Laurent Valdiguié est grand reporter chez Marianne.
Regardez Le débat du 06 octobre 2023 avec Yves Calvi et Amandine Bégot.
Regardez Le débat du 06 octobre 2023 avec Yves Calvi et Amandine Bégot.
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00:00 Vous êtes sur RTL.
00:02 RTL matin.
00:06 RTL il est 8h23. Bonjour Laurent Valdiguier.
00:08 Vous êtes grand reporter à l'hebdomadaire Marianne où vous suivez en particulier toutes les affaires de police, de justice et vous publiez avec notre confrère de l'Express Etienne Girard
00:16 une enquête consacrée à Nicolas Sarkozy qui était notre invité lundi matin.
00:20 Enquête au titre intriguant puisque votre livre est très attendu aux éditions du Seuil.
00:24 Il est intitulé "Le parrain" sous titre Sarko après Sarko l'enquête.
00:28 Alors que notre ancien président de la République aime faire l'exégèse de son quinquennat dans ses mémoires,
00:33 vous Laurent Valdiguier vous êtes intéressé à sa vie d'après.
00:35 On y revient dans un instant.
00:36 Il se trouve que Nicolas Sarkozy sera peut-être mis en examen pour la cinquième fois aujourd'hui.
00:41 L'ex-président s'apprête à vivre sa quatrième journée d'audition.
00:44 C'est une durée rarissime.
00:46 Oui. Alors dans l'affaire libyenne il avait été déjà entendu quatre jours.
00:49 Ce sont à chaque fois des marathons judiciaires qui commencent le matin à 10h et qui se terminent généralement tard dans la nuit.
00:55 Ça fait d'énormes procès-verbaux.
00:57 Et d'ailleurs souvent quand vous lisez les procès-verbaux dans tous ces dossiers,
01:00 quand vous lisez le procès-verbal ordinaire et le procès-verbal de Nicolas Sarkozy,
01:04 c'est comme l'impression que vous avez au tennis entre les balles et le match.
01:07 Parce que lui il connaît les dossiers par cœur en général.
01:10 Ses avocats travaillent comme des fous.
01:12 Ses avocats travaillent comme des fous.
01:13 Mais lui il connaît les dossiers en général par cote, par détail.
01:17 Et alors ça donne des auditions.
01:18 Il faut que les juges, c'est d'ailleurs pour ça qu'en général les juges se les réservent en fin d'instruction.
01:23 Il faut que les juges connaissent le dossier sur le bout des doigts.
01:26 Ils vont dans les recoins des dossiers.
01:28 Et c'est un affrontement qui ne sera jamais télévisé,
01:31 qui ne sera jamais enregistré, dont on ne voit la trace que par écrit.
01:35 Mais ce sont des affrontements terribles.
01:37 En un mot, il y a un véritable enjeu aujourd'hui ?
01:39 Il y a un énorme enjeu parce qu'en réalité les juges le soupçonnent d'avoir joué un rôle
01:44 dans cette fausse rétractation d'Oziad Takedine.
01:47 Vous savez Oziad Takedine c'est son accusateur principal dans l'affaire libyenne.
01:50 Et puis tout d'un coup en novembre 2020, hop, dans un article dans Paris Match,
01:55 Oziad Takedine a l'air de dire qu'il a menti sur tout.
01:58 Alors Nicolas Sarkozy il fait un tweet, la vérité éclate enfin,
02:02 il fait une interview télévisée tout de suite,
02:04 il demande à ses avocats une démise en examen dans l'affaire libyenne.
02:07 Autrement dit, il pense que cette seule phrase dans Paris Match,
02:10 Oziad Takedine, va effacer l'affaire libyenne.
02:12 Alors les juges enquêtent, le PNF fait tout de suite un communiqué disant
02:15 "Attention, l'affaire libyenne ce n'est pas juste deux phrases d'Oziad Takedine".
02:18 Les juges vont le voir au Liban, puisqu'il est en fuite au Liban, Oziad Takedine.
02:22 Et puis ils se rendent compte, ils commencent à dépiauter l'orange.
02:25 Vous savez, une instruction judiciaire, c'est les juges qui dépiotent une orange.
02:28 Ils dépiotent l'orange et ils se rendent compte que derrière tout ça,
02:31 il y a des promesses d'argent à Takedine, il y a des remises d'argent à Takedine,
02:36 un entourage de Takedine, et ils soupçonnent, jusqu'à aujourd'hui Nicolas Sarkozy,
02:41 d'avoir joué un rôle dans le volet occulte et financier de cette fausse rétractation.
02:46 Il se défend, il doit se défendre pied à pied depuis quatre jours,
02:50 et c'est vrai que l'enjeu c'est d'éviter la mise en examen.
02:52 - Venons-en au titre de votre livre, "Le parrain, Sarko après Sarko".
02:55 Un parrain de la politique comme du business, un parrain qui tire les ficelles,
02:58 mais qui cultive la discrétion, un parrain avec les juges à ses trousses.
03:02 Vous nous décrivez d'où Sarkozy là ?
03:04 - Oui, il a un petit côté... C'est Gérald Darmanin qui a donné l'idée de ce titre en réalité,
03:09 parce qu'il a une affection infinie pour Nicolas Sarkozy.
03:12 Il le décrit avec ses lunettes noires réfléchissantes, sa barbe de trois jours et sa chemise blanche,
03:17 et il l'imite, parce que Gérald Darmanin a des talents d'imitation.
03:21 Et il l'imite, et puis c'est vrai que ça avait un côté...
03:23 Un jour en rendez-vous, je lui dis "mais vous imitez Vito Corleone".
03:26 Alors il a un petit recul, mouvement de recul, et puis il dit "non mais Vito Corleone il est sympathique, il fait pas dans la drogue".
03:33 - Mais Carla Bruni elle-même, nous dites-vous, le surnomme le parrain.
03:36 - Exactement, dans une interview au Coréen de la Serre, elle le surnomme le parrain.
03:40 - Alors, au coeur de cette enquête quand même, et sans doute peut-être le plus passionnant,
03:43 le très mystérieux lien qui semble lier Nicolas Sarkozy à notre président Emmanuel Macron.
03:48 Qui a le plus besoin de l'autre ?
03:50 - Ils ont besoin de l'autre, l'un et l'autre.
03:52 Le Vatican a eu deux papes, nous on a deux présidents.
03:55 Alors tous les opposés au début, c'est vrai que Nicolas Sarkozy, justement à Gérald Darmanin,
04:01 quand Gérald Darmanin lui annonce qu'il est nommé ministre du budget, il dit cette phrase,
04:06 on est en 2017, "je ne comprends plus rien à la politique".
04:09 La phrase pour se résumer Nicolas Sarkozy, pour résumer la politique, le mot clé c'est cicatrice.
04:15 Il a le corps couvert de cicatrices.
04:17 Pour lui la politique avant d'être président, il a été pendant 40 ans,
04:20 il a fait les guerres, il a perdu les élections, il en a gagné.
04:23 Et Emmanuel Macron, il n'en a aucune.
04:25 Pour lui c'est un ovni.
04:27 Donc au début tous les opposent, et en réalité, ils vont trouver un énorme,
04:32 plusieurs énormes terrains d'entente.
04:34 - Alors il y a quand même quelque chose de très particulier sur la nature de leur lien.
04:37 Vous écrivez très clairement que Nicolas Sarkozy,
04:39 alors ça boucle avec l'information de la journée,
04:41 et son épouse rêvent en fait d'une grâce présidentielle
04:44 en fonction des condamnations éventuelles à venir de Nicolas Sarkozy en justice.
04:48 - Oui, alors c'est bien d'autres...
04:49 - Et ça existe ?
04:50 - C'est l'article 17 de la Constitution.
04:52 - Voilà, parce qu'on en parle très rarement, donc expliquez en deux mots.
04:54 - Oui, très rarement, parce que c'était utilisé par, en réalité,
04:56 c'était utilisé par le président de la République, de la Ve République,
04:59 à l'époque des condamnations à mort.
05:01 - À mort, mais oui !
05:02 - C'était le dernier recours.
05:03 En réalité l'article 17 de la Constitution, il permet à tout président
05:06 d'effacer en totalité ou en partie une ardoise judiciaire.
05:09 - Mais donc du point de vue de Nicolas Sarkozy,
05:11 il est là le lien ou l'intérêt, si je puis dire ?
05:13 - Alors il y en a plein d'autres.
05:14 Nicolas Sarkozy, il a rendu de grands services à Emmanuel Macron au début,
05:18 il a été un peu son DRH.
05:20 Vous savez Emmanuel Macron, il arrive, il braconne à droite,
05:23 il a besoin de personnels politiques à droite, tout ça.
05:25 Nicolas Sarkozy, il connaît tout le monde,
05:27 il a une particularité, une intelligence de la formule,
05:31 c'est-à-dire qu'il peut vous croquer à peu près tout le personnel politique français
05:35 en une phrase, souvent une exécution ou pas, mais enfin en une phrase.
05:40 - Souvent très drôle.
05:41 - Donc c'est très utile pour Emmanuel Macron, il a fait son casting,
05:43 il lui a donné plein d'idées, il lui a servi de coach d'une certaine façon.
05:47 - Est-ce qu'il y a un accord entre les deux hommes ?
05:49 Si oui, pourquoi, comment ?
05:50 Et franchement, est-ce qu'Emmanuel Macron peut prendre le risque
05:53 d'accorder une grâce présidentielle à Nicolas Sarkozy
05:55 s'il devait être un jour condamné ?
05:57 - Alors on n'en est pas là, on sait qu'il se voit régulièrement,
05:59 et que c'est Carla Bruni qui a mis, lors d'un déjeuner à 4,
06:02 ils s'entendent bien tous les 4.
06:04 Et c'est vrai qu'en juillet 2017, la première fois que Nicolas Sarkozy
06:08 et Carla Bruni vont dîner avec le couple Macron,
06:11 Brigitte Macron a l'élégance, alors ça va fuiter assez vite,
06:15 mais elle a l'élégance de dire qu'elle a toujours voté pour Nicolas Sarkozy.
06:18 Donc ça les rapproche.
06:19 Et c'est vrai que Carla Bruni, elle met les pieds dans le plat.
06:22 Parce que c'est vrai que, de leur point de vue,
06:24 ils vivent tous ces procès, ces auditions, ces mises en examen,
06:28 tout ça comme une grande injustice.
06:30 Donc en réalité, c'est ce qu'ils lui ont demandé.
06:32 - Alors, une dernière question.
06:34 Qui mène la danse entre les deux hommes ?
06:36 Emmanuel Macron ou Nicolas Sarkozy ?
06:38 - Emmanuel Macron, il a quand même une dette de jeu envers Nicolas Sarkozy.
06:41 Parce que Nicolas Sarkozy, vous savez que la campagne présidentielle de 2022,
06:46 il craignait beaucoup Xavier Bertrand au départ, l'Élysée.
06:49 Et puis Xavier Bertrand, chez Sarkozy, il l'appelait à ce moment-là
06:52 "Séraphin Lampion", du nom de l'assureur d'Antintin.
06:56 Donc, exil Xavier Bertrand, ça a été Valérie Pécresse.
06:59 Le fauteuil de Nicolas Sarkozy, dans tous les meetings de Valérie Pécresse,
07:03 il reste vide.
07:05 Et donc c'est vrai que cette dette de jeu, disons,
07:08 peut-être que ça les lira en cas de pépins judiciaires.
07:13 - Passionnant. Il y a tant de choses à raconter.
07:15 Votre livre "Le Parrain", Sarko après Sarko,
07:17 l'Enquête par les éditions du Seuil avec Étienne Girard.
07:19 Merci infiniment, Laurent Valliguet. Bonne journée à vous.
07:21 On l'a vu.
07:21 Merci.
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