déjà lors des émeutes de juillet dernier, certains s'alarmaient
01:11 des répercussions pour les JO.
01:13 Ainsi le patron de l'Office du tourisme de Paris prévenait, si ces émeutes perdurent,
01:17 ce ne sera pas bon pour l'image de la France à un an des Jeux Olympiques.
01:21 Le premier adjoint de la mairie de Paris, lui, se disait confiant après tout.
01:25 « D'ici les Jeux Olympiques, je suis persuadé qu'on retrouvera un climat social apaisé
01:30 ! » Et je ne cite là que deux exemples parmi d'autres.
01:34 La France paraît, plus que jamais, travailler par des failles tectoniques et les signes
01:39 d'un déclassement s'accumulent.
01:40 Mais certains restent focus sur les objectifs JO.
01:44 Des émeutes à la crise des transports en passant par les punaises de lits, rien ne
01:48 doit venir gâcher la fête, rien ne doit ternir l'image.
01:51 Une obsession dont se moquait une récente une de Charlie Hebdo mettant en scène des
01:56 personnages apeurés marchant dans les rues taguées de Croix-Gamée avec ce titre « Antisémitisme
02:02 ! Les Français inquiets ! Les murs de Paris seront-ils nettoyés à temps pour les JO ? »
02:07 Ça ne va pas jusque-là, bien sûr !
02:09 Non, bien sûr, c'est une caricature.
02:11 Au reste, je ne voudrais pas donner l'impression que je critique tous ceux qui attendent avec
02:15 joie ce grand événement sportif.
02:17 Je me mets néanmoins en garde contre la tentation de certains, notamment dans une petite partie
02:22 de l'élite politique ou économique, de croire que les JO sont une occasion de réparer
02:26 la France par la fête.
02:28 C'est la politique Potemkin.
02:29 Tant que la vitrine tient, tout va.
02:32 Ça me rappelle une des prophéties de feu les séillistes Philippe Muray.
02:35 Il annonçait qu'après « Sapiens, Sapiens », on était en train d'assister à l'avènement
02:40 de « Festivus Festivus ».
02:41 Ce dernier, à ceci de particulier, écrivait Muray, qu'il ne fait plus aucun, mais vraiment
02:46 aucun compromis avec le réel.
02:49 Son sentiment de toute puissance infantile l'en dispense.
02:52 J'ajouterais Nicolas que ça ne me dit rien qui vaille, car le réel se venge toujours.
02:57 Chers, merci et à jeudi prochain.