Lundi 4 septembre 2023, SMART JOB reçoit Elisabeth Allain-Moreno (Secrétaire générale, SE-Unsa) et Sylvain Bersinger (chef économiste et auteur, Cabinet Asterès)
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00:12 Le cerclérage, on parle aujourd'hui de la rentrée des classes, alors évidemment les élèves préparent leur trousse, leur cartable,
00:17 mais il y a aussi les professeurs qui préparent leur rentrée, alors des professeurs intégrés, puis aussi des vacataires, on va en parler,
00:23 parce qu'évidemment il faut faire appel à des vacataires, on va parler du recrutement, de la crise des vocations.
00:28 Alors le ministère de l'éducation nationale a un nouveau ministre qui a fait des annonces sur certains sujets retentissants il y a quelques jours
00:35 chez nos confrères de TF1, avec une campagne de communication, vous l'avez vu, pour redorer le blason des professeurs,
00:41 c'est Toledano Nacache qui avait réalisé d'ailleurs, qui ont réalisé ces films, mais est-ce que ça va suffire pour redonner envie aux professeurs,
00:49 femmes et hommes, de pousser la porte d'une classe ? On en parle avec mes invités, Elisabeth Alain Moreno, ravie de vous accueillir,
00:55 vous êtes secrétaire générale SE Unsa, S.E. ? - Syndicat des enseignants. - Syndicat des enseignants.
01:02 Et Sylvain Bersinger, ravi de vous accueillir, Sylvain, vous venez souvent dans notre émission, chef économiste chez Astérez,
01:08 mais vous avez été, vous, professeur, comme vous l'êtes d'ailleurs, vous, Elisabeth, professeur des écoles, vous avez été prof d'éco, c'est ça ?
01:15 - Oui, S.E.S, c'est comme on appelait ça. - S.E.S. - Voilà, maintenant tout a été chamboulé un peu dans le bac, mais économie en lycée, oui.
01:21 - Et ça vous étonne qu'on ne trouve plus de prof ? Alors ça, c'était un peu un coup de gueule, parce que vous écrivez beaucoup, c'est presque un de vos premiers livres, celui-là ?
01:28 - Oui, parmi les premiers. - Parmi les premiers ? - Oui, il y en a eu d'autres, mais oui, plutôt.
01:34 - Édition Henrik B. Je vous donne juste la parole, parce que vous, vous avez claqué la porte, vous êtes parti faire autre chose, parce que vous êtes chez Astérez,
01:40 et on vous écoute souvent avec passion. Pourquoi vous étiez engagé d'abord ? Pourquoi vous avez voulu devenir prof ?
01:47 - Parce que je trouve que c'est très intéressant, l'enseignement. Moi, je trouve ça passionnant. En fait, je pense que j'ai un peu en moi le côté pédagogique.
01:54 Je pense que c'est un peu quelque chose qu'on a ou qu'on n'a pas. C'est comme courir le 100 mètres ou être acteur, c'est des choses qu'on peut s'améliorer à la marge, mais je pense qu'il y a une base...
02:02 - On l'a ou on ne l'a pas, quoi. - Sur la base, on l'a ou on ne l'a pas. Et le côté pédagogique, je pense que je l'avais. J'avais fait quelques...
02:09 On me fait ça les travaux dirigés à la fac, il y a très longtemps, ça m'avait bien plu. Et donc, voilà, j'avais vraiment dans un coin de ma tête l'idée d'une carrière dans l'enseignement.
02:18 Alors supérieure, secondaire, j'ai hésité. Et voilà, j'ai essayé pendant 3 ans, grosso modo, parce que j'ai eu un enseignement un peu hâché. J'ai pris plein de postes à droite, à gauche.
02:28 - Vacataire, on est d'accord. - Voilà, vacataire. - On appelait ça maître auxiliaire à l'époque ?
02:33 - Alors en fait, j'ai été dans l'enseignement général, agricole, donc c'était pas les mêmes termes. Donc voilà, mais en gros, j'ai fait 3 lycées différents.
02:39 Et après, voilà, j'ai pas senti la passion suffisante pour me lancer... - Justement, et je vais donner la parole à Elisabeth, mais qu'est-ce qui a tué votre vocation ?
02:48 Parce que c'est vrai que vous nous le dites et vous le dites dans ce livre. On arrive avec plein d'énergie. J'ai été prof aussi. J'ai eu des classes devant moi.
02:54 Donc il y a une forme de théâtralisation. On est devant une classe, on a envie aussi un peu de briller, on a envie de dire des choses. Et puis on déchante.
03:01 J'ai aussi déchanté. Qu'est-ce qui a tué votre vocation ? - Je pense que c'est la perspective de passer 30, 35, 40 ans de vie professionnelle, en fait, sans avoir beaucoup de capacités d'évolution.
03:11 Et je pense que c'est un vrai problème. C'est-à-dire qu'on a 25 ans, 23 ans, enfin on sort un peu de son master ou autre, et on se dit "Voilà, je me lance dans l'éducation".
03:19 Mais jusqu'à la retraite, donc maintenant jusqu'à 64 ans, en fait, il y a globalement peu. Alors on peut changer, on peut devenir CPE, on peut être mis en disponibilité.
03:27 Il y a des possibilités, mais qui sont... Voilà, la carrière vraiment centrale, c'est d'être prof d'une matière sur un niveau d'éducation pendant toute sa vie professionnelle.
03:35 - Et souvent en répétant parfois le même cours. - Oui, bah, après on peut essayer de changer un petit peu, mais la classe est toujours la même, le niveau est toujours le même.
03:41 Donc voilà, je crois que ce qui asphyxie un petit peu le métier, et moi en tout cas, ce qui m'a paru un petit peu... Voilà, j'ai pas voulu me lancer dedans, c'est de me dire "Voilà, je vais faire ça".
03:49 - La routine, une forme de routine. - Un côté routinier, voilà.
03:52 - Elisabeth Alain-Moreno, vous êtes professeure des écoles, détachée intégralement aujourd'hui pour votre action syndicale, mais on connaît, on le sait pour les infirmières par exemple,
04:01 on sait le nombre de profs qui claquent la porte et qui sont en crise de vocation. Est-ce qu'on a des chiffres sur le volume des départs ?
04:11 - Oui, on a des chiffres, on est sur à peu près 1 500 démissions. Après, ça fait quelques années que ça a stabilisé, parce qu'il faudrait y ajouter les ruptures conventionnelles.
04:21 Mais ça, ce sont des chiffres qu'on avait avant dans le bilan social et maintenant dans une nouvelle base de données qui est plus copieuse et qu'on appelle le RSU.
04:30 Et justement, on a toujours demandé à notre employeur d'avoir davantage de données, parce qu'on ne sait pas vraiment comment sont les remontées, si elles sont complètes ou pas,
04:39 alors qu'on aurait besoin justement pour mieux analyser l'évolution des professionnels, mieux comprendre les raisons de leur départ, l'âge à laquelle on part,
04:49 la raison pour laquelle on part, parce que ça permettrait aussi de mieux pointer les causes et de mieux travailler sur les causes.
04:56 - Clairement. Mais rassurez-moi, ou pas d'ailleurs, quand on quitte l'éducation nationale sous forme de démission, je ne savais pas qu'on pourrait partir sous forme de rupture conventionnelle.
05:03 - C'est récent. - C'est récent et donc ça existe. On va négocier avec qui ? Avec l'inspection de l'académie ? Avec le recteur ?
05:08 - Oui, c'est avec l'employeur, c'est ça. - C'est ça, hein ? Et on se met d'accord de gré à gré pour une sortie avec un chèque de l'éducation nationale ?
05:14 - Dans de très rares cas, parce que c'est sous condition, et d'ailleurs il y a beaucoup de refus de rupture conventionnelle, pour une raison qui ne va pas vous étonner,
05:22 c'est l'absence, enfin le manque déjà très important de personnel dans l'éducation nationale.
05:26 - Vous ne partez pas, vous allez rester dans les classes. Quand même sur les démissions, il y a un service RH, vous qui êtes dans un syndicat,
05:34 est-ce qu'il y a quelqu'un qui accueille ce professeur, Sylvain Bersinger, ou moi, pour lui dire "expliquez-nous le motif de votre départ, on veut tout entendre".
05:42 Ça n'existe pas ? - On a sur le papier, dans chaque académie, ce qu'on appelle le RH de proximité, qui a été mis en place depuis quelques années,
05:50 mais quand je dis sur le papier, j'insiste, parce que, effectivement, dans l'esprit, on pourrait tous être d'accord sur cette conception de la relation entre l'employeur et l'employé,
06:00 sauf qu'on est 1 300 000 personnels dans l'éducation nationale, et que jamais, en termes d'agents administratifs, ont été mis les moyens pour qu'il puisse y avoir suffisamment de personnel.
06:10 Et d'ailleurs, on tape toujours sur l'administration de l'éducation nationale, et c'est important de rappeler que nos agents, nos collègues administratifs, sont aussi en difficulté d'être en nombre insuffisant,
06:23 avec des changements de métiers permanents, des nouveaux outils qui arrivent, une absence de formation, il y a beaucoup de contrats actuels là aussi.
06:30 Donc comment est-ce que ces agents, qui ne sont pas assez nombreux, qui ne sont pas suffisamment formés, et accompagnés, et pas suffisamment outillés, peuvent-ils, eux, pouvoir assurer un service RH auprès des enseignants ?
06:41 – Ça ne vous aura pas échappé, Sylvain, non plus, mais changement de ministre, avec un ministre qui fait des déclarations il y a quelques jours sur TF1,
06:47 vous étiez devant le poste, forcément, pour écouter ce qu'il voulait dire. Alors c'est parti sur l'ABAIA, qui est un sujet très médiatique.
06:53 Vous avez été déçu de ces annonces, parce que lui aussi s'engage à l'idée qu'il y aura bien un professeur devant chaque classe.
06:58 Moi j'ai lu, j'ai essayé de comprendre, visiblement, ce n'est pas gagné du tout, ça. On est d'accord ?
07:03 – Oui. Je ne vais pas dire qu'on n'a pas été déçu, on n'a pas été surpris non plus, parce que la semaine précédente, on a eu le président de la République…
07:13 – La longue interview ! – … qui a voulu, voilà, s'octroyer un domaine réservé qu'est l'école, comme il l'a dit.
07:20 – Vous dites qu'il est devenu le ministre de l'Éducation nationale, d'ailleurs. C'est lui le ministre, en fait, ces mesdames et messieurs.
07:23 – Pour lui, il s'est fait passer pour le super ministre de l'Éducation nationale.
07:27 Nous, en tout cas, on a un seul interlocuteur, c'est Gabriel Attal et c'est Ruud Gronel, ce ne sera pas ailleurs.
07:31 Parce qu'on a besoin d'un pilote fort de ce ministère, on l'a suffisamment dit.
07:34 Par contre, rien de très surprenant dans ces annonces, puisqu'il y a des choses qui avaient déjà été annoncées,
07:39 soit la semaine précédente par le président, soit la veille par Gabriel Attal lui-même sur TF1.
07:44 Et en plus, on est sur une poursuite d'une feuille de route qu'on ne connaît que trop, et avec laquelle on est plutôt en désaccord.
07:50 – Juste un mot, parce qu'il y a le débat politique et les bras de fer avec les syndicats,
07:54 ça c'est le dialogue social au sein de l'institution, puis il y a le débat des salaires.
07:57 Quand vous avez claqué la porte, est-ce que le salaire était un élément dans votre choix de départ ?
08:04 Parce que c'est vrai que quand on regarde la grille des salaires en démarrage, je dis bien en démarrage,
08:08 il suffit d'habiter dans une grande métropole ou à Paris, on a du mal à trouver un logement quand même.
08:13 – Alors à titre personnel, ce n'était pas le sujet principal.
08:16 Moi, j'ai fait des études en éco-finance et je suis lauréat-seigneur en lycée.
08:18 Donc je savais clairement que je ne prenais pas la voie la plus rémunératrice.
08:21 J'ai des copains de fac qui sont partis en salle de marché à Londres ou à Singapour,
08:25 je sais très bien que ce n'étaient pas du tout les mêmes salaires.
08:27 – Donc il y avait une vraie vocation qui vous habitait ?
08:29 – Voilà, je ne me fais pas d'illusion.
08:31 Je pense que les salaires sont importants, clairement s'il y avait plus de moyens, ça arrangerait les choses.
08:35 Mais je pense que ce n'est pas l'élément clé.
08:37 Je pense qu'on ne se lance pas dans l'éducation pour le salaire et on n'en part pas avant tout pour le salaire.
08:42 C'est un élément, il y a les questions des revalorisations par rapport à l'inflation etc.
08:46 Mais je pense que ce n'est pas l'élément clé.
08:48 Je pense que s'il y a des moyens à mettre pour essayer de fidéliser, de recruter des profs,
08:51 c'est plus sur les conditions de travail, l'administration dont vous parlez, la taille des classes.
08:55 Je pense que ce n'est pas l'élément déclencheur en tout cas.
08:58 – Dans une note, en préparant l'émission que m'a donnée Nicolas Juchat,
09:02 on voit quand même que le sujet des salaires, les salaires ne sont pas si bas
09:05 quand on prend les moyennes globales en Europe.
09:07 Les profs français ne sont pas aussi mal lotis que parfois on l'entend.
09:10 – En fait, c'est vrai que j'ai fait cette note, je crois qu'il y a une…
09:13 – Je ne sais pas vous l'attribuer mais…
09:15 – Non, non, mais c'est une note d'Asterès que j'ai faite.
09:17 Il y a un écart, quand on compare avec l'OCDE,
09:19 donc l'ensemble des pays développés, Européens, puis Nord-Américains, Océaniens etc.
09:23 Si on regarde les salaires statutaires, il y a effectivement un écart assez important,
09:26 à peu près de 10%.
09:27 Mais si on prend les salaires effectivement versés avec prime, l'écart est à peu près de 2%.
09:32 – Donc les primes compensent ?
09:33 – En grande partie, oui.
09:34 Donc il y a toujours un petit écart, qui peut s'expliquer aussi,
09:37 pas des écarts de salaires globaux.
09:40 – Je crois que le panorama est très différent selon qu'on prend quel type de salaire on regarde.
09:44 – Je suis d'accord.
09:45 Un mot quand même, parce que j'aimerais qu'on parle aussi des 4 académies
09:48 sur lesquelles on voit qu'il y a de grosses difficultés, Versailles, Créteil, Mayotte,
09:54 et j'oublie une dernière académie où on voit qu'il y a des difficultés de recrutement.
09:58 Un mot sur l'idée qu'avait eue Papendiaille et qui visiblement est en train d'être reprise,
10:03 c'est qu'il faudra remplacer, lorsqu'il y aura de courtes absences de moins de 15 jours,
10:08 il faudra que des professeurs volontaires inscrits sur une liste
10:12 viennent compenser les heures de cours manquantes par le prof absent.
10:17 Et à l'époque, vous vous en souvenez, on avait raillé,
10:20 le prof de maths ira faire du sport, le prof de sport donnera des cours de géo,
10:23 tout ça avait été un peu ridicule, mais le sujet est encore sur la table.
10:27 Vous le soutenez ce projet ?
10:28 Faire en sorte que les élèves puissent avoir un professeur
10:31 lorsque leur prof de maths est absent,
10:33 mais on le remplace par un prof de l'établissement.
10:35 Vous le soutenez ce projet ou pas ?
10:37 En fait, ce n'est même pas une question de le soutenir ou pas,
10:39 parce que c'est déjà le cas.
10:41 C'est de toute façon, comme à chaque fois qu'on a un nouveau ministre qui arrive,
10:45 on a l'impression qu'il y a quelque chose de nouveau qui va être mis en place
10:47 et qui va tout solutionner.
10:49 Là, aujourd'hui, on a un dispositif qui s'appelle le RC de remplacement de courte durée
10:54 qui est censé venir répondre aux 15 millions d'heures
10:58 qu'on ne sait pas comment elles ont été calculées.
11:00 C'est trop ? C'est exagéré ?
11:02 C'est surtout que le mode de calcul, on ne l'attendrait pas.
11:04 Mais c'est à la hausse ou c'est à la baisse ce calcul ?
11:07 Visiblement, de ce qu'a dit le ministre lundi, c'est à la hausse,
11:10 puisqu'il a parlé de passer de 12 millions à 15 millions.
11:12 En tout cas, nous, on n'a jamais eu la formule qui a permis de le trouver.
11:15 Quoi qu'il en soit, c'est une réalité qu'il y a beaucoup d'heures d'enseignants
11:19 qui ne sont pas remplacés et des enseignants qui sont très souvent
11:22 sur de la formation, sur des démissions, comme de la surveillance de jury, d'examen.
11:27 Et donc, forcément, c'est lié au fonctionnement du système.
11:31 Donc, les premiers pénalisés sont les élèves, mais aussi les enseignants.
11:35 Donc, il y avait déjà, avant cette mesure du RCD, ce dispositif,
11:40 il y avait déjà des organisations sur les établissements.
11:43 Qui permettaient de suppler et de combler le trou.
11:46 Voilà, un collègue qui ne peut pas faire son heure de français, de maths, d'anglais,
11:50 parce qu'il doit surveiller un examen ou parce qu'il est sur une formation.
11:55 Soit il s'entendait déjà avec sa classe, avec ses élèves,
11:58 avec l'accord du chef d'établissement pour rattraper l'heure,
12:01 ce qui fonctionnait très bien, parce qu'on a quand même tous le souci
12:04 en tant qu'enseignants que nos élèves et leurs heures de cours.
12:07 Soit il proposait à un collègue d'inverser l'horaire.
12:10 Donc, il y avait des choses qui se faisaient déjà.
12:12 - Je ne veux pas qu'on se quitte sans parler de Créteil et de Versailles,
12:14 qui sont les académies de la banlieue parisienne.
12:16 Et on voit là aussi qu'il y a un très, très fort taux de démission,
12:19 de difficulté des enseignants à pouvoir faire classe dans de bonnes conditions
12:23 et même parfois de pouvoir faire leur cours.
12:25 Je pense évidemment, j'ai une pensée pour Samuel Paty.
12:28 Ça aussi, c'est un sujet de démission des professeurs qui disent,
12:32 après tout, dans ces académies, si on me propose d'y aller, je n'y vais pas.
12:35 Donc, comme je ne veux pas aller à Versailles ou à Créteil, je démissionne.
12:38 Ça m'a l'air extrêmement fort, ça, quand même.
12:41 - Oui. Alors, il y a plusieurs raisons, effectivement.
12:44 Et en premier lieu, c'est la mobilité géographique
12:48 qui est donnée comme élément un petit peu repoussoir par les collègues,
12:52 parce que quand on...
12:54 Alors, il faut distinguer professeurs des écoles et les professeurs du second degré
12:58 parce qu'il y a des concours académiques et des concours d'astronautes.
13:00 - Oui, le primaire du secondaire.
13:01 - Voilà. Et c'est vrai qu'on ne fait pas du tout le plein
13:04 sur les concours académiques du premier degré sur ces académies-là.
13:07 - Clairement pas.
13:08 - Parce qu'après, on va mettre 10 ans, 15 ans à en partir.
13:11 Et quand on est dans le second degré, selon les disciplines,
13:14 selon le concours que l'on passe, on s'y paraît.
13:16 - On se piège un peu, quoi.
13:17 - Quand on est sur des grosses disciplines, mathématiques, lettres,
13:19 bon, voilà, il y a plus d'oxygène, il y a plus de personnel.
13:22 Mais quand on est sur d'autres disciplines...
13:23 - Espagnol, allemand...
13:24 - ...et je parlais de la voie professionnelle, voilà.
13:25 Et donc, ça fait partie des causes de la désaffection des concours.
13:30 Et ça, ça revient tout le temps,
13:31 et ça fait des années qu'on demande aux ministères
13:33 à reposer le dispositif de mobilité au sein de l'éducation nationale.
13:38 - On ne va pas régler le problème de l'éducation nationale
13:40 dans ce débat passionnant au demeurant.
13:42 Mais vous, Sylvain Bersinger, qui êtes sorti maintenant
13:45 définitivement l'éducation nationale...
13:47 - Effectivement, je ne sais pas. On verra.
13:48 - Peut-être pas, d'ailleurs, parce qu'on sent que vous avez la vocation.
13:50 Est-ce que ce gros mammouth dont parlait un ministre il y a quelque temps,
13:55 qu'il fallait dégraisser le mammouth,
13:57 est-ce que ça part de là ou est-ce que le problème est ailleurs ?
13:59 Vous, qui êtes un économiste.
14:00 Est-ce qu'on a une forme de sur-bureaucratie ?
14:02 Un peu comme disait d'ailleurs Gérald Darmanin,
14:04 il faut plus de policiers dans la rue que dans les bureaux.
14:06 - Alors, sur-bureaucratie, je ne sais pas si le terme est bon,
14:11 mais je pense que mon sentiment, qui est le mien,
14:16 mais quand j'ai discuté avec beaucoup de collègues en salle des profs,
14:18 je pense qu'il est quand même partagé par un certain nombre de collègues,
14:21 c'est d'avoir une capacité de pouvoir changer.
14:25 Je suis prof 10 ans, peut-être que j'ai envie de faire un autre métier
14:28 pendant 10 ans, de revenir...
14:30 - Mais je reviens.
14:31 - Alors, il y a des possibilités de mise en disponibilité, etc.,
14:33 mais ce n'est pas forcément facile,
14:35 ce n'est pas forcément entrer dans les habitudes ni des profs,
14:38 ni des employeurs du secteur privé aussi, d'ailleurs,
14:41 parce que pour un prof qui va dans le privé,
14:42 il est souvent un peu étiqueté "gréviste",
14:45 enfin, c'est la caricature, mais voilà, il y a ces caricatures-là.
14:48 Donc, je pense que ce qu'il faut essayer,
14:50 ce n'est pas Gabriel Attal qui va le régler en un mois à l'été,
14:53 mais c'est de donner un petit peu d'air et de souplesse.
14:56 Moi, j'aime beaucoup le système de l'enseignement agricole
15:00 dans lequel j'ai passé un an, que je trouve plus souple,
15:03 alors qu'il est souvent vu avec un peu de dédain.
15:05 Et je trouve qu'il est...
15:07 - Plus décentralisé.
15:08 - Oui, il est plus proche du terrain,
15:09 il est plus proche du monde professionnel,
15:11 il y a plus de professionnels...
15:12 - Mais il ne dépend pas de l'éducation nationale, comme vous le savez.
15:14 - Oui, mais ça veut dire qu'en France, on est capable de le faire aussi.
15:16 - Nous sommes d'accord.
15:17 - Je pense qu'il y a des pistes qu'on peut essayer de tirer...
15:18 - C'est vrai.
15:19 - Pour donner plus de souplesse, plus d'oxygène,
15:21 pour rapprocher le monde d'éducation de la société dans son ensemble,
15:24 pas que de l'entreprise, mais de la société.
15:26 Et je pense qu'on motivera plus de profs
15:28 et on pourra aussi aller capter des professionnels de l'extérieur
15:31 qui ont envie d'enseigner, il y a plein de gens qui ont envie d'enseigner.
15:33 - Merci d'être venu sur le plateau.
15:35 C'est vrai qu'il y a aussi des gens qui ont poussé la porte,
15:37 ces derniers mois, pour faire les fameux 7 jours de formation,
15:39 en disant "j'en ai marre de l'entreprise, je veux voir des élèves".
15:42 En tout cas, il y a encore des vocations,
15:44 même si, vous l'évoquiez Elisabeth,
15:46 il n'y aura peut-être pas assurément un prof devant chaque élève, chaque classe.
15:52 Merci Elisabeth Alain-Moreno, secrétaire générale S.E. UNSA,
15:55 professeure des écoles dans l'Hérault
15:57 et aujourd'hui détachée intégralement pour le syndicat.
16:00 Merci à vous, Sylvain Bersinger, vous êtes chef économiste chez Astérez,
16:03 vous avez produit cette note à lire sur les salaires au sein de l'OCDE
16:07 et ça vous étonne qu'on ne trouve plus de prof,
16:10 Henrique B., parmi tous les livres qu'écrit Sylvain Bersinger,
16:14 qui sont tous des livres passionnants, je tiens à vous le dire.
16:17 On tourne une page, c'est maintenant fenêtre sur l'emploi
16:20 et on accueille notre dernière invitée.