Thomas Sotto reçoit Marylise Léon, secrétaire générale de la CFDT sur le plateau des 4 vérités.
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00:00 Bonjour et bienvenue dans les 4V, Marenise Léon.
00:04 Bonjour.
00:05 Le chômage repart à la hausse, évidemment ça ne plaît pas du tout au gouvernement et encore moins à son ministre de l'économie.
00:09 Ainsi, Bruno Le Maire a annoncé qu'il voulait aligner la durée d'indemnisation du chômage des plus de 55 ans sur celle des autres, autrement dit réduire leur durée d'indemnisation.
00:18 Qu'est-ce que vous lui répondez ?
00:20 Alors je lui réponds que c'est un sujet qui a été abordé dans le cadre effectivement de la dernière négociation à ce chômage,
00:25 qu'on va ouvrir une négociation sur l'emploi des seniors et qu'il est hors de question de toucher à quoi que ce soit tant qu'on ne sait pas ce à quoi les entreprises sont prêtes à s'engager pour le maintien de l'emploi.
00:35 Donc c'est non ?
00:36 Ça doit faire partie des discussions et on ne peut pas décider de but en blanc qu'il faut un alignement automatique, c'est beaucoup plus compliqué que ça.
00:45 On sait qu'être au chômage lorsqu'on a 55 ans, les difficultés de reprise de l'emploi sont beaucoup plus nombreuses,
00:51 il y a un enjeu de maintien dans l'emploi des seniors et donc les discussions doivent s'ouvrir et elles sont certainement un peu plus compliquées qu'un simple alignement de règles par rapport à ce qui peut être fait pour d'autres salariés.
01:04 Donc j'ai bien compris, c'est pas non, c'est parlons-en mais parlons de tout et mettons tout sur la table.
01:07 On va tout mettre sur la table et c'est surtout que ça regarde d'abord les organisations syndicales et patronales.
01:10 Il explique, Bruno Le Maire, que de manière hypocrite et déguisée on transforme l'assurance chômage en retraite et que de fait,
01:16 quand on a droit à 27 mois d'anonymisation au-delà de 55 ans, les entreprises disent voilà, tu vas au chômage, comme ça c'est la période de tampons entre les deux.
01:24 Est-ce qu'il a complètement tort là-dessus ?
01:25 Non, il n'a pas forcément tort mais l'hypocrisie elle vient bien de la part des employeurs.
01:29 Donc la question de mettre tout sur la table, c'est de savoir en quoi ils sont prêts à maintenir les seniors en emploi.
01:35 On sait que ce sont des personnes qui ont moins accès à la formation professionnelle par exemple,
01:39 on sait qu'elles sont victimes de discrimination, de stéréotypes comme quoi elles seraient moins adaptables au monde du travail, plus chères.
01:46 Voilà, il faut mettre l'intégralité de ces sujets sur la table et on ne prendra certainement pas de mesures tant qu'on n'a pas d'engagement des employeurs de maintenir ces personnes en emploi.
01:56 Mais pourquoi on est tellement nul sur l'emploi des seniors ? Pourquoi on ne progresse pas sur l'emploi des seniors ?
02:00 33% d'emplois pour les 60-64 ans en France contre 46,4 en moyenne dans l'Union Européenne. C'est quoi le problème français là-dessus ?
02:07 Je pense qu'on a une vision du travail très limitée dans le temps, c'est-à-dire qu'on est un "bon salarié" entre 30 et 45 ans.
02:16 Avant on est trop jeune, on n'a pas assez d'expérience, après on coûte trop cher. Je pense qu'il y a vraiment cette vision en France.
02:22 Et puis on a un sujet de... on parle beaucoup d'emploi, c'est devenu le sujet prioritaire de préoccupation.
02:30 L'objectif de plein emploi que la CFDT partage, là il n'y a aucun problème.
02:34 Mais avec des chiffres qui disent que ça repart un peu là-haut ça.
02:36 Ça repart un peu là-haut, mais justement arrêtons de se scotcher et d'être figés sur ces chiffres et regardons ce que les salariés attendent.
02:45 La question des salaires, la question du pouvoir d'achat bien entendu, la question des conditions de travail, il faut mettre tout ça sur la table.
02:51 Est-ce qu'il n'y a pas un état d'esprit à changer aussi ? Est-ce qu'il ne faut pas aujourd'hui un cadre de 55 ans qui est au travail,
02:55 accepte d'aller travailler je ne sais pas dans un restaurant, de conduire un VTC, est-ce qu'il n'y a pas un changement de logiciel à faire ?
03:01 Mais on sait que je pense que ça concerne l'ensemble des salariés, cette question de pouvoir avoir plusieurs vies professionnelles.
03:13 Pour ça il faut qu'il soit sécurisé et il faut qu'il y ait un dispositif de formation qui le permette réellement.
03:18 Aujourd'hui ce n'est pas le cas.
03:20 Ça doit aussi faire partie des discussions qu'on doit entamer probablement à la fin de l'année, au début de l'année prochaine avec les organisations patronales.
03:27 Ce qu'on ne comprend pas très bien, Marie-Lise Léon, c'est que dans toute la période de la réforme des retraites, on a parlé de l'emploi des seniors.
03:32 Il y avait eu l'index senior qui avait été retoqué, c'était obligé les entreprises à dire publiquement combien de seniors elles embauchaient.
03:38 Il y avait le CDI senior exonéré de cotisations famille, proposé par les sénateurs, rejeté par Bercy à l'époque.
03:43 Et en fait on n'avance pas.
03:44 On n'avance pas parce qu'on a fait le choix.
03:46 Vous voulez redemander ces mesures, l'index senior, le CDI senior ?
03:48 Ça, ça doit faire partie des discussions. L'index senior, ça peut être un bon outil mais ça ne va pas être la solution miracle.
03:53 Un contrat de travail où il y a encore des exonérations de cotisations, ce n'est pas non plus la solution.
03:58 Et on n'avance pas parce qu'on fait les choses à l'envers.
04:02 La question de l'emploi des seniors, elle aurait dû être posée bien avant la question du recul de l'âge légal à la retraite.
04:09 On le dit depuis plus d'un an maintenant.
04:12 Il faut d'abord travailler sur la question du travail, la question de l'emploi des seniors,
04:18 avant même de discuter de tout projet retraite qui en plus était profondément injuste et inéquitable.
04:26 Marie-Lyséle Léon, décidément le dialogue semble bien compliqué entre les partenaires sociaux et le gouvernement.
04:29 Vous avez signé une convention d'assurance-chômage, mais l'exécutif, le gouvernement, n'en veut pas.
04:33 Il l'a retoqué hier.
04:34 "Ne le conteniez pas pour l'emploi des seniors", dit-il.
04:36 Qu'est-ce que ça veut dire et qu'est-ce que ça change ?
04:38 Comment vous interprétez ce revu ?
04:39 Moi, je pense que... Je ne le lis pas tout à fait comme vous.
04:42 Je ne pense pas qu'il retoque l'accord.
04:45 Il veut avoir plus d'éléments sur les questions des seniors,
04:49 c'est-à-dire que tout ce qui est dans l'accord, aujourd'hui, va être agréé,
04:53 c'est-à-dire la possibilité pour notamment des jeunes d'accéder au régime d'assurance-chômage
04:58 avec cinq mois de travail au lieu de six.
05:01 Ça, c'est une avancée. Ça va être agréé.
05:04 Il y a un ensemble de dispositions qui vont être agréées plus tard.
05:07 Mais le gouvernement dit qu'il implimente 440 millions d'économies quand vous demandez de faire.
05:10 Oui, mais on ne va pas signer un chèque en blanc et dire "OK, on va faire des économies"
05:14 sans savoir en quoi les entreprises sont prêtes à s'engager.
05:17 C'est ça, le sujet du moment.
05:19 Donc vous dites que ce n'est pas l'heure du bras de fer, c'est l'heure de se parler, c'est ça ?
05:21 C'est l'heure de se parler et c'est l'heure d'agréer...
05:24 Enfin, cet accord va être agréé dans quelques mois.
05:28 Donc ça ne fait que reporter de quelques mois les mesures qui ont été décidées,
05:33 qui ont été conclues, qui sont justes
05:36 et qui vont permettre d'avoir des avancées pour les demandeurs d'emploi.
05:39 Autre idée du gouvernement qui concerne beaucoup de monde,
05:42 d'ailleurs c'est plutôt l'idée d'Elisabeth Borne pour dire les choses,
05:45 elle veut restreindre les ruptures conventionnelles qui seraient, selon elle,
05:48 l'une des principales raisons de la hausse du chômage.
05:50 On rappelle, ces ruptures conventionnelles, ça permet de quitter un job en ayant droit au chômage.
05:53 Ce n'est pas une démission, on fait ça en accord avec le patron.
05:56 C'est un accord réciproque, absolument.
05:58 Est-ce que vous êtes plus ouverts sur ce sujet-là que sur la réduction de la durée d'indemnisation
06:02 d'il y a plus de 55 ans ?
06:03 Moi, je suis prête à regarder le pourquoi.
06:05 On estime à peu près à 500 000 ruptures conventionnelles en 2022.
06:08 En forte hausse, sur 5 ans.
06:09 C'est en forte hausse, il y a 5 millions de CDI, ce n'est pas non plus un rat de marée.
06:14 C'est conclu d'un commun accord entre le salarié et l'employeur.
06:19 Donc, il faut regarder quels sont les motifs.
06:21 Au lieu de se dire on va les restreindre, la question c'est pourquoi les gens veulent partir de leur travail.
06:28 Il y a des motifs différents, ça peut être des questions de maisons-temps,
06:32 des questions de santé, des questions d'avoir un projet personnel.
06:37 Vous êtes prête à en parler ?
06:39 Moi, je suis prête à en parler si on ne s'arrête pas uniquement à vouloir coller une rustine
06:43 ou contraindre, ce qui peut être aussi une idée,
06:47 contraindre les salariés à rester coup de coude dans un emploi qui ne leur convient pas
06:51 et qui ne convient pas non plus à l'employeur.
06:53 Je pense que le dispositif a fait ses preuves.
06:57 Il faut surtout comprendre pourquoi il y a cette forte augmentation.
07:01 Et je pense que la bonne question à se poser c'est quels sont les rapports
07:07 que les salariés, les agents des fonctions publiques ont aujourd'hui au travail.
07:12 Je pense qu'on a vécu, depuis notamment le Covid, des périodes de transformation du travail
07:17 et ce n'est pas uniquement en ajustant un dispositif comme les ruptures conventionnelles
07:21 qu'on va répondre aux vrais défis.
07:23 Marie-Lise Léon, avoir un ministre du Travail, Olivier Dussopt,
07:25 qui est votre interlocuteur régulier, qui est jugé pour des soupçons de favoritisme,
07:28 est-ce que ça change quelque chose pour vous ?
07:30 Ça ne change non, ça ne change rien.
07:33 Il est en procès, donc on va attendre que la justice fasse son travail.
07:38 Il est engagé dans le projet de loi Immigration qui est débattu en ce moment au Parlement.
07:42 Qu'est-ce que vous en dites de ce projet de loi ?
07:44 Je l'ai appelé le projet de la honte.
07:46 Aujourd'hui c'est comme ça que je le qualifierais.
07:48 Pourquoi ?
07:49 Parce qu'il est en parfaite opposition avec les valeurs humanistes de la CFDT
07:57 et de ce que l'on porte et de ce que la France devrait continuer de porter.
08:02 Je pense notamment à la modification du droit du sol
08:05 ou à la suppression de l'aide médicale d'État.
08:08 Qui devrait revenir à l'Assemblée.
08:11 Qui devrait revenir, en l'État, c'est le projet de la honte.
08:14 Et puis il y a cet article 3, c'est-à-dire la façon dont on peut mieux reconnaître
08:18 les travailleurs sans-papiers, des personnes en situation irrégulière
08:22 mais qui travaillent, qui doivent être régularisées
08:25 parce qu'elles contribuent économiquement à ce que produit l'oeuvre.
08:29 Vous êtes favorable à ces métiers en tension ?
08:31 On est favorable à un article 3 qui serait un article minimum.
08:35 C'est-à-dire que je ne pense pas que faire des listes de métiers en tension
08:39 ce soit une bonne solution.
08:41 Je pense qu'il ne faut pas qu'on ait une relation adéquationniste
08:44 entre immigration et travail.
08:46 C'est une dernière question qui concerne les JO de Paris.
08:48 Un décret paru dans l'autre JO, le journal officiel,
08:50 va permettre à toutes les entreprises concernées par ces jeux
08:52 de suspendre le repos hebdomadaire de leurs salariés.
08:55 On les a travaillés 7 jours sur 7.
08:57 En échange, ces salariés auront droit à des repos compensateurs
08:59 à prendre juste après.
09:01 C'est un cas de forche majeure, c'est un moment exceptionnel,
09:03 les JO, où ça ne doit pas tout permettre.
09:05 Quelle est votre position rapidement à la fin de l'été ?
09:07 C'est un cas exceptionnel.
09:09 C'est une dérogation qui doit strictement être temporaire
09:13 et qui doit faire l'objet de négociations par entreprise
09:16 pour pouvoir définir ces justes compensations.
09:19 Donc oui, mais sous conditions ?
09:20 Absolument.
09:21 Merci beaucoup Marie-Léon d'être venue dans les 4V. Bonne journée à vous.
09:23 Merci.