À 8h20, Jean-Louis Bourlanges, député Modem des Hauts-de-Seine, président de la commission des Affaires étrangères de l’Assemblée nationale, Mariam Pirzadeh, journaliste et Ofer Bronchtein, président du Forum international pour la paix, sont les invités du Grand Entretien. Plus d'info : https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-invite-de-8h20-le-grand-entretien/l-invite-de-8h20-le-grand-entretien-du-mercredi-11-octobre-2023-3352662
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00:00 Avec Léa Salamé, nous vous proposons, évidemment encore, de réfléchir ce matin aux suites de l'attaque d'Israël par le Hamas.
00:07 Vos questions au 01 45 24 7000 et sur l'application d'Inter.
00:12 Nos invités, Léa ?
00:13 Jean-Louis Bourlange, vous êtes député MoDem, président de la commission des affaires étrangères de l'Assemblée nationale, et vous êtes ancien député européen.
00:19 Bonjour et merci à vous.
00:20 Ofer Bronstein, vous êtes président du Forum international pour la paix.
00:24 Vous êtes aussi chargé de mission auprès d'Emmanuel Macron pour le rapprochement des sociétés israéliennes et palestiniennes.
00:29 J'ai envie de vous dire bon courage.
00:30 Et vous êtes ancien conseiller d'Itzhak Rabin.
00:33 Mariam Peirzadeh, vous êtes rédactrice en chef à France 24, ancienne correspondante en Iran, et vous connaissez bien, très bien, la région.
00:39 Bonjour à vous.
00:40 Bonjour.
00:41 Et soyez les bienvenus sur France Inter, comme tous les matins à la même heure, je vous redonne le bilan humain qui ne cesse de s'alourdir.
00:48 1200 morts et plus de 2800 blessés côté israélien, et près de 900 morts et 4500 blessés côté palestinien.
00:58 Cinq jours après l'attaque du Hamas contre Israël.
01:01 Première question à vous tous.
01:03 Qu'est-ce qui vous a le plus saisi ces derniers jours, ces dernières heures qui ont changé la face du Moyen-Orient ?
01:10 Et qu'est-ce que vous redoutez le plus en cet instant ?
01:13 On commence avec vous, Jean-Louis Bourlange.
01:16 Ce qui m'a le plus saisi, c'est ce qui a saisi tout le monde.
01:18 C'est-à-dire l'horreur absolue.
01:20 L'horreur absolue, la façon dont cette guerre, cette action a été menée par le Hamas contre la violence, les humiliations, le massacre systématique des civils,
01:34 la déportation de personnes en situation de vulnérabilité profonde, des femmes, des enfants, des vieillards.
01:41 Tout ça a été absolument abominable.
01:43 C'est la première chose qui m'a saisie, ce n'est pas la seule.
01:46 Ce qui m'a saisie aussi, c'est quand même l'étonnement, la surprise.
01:50 Comment une attaque de cette ordre, de cette ampleur, face à un État qui est réputé pour la qualité de ses services de renseignement, la force de son armée,
02:00 comment tout cela a été possible ?
02:02 Comment cette brutale et sans doute éphémère inversion du rapport de force a été possible ?
02:10 Je pense qu'il y a là quelque chose de saisissant, notamment pour tous les juifs qui se sont dit "Nous croyons, nous pensions que Israël était la protection, le territoire protégé
02:22 et nous voyons que la précarité règne dans ce pays comme ailleurs."
02:26 Je crois que ces deux éléments sont fondamentaux.
02:29 Et puis après, parce que je suis de ceux qui pensent que ne rien justifier ne dispense pas de tout expliquer,
02:36 il y a effectivement toutes les causes, l'enchaînement terrible de la situation.
02:41 Et je crois que le moment de la réflexion va venir, même si le moment de la sérénité n'est pas encore venu.
02:47 On va essayer de parler des causes aussi, parce que c'est vrai qu'il faut en parler aujourd'hui, au cinquième jour.
02:53 Il n'y a pas que l'émotion, il y a aussi les causes. Pourquoi on en est arrivé là ?
02:56 Offer Braunstein, dès samedi vous disiez "Il y aura un avant et un après", 7 octobre 2023, après l'effroi, après la sidération des premières heures.
03:03 Qu'est-ce qui vous a marqué ? Même question à vous. Et que redoutez-vous aujourd'hui, 5 jours après l'attaque ?
03:10 Je suis tout à fait d'accord avec la description de ce que vous avez fait. C'est abominable.
03:15 Ce n'est pas un crime de guerre que le Hamas a commis, c'est un crime contre l'humanité.
03:20 C'est du jamais vu. Je suis complètement sidéré, moi qui suis un militant pour la paix.
03:25 Ce qu'on doit bien se mettre en tête, le Hamas est l'ennemi du peuple palestinien.
03:30 Il faut se rappeler, il a été créé en 1987 par le Cheikh Yassin.
03:34 Le vrai nom du Hamas, c'est le mouvement de résistance islamique.
03:37 Ce n'est pas le mouvement de libération de la Palestine. Ses objectifs ne sont pas la libération de la Palestine.
03:42 Le Hamas, après les accords historiques de 1993, avec la polidomie historique entre Arafat et Rabin,
03:49 tout de suite après, il commence à faire sauter des bus et des bombes au cœur d'Israël, tuant des civils israéliens.
03:56 Ce qui a fait dérailler le processus de paix. On aurait pu être ailleurs si le Hamas n'avait pas perpétré les coups.
04:01 Mais aujourd'hui, c'est le Hamas qui représente les Palestiniens, beaucoup plus que l'autorité palestinienne.
04:05 Je ne crois pas.
04:06 Vous avez l'impression que l'autorité palestinienne est à droit au chapitre ?
04:10 Non, j'ai l'impression que c'est le chaos.
04:11 Vous l'entendez ?
04:12 Non. Oui, tout d'abord, si on l'a renforcé, oui. Mais je crois qu'aujourd'hui, c'est le chaos.
04:16 Il n'y a pas vraiment de représentants. La communauté internationale et Israël ont marginalisé l'autorité palestinienne,
04:22 l'ont affaiblie, mais le Hamas ne représente pas.
04:25 Je voudrais vous dire autre chose au niveau du Hamas.
04:27 N'oublions pas qu'en 2006, quand il prend le pouvoir par la force à Gaza, il tue des centaines de ses frères.
04:33 Il les jette par des immeubles. C'est des gens du Fatah qui le tuent pour prendre le pouvoir.
04:37 Donc il faut bien se rendre compte.
04:39 Ce qui me sidère, c'est le fait que la communauté internationale...
04:43 On connaît la solution. Il n'y a plus rien à inventer.
04:46 Elle n'est pas militaire, elle est politique.
04:48 Et la communauté internationale, et surtout les Européens, me sidèrent dans leur incapacité,
04:53 dans leur impossibilité de réagir et d'être déterminé à régler le problème.
04:58 Vous pensez qu'ils ont oublié le sujet et que ça leur est sauté au visage ? C'est ça qui s'est passé ?
05:03 Je pense que c'est des faits néants. Je pense que le conflit israélo-palestinien nourrit beaucoup de diplomates,
05:08 nourrit beaucoup d'ONG, nourrit beaucoup d'organisations, mais qui sont absolument inefficaces.
05:14 Mariam Pierzadeh, le Moyen-Orient va changer, changer durablement après ce qui s'est passé ?
05:19 Oui, de tout évident. Je partage ce qui a été dit avant, c'est la sidération.
05:23 Les services de renseignement israéliens, qui sont quand même capables de frapper en Iran,
05:27 de tuer des responsables du programme nucléaire iranien, sur le sol iranien,
05:31 avec des infiltrations du Mossad en Iran, et qui ne voient pas cette menace qui est en face à la bande de Gaza.
05:39 Visiblement, ils estimaient que la menace était plutôt du côté de la Cisjordanie,
05:42 puisque des unités de l'armée israélienne étaient basées en Cisjordanie pour protéger aussi les colonies.
05:48 Bien sûr, et on voit ce qui se passe avec le front libanais aussi,
05:52 le Hezbollah qui, pour le moment, entre timidement, mais est-ce qu'ils vont rentrer complètement dans ce conflit ?
05:59 L'Iran qui est évidemment derrière, qui a mené des discussions depuis 6 mois, 7 mois maintenant,
06:06 et la possibilité que ce conflit s'étende, s'étende potentiellement à l'Iran,
06:12 c'est une crainte que tout le monde a aujourd'hui en fait, dans un deuxième temps.
06:14 Vous dites l'Iran, pardon, je vous coupe, l'Iran est évidemment derrière.
06:17 Pourquoi l'Iran est évidemment derrière ? A-t-on des preuves que l'Iran est évidemment derrière ?
06:23 Et pourquoi les chancelleries occidentales, pour l'instant, le disent sans le dire ?
06:27 Emmanuel Macron a dit hier, a laissé entendre que le Hamas avait été aidé par des aides extérieures,
06:34 et beaucoup de gens savent que l'Iran est derrière. Pourquoi on ne le dit pas ?
06:38 100 millions de dollars par an.
06:40 L'Iran finance le Hamas, est-ce qu'ils ont été au courant de toute l'ampleur que ça allait avoir ?
06:47 Ça, c'est toute la question. Parce que si jamais, là, aujourd'hui, Israël et les Etats-Unis viennent,
06:52 Tony Blinken, le secrétaire d'Etat américain, annonce qu'ils n'ont aucune preuve de l'implication de l'Iran,
06:57 si jamais ils annoncent que l'Iran est impliqué de manière directe dans ce conflit,
07:01 ça veut dire qu'il faut rentrer en guerre avec l'Iran.
07:04 Et aujourd'hui, vous regardez aussi les réactions de la République islamique, via le guide suprême,
07:08 qui a quand même tweeté en hébreu hier, c'est la première fois que je le vois tweeter en hébreu,
07:15 qui est sur une ligne de crête. Nous ne sommes pas impliqués, mais nous annonçons la calamité,
07:19 je cite, au régime sioniste et la destruction du régime sioniste.
07:23 Moi, je pense que l'Iran n'a pas la possibilité d'entrer en guerre direct avec Israël,
07:28 et a poussé le Hamas et le djihad islamique, qui est financé, le djihad islamique en partie,
07:34 par les Iraniens, qui a été aidé également pour l'armement, il leur a appris,
07:38 les gardiens de la révolution, le régime iranien a appris à ces groupes à fabriquer des armes de manière rapide,
07:45 avec des bouts de ficelle. C'est exactement ce qui se passe en Ukraine, avec la fabrication des drones Shahed,
07:51 ça ne coûte pas cher, c'est rapide, et les Iraniens disent "non non, ce n'est pas nous qui livrons des drones à la Russie pour frapper l'Ukraine".
08:00 Donc l'Iran est aujourd'hui sur cette ligne de crête pour éviter un affrontement direct avec Israël,
08:05 qui, ils le savent, sera dévastateur. Ils n'ont pas la possibilité, militaires et en armement, d'entrer en guerre avec Israël.
08:12 Et là, ce n'est plus une guerre Iran-Israël, c'est une guerre mondiale.
08:16 - Jean-Luc Bourlange, c'est la crainte ? - Oui, je crois d'abord que la logique, c'est évidemment de dire que l'Iran est derrière tout ça,
08:23 mais la logique, ce n'est pas les preuves. Quand on tient un discours diplomatique, on ne se fonde pas simplement sur des raisonnements,
08:29 il faut avoir les preuves, et si on n'a pas les preuves, on est dans une situation complètement fausse vis-à-vis du pays qu'on accuse.
08:35 Mais il est évident que derrière tout ça, il y avait l'intention de l'Iran d'organiser une sorte de rupture entre tous ces pays arabes
08:44 qui ont reconnu, qui se rapprochaient, dont évidemment au premier plan l'Arabie Saoudite, qui se rapprochaient d'Israël,
08:52 au point d'oublier, car je crois que c'est quand même ça le fond du problème, c'est l'oubli du peuple palestinien.
08:58 Je suis tout à fait d'accord avec ce que vous avez dit, Ofer, tout à l'heure, sur le fait que Hamas se fichait complètement du sort des Palestiniens,
09:05 comme d'ailleurs Netanyahou, comme tout le monde. L'idée du gouvernement israélien, c'était de prendre le contrôle de la Cisjordanie progressivement,
09:15 et puis le reste, ça n'avait aucune importance, et les Palestiniens étaient tous seuls.
09:20 Et là, Hamas a utilisé toutes ces contradictions, le fait que les Israéliens étaient tournés vers la Cisjordanie et négligé Hamas,
09:28 le fait qu'en réalité Israël s'était fort bien accommodé de la présence de Hamas, parce que ça empêchait la constitution d'une alternative,
09:38 ce qu'a dit très bien Elie Barnavi, l'ancien ambassadeur d'Israël à Paris, ça empêchait la constitution d'une alternative palestinienne,
09:49 qui est effectivement très claire, les deux États, tout le monde dit que c'est impossible, les deux États c'est fini, c'est peut-être fini, mais c'est pas remplacé.
09:57 Donc il n'y a aucune alternative qui avait été mise là-dessus, donc tout ça est une situation extraordinairement dangereuse,
10:04 et effectivement les grandes puissances, à mon avis, ont quand même intérêt vis-à-vis de l'Iran,
10:09 parce qu'à prévenir absolument le conflit, c'est quand même l'embrasement général de la zone, ça serait une catastrophe absolue,
10:17 et de ce point de vue-là, les Iraniens ont derrière eux leur hypocrisie, si je puis dire, les serfs,
10:24 parce que tout le monde a intérêt à limiter au maximum le conflit, je pense que les Américains...
10:30 - Les Américains ont envoyé un porte-avions dans la zone territoriale israélienne, comme une dissuasion,
10:35 en disant "on est là, on a nos navires de guerre qui sont dans la région, si ça déraille, on peut y aller", au fur et à mesure.
10:41 - Moi je voudrais dire quelque chose sur l'Iran, sur le Hamas. N'oublions pas que lorsque le Hamas est créé en 87,
10:46 il est interdit par la loi israélienne de parler à l'OIP. Ceux comme moi qui parle à l'OIP allaient en prison,
10:52 alors qu'il était permis de parler au Hamas. Donc il était dans l'intérêt d'Israël à l'époque de voir le Hamas se développer...
10:57 - De faire monter le Hamas. - De voir le Hamas se développer pour diviser...
11:00 - A l'origine, il faut le rappeler, Israël a encouragé... - Pour diviser le peuple palestinien.
11:03 - Absolument. - La sortie de Gaza d'une façon unilatérale avait les mêmes raisons.
11:07 Maintenant, quant à l'Iran, il faut bien se mettre en tête, il n'y a rien de commun entre les sunnites palestiniens et les chiites iraniens.
11:17 Le dessein de l'Iran, ce n'est pas Israël. Israël et les juifs, c'est un prétexte.
11:22 l'Iran a un autre dessin pour le Moyen-Orient. Donc c'est une opportunité pour les iraniens d'utiliser le Hamas, d'utiliser le Hezbollah...
11:28 - En bouclier. - En bouclier. Mais ce n'est pas du tout leur problème. Moi j'espère, vraiment j'espère,
11:33 parce que ça a été possible à une époque, que l'Iran devienne un partenaire dans la région.
11:38 C'est une grande civilisation, c'est un énorme peuple. Enfin, c'est mon rêve.
11:43 - Vous savez, c'est le rêve de beaucoup d'Iraniens. Dans les manifestations, depuis 6 ans, on entend vraiment ce slogan
11:49 "Ni Hamas, ni Hezbollah, l'argent à l'Iran". Il y a une grande partie des Iraniens aujourd'hui qui en ont assez,
11:54 que l'argent de l'Iran aille à ces groupes-là, et qui rêvent aussi de paix. Et ça c'est une réalité. Je parle de la population, évidemment.
12:02 - L'Iran était le premier pays à avoir des relations avec Israël. Le premier pays.
12:06 - Les attaques de l'Iranien, c'est un bonheur. Ce sont des gens d'une culture, d'une intelligence, d'un sens de la nuance, etc.
12:14 On voit tout ce trésor civilisationnel qui est broyé par cette espèce d'obscurantisme fanatique de Zayatollah.
12:22 C'est vraiment une tragédie. Vraiment, le peuple perse, c'est quelque chose.
12:26 - La question des otages et critiques, Mariam Pirzadeh, à quel moment doivent ou peuvent s'engager des négociations ?
12:33 Pour les Israéliens tout de suite, pour le Hamas après un cessez-le-feu, où en est-on ?
12:37 Elles ont commencé, dites-vous, au Ferbenstein, que pouvez-vous nous dire ?
12:41 - Je sais que par le biais de l'Egypte ces deux derniers jours... - Et du Qatar et de la Turquie. Egypte, Qatar et Turquie.
12:47 - Ils négocient la libération des femmes et des enfants. Israël pourrait les Palestiniens libérer les femmes et les enfants qui sont dans les geôles israéliennes,
12:54 et le Hamas libérer les femmes et les enfants qu'il a pris en otage.
12:58 - Mariam Pirzadeh ? - Oui, ça a commencé, mais c'est vraiment un traumatisme en Israël.
13:02 Quand vous regardez la télévision depuis samedi sur les chaînes israéliennes, c'est des familles qui viennent se succéder,
13:07 qui appellent à l'aide et qui se sentent totalement laissées pour compte par le gouvernement.
13:11 Et justement, ce que disait M.Bourlanche, c'est qu'Israël avait promis à ses citoyens de les protéger.
13:15 Il n'a pas réussi et il les laisse complètement dans l'abandon. C'est le dilemme de l'armée israélienne.
13:21 - C'est la question impossible. - C'est la question impossible.
13:24 - Le gouvernement israélien est-il prêt à sacrifier les otages ? C'est ça la question qui se pose dans les prochaines heures.
13:28 - Le porte-parole de l'armée israélienne ne répond pas à cette question. Où sont ces otages ?
13:32 Apparemment, il y en a certains qui sont à l'hôpital. Est-ce qu'ils sont aussi cachés dans les tunnels à Gaza ? C'est impossible.
13:39 Eux, ce qu'espère en tout cas le Hamas, c'est de se servir de ces otages israéliens comme d'un bouclier humain pour ralentir l'offensive terrestre,
13:47 et de négocier aussi la libération de 4 500 combattants palestiniens qui sont actuellement dans les geôles israéliennes.
13:53 C'est un dilemme impossible. Et est-ce que l'armée israélienne elle-même a la réponse à cette question aujourd'hui ?
13:59 - Oui, on va faire penser à ça.
14:01 - Vous savez, de la part de l'armée israélienne, les chiffres des kidnappés israéliens ont changé.
14:08 On parlait de 130, de 140, de 150 ces derniers jours. L'armée israélienne aujourd'hui dit qu'il n'y en a que 57.
14:13 Alors, est-ce que c'est de la propagande pour dire que ce n'est pas aussi grave que ça ?
14:17 Mais est-ce que c'est une réalité ? Je ne sais pas.
14:19 Mais je veux vous rappeler qu'Israël, après 5 ans de géole pour le soldat Chalit, a été prêt à libérer 1270 prisonniers palestiniens.
14:27 Peut-être qu'il est temps, peut-être qu'il est trop tôt de parler de l'après-guerre,
14:31 parce que de toute façon elle va se terminer avec beaucoup de victimes, avec beaucoup de déservoirs.
14:35 Mais il va falloir libérer les palestiniens, et en particulier Marwan Barghouti, qui à mon avis devrait prendre le leadership palestinien.
14:42 - En attendant, 300 000 réservistes ont été mobilisés par l'armée israélienne.
14:45 Les forces se concentrent au portoir de Gaza, zone de laquelle les résidents israéliens ont été évacués.
14:51 Est-ce le prélude à une opération terrestre, à une entrée de l'armée israélienne dans la bande de Gaza, selon vous, au frère Bernstein ?
14:59 - Oui et non. Parce que Israël était déjà à Gaza.
15:03 Et si on est certain, c'est qu'il y avait des victimes auprès des soldats tous les jours.
15:06 Ils vont se faire... On va leur tirer dessus comme des canards.
15:10 C'est pas l'aviation, c'est pas les forces spéciales, c'est des soldats qui sont à pied dans Gaza.
15:16 Gaza c'est 400 mètres carrés.
15:18 - Oui, là on parle bien d'une autre opération, d'une autre dature.
15:20 - C'est 2,5 millions de personnes sur 400 mètres carrés.
15:26 - Kilomètres carrés.
15:28 - C'est la place la plus peuplée au monde, par kilomètre.
15:32 Donc rentrer d'une façon terrestre, c'est des risques énormes pour les israéliens.
15:37 Et de toute façon, ils ne trouveront pas les pauvres qui ont été kidnappés.
15:43 Et autre chose, je regrette de vous le dire, mais ils n'ont pas les moyens logistiques de rentrer.
15:48 Il y a 300 000 réservistes qui ont été appelés, pas un seul est rentré parce qu'ils ne peuvent pas encore les nourrir.
15:53 On doit servir un million de repas tous les jours, les israéliens...
15:56 L'armée israélienne n'est pas capable de l'assumer.
15:58 Donc il y a des problèmes de logistique.
16:00 - Jean-Louis Bourlange, beaucoup disent que c'est un piège l'opération Tahrir.
16:03 Est-ce que ce serait un piège pour l'armée israélienne de rentrer à pied ?
16:06 "Feet on the ground" comme on dit, à pied, pas par l'aviation.
16:10 Mais peuvent-ils ne pas la mener ?
16:12 - Je ne suis pas un expert militaire, donc je ne peux pas répondre à votre question.
16:15 Ce qui m'a quand même frappé en écoutant M. Netanyahou annoncer une destruction totale, etc.
16:21 J'avais l'impression de l'extrémiste de l'impuissance.
16:24 C'est-à-dire qu'en réalité, je ne vois pas très bien quelles sont les options militaires qui s'offrent à Israël.
16:31 L'amende de Gaza, c'est ce que vous avez dit.
16:34 Ils peuvent faire des opérations coup de poing,
16:36 mais est-ce qu'on va se mettre, est-ce que Ezzal va se mettre à faire une occupation militaire durable
16:42 de 2,4 millions de personnes ?
16:45 C'est un piège total.
16:48 Porter la guerre contre le Liban, contre le Hezbollah, en disant "le Hezbollah c'est l'Iran", etc.
16:55 Là aussi, d'abord ils ont déjà donné, ça n'a pas très bien marché il y a quelques années,
16:59 et d'autre part, ils auront affaire à des gens...
17:02 Ils peuvent faire des coups de poing, que faire d'autre ?
17:05 L'Iran, ça serait une catastrophe.
17:07 Donc je crois effectivement qu'il faut que les puissances, comme on disait Naguère,
17:10 que les pays travaillent tous.
17:13 Alors vous avez cité des noms, la Turquie, d'autres, l'Egypte, les Etats-Unis, l'Union Européenne,
17:19 travaillent véritablement à ce qu'on dégage enfin une solution politique sur ce problème palestinien.
17:25 Parce que là, le gouvernement israélien s'est enfermé dans une impasse politique,
17:30 et il faut absolument en sortir.
17:32 - En attendant, il y a bombardement de Gaza, et mise en place d'un siège complet,
17:36 pas d'électricité, pas de nourriture, pas de gaz, a dit le ministre de la Défense israélien Yoav Galant,
17:42 nous combattons des animaux, et nous agissons en conséquence, sur le fond comme la forme.
17:47 Comprenez-vous la décision israélienne Jean-Louis Bourlange ?
17:51 - Je crois que c'est l'impuissance, c'est le fait qu'il n'y a pas d'option.
17:55 Mais effectivement, c'est totalement absurde d'imaginer qu'on va obtenir des otages,
18:00 en prenant en otage 2,4 millions de personnes.
18:06 C'est totalement aberrant, et ça ne tiendra pas la distance.
18:11 Donc là n'est pas l'option.
18:13 - Mariame Pires Adé, le blocus complet de Gaza, aujourd'hui,
18:17 peuvent-ils faire autrement que faire un blocus complet de Gaza aujourd'hui ?
18:22 - Non, parce qu'il fallait qu'ils agissent rapidement, mais Gaza, c'est effectivement,
18:26 comme le disait M. Bronstein, c'est la plus grande densité au monde,
18:30 6 000 habitants par kilomètre carré, qui dépendent à plus de 70% des aides internationales,
18:35 qui sont dépendants d'Israël pour tout, pour l'eau, pour l'électricité.
18:39 Il fallait frapper fort les esprits.
18:41 Effectivement, cette parole du ministre de la Défense est extrêmement choquée,
18:45 mais elle a trouvé un écho aussi en Israël, sur la radicalité.
18:49 - Ce qui a une soif de revanche aujourd'hui.
18:51 - Oui, mais cette soif de revanche va entraîner un autre cycle de soif de revanche.
18:55 C'est un puissant fond, en fait.
18:58 Et donc, la radicalité des deux côtés, on parlait tout à l'heure de la Cisjordanie,
19:01 du Fatah et du Hamas, ça a été aussi célébré dans les territoires,
19:04 dans les camps de Palestiniens au Liban.
19:06 En Cisjordanie, la jeunesse ne croit plus à cet État.
19:10 Elle a soif de revanche, elle a soif de violence, elle a soif de radicalité.
19:13 Et ce cycle va en apporter un autre.
19:16 Donc, la paix s'éloigne de...
19:18 C'est un vœu pieux des armées.
19:20 - Et Einstein, l'opération du Hamas, elle est appuyée par une grande partie de la population arabe.
19:25 - Absolument, même les militants pour la paix.
19:27 N'oublions pas que les victimes de ce qui s'est passé les samedis,
19:30 ce sont tous des militants pour la paix.
19:32 Ces jeunes qui dansaient dans le désert,
19:34 c'est des gens de gauche, c'est des gens qui militent pour la paix.
19:37 Les kiboutzim, c'est des organisations de gauche israélienne qui militent pour la paix.
19:41 Donc, le Hamas a voulu tuer pour tuer.
19:44 C'était complètement inhumain.
19:46 Et qu'ils veuillent s'attaquer à des soldats, peut-être, mais de cette façon...
19:49 Et je voulais vous dire quelque chose pour Gaza, au niveau du blocus.
19:53 Tout d'abord, le blocus oblige aujourd'hui 200 000 palestiniens,
19:57 contrairement aux israéliens qui peuvent aller dans le nord,
19:59 les palestiniens ne peuvent aller que vers la mer.
20:01 Et donc aujourd'hui, on voit sur les bords de mer de Gaza
20:03 200 000 personnes qui sont allées s'abriter.
20:06 - Qui vont vers l'Égypte et l'Égypte n'en veut pas.
20:08 - L'Égypte a fermé sa frontière à Rafah.
20:10 Elle a été d'ailleurs bombardée, la frontière de Rafah, par le Hamas même.
20:13 1,5$ par jour par palestinien à Gaza.
20:17 Et 35... 70% de chômeurs à Gaza.
20:22 PIB par habitant par an, c'est 2 000$.
20:24 Alors que c'est 45 000$ en Israël.
20:27 C'est la détresse, c'est le désespoir, c'est la pauvreté, c'est l'ignorance.
20:31 Et c'est sur ça que le Hamas se nourrit.
20:33 - Un mot Jean-Louis Bourlange et on passe au standard.
20:35 - On a comparé le 11 septembre. Je crois que la comparaison est juste.
20:39 Mais il y a une chose. Qu'est-ce qui s'est passé après le 11 septembre ?
20:42 La catastrophe, ça a été la nature des représailles.
20:44 Les américains ont totalement surréagi.
20:47 Et réagi de la façon la plus absurde qui soit.
20:50 Et ça a donné le Moyen-Orient que nous connaissons.
20:52 Et là, il faut se méfier.
20:54 Moi je comprends très très bien la colère des israéliens.
20:56 Et le fait qu'ils veuillent vraiment serrer le kiki au maximum aux gens de Gaza.
21:01 Mais nous, nous devons inventer des solutions et pas des représailles.
21:05 - Elles existent.
21:06 - Alors on y va au standard.
21:08 Alain, bonjour. Bienvenue sur Inter.
21:10 - Oui, bonjour.
21:11 - J'aurais voulu me poser une question à vos intervenants d'aujourd'hui.
21:14 Moi je trouve que l'Europe et notamment la France marchent à petits pas par rapport à sa position.
21:21 Parce que vu l'importance de la communauté musulmane et tout qu'il y a en France,
21:25 les gens qui ont fait des attentats et qui risquent, on sait jamais.
21:30 On marche à petits pas et on n'ose pas trop prendre position pour Israël.
21:34 Et appuyer le doigt sur le Hamas.
21:37 Ce ne sont pas des animaux, ce sont des humains.
21:39 Et les humains réfléchissent quand ils font quelque chose,
21:41 tandis que les animaux font ça pour se nourrir.
21:44 - Donc vous voudriez que l'Europe en fasse un peu plus ?
21:47 - Ah oui, oui, oui, honnêtement.
21:49 - Et la France ?
21:50 - Et la France.
21:51 - Voilà, la Palestine a apparemment un gouvernement légitime,
21:55 mais le Hamas c'est celui qui fait la pluie le beau temps.
21:58 On a su geler les avoirs des Russes quand ils ont envahi l'Ukraine.
22:02 On pourrait prendre certaines positions.
22:05 Mais on sait très bien que la richesse, l'argent détourné par les gens du Hamas,
22:09 l'argent qu'amène le Qatar, je crois, aux gens du Hamas, c'est un scandale.
22:14 - Bien compris Alain, bien compris.
22:16 Merci pour cette intervention Jean-Louis Bollange.
22:19 Vous voulez répondre ?
22:21 - Je crois que la condamnation, je ne suis pas d'accord avec les petits pas,
22:25 la condamnation par le président de la République a été extrêmement ferme
22:28 et l'ensemble des forces politiques, à l'exception de l'extrême gauche,
22:34 a été extrêmement nette.
22:36 Simplement, on est quatre jours après le déclenchement de cette affaire,
22:39 on n'a pas effectivement les uns et les autres la solution clé en main,
22:43 c'est le moins qu'on puisse dire.
22:44 Donc maintenant le travail commence.
22:46 - Jean-Louis Bollange, elle est où l'Europe ? Vous l'entendez ?
22:48 - Elle est...
22:49 - Elle a encore une voix au chapitre l'Europe ?
22:51 - Mais où est l'Amérique ?
22:52 - L'Amérique est là !
22:54 - Oui l'Europe, on va faire bonne chaîne.
22:57 - L'Europe c'est 50 milliards d'euros en 25 ans.
23:00 Pourquoi ? Pour une autorité palestinienne qui devait devenir un Etat.
23:03 L'Europe c'est le principal bailleur de fonds des Palestiniens.
23:06 L'Europe c'est le plus grand marché économique pour Israël
23:09 et l'Europe c'est zéro politique.
23:10 Pourquoi ? Parce qu'il n'y a pas de détermination politique,
23:14 parce qu'il n'y a pas de courage politique
23:15 et parce que le levier économique que l'Europe a,
23:18 elle ne le traduit pas par un levier politique.
23:21 Et il est temps de se réveiller.
23:22 - Je suis entièrement d'accord.
23:24 - Vous êtes d'accord ?
23:25 - Écoutez, je milite depuis suffisamment d'années pour passer à l'Europe politique
23:29 et j'enrage, j'enrage qu'on piétine sur cette affaire
23:32 et qu'on butte constamment, qu'on ne soit jamais capable.
23:35 On a été à peu près capable sur l'Ukraine, pas complètement,
23:38 mais on n'est pas capable du tout sur l'Arménie d'avoir une position commune.
23:42 Et sur Israël je crois qu'on est préjudiciés,
23:44 mais on n'a quand même pas encore une véritable détermination.
23:48 - L'Europe a donné une image dévastatrice hier avec ce secrétaire,
23:52 ce commissaire européen qui annonce de manière unilatérale que l'aide aux développements...
23:55 - Hongrois.
23:56 - Hongrois. Il est européen ?
23:57 - Oui, il est quand même un peu marginal.
24:00 - Oui, oui, bien sûr.
24:02 - Les hongrois sont un peu marginaux par rapport au reste de l'Union Européenne.
24:04 - Les hongrois, les polonais, bien sûr.
24:05 Mais il annonce de manière unilatérale la fin de l'aide aux développements aux Palestiniens,
24:09 c'est suivi par l'Autriche et l'Allemagne et finalement la France et d'autres pays.
24:13 Ça montre bien qu'il y a une cacophonie, il n'y a aucune position commune.
24:16 Mais Joseph Borrell, le chef de la diplomatie européenne,
24:18 a condamné le blocus de Gaza.
24:20 - C'est pour ça que l'Israélien n'ira pas à Bruxelles.
24:22 - Oui, parce qu'il y a une réunion qui est prévue normalement
24:24 entre les deux chefs de la diplomatie palestinien-israélien.
24:26 - Et du coup, Israël va boycotter parce qu'il a condamné le blocus complet à Gaza.
24:29 Voilà où on en est aujourd'hui.
24:31 - Merci à vous les trois.
24:32 Merci Jean-Louis Bourlan, Joffer Brandstein, Mariam Pierzadé d'avoir été à notre micro.