Les visiteurs du soir du 06/05/2023

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Frédéric Taddeï et ses invités débattent des grandes questions du XXIe siècle dans les #VisiteursDuSoir

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00:00:00 Et les visiteurs du soir, c'est dans un instant, juste après le rappel des titres par Michael Dos Santos.
00:00:08 La grogne sociale se poursuit dans plusieurs villes françaises.
00:00:14 A Marseille, des milliers de personnes ont manifesté lors d'une marche d'écolaires en présence de Jean-Luc Mélenchon.
00:00:19 A Lyon, ils étaient environ 650 à s'opposer à la réforme des retraites et protester contre l'inflation.
00:00:25 Plus insolites, 400 personnes déguisées en bourgeois ont également jeté de faux billets à la boule.
00:00:30 Et puis, plus de 11 tonnes de cigarettes de contrebande saisies dans la Loire,
00:00:34 la cargaison estimée à près de 6 millions d'euros a été retrouvée dans un camion immatriculé en Lettonie.
00:00:40 Venant d'Espagne, le poids lourd se dirigeait vers Paris. Il devait en principe contenir des radiateurs.
00:00:45 Puis enfin, une petite île du Pacifique célèbre le Sacre de Charles III d'une étonnante manière.
00:00:51 L'île de Tanna considère le nouveau roi britannique comme le fils d'un dieu, son défunt père, le prince Philippe.
00:00:57 Selon une ancienne prophétie, un être mythique à la peau blanche devait revenir sur l'île.
00:01:01 Le duc d'Edimbourg s'y était rendu dans les années 70.
00:01:04 - Bonsoir, bienvenue sur le plateau des visiteurs du soir.
00:01:21 On est samedi, il est 22h, l'heure de se poser des questions sur l'intelligence artificielle,
00:01:27 sur l'automobile ou sur la nupèce qui fête son premier anniversaire.
00:01:31 Seulement voilà, Jean-Luc Mélenchon, le père fondateur, est de plus en plus contesté pour comprendre où est le problème.
00:01:37 À 23h, on donnera la parole à des gens de gauche. Ce sont eux que ça concerne, aux premiers chefs.
00:01:42 Et eux-mêmes sont divisés entre pro et anti-Mélenchon.
00:01:45 Thomas Guénolé, l'auteur de "La fin des haricots", est déjà parmi nous.
00:01:49 Gérard Filoche, qui a été communiste dans sa jeunesse, puis trotskiste, puis socialiste,
00:01:53 avant de fonder la gauche démocratique et sociale, qui fait partie de la nupèce, nous rejoindra à ce moment-là.
00:01:59 Auparavant, on va s'intéresser de plus près à chaque GPT, l'intelligence artificielle qui n'en finit pas d'épater son monde.
00:02:07 Claire Mathieu est avec nous ce soir, informaticienne spécialisée dans les algorithmes.
00:02:12 Vous êtes membre de l'Académie des sciences, après avoir occupé la chaire informatique et sciences numériques au Collège de France.
00:02:19 Laurent-Alexandre, qui sortira d'ici peu un nouveau livre, "La guerre des intelligences",
00:02:23 à l'heure de Tchad GPT, s'apprête à nous rejoindre, mais en duplex.
00:02:28 Tout comme Laetitia Poulikin, l'auteur de "Femmes 2.0", "Féminisme et transhumanisme, quel avenir pour la femme".
00:02:35 Et l'on commence tout de suite l'émission avec Raphaël Doran, historien de l'Antiquité,
00:02:40 qui sort "Si Rome n'avait pas chuté", un livre intéressant à plus d'un titre.
00:02:45 D'abord parce qu'il s'agit d'une Uchronie, que serait devenu l'Empire romain s'il avait fait sa révolution industrielle sous Néron,
00:02:52 au moment où Héronde Alexandrie a fabriqué la toute première machine à vapeur ?
00:02:57 Les Romains auraient pu envoyer le premier homme sur la lune, dès le 5ème siècle de notre ère.
00:03:03 C'est en tout cas la thèse du livre.
00:03:05 Mais le plus intéressant pour nous ce soir, c'est que pour la première fois depuis l'invention de l'imprimerie,
00:03:10 ce livre n'a pas été écrit par un être humain.
00:03:13 Le texte, comme les photos qui l'accompagnent, ont été produits par une intelligence artificielle.
00:03:18 Racontez-nous comment vous avez procédé, Raphaël Doran ?
00:03:21 Alors, c'est un projet qui est assez nouveau.
00:03:24 D'abord, il n'est pas entièrement fait par l'intelligence artificielle.
00:03:26 Non, de temps en temps vous en mêlez.
00:03:28 Mais vous le dites quand c'est vous.
00:03:30 C'est important de bien clarifier les choses pour que le lecteur sache à quoi il a à faire,
00:03:33 selon qu'il s'agit de textes qui ont été faits par l'intelligence artificielle,
00:03:36 et de textes qui ont été faits par l'auteur, c'est-à-dire par moi-même.
00:03:39 En fait, moi j'aborde ces technologies de synthèse de textes et de modèles de langage
00:03:45 d'un point de vue vraiment de littéraire, au fond.
00:03:47 Je ne suis pas un programmeur, je ne suis pas informaticien.
00:03:50 Mais je trouve que, justement, avec ChatGPT et les autres modèles de langage similaires,
00:03:56 on a un pont qui se crée entre le monde de l'écriture, du livre, de la littérature,
00:04:01 de la réflexion intellectuelle au sens large,
00:04:03 et le monde de l'informatique, du numérique et des programmes informatiques.
00:04:08 Et je trouvais ça assez fascinant d'essayer de pousser le plus loin possible cette idée de
00:04:13 « est-ce que ça peut nous aider à créer des choses qu'on ne pouvait pas faire auparavant,
00:04:17 à inventer des idées qu'on ne pouvait pas avoir auparavant,
00:04:20 et donc à essayer de faire un livre en se servant de l'IA, de l'intelligence artificielle,
00:04:25 comme une sorte de tremplin pour la réflexion. »
00:04:27 Mais quel genre de questions lui avez-vous posées ?
00:04:29 Alors, en fait, le livre, donc, l'un des défauts des modèles de langage aujourd'hui,
00:04:34 c'est que, par leur structure même, ils n'ont pas de rapport à la vérité,
00:04:37 donc ils ne savent pas que ce qu'ils disent est faux ou vrai, et donc ils sont sujets à...
00:04:41 Ils savent aligner des mots.
00:04:42 Ça, voilà, ils prédisent chacun des mots au fur et à mesure,
00:04:44 et donc ils sont sujets à ce qu'on appelle parfois des hallucinations,
00:04:47 donc à des faits totalement inventés, des idées parfaitement fausses, des dates...
00:04:51 Je précise que les images qu'on voit défiler à côté de vous sont des images du livre,
00:04:55 là aussi produites par une intelligence artificielle, on y reviendra.
00:04:58 Exactement.
00:04:59 C'est mis ou mis de journée ?
00:05:00 Alors, c'est mis de journée pour certaines d'entre elles, mais il y a un peu de tout.
00:05:04 Et donc, ces modèles de langage sont sujets à ces hallucinations,
00:05:08 ce qui serait un problème pour faire un livre d'histoire qui parle de la véritable histoire,
00:05:12 parce qu'évidemment, on n'a pas envie d'avoir des inventions et des erreurs dans un livre d'histoire,
00:05:18 mais en revanche, il y a un genre particulier de l'histoire qui s'y prête très bien, au contraire,
00:05:21 c'est l'uchronie, donc ce genre qui consiste à se demander ce qui aurait pu se passer dans l'histoire
00:05:26 si un événement, un paramètre, avait changé.
00:05:29 En l'occurrence, l'Empire romain n'a pas chuté, il a même fait sa révolution industrielle au premier siècle de notre ère.
00:05:37 Quelles sont les principales difficultés que vous avez rencontrées ?
00:05:41 Alors, il y a une première limite qui est aujourd'hui très importante pour l'utilisation de l'IA,
00:05:46 c'est la limite de taille.
00:05:48 Il y a un contexte ou une capacité à créer, à comprendre du texte et ensuite à générer du texte
00:05:56 qui est très limité en termes de nombre de mots.
00:05:58 Donc on ne peut pas du tout lui faire générer un texte, un livre entier, en appuyant sur un bouton et pouf !
00:06:03 Non, mais là, il faut lui dire par exemple, imaginons qu'au premier siècle,
00:06:07 quand Héron d'Alexandrie invente la première machine à vapeur,
00:06:12 toute petite, mais c'est une vraie machine à vapeur,
00:06:15 imaginons ce qui se serait passé après si Néron avait trouvé ça génial.
00:06:19 C'est ça, et même on peut aller encore plus en amont en lui demandant d'imaginer
00:06:23 10 scénarios ou 10 idées de ce qui aurait pu se passer si les Romains avaient eu accès à la machine à vapeur,
00:06:28 à la fois les manières dont ils auraient pu y avoir accès
00:06:31 et ce que ça aurait occasionné comme changement et comme évolution dans le monde.
00:06:34 De là à arriver à cette femme qui a un smartphone ou une tablette dans la main,
00:06:40 reproduit sur les murs de son pays.
00:06:44 Ce qui est frappant finalement, c'est qu'entre l'invention de la machine à vapeur, la vraie,
00:06:48 et justement l'émission Apollo, ou même l'invention de l'iPhone et des tablettes d'aujourd'hui,
00:06:54 il se passe très peu de temps, en fait.
00:06:55 Deux siècles.
00:06:56 Il se passe deux siècles et demi.
00:06:57 Et donc si on transpose ça, même si évidemment on ne peut pas tout transposer de la même manière,
00:07:01 mais à l'Antiquité, avec cette fameuse machine à vapeur qu'avait réellement inventée
00:07:06 un savant grec Héron d'Alexandrie au premier siècle après Jésus-Christ,
00:07:10 on pourrait avoir des... on peut imaginer une sorte de monde alternatif
00:07:13 où l'histoire aurait suivi un cours très très différent.
00:07:16 Et ce qui est intéressant, c'est que justement ça ne s'est pas produit.
00:07:18 Donc c'est aussi, je cherche à en parler dans le livre, il s'agit de se demander pourquoi.
00:07:22 Est-ce que les Grecs et les Romains en fait n'ont pas eu cette révolution industrielle ?
00:07:25 Qu'est-ce qui les a empêchés de passer à ces inventions-là ?
00:07:28 Mais puisque l'intelligence artificielle telle qu'elle existe aujourd'hui,
00:07:33 elle ne sait pas ce qu'est le réel, elle ne sait pas ce qui est vrai,
00:07:36 elle ne sait pas ce qu'est le réel, ça doit poser quand même des problèmes à l'historien que vous êtes.
00:07:42 Est-ce que véritablement elle fait oeuvre d'imagination à ce moment-là
00:07:46 ou elle parle de quelque chose qu'elle croit vrai ?
00:07:49 Alors, qu'elle croit vrai ou pas, finalement ça n'a pas beaucoup de sens
00:07:52 du point de vue du modèle de langage qui ne fait qu'aligner des mots.
00:07:55 En revanche, ce qui est intéressant, c'est qu'elle a été entraînée sur des quantités énormes de données,
00:08:01 donc en fait quasiment tout ce qui a été écrit par l'humanité
00:08:03 depuis la naissance de l'écriture jusqu'à Facebook.
00:08:06 Et à partir de toutes ces données, elle en dégage des relations en fait,
00:08:11 un peu implicites, entre plein d'éléments, plein de paramètres
00:08:16 et de faits qu'elle a pu voir au fur et à mesure dans cet entraînement à partir de ces données.
00:08:21 Ce qui fait qu'en fait, elle connaît quand même assez bien ce que c'est que la société romaine dans l'Antiquité.
00:08:27 Elle arrive à en déceler des traits et à les adapter ensuite à un monde tout à fait différent
00:08:32 qui est celui de la révolution industrielle.
00:08:34 Et en fait, même si elle ne crée rien ex nihilo, puisqu'elle ne fait que travailler à partir de données préentraînées,
00:08:40 en fait, elle est capable d'interpeler, de mélanger des sources complètement différentes
00:08:45 et des inspirations totalement différentes. Et ça, ça fait du nouveau.
00:08:48 Vous avez pâté parfois ? Vous avez dit "tiens, ça, je n'y aurais jamais pensé".
00:08:51 Par exemple, elle invente un personnage qui est une sorte de mélange entre la figure de Thomas Edison,
00:08:57 le fameux Américain qui a vraiment révolutionné l'électricité avec la lumière,
00:09:03 et une sorte de destin à la Sénèque dans l'Antiquité, c'est-à-dire d'un personnage qui est trop près du pouvoir
00:09:08 et qui finit par susciter la méfiance de l'empereur, qui lui ordonne de se suicider.
00:09:12 Et ce mélange des deux marche très bien, parce que si on se dit que peut-être qu'il y aurait eu...
00:09:17 S'il y avait l'électricité à Rome, peut-être qu'il y aurait eu un mania de l'électricité
00:09:20 qui aurait fait peur à un empereur un peu paranoïaque et qui aurait pu justement,
00:09:23 le spolier de ses inventions puis lui ordonner de se suicider.
00:09:26 Donc c'est une très bonne invention, très cohérente finalement, entre ces deux mondes.
00:09:29 Mais alors est-ce que c'est cohérent ? Là, je parlais de l'historien,
00:09:32 quelqu'un qui a vu tout le cheminement de son Uchronie.
00:09:36 Est-ce que c'est véritablement plausible, possible, que si les Romains avaient fait leur révolution industrielle
00:09:43 au 1er siècle, qu'ils aient inventé l'avion, comme on le voit dans votre livre,
00:09:47 ou une fusée pour aller sur la Lune ?
00:09:49 Alors, il y a plusieurs paramètres à prendre en compte. Il y a d'abord le fait que...
00:09:53 Parce que vous l'avez dit, c'est 200 ans entre James Watt qui invente la machine à vapeur,
00:09:57 entre 200 et 250 ans, jusqu'à la mission Apollo et l'iPhone.
00:10:01 Voilà, dans le terme de pure chronologie, si on transpose l'un à l'autre, on peut imaginer.
00:10:05 Après, il y a évidemment des paramètres qui changent.
00:10:07 Le premier paramètre, c'est la culture et l'univers mental dans lequel évoluent les Grecs et les Romains,
00:10:12 qui est quand même très différent du nôtre et de celui de la révolution industrielle.
00:10:16 D'abord parce que les Romains n'ont pas vraiment de capitalisme, par exemple.
00:10:20 Ils ont quelque chose qui s'en rapproche un tout petit peu, qui sont les armateurs,
00:10:23 qui font un peu du capital-risque en se disant "bon, je vais charger une cargaison sur un bateau
00:10:27 et j'espère que ça va me permettre de fructifier".
00:10:29 Mais c'est très rare, c'est très parcellaire.
00:10:31 Il leur manque aussi quelque chose comme la figure de l'ingénieur aujourd'hui.
00:10:37 C'est quelqu'un qui a à la fois une grande connaissance théorique
00:10:40 et en même temps une application pratique de ses théories et qui travaille à ça.
00:10:45 Ils ont des artisans, des gens qui sont des artisans très spécialisés,
00:10:48 qui construisent des ponts, des bâtiments, qui deviennent architectes.
00:10:51 Mais les savants, les philosophes, les Platons, les Aristotes, etc.,
00:10:55 eux rechignent un peu à appliquer leurs théories dans le ciel des idées à la vraie vie.
00:11:00 Ils trouvent que c'est un travail d'esclave d'inventer des machines et de faire ce genre de choses.
00:11:04 Il y a ça qui les limitait beaucoup dans la capacité, dans la réalité,
00:11:08 à mettre en œuvre même des idées brillantes qu'ils pouvaient avoir dans la vraie vie.
00:11:13 C'est ça sans doute qui a fait qu'ils n'ont pas eu la révolution industrielle, pour autre paramètre.
00:11:18 Mais il y a aussi, je pense, des contingences dans l'histoire.
00:11:21 Si jamais il y avait quelqu'un qui avait poussé plus loin ses recherches,
00:11:24 peut-être qu'ils auraient vu l'utilité quand même d'une machine aussi puissante.
00:11:27 Parce que par ailleurs, ils utilisaient des machines quand même.
00:11:29 Oui, surtout pour faire la guerre.
00:11:31 Exactement, pour faire la guerre, pour construire.
00:11:33 Il y a eu beaucoup de mécanisations en Antiquité.
00:11:35 Mais il leur a peut-être manqué ce point de bascule qui ensuite entraîne les faibles données.
00:11:39 Et Raphaldo, pourquoi vous n'avez pas prolongé votre chronique jusqu'à nos jours ?
00:11:43 C'est-à-dire en vous disant si l'Empire romain dominait encore le monde aujourd'hui,
00:11:49 en le partageant grosso modo avec la Chine,
00:11:51 puisque quand on lit votre livre, on s'aperçoit qu'à un moment, il se retrouve face à la Chine.
00:11:56 Et de vous dire comment est-ce qu'on s'habillerait aujourd'hui ?
00:12:01 Est-ce qu'on parlerait encore latin, à votre avis ?
00:12:04 Si l'Empire romain n'avait jamais chuté depuis 2000 ans ?
00:12:08 La difficulté, c'est que ça voudrait dire qu'on doit inventer 1500 ans d'histoires futures.
00:12:12 Et franchement, imaginez ce qu'on sera nous-mêmes dans 1500 ans, c'est pas évident.
00:12:15 Vous ne faites rien, c'est Chadjé Pété qui le travaille.
00:12:17 Chadjé Pété aura plus de mal à inventer quelque chose qui n'existe pas du tout, mais comme nous.
00:12:22 Pour nous aussi, c'est quasiment impossible d'imaginer la société humaine dans 1500 ans.
00:12:26 Chadjé Pété n'est pas meilleur que nous pour ça.
00:12:28 Vous avez lu "Chronie", mes versions futures, ça s'appelle la science-fiction ?
00:12:33 Et même la science-fiction, finalement, recycle beaucoup de thématiques qui viennent de l'histoire.
00:12:37 Star Wars, c'est des références très classiques de l'histoire et des contes traditionnels.
00:12:42 Et dans toutes les inventions qu'on a maintenant, on en trouve des premières traces dans des récits de science-fiction.
00:12:47 Je pense à Jules Verne, je pense à Asimov.
00:12:49 Et donc ça peut fonctionner comme ça pour se projeter dans le futur.
00:12:52 Ça pourrait fonctionner aussi.
00:12:53 Et puis une autre chose qui est un peu vertigineuse, c'est de se dire, les Romains et les Grecs ne sont pas passés si loin.
00:12:58 En tout cas, ils ne leur manquaient rien matériellement, par exemple pour inventer l'ampoule électrique.
00:13:02 L'ampoule électrique, ils n'avaient pas besoin de matériaux dont ils manquaient.
00:13:05 Ils auraient pu le faire s'ils avaient eu l'idée et le cadre social, mental et économique pour le faire.
00:13:10 Et donc on peut aussi se demander de manière un peu vertigineuse, de quoi nous, on est en train de manquer.
00:13:16 De quoi on passe à côté aujourd'hui ?
00:13:19 Il y a des choses qui sont présables et qu'on ne peut pas voir parce qu'on n'a pas encore peut-être la culture pour le voir
00:13:24 ou des modèles de société qui permettent de le découvrir.
00:13:28 Nous, notre dernière grande découverte, c'est qu'on a pris une télé, un téléphone, un poste de radio, un tourne-disque, une bibliothèque et une discothèque.
00:13:37 Et on a tout mis ça dans un petit rectangle.
00:13:39 En quelque sorte, c'est ça le dernier.
00:13:41 C'est ça notre grand plan d'avancée.
00:13:42 Ou alors le dernier, c'est justement ces modèles de langage dont on parle aujourd'hui qui sont aussi peut-être un tournant dans l'évolution technologique.
00:13:48 Claire Mathieu, comment vous trouvez la petite expérience à laquelle s'est livrée Raphaëlle Doran ?
00:13:53 Ah, ça me semble très intéressant.
00:13:56 Ce sera assez fascinant de lire ce livre et de voir comment Chad Jepeté exploite ses connaissances des corpus pour s'amuser.
00:14:08 Je pense que la fiction, la création de textes, c'est vraiment pour ça que c'est fait.
00:14:12 Chad Jepeté ou l'autre modèle de langage que vous avez utilisé, je ne sais pas lequel vous avez utilisé,
00:14:17 mais vraiment, je crois que c'est vraiment conçu pour ce genre de choses.
00:14:21 Donc c'est là que ça peut déployer toute sa puissance.
00:14:24 Et donc, je pense que ça devrait être très intéressant de voir.
00:14:28 Au fond, c'est comme quand Chad Jepeté aide un étudiant à préparer son devoir ou son prochain exposé.
00:14:34 Un peu ça, sauf que là, on l'assume, contrairement à certains étudiants.
00:14:38 Thomas Guénolé ?
00:14:39 Pour rebondir là-dessus, moi, je sors d'une école qui s'appelle Sciences Po,
00:14:44 qui a annoncé qu'ils allaient faire vraiment la chasse aux étudiants qui utilisent les intelligences artificielles
00:14:49 pour préparer leurs exposés, leurs travaux.
00:14:51 Au courage !
00:14:52 Ce qui est, à mon avis, aussi débile que leur interdire Internet en l'an 2000.
00:14:56 Ça me semble vraiment complètement idiot.
00:14:58 Et donc, du côté de l'autre établissement où moi j'enseigne maintenant, qui est le campus parisien de M.Lyon,
00:15:03 on prend une approche qui est exactement le contraire, c'est-à-dire,
00:15:07 allez-y, utilisez des intelligences artificielles pour l'ensemble des travaux que vous voulez,
00:15:11 puisque de toute façon, vous les aurez quand vous serez dans le monde professionnel.
00:15:14 Simplement, on va mettre en place des programmes de formation pour que vous sachiez bien vous en servir.
00:15:19 Parce que, par rapport à ce qui a été dit tout à l'heure,
00:15:21 effectivement, Chad Jepeté, c'est quoi ?
00:15:23 C'est un rédacteur documentariste automatisé,
00:15:26 qui va chercher avec un gigantesque filet de pêche à peu près tout ce qu'il peut trouver sur Internet.
00:15:31 C'est ça, ce qu'il fait.
00:15:32 Ça veut dire donc qu'au moins aussi important que la réponse qu'il va vous chercher
00:15:36 est la question que vous allez poser et la façon dont vous allez la poser.
00:15:40 Et donc, moi, ça fait trois mois à peu près que je me suis sérieusement mis à utiliser Chad Jepeté.
00:15:44 Et je me rends compte qu'un élément qu'on a tendance à sous-estimer quand on parle de ce type de fonctionnement,
00:15:50 c'est notre inégalité à nous en tant qu'utilisateur dans la capacité à bien formuler nos questions,
00:15:55 qui vraiment change considérablement la gueule des réponses.
00:15:58 Et donc, là-dessus, il me semble qu'on surestime la capacité d'initiative, en quelque sorte, de Chad Jepeté,
00:16:06 en projetant dessus des choses qui viennent de la science-fiction.
00:16:09 C'est-à-dire que Chad Jepeté, on en parle, en fait, ce qu'on a en tête en disant
00:16:12 « est-ce que Chad Jepeté va remplacer ceci, faire cela, etc. »
00:16:16 On se posera toutes ces questions dans quelques instants.
00:16:18 Mais oui, bien sûr. Ce que je veux dire, c'est que dans le cas que vous évoquiez,
00:16:22 ce que je trouve intéressant, c'est qu'en fait, on a maintenant à disposition
00:16:28 un rédacteur documentariste automatisé, taillable et corvéable à merci,
00:16:33 du moment que vous ne lui demandez pas trop d'innover. C'est un point important.
00:16:37 La création est assez intéressante de ce point de vue-là, parce que...
00:16:40 Si c'est pour la fiction.
00:16:42 Si c'est pour la fiction.
00:16:43 Ou même, simplement, générer des idées qui vont nous amener, nous, à réfléchir de manière différente.
00:16:48 Mais il ne les génère pas, il va les chercher, il va les pêcher.
00:16:50 C'est un pêcheur, ce n'est pas un inventeur.
00:16:53 Il génère quand même parce qu'il y a aussi des rapprochements qu'il fait
00:16:55 et qui n'ont jamais été faits auparavant, parce qu'il est capable justement de faire des interpolations.
00:16:59 Et c'est quelque chose à quoi il est assez bon.
00:17:01 On peut lui demander, par exemple, un professeur dans une classe pourrait lui demander
00:17:04 de prendre un film qu'il a montré à ses élèves et ensuite de demander à Chad Jepeté
00:17:09 de rédiger un cours qui explique tel concept de philosophie à partir du film.
00:17:13 Et même si ça n'a jamais été fait, il sera capable de le faire et assez bien en plus, probablement.
00:17:17 Et donc, dans ce livre, c'est un peu comme ça que je l'ai utilisé aussi.
00:17:20 C'est de servir de stimuli comme ça lancés par Chad Jepeté ou Jepeté 3 en l'occurrence,
00:17:26 pour ensuite, moi-même, avoir quelque chose à moudre sous la dent, de quelque sorte,
00:17:31 pour réfléchir dessus.
00:17:32 Et ça m'a fait penser à des choses que je n'aurais sans doute pas écrites autrement,
00:17:36 auxquelles je n'aurais pas réfléchi autrement.
00:17:38 Et donc, c'est vraiment une manière de se…
00:17:40 de comme si on avait un interlocuteur très différent, quasiment extraterrestre,
00:17:44 avec qui on peut converser pour avoir des nouvelles idées et une nouvelle manière de voir le monde.
00:17:48 Et comment expliquez-vous cet engouement assez récent, semble-t-il, pour les Uchronies ?
00:17:53 Bonne question.
00:17:54 Ah non, ça fait longtemps.
00:17:55 Voilà, il y en a depuis quelques années.
00:17:56 Ça existe depuis longtemps.
00:17:58 Non, non.
00:17:59 Les femmes d'Ukronie, ça fait vraiment… ça fait moins d'une trentaine d'années.
00:18:02 Oui, oui.
00:18:03 C'est ce que j'appelle récent.
00:18:04 Voilà, ça peut être récent.
00:18:05 Mais c'est vrai que je pense que les Ukronies, ça touche quelque chose d'assez sensible chez nous,
00:18:10 parce que l'idée du contingent, des multivers un peu aussi,
00:18:13 qui est quelque chose qui est très à la mode, notamment dans le cinéma hollywoodien,
00:18:16 mais l'idée qu'en fait, on pourrait avoir des vies différentes,
00:18:19 que ce soit au niveau individuel ou au niveau collectif,
00:18:22 et qui montre à quel point, finalement, la société qu'on a aujourd'hui,
00:18:25 elle aurait pu être différente.
00:18:27 Et je pense qu'on est encore plus conscient de ça maintenant qu'on voit
00:18:29 peut-être certaines fragilités aussi de nos sociétés actuelles,
00:18:32 par opposition à des époques qui sont peut-être plus confiantes en elles-mêmes
00:18:35 et qui ne se posent pas la question de savoir ce qu'elles auraient pu être autrement, finalement.
00:18:38 On va laisser Michael De Santos faire le rappel des titres,
00:18:43 et on va continuer... Ah bah non, on me dit dans l'oreillette que non,
00:18:46 c'est pas Michael De Santos, pas tout de suite.
00:18:48 On fait une pause, et après on va continuer de réfléchir à Tchad GPT,
00:18:52 avec Laurent Alexandre et Laetitia Poulikin, qui doivent nous rejoindre.
00:18:57 Les visiteurs du soir, c'est de 22h à minuit,
00:19:06 et on continue de s'intéresser aux exploits accomplis par Tchad GPT.
00:19:10 Laetitia Poulikin, l'auteur de "Femmes de zéro",
00:19:14 "Féminisme et transhumanisme, quel avenir pour la femme",
00:19:17 est maintenant avec nous. Bienvenue.
00:19:19 Vous êtes la directrice de Nbic Ethics,
00:19:22 un think-tank qui conseille les institutions européennes
00:19:25 sur les questions éthiques liées aux technologies.
00:19:28 Laurent Alexandre est là aussi. Je rappelle que vous êtes chirurgien à l'origine
00:19:32 et l'un des deux fondateurs du site d'Octissimo,
00:19:35 et que vous publierez bientôt un nouveau livre,
00:19:37 "La guerre des intelligences", à l'heure de Tchad GPT.
00:19:40 C'est vous qui avez attiré mon attention sur une étude parue
00:19:43 dans la prestigieuse revue scientifique JAMAI Internal Medicine.
00:19:46 D'après ses conclusions, Tchad GPT est jugé bien plus humain
00:19:50 que les médecins dans ses réponses aux patients.
00:19:53 Alors Tchad GPT est plus humain que des vrais médecins ?
00:19:56 Ça demande quelques explications. Est-ce que vous pouvez nous les donner, Laurent Alexandre ?
00:20:01 Oui, c'est une étude qui est sortie dans JAMAI.
00:20:04 On s'attendait bien sûr à ce que Tchad GPT soit supérieur aux médecins
00:20:08 d'un point de vue technique, mais on ne s'attendait pas
00:20:10 qu'il y ait une très très forte supériorité par rapport aux médecins
00:20:13 sur le plan de l'empathie.
00:20:15 Et en réalité, la notation en termes d'empathie des réponses des médecins
00:20:20 est très impressionnante, avec une supériorité de Tchad GPT
00:20:25 qui a en moyenne une note deux fois supérieure à la note des médecins
00:20:30 sur une étude très très sérieuse et très fouillée.
00:20:33 Donc je pense que ma profession va devoir beaucoup se bouger.
00:20:38 Elle ne va pas être menacée uniquement sur le plan technique,
00:20:41 mais elle va aussi être menacée sur le plan de l'empathie et de la relation humaine.
00:20:46 Alors pour bien comprendre, les chercheurs ont pioché au hasard 200 questions
00:20:50 sur un forum médical un peu similaire à Doctissimo que vous avez fondé,
00:20:54 et les 200 réponses apportées par des médecins.
00:20:57 Ils ont ensuite posé les mêmes questions à Tchad GPT,
00:21:00 puis ils ont fourni les réponses de Tchad GPT et les réponses des médecins
00:21:05 à des experts médicaux, sans que les experts sachent s'il s'agissait des réponses
00:21:09 de l'un ou de l'autre, et ils ont demandé de les évaluer.
00:21:12 Et on s'est aperçu à ce moment-là que dans 79% des cas,
00:21:16 les experts médicaux ont trouvé que les réponses de Tchad GPT
00:21:20 étaient bien meilleures que celles des médecins.
00:21:22 Et c'est surtout son empathie, comme vous dites, qui ont emballé les experts.
00:21:26 Comment un robot qui ne ressent rien peut-il être à ce point empathique ?
00:21:31 Oui, vous savez, c'est le miracle de l'intelligence artificielle
00:21:35 sous la forme de ce qu'on appelle les LLM.
00:21:38 Ce ne sont pas des intelligences artificielles fortes,
00:21:41 c'est-à-dire qu'elles n'ont pas de conscience d'elles-mêmes,
00:21:43 elles n'ont pas de conscience du monde, mais elles sont capables de produire
00:21:47 des productions intellectuelles de très très haut niveau
00:21:51 et de comprendre très bien la psychologie humaine.
00:21:54 D'ailleurs, Microsoft a pondu, Microsoft qui contrôle 49% de Tchad GPT,
00:22:00 a sorti une étude très très fouillée de 140 pages
00:22:04 pour essayer de comprendre pourquoi Tchad GPT était aussi bon
00:22:07 dans sa version GPT-4 et pourquoi GPT-4 comprenait aussi bien la psychologie humaine.
00:22:14 Et pour l'instant, les chercheurs de Microsoft et d'OpenAI,
00:22:17 le fondateur de Tchad GPT, n'ont pas trouvé de réponse
00:22:21 aux raisons pour lesquelles Tchad GPT est aussi bon sur le plan technique,
00:22:27 mais également sur le plan de la compréhension de la psyché humaine.
00:22:31 C'est assez troublant.
00:22:32 Dans le cadre de l'étude que vous citez là, ce qui est terrible,
00:22:35 c'est que l'étude a été faite avec GPT-3 et pas GPT-4.
00:22:40 Or, comme vous le savez, GPT-4 est très très supérieur à GPT-3,
00:22:44 donc je suis un petit peu inquiet du score de ma profession
00:22:47 face à GPT-5 qui devrait sortir dans quelques mois.
00:22:50 Ce que l'on constate effectivement, c'est que les soignants,
00:22:53 quand ils répondent à leurs patients, sont beaucoup plus directs que Tchad GPT.
00:22:57 Tchad GPT, tous ceux qui ont eu affaire à ce robot conversationnel,
00:23:01 savent qu'il est extrêmement obstéqueux, c'est le moins qu'on puisse dire.
00:23:05 Et pour peu que vous le preniez en train…
00:23:07 Ce n'est pas l'empathie.
00:23:08 … ayant fait une erreur, vous lui dites non, c'est une erreur,
00:23:10 il se confond en excuses.
00:23:12 L'empathie de Tchad GPT, vous l'expliquez comment, Claire Mathieu ?
00:23:18 Eh bien, je pense que d'abord, plutôt que de parler de miracle,
00:23:23 j'aimerais essayer de démystifier un petit peu cette intelligence impressionnante,
00:23:29 ces résultats impressionnants de Tchad GPT,
00:23:31 en essayant de comprendre un tout petit peu comment ça marche.
00:23:36 Et pour ça, je voudrais dire un mot sur l'apprentissage.
00:23:40 Donc, Tchad GPT, on lui a fourni un grand corpus de documents.
00:23:46 À partir de ça, il a construit une représentation mathématique
00:23:50 avec des nombres et des coefficients.
00:23:52 Et dans l'apprentissage, pour ajuster les coefficients,
00:23:56 on lui a donné des phrases du corpus où on enlève un mot.
00:24:00 Par exemple, c'est une très nouvelle.
00:24:06 Que faut-il mettre dans le trou ?
00:24:08 C'est une très…
00:24:10 Bonne ou mauvaise ?
00:24:11 C'est une très bonne ou très mauvaise nouvelle, exactement.
00:24:13 Et donc, on pose cette question, une phrase à trou.
00:24:17 Tchad GPT essaie de compléter le trou
00:24:19 et après vérifie si ça correspond à la phrase du corpus.
00:24:22 Et si ça ne correspond pas,
00:24:24 ajuste ses coefficients dans la représentation du monde
00:24:26 pour être au plus près des mots qui manquent.
00:24:29 Et quand on fait ça avec beaucoup de phrases,
00:24:32 les coefficients sont ajustés de façon que, sans qu'on donne des règles,
00:24:36 Tchad GPT puisse tout seul apprendre la conjugaison, la grammaire,
00:24:41 l'orthographe, le contexte…
00:24:43 L'empathie…
00:24:44 Il ne connaît pas le sens de ce qu'il raconte, si je vous suis.
00:24:45 Absolument pas.
00:24:46 Ça, c'est une information importante.
00:24:47 On savait, il a lit des mots, mais l'empathie…
00:24:49 C'est important de le souligner.
00:24:50 Il ne peut pas être empathique par rapport à des choses
00:24:52 qu'il ne comprend pas sur le fond.
00:24:54 Mais vous voyez bien qu'avec cette méthode d'apprentissage,
00:24:57 il arrive à savoir quel est le bon mot par rapport au contexte.
00:25:01 C'est probabiliste, finalement.
00:25:02 C'est probabiliste, mais ce n'est pas seulement la grammaire,
00:25:04 c'est aussi le sens, une bonne nouvelle ou une mauvaise nouvelle.
00:25:07 Mais donc, c'est une machine à imiter, en fait.
00:25:08 Ce n'est pas une machine à ressentir, donc il ne peut pas avoir d'empathie.
00:25:11 On sait bien qu'il ne peut pas avoir d'empathie.
00:25:13 On dit comment fait-il pour l'imiter si bien,
00:25:15 alors que les soignants qui sont très directs avec leurs patients
00:25:18 sont incapables de le faire.
00:25:20 Parce que ce n'est pas leur boulot, déjà.
00:25:21 Très vite.
00:25:22 Que font ces médecins ?
00:25:23 Ces médecins, d'abord, ils sont pressés.
00:25:25 Ils n'ont que quelques mots pour le dire.
00:25:27 Donc, ce qu'ils pourraient faire, c'est après, donner la parole à Tchadjépeté,
00:25:32 leur donner quelques mots pour donner le fond de la réponse,
00:25:34 et après, laisser Tchadjépeté passer la pommade, pour ainsi dire.
00:25:38 L'empathie, ce n'est pas ça.
00:25:40 L'empathie, c'est sympathiser, c'est ressentir avec,
00:25:43 c'est être saisi aux entrailles.
00:25:45 Ça ne peut être qu'un humain avec un humain.
00:25:49 Dire qu'une machine a de l'empathie, c'est absurde pour moi.
00:25:52 Ou alors, elle est capable d'hypocrisie, comme le sont beaucoup d'humains.
00:25:57 Un mot de Laetitia Poulicain ?
00:25:59 Il nous reste une minute avant une pause,
00:26:02 mais je vous redonnerai la parole après. Allez-y.
00:26:04 Merci.
00:26:05 Moi, je pense que c'est une opportunité, en réalité.
00:26:08 Cette étude dévoile que cet outil pourrait permettre
00:26:13 d'augmenter la productivité des médecins,
00:26:15 et de ce fait, augmenter la pertinence de leurs réponses
00:26:20 et de leur interaction d'humain à humain.
00:26:22 Je partage 100% de l'opinion de Mme Mathieu.
00:26:25 En effet, l'empathie n'est pas imitable,
00:26:29 elle est une propriété de l'être humain.
00:26:31 Et l'outil de production de chat GPT et des diagnostics de santé combinés
00:26:38 peuvent permettre de gagner du temps,
00:26:41 d'obtenir des niveaux diagnostiques extrêmement pertinents,
00:26:45 beaucoup plus que ne le serait une personne.
00:26:48 Et de ce fait, avec les bons trainings, les bons entraînements
00:26:53 que l'on fait en bioéthique d'ailleurs maintenant,
00:26:56 dans les cursus médicaux,
00:26:59 il serait possible pour les médecins de gagner eux-mêmes en empathie,
00:27:03 c'est-à-dire de trouver les bons mots pour la bonne ou la mauvaise nouvelle.
00:27:09 Vous avez utilisé exactement la terminologie qu'on utilise
00:27:13 dans l'un des UCTS de l'université de médecine,
00:27:18 de façon à ce que les médecins sachent utiliser les bons mots
00:27:23 pour annoncer en particulier une mauvaise nouvelle
00:27:26 en fonction de la personne qu'ils ont,
00:27:29 en fonction de leurs entrailles.
00:27:32 Vous avez utilisé le mot juste, il me semble, madame Mathieu,
00:27:35 des entrailles qui leur fait dire que cette personne
00:27:39 saura sur la durée subir un traitement long, par exemple,
00:27:46 ou bien si au contraire cette personne est plutôt de nature stressée,
00:27:50 anxieuse et rapide,
00:27:53 il faudra mieux prendre un traitement en cancéro
00:27:57 plus agressif et plus rapide
00:27:59 et qui ne nécessitera pas une médication quotidienne sur trois ans, par exemple.
00:28:04 Je vous interromps Laetitia Politikin, pardonnez-moi,
00:28:08 l'heure c'est important sur une chaîne d'information
00:28:11 et c'est l'heure que Michael Dos Santos nous fasse le rappel des titres.
00:28:16 Charles III, sacré en grande pompe à Londres,
00:28:21 à l'abbaye de Westminster,
00:28:23 l'ancien prince de Galles a reçu la couronne certie d'or et de rubis.
00:28:26 Le roi et la reine ont ensuite rejoint en carrosse
00:28:29 le balcon de Buckingham Palace pour saluer leur sujet.
00:28:32 Des britanniques qui s'étaient massés par milliers
00:28:34 malgré la pluie et quelques manifestations anti-monarchie.
00:28:37 La CGT accepte l'invitation de Matignon,
00:28:40 Sophie Binet, secrétaire générale du syndicat,
00:28:43 rencontrera Elisabeth Borne le 16 ou le 17 mai prochain.
00:28:46 D'autres leaders syndicaux sont également conviés
00:28:49 pour cette réunion sans ordre du jour précis.
00:28:52 La CFDT, à travers Laurent Berger,
00:28:54 devrait également être autour de la table.
00:28:56 Et puis un adolescent interné à Besançon
00:28:59 après avoir poignardé trois membres de sa famille.
00:29:01 Le mineur a blessé sa mère, sa soeur et son frère
00:29:04 dans la nuit du jeudi au vendredi, sans raison apparente.
00:29:07 Arrêté et placé en garde à vue,
00:29:09 il était déjà connu pour des antécédents psychiatriques.
00:29:12 Raphaël, dans votre livre, vous dites quelque chose
00:29:18 à propos de cette étude sur laquelle
00:29:21 Laurent Alexandre a attiré mon attention.
00:29:24 Vous écrivez "ce n'est pas l'IA qui va remplacer les hommes,
00:29:27 ce sont les hommes qui utilisent l'IA
00:29:30 qui remplaceront ceux qui ne l'utilisent pas".
00:29:33 Clairement, pour les médecins, c'est un bon exemple.
00:29:35 Très probablement, les médecins qui utiliseront une IA
00:29:37 pour les aider seront beaucoup plus productifs,
00:29:39 peut-être plus empathiques ou perçus comme plus empathiques
00:29:41 et feront peut-être des meilleures diagnostics
00:29:43 que ceux qui ne l'utiliseront pas.
00:29:45 Ce que je trouve intéressant dans l'étude,
00:29:47 c'est que même si on sait très bien,
00:29:49 comme on l'a dit, que la GAPT n'a pas d'empathie,
00:29:52 ce qui est intéressant, c'est que le public,
00:29:54 ou les gens, le perçoivent comme tel.
00:29:56 Je pense que ça va devenir un vrai phénomène dans la société
00:29:59 que des gens, indépendamment de la manière dont fonctionnent
00:30:02 ces outils, vont y voir des consciences,
00:30:05 vont y voir des réactions humaines
00:30:07 et vont interagir avec eux comme avec des humains.
00:30:09 Ils vont s'y attacher, on sait très bien.
00:30:11 Il y avait un excellent film de science-fiction
00:30:13 qui s'appelait "Her", où Joaquim Phoenix
00:30:15 tombait amoureux de son intelligence artificielle,
00:30:17 mais c'est quelque chose qui est déjà arrivé récemment.
00:30:20 On voit à quel point nous sommes capables
00:30:23 de projeter notre propre empathie
00:30:25 sur n'importe quel type d'objet,
00:30:27 particulièrement ceux qui arrivent très bien
00:30:29 à imiter les êtres humains.
00:30:31 Comme les chats aussi, les chats nous imitent.
00:30:33 Exactement, mais d'ailleurs les animaux,
00:30:35 de manière générale, nous-mêmes nous projetons
00:30:37 sur les animaux, c'est l'anthropomorphisme,
00:30:39 des choses qui nous appartiennent, et on va faire pareil
00:30:41 probablement à très grande échelle
00:30:43 et on va faire pareil à très grande échelle.
00:30:45 C'est ce que nous faisons.
00:30:47 C'est ce que nous faisons.
00:30:49 C'est ce que nous faisons.
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00:33:29 C'est ce que nous faisons.
00:33:31 Merci.
00:33:33 - Merci.
00:33:35 Je pense que l'innovation,
00:33:37 l'invention, la créativité,
00:33:39 c'est quelque chose qui nous intéresse beaucoup,
00:33:41 nous les chercheurs.
00:33:43 On se demande comment faire pour être inventif.
00:33:45 On va voir les avancées dans notre domaine.
00:33:47 On essaie de voir d'où c'est sorti.
00:33:49 Comment on a fait pour avoir une idée nouvelle.
00:33:51 Et souvent,
00:33:53 il y a une partie des inventions
00:33:55 qui arrive par juxtaposition.
00:33:57 Donc si on met deux personnes en présence
00:33:59 qui ont des compétences différentes,
00:34:01 qui connaissent des domaines différents
00:34:03 et qui se trouvent discutées ensemble,
00:34:05 elles peuvent se rendre compte
00:34:07 que chacune d'elles a des connaissances
00:34:09 qui peuvent être utilisées par l'autre
00:34:11 pour produire quelque chose de nouveau.
00:34:13 Donc ce rapprochement
00:34:15 de deux domaines différents,
00:34:17 c'est quelque chose
00:34:19 dont un outil comme
00:34:21 JADGPT pourrait être capable
00:34:23 simplement par sa connaissance encyclopédique.
00:34:25 sa connaissance encyclopédique.
00:34:27 Donc je pense qu'il y a...
00:34:29 On dit toujours que
00:34:31 pour découvrir quelque chose,
00:34:33 il faut beaucoup de transpiration
00:34:35 et un tout petit peu d'inspiration.
00:34:37 La partie transpiration,
00:34:39 un outil comme JADGPT
00:34:41 est capable de la faire.
00:34:43 Laetitia Poulikène ?
00:34:45 Écoutez, moi ce que je pense,
00:34:47 c'est que Laurent a certainement raison.
00:34:49 Nous ne sommes pas organisés,
00:34:51 pas équipés
00:34:53 pour prendre en compte l'IA.
00:34:55 Mais je pense que c'est tout de même
00:34:57 une urgence au sens où
00:34:59 on ne peut interagir avec l'IA
00:35:01 que dans une logique de copilotage.
00:35:03 Mais c'est bien l'IA
00:35:05 qui est dans le siège du copilote
00:35:07 et nous derrière le volant.
00:35:09 Il faut que ça reste de la sorte.
00:35:11 Et en fait, ce que je voulais dire aussi,
00:35:13 c'est que la performance,
00:35:15 ce n'est pas la compétence.
00:35:17 C'est René Brooks qui dit ça.
00:35:19 Il est du MIT, il est pionnier en robotique.
00:35:21 Et j'ai discuté un jour
00:35:23 avec une chercheure en chirurgie
00:35:25 qui était depuis 30 ans
00:35:27 formatrice en chirurgie robotisée
00:35:29 aux États-Unis.
00:35:31 Et elle me disait,
00:35:33 moi en réalité, je souffre beaucoup,
00:35:35 y compris sur le plan éthique
00:35:37 et sur le plan de la pratique
00:35:39 de ma profession,
00:35:41 des bonnes pratiques en fait,
00:35:43 de mon métier.
00:35:45 Parce que quand je suis dans ma cabine
00:35:47 en train de computer
00:35:49 des données et de diriger le robot
00:35:51 pour lui faire faire ce que j'ai envie de lui faire faire,
00:35:53 je perds le contact avec le patient.
00:35:55 Et donc sur le plan éthique,
00:35:57 ça me dérange,
00:35:59 cette relation au patient.
00:36:01 Et d'autre part,
00:36:03 certes, le robot
00:36:05 doté d'IA est extrêmement performant,
00:36:07 mais en revanche, il y a des choses
00:36:09 qui ne trompent pas quand on a les mains sur un corps.
00:36:11 On sait quand on perd un corps.
00:36:13 Et là, je pense
00:36:15 qu'il y a quelque chose à entendre.
00:36:17 Alors justement, vous touchez du doigt
00:36:19 et c'est le cas de le dire.
00:36:21 Une question que je me pose et que j'avais envie de poser à Laurent-Alexandre,
00:36:23 c'est que les robots, au fond,
00:36:25 et je mets Chadjé Pété dans les robots,
00:36:27 c'est un robot conversationnel,
00:36:29 les robots imitent plus facilement
00:36:31 les intellectuels que les manuels.
00:36:33 Au fond,
00:36:35 Chadjé Pété est capable de passer
00:36:37 des examens, de faire un diagnostic,
00:36:39 mais comme vient de le dire Laetitia,
00:36:41 à un moment,
00:36:43 il n'est pas capable de mettre ses doigts sur un corps.
00:36:45 Et c'est ce que les robots imitent mal.
00:36:47 Ils sont incapables d'imiter
00:36:49 bien un serveur
00:36:51 ou une femme de ménage,
00:36:53 leur art,
00:36:55 ce pour quoi ils sont bons,
00:36:57 ce pour quoi ils sont doués.
00:36:59 Le robot ne peut pas les imiter.
00:37:01 Mais il peut imiter un écrivain, un historien,
00:37:03 un cinéaste,
00:37:05 demain.
00:37:07 Qu'est-ce que vous en pensez, Laurent ?
00:37:09 Alors,
00:37:11 ne laissons pas les travailleurs manuels s'endormir
00:37:13 sur cette illusion.
00:37:15 Sam Altman,
00:37:17 le patron de Ponehaï, qui produit Chadjé Pété,
00:37:19 est en train d'investir dans la robotique.
00:37:21 Il va y avoir
00:37:23 la fusion entre une gamme de robots humanoïdes
00:37:25 qui s'appellent les robots Néo
00:37:27 et Gpt4
00:37:29 puis Gpt5, à partir de l'été prochain,
00:37:31 de l'automne prochain.
00:37:33 Donc nous allons avoir progressivement
00:37:35 des robots qui vont avoir les capacités
00:37:37 d'un Aristote,
00:37:39 d'un Edison,
00:37:41 et ça va être une révolution
00:37:43 parce que jusqu'à présent,
00:37:45 nous n'avions pas
00:37:47 en tête l'idée que les robots
00:37:49 pourraient être dotés de l'intelligence
00:37:51 artificielle. Cette fusion
00:37:53 entre la robotique et l'intelligence artificielle
00:37:55 qui n'est qu'à ses tous débuts
00:37:57 et qui est en train d'être développée
00:37:59 à l'initiative du propriétaire
00:38:01 de Chadjé Pété, elle est révolutionnaire.
00:38:03 Donc je pense qu'il faut que
00:38:05 l'ensemble des métiers se préparent au choc
00:38:07 de l'intelligence artificielle
00:38:09 puis demain de l'intelligence artificielle
00:38:11 couplée à la robotique
00:38:13 et il ne faut pas laisser certaines professions,
00:38:15 par exemple les professions manuelles,
00:38:17 s'endormir sur l'illusion
00:38:19 que cette révolution ne va pas les concerner.
00:38:21 Thomas Guédelet ?
00:38:23 Je voudrais souligner
00:38:25 parce que c'est mon frère aîné qui est psychiatre
00:38:27 qui a fait une thèse entière là-dessus
00:38:29 sur la définition de l'intelligence.
00:38:31 Et la conclusion d'une thèse entière
00:38:33 de médecine, c'était de dire
00:38:35 "on n'a pas de définition".
00:38:37 Je croyais que c'était la capacité
00:38:39 de s'adapter aux situations nouvelles.
00:38:41 C'est une définition qui existe parmi beaucoup d'autres.
00:38:43 Il n'existe pas, alors que je vous parle,
00:38:45 de définition claire de ce que c'est que l'intelligence.
00:38:47 En revanche, on pourrait dire par exemple
00:38:49 que c'est une intelligence artificielle
00:38:51 alors qu'on n'a pas de définition claire
00:38:53 et définitive de ce que c'est que l'intelligence.
00:38:55 Pour moi c'est déjà un premier problème.
00:38:57 La définition de la guerre a beaucoup changé ces derniers temps.
00:38:59 J'entends bien.
00:39:01 C'est juste pour relativiser le fait que
00:39:03 le mot "intelligence" est trompeur
00:39:05 sur ce que c'est capable de faire ou pas.
00:39:07 Je voudrais clarifier ce point-là.
00:39:09 Il y a encore beaucoup de gens dans le public
00:39:11 qui fantasment ça.
00:39:13 On n'est pas du tout dans "Skynet" de Terminator.
00:39:15 Ça n'existe pas.
00:39:17 Toujours pas.
00:39:19 L'intelligence artificielle globale, ça n'existe pas.
00:39:21 On n'a pas non plus l'ordinateur HAL
00:39:23 qui décide des trucs tout seul
00:39:25 ou qui commence à ressentir des choses dans "2001 - Odyssée de l'espace".
00:39:27 Ça n'existe pas.
00:39:29 La matrice dans "Matrix", ça n'existe toujours pas.
00:39:31 Vous êtes en train de nous dire que notre intelligence artificielle
00:39:33 est encore faible. On est d'accord.
00:39:35 Il faut le préciser parce qu'à force d'entendre
00:39:37 parler de remplacement par des intelligences artificielles,
00:39:39 des robots, etc.,
00:39:41 ça convoque un imaginaire qui est celui de la science-fiction
00:39:43 qu'on a vu ces 40 dernières années.
00:39:45 C'est l'idée
00:39:47 de domination, de destruction et d'asservissement.
00:39:49 C'est complètement à côté de la plaque.
00:39:51 En revanche, ce qui est vrai, c'est que
00:39:53 tous les "bullshit jobs" chez les cols blancs,
00:39:55 ça, ça devient remplaçable.
00:39:57 Les gens qui, aujourd'hui, pissent de la copie
00:39:59 dans des salles de rédaction en plagiant
00:40:01 des pêches AFP
00:40:03 juste en faisant du copier-coller un peu agrémenté,
00:40:05 ça, une intelligence artificielle
00:40:07 peut le faire. Rédiger une annonce
00:40:09 immobilière bateau
00:40:11 ou une lettre de motivation bateau,
00:40:13 j'ai fait le test, je vous le dis clairement,
00:40:15 ça, chat GPT
00:40:17 peut le faire sans problème.
00:40:19 En revanche, croire que
00:40:21 ça va
00:40:23 éradiquer, enfin, plus personne n'aura du boulot,
00:40:25 ça va être une catastrophe, etc., je vais vous dire ce que
00:40:27 j'en pense, c'est du ludisme.
00:40:29 Les ludistes, au début du XIXe siècle,
00:40:31 c'était des artisans anglais qui cassaient
00:40:33 les machines en disant "c'est une catastrophe,
00:40:35 ça détruit les emplois", etc.
00:40:37 Et finalement, c'était l'industrialisation
00:40:39 et ça apportait surtout du progrès, à tout point de vue.
00:40:41 - Et des emplois, mais un peu plus tard.
00:40:43 - Et du progrès de confort, technique, etc.
00:40:45 Et donc, ils étaient contre, quelque part,
00:40:47 sans le savoir peut-être, ils étaient contre
00:40:49 quelque chose de bénéfique. J'ai l'impression
00:40:51 qu'on a le même problème sur les intelligences artificielles,
00:40:53 c'est qu'on fantasme des trucs totalement
00:40:55 délirants par rapport à la réalité,
00:40:57 on panique sur des choses qui ne sont pas en train de se produire
00:40:59 et on passe à côté de points que, d'ailleurs,
00:41:01 Laurent-Alexandre a soulevés,
00:41:03 qui sont effectivement des transformations
00:41:05 qui, elles, sont bien réelles et dont on parle très peu.
00:41:07 Par exemple, si vous avez un job de col blanc
00:41:09 sur lequel ça ne demande pas vraiment de créativité,
00:41:13 un bullshit job,
00:41:15 votre poste peut être remplacé par une intelligence artificielle,
00:41:17 ça c'est vrai.
00:41:19 - Claire Mathieu ?
00:41:21 - Je pense qu'on peut rêver à l'avenir,
00:41:25 mais je trouve que le présent est déjà très intéressant.
00:41:27 Les possibilités qui existent dès maintenant
00:41:29 et les limites.
00:41:31 Les limites, c'est que, actuellement,
00:41:33 ces agents conversationnels n'ont pas de bon sens.
00:41:37 C'est pour ça que c'est important,
00:41:39 quand on a parlé de copilote,
00:41:41 c'est très important, parce qu'actuellement,
00:41:43 il est très facile de déraper, de dérailler,
00:41:45 que ça dise n'importe quoi.
00:41:47 C'est un vrai problème.
00:41:49 Mais il y a quand même énormément de possibilités
00:41:51 qui sont présentes dès maintenant.
00:41:53 Je vais vous en parler,
00:41:55 je voudrais en mentionner deux
00:41:57 qui me sont venus à l'esprit hier et aujourd'hui.
00:41:59 Hier, les drones pendant les manifs.
00:42:01 Si les forces de l'ordre
00:42:03 avaient leur numéro d'identification
00:42:05 sur leur casque,
00:42:07 en haut, au sommet de leur crâne,
00:42:09 avec les drones,
00:42:11 on peut les identifier,
00:42:13 et donc on sait exactement
00:42:15 qui est responsable de quel incident,
00:42:17 pourvu que ce soit saisi sur les drones.
00:42:19 - Déjà qu'ils les planquent souvent sur leurs uniformes.
00:42:21 - Donc les drones peuvent venir,
00:42:23 à l'aide de la justice.
00:42:25 Deuxièmement,
00:42:27 je suis allée à la mairie
00:42:29 pour essayer de faire renouveler mon passeport,
00:42:31 faire un dépôt de demande.
00:42:33 - On dirait que c'est très long.
00:42:35 - C'est extrêmement long, ça prend plusieurs mois.
00:42:37 Après, quand j'y suis allée,
00:42:39 la secrétaire m'a dit
00:42:41 qu'il y avait un papier qui manquait,
00:42:43 donc il fallait que je reprenne rendez-vous.
00:42:45 Je suis rentrée chez moi,
00:42:47 elle s'était trompée.
00:42:49 Mais je dois quand même reprendre rendez-vous.
00:42:51 Alors est-ce qu'une intelligence artificielle
00:42:53 pourrait remplacer ce genre de tâches ?
00:42:55 Et là, c'est très compliqué.
00:42:57 C'est très compliqué parce que...
00:42:59 En fait, quel est son rôle ?
00:43:01 Moi, j'ai déjà rempli mes papiers avant,
00:43:03 j'ai déjà rassemblé mes papiers.
00:43:05 Elle me voit,
00:43:07 elle prend mes papiers,
00:43:09 elle vérifie qu'il y a tous les papiers,
00:43:11 elle me pose deux, trois questions,
00:43:13 et elle range les papiers dans un dossier pour la suite.
00:43:15 Qu'est-ce qu'un outil du genre chat GPT
00:43:17 serait capable de faire actuellement ?
00:43:19 Est-ce qu'elle serait capable de me dire
00:43:21 "montrez votre papier, le scanner",
00:43:23 mais le prendre, le ranger,
00:43:25 vérifier que j'ai bien donné ce que j'ai dit,
00:43:27 que je rangerais, que je suis bien moi ?
00:43:29 Tout ça...
00:43:31 Je ne sais pas comment...
00:43:33 Il y a encore des difficultés, là.
00:43:35 Donc je pense qu'on n'est pas tout à fait prêts
00:43:37 à remplacer cette personne.
00:43:39 Laetitia Pouliquin.
00:43:41 Alors, sur le plan de l'emploi,
00:43:43 c'est déjà en cours.
00:43:45 Vous voyez bien comment est en train de se refaçonner
00:43:47 l'industrie technologique américaine en particulier.
00:43:49 Le patron d'IBM a annoncé
00:43:51 qu'il allait...
00:43:53 Il était en tout cas en capacité,
00:43:55 je ne sais pas s'il l'a acté,
00:43:57 mais en capacité de mettre à la porte 7 400 personnes
00:43:59 dont les métiers
00:44:01 consistaient à faire des métiers
00:44:03 qu'on pouvait répliquer par des IA
00:44:05 et qu'il pourrait potentiellement aller
00:44:07 jusqu'à 30 % de sa workforce.
00:44:09 Donc on est vraiment
00:44:11 déjà dans une logique
00:44:13 de remplacement
00:44:15 dans des industries capitalistiques
00:44:17 assez...
00:44:19 réactives, mettons.
00:44:23 Donc ça, c'est pour l'aspect
00:44:25 de l'emploi
00:44:27 et l'aspect sociologique.
00:44:29 Moi, j'ai eu des recommandations
00:44:31 auprès de l'Union européenne
00:44:33 sur le plan
00:44:35 de l'éthique.
00:44:37 Et je ne sais pas si c'est
00:44:39 un sujet qui vous intéresse, mais
00:44:41 d'abord, Chair GPT n'est pas inclus
00:44:43 et il n'est que un saut d'ailleurs
00:44:45 dans tous les règlements étudiés à l'Union européenne
00:44:47 à l'heure actuelle. Mais je pense que
00:44:49 sur le plan sociologique, psychologique,
00:44:51 même anthropologique, il serait peut-être
00:44:53 intéressant de faire en sorte que quand un résultat
00:44:55 est publié comme étant
00:44:57 le fruit
00:44:59 d'une intelligence artificielle,
00:45:01 il est important que l'être humain le sache.
00:45:03 Donc pour moi, il semblerait
00:45:05 intéressant que l'on ait...
00:45:07 que l'on tague, que l'on étiquette
00:45:09 une résultante
00:45:11 d'un chatbot
00:45:13 ou d'un LLM
00:45:15 comme étant "il y a" ou "non il y a".
00:45:17 Et d'autre part,
00:45:19 Madame Mathieu mentionnait l'exemple
00:45:21 effectivement du processus
00:45:23 pour renouveler un passeport.
00:45:25 Typiquement,
00:45:27 les difficultés qu'on a
00:45:29 quand on va résilier
00:45:31 un abonnement
00:45:33 de télécom ou autre,
00:45:35 est-ce que là, on ne pourrait pas
00:45:37 être en capacité pour certaines personnes
00:45:39 les plus vulnérables, qui sont
00:45:41 devant la difficulté matérielle,
00:45:43 internet,
00:45:45 de faire face
00:45:47 à des intelligences artificielles,
00:45:49 et bien à ce moment-là, de pouvoir dire
00:45:51 "non, moi je ne veux pas, je veux avoir
00:45:53 une interaction avec un être humain,
00:45:55 je prendrai le temps qu'il faudra,
00:45:57 mais pas dire, pour moi, pas dire".
00:45:59 Et puis en fait,
00:46:01 le dernier point, il me semble
00:46:03 tout à fait central dans nos travaux,
00:46:05 en tout cas sur le plan de l'éthique et du juridique,
00:46:07 c'est la création éventuellement,
00:46:09 ou une mise à jour, j'allais dire,
00:46:11 de notre charte
00:46:13 des droits fondamentaux. Parce que là,
00:46:15 je pense qu'on est loin du compte.
00:46:17 Laurent-Alexandre,
00:46:19 qu'en pensez-vous ?
00:46:21 Je pense que les problèmes éthiques
00:46:23 sont devant nous, et qu'il y a
00:46:25 beaucoup de questions qui se posent,
00:46:27 mais je voudrais revenir sur ce qu'a dit Thomas Guénolé.
00:46:29 Il a dit "je ne crois pas
00:46:31 qu'il faille s'occuper
00:46:33 des sujets de science-fiction,
00:46:35 comme la possibilité d'intelligence artificielle
00:46:37 qui dépasse l'homme".
00:46:39 C'est un sujet dont je discute beaucoup avec Raphaël Dehaene,
00:46:41 qui est un très très bon spécialiste
00:46:43 de ce qu'on appelle l'intelligence artificielle générale,
00:46:45 ou l'AGI en anglais.
00:46:47 Beaucoup d'experts aujourd'hui,
00:46:49 beaucoup d'experts aujourd'hui,
00:46:51 à peu près 80-90% des experts,
00:46:55 pensent que l'intelligence artificielle générale,
00:46:57 c'est-à-dire dépassant l'homme
00:46:59 dans une large partie
00:47:01 des activités intellectuelles,
00:47:03 est à l'horizon
00:47:05 de 3 à 7 ans.
00:47:07 Quand on prend les plus grands experts mondiaux,
00:47:09 ils donnent,
00:47:11 voire même le qu'un.
00:47:13 Donc aujourd'hui, je pense que le sujet
00:47:15 ne peut pas être éludé.
00:47:17 Il n'est pas possible aujourd'hui de savoir
00:47:19 si on va avoir une intelligence artificielle générale
00:47:21 prochainement.
00:47:23 Personne ne peut le prévoir.
00:47:25 - Je disais juste qu'elle n'existe pas à l'heure actuelle, on est d'accord là-dessus.
00:47:27 - Non, non, j'entends, je comprends bien.
00:47:29 Mais je pense qu'il faut quand même travailler le sujet,
00:47:31 car une intelligence artificielle générale
00:47:33 changerait radicalement
00:47:35 l'organisation de la société,
00:47:37 et c'est quelque chose qu'il faut planifier,
00:47:39 qu'il faut prévoir, même si cela ne
00:47:41 survient pas avant 2030.
00:47:43 Donc je pense que
00:47:45 la principale discussion éthique
00:47:47 que l'on doit avoir, c'est autour
00:47:49 de l'intelligence artificielle générale.
00:47:51 Car les intelligences
00:47:53 artificielles actuelles, comme
00:47:55 GPT-4, ne posent pas
00:47:57 énormément de problèmes éthiques.
00:47:59 En revanche, une intelligence artificielle
00:48:01 générale supérieure
00:48:03 globalement à l'intelligence humaine
00:48:05 poserait d'énormes problèmes politiques,
00:48:07 philosophiques, éthiques.
00:48:09 Et c'est une discussion que nous devons avoir
00:48:11 au moment où une large majorité
00:48:13 des experts mondiaux pensent
00:48:15 que cela va arriver entre
00:48:17 1 000 et 2 000 jours,
00:48:19 c'est-à-dire demain matin.
00:48:21 - Raphaël Dohen. - C'est vrai que sur les questions éthiques,
00:48:23 je suis assez d'accord que, en l'état actuel
00:48:25 des choses, au fond, ce sont des questions
00:48:27 un peu rattachées à des cadres qu'on connaît bien,
00:48:29 sur le droit d'auteur, sur la protection des données personnelles.
00:48:31 Donc, finalement, il n'y a pas de changement profond.
00:48:33 - La formation professionnelle. - Exactement.
00:48:35 Et donc, ce serait vraiment si jamais on arrivait à un stade
00:48:37 encore beaucoup plus développé de l'IA
00:48:39 qu'on pourrait se poser des questions nouvelles en matière d'éthique.
00:48:41 Mais je voulais dire une chose sur
00:48:43 les possibilités de remplacement de l'homme
00:48:45 par la machine. Il y a évidemment des tâches
00:48:47 qui vont disparaître à cause
00:48:49 de l'IA, ça c'est évident.
00:48:51 Mais en même temps,
00:48:53 je trouve qu'il faut toujours se rappeler aussi que, par exemple,
00:48:55 en termes de création, on va être
00:48:57 extraordinairement augmenté. Il y aura
00:48:59 probablement dans quelques années, vraiment pas longtemps,
00:49:01 un étudiant qui sera capable de faire
00:49:03 sur son MacBook dans sa chambre
00:49:05 d'étudiant un film qui rivalisera
00:49:07 avec les productions de studios d'Hollywood.
00:49:09 - Oui, comme vous avez fait vos photos.
00:49:11 - Et le livre que j'ai fait était un peu une manière
00:49:13 d'essayer de montrer la voie là-dedans.
00:49:15 - Il faut se dire que les photos que vous avez
00:49:17 dans votre livre, qui représentent donc Rome
00:49:19 avec une technologie que Rome n'avait pas,
00:49:21 ça coûtait très cher,
00:49:23 il y a encore... - Ça aurait été un livre infaisable, en fait,
00:49:25 sans l'IA. - Il y a 30 ans. - Exactement.
00:49:27 Et de la même manière, je pense que beaucoup de choses qui étaient
00:49:29 inexistantes et infaisables auparavant deviennent
00:49:31 possibles maintenant, en fait. - Et votre étudiant
00:49:33 pourra faire ce film dans sa chambre
00:49:35 avec une IA qui lui racontera en plus
00:49:37 même le scénario, et il pourra
00:49:39 faire jouer dedans Lino Ventura
00:49:41 ou Brad Pitt. - Exactement. - Je pensais qu'aujourd'hui,
00:49:43 on peut faire des photos très réalistes
00:49:45 de Donald Trump.
00:49:47 - Ce qui ne veut pas dire qu'il ne sera pas le créateur non plus, parce qu'il aurait
00:49:49 quand même eu une vision, il aurait quand même su quoi choisir.
00:49:51 En fait, il aurait été un réalisateur, c'est-à-dire qu'il fait le choix
00:49:53 de ce qu'il prend ou ce qu'il ne prend pas.
00:49:55 - Oui, sans juste être emmerdé par la direction. - Exactement.
00:49:57 Et en plus, ça veut dire qu'en fait,
00:49:59 au lieu de coordonner des équipes entières dans un studio,
00:50:01 il coordonne des IA.
00:50:03 Mais après tout, c'est très bien. Ça veut dire qu'on n'a
00:50:05 plus besoin d'être Disney pour pouvoir
00:50:07 produire de la culture... - Il n'y aura plus de réalisateur,
00:50:09 il y aura un producteur comme du temps
00:50:11 de Hollywood. - Et qui aura la vision artistique, donc.
00:50:13 C'est ça qui compte, finalement. - C'était ça, Hollywood, il avait le broyet.
00:50:15 Mais au même moment où on aura tout ça,
00:50:17 donc où il n'y aura plus de réalisateur, plus d'acteur,
00:50:19 tout ça, il y aura toujours des serveurs
00:50:21 et des femmes de ménage. - Ça, c'est le paradoxe.
00:50:23 - Parce qu'elles, on ne peut pas, elles ou lui,
00:50:25 on ne peut pas, pour l'instant,
00:50:27 en tout cas, on ne peut pas les remplacer par de l'IA.
00:50:29 - Je suis d'accord avec Roran Alexandre que ça va arriver, quand même.
00:50:31 - Ils sont meilleurs que ça. - En fait, ce qui manque
00:50:33 principalement aujourd'hui, c'est que les IA
00:50:35 dont on parle aujourd'hui, ce sont des modèles de langage
00:50:37 qui sont entraînés que sur du langage, ce qui est
00:50:39 déjà énorme. On voit à quel point c'est efficace.
00:50:41 Mais il y a toute la partie aussi de la vision. Nous,
00:50:43 en tant qu'être humain, on parle, on pense, mais on voit aussi.
00:50:45 Et après, on touche. Mais la vision,
00:50:47 c'est une autre partie du champ de la recherche en IA.
00:50:49 Il y a un chercheur français très connu qui est Yann Lequin
00:50:51 pour qui l'avenir
00:50:53 de l'IA, ce sera aussi par la vision.
00:50:55 Et donc là, ça permettra de faire des choses
00:50:57 comme des manipulations d'objets dans l'espace.
00:50:59 Et donc ça va être aussi une manière d'aborder
00:51:01 la robotique et à la fin, de finir par
00:51:03 permettre d'automatiser beaucoup plus de tâches encore.
00:51:05 - Claire Mathieu, là-dessus ?
00:51:07 - Je pense aux tondeuses.
00:51:09 Vous savez, les tondeuses qui tondent toutes seules ?
00:51:11 - Oui.
00:51:13 - Après tout, c'est un premier pas.
00:51:15 - C'est un tout petit pas par rapport à quelqu'un
00:51:17 qui est capable de nettoyer
00:51:19 des verres très précieux,
00:51:21 des objets précieux,
00:51:23 de voir des poussières là où personne n'en voit.
00:51:25 - De jardiner en désherbant,
00:51:27 en distinguant la mauvaise herbe
00:51:29 de la bonne plante. Oui, c'est vrai.
00:51:31 C'est vrai. Non, je pense que
00:51:33 il y a plutôt des questions.
00:51:35 Pour moi, dans l'immédiat, ce qui se pose
00:51:37 c'est des questions de responsabilité.
00:51:39 Qui est responsable s'il y a un problème ?
00:51:41 C'est plus un obstacle, ça.
00:51:43 Et puis,
00:51:45 oui,
00:51:47 des questions de bon sens,
00:51:49 de responsabilité,
00:51:51 et puis,
00:51:53 le fait qu'on ait besoin
00:51:55 de présence humaine.
00:51:57 Il y a une partie des tâches.
00:51:59 Par exemple, une auxiliaire de vie
00:52:01 dans une maison de retraite
00:52:03 qui va aider à faire la toilette d'un résident.
00:52:05 Évidemment,
00:52:07 il a besoin que sa toilette soit faite,
00:52:09 mais il a aussi besoin du contact humain.
00:52:11 - Oui, mais ça, aujourd'hui,
00:52:13 comme disait Raphaël Dohade tout à l'heure,
00:52:15 des gens commencent à tomber amoureux
00:52:17 de leur intelligence artificielle.
00:52:19 Il n'est pas dit qu'il n'y a pas des gens
00:52:21 déjà amoureux de Chad Gpt,
00:52:23 qui est très poli, très gentil.
00:52:25 Quand il nous répond, il est franchement adorable.
00:52:27 - Tout à fait. Adorable.
00:52:29 Et on lui demande de faire une multiplication,
00:52:31 il se trompe.
00:52:33 - Oui.
00:52:35 Je ne reviens pas sur ce que j'ai déjà dit
00:52:37 sur l'intelligence artificielle générale.
00:52:39 Je me contente de constater qu'elle n'existe pas.
00:52:41 Les débats éthiques qu'on peut avoir
00:52:43 sont déjà largement disponibles
00:52:45 dans des magnifiques romans de science-fiction.
00:52:47 On peut déjà les consulter.
00:52:49 "I, robot, le méchant est une intelligence
00:52:51 artificielle générale maléfique".
00:52:53 "Asimov, il y a toute une littérature".
00:52:55 On a déjà largement de quoi faire,
00:52:57 mais ça reste de la science-fiction.
00:52:59 "The Singularity is near",
00:53:01 de Kurzweil.
00:53:03 Il avait dit que c'était bientôt,
00:53:05 mais on n'y est toujours pas.
00:53:07 C'est là-dessus que je voudrais revenir.
00:53:09 L'intelligence artificielle générale,
00:53:11 elle n'existe toujours pas.
00:53:13 Pendant ce temps-là,
00:53:15 les conséquences multiples
00:53:17 des intelligences artificielles spécialisées
00:53:19 qui, elles, existent et sont en train
00:53:21 de se développer très vite,
00:53:23 on en débat pas assez. On débat trop d'un truc
00:53:25 qui n'existe pas encore.
00:53:27 On ne s'intéresse pas encore assez
00:53:29 aux conséquences. Par exemple,
00:53:31 le système éducatif français, partout dans le monde,
00:53:33 repose sur la capacité
00:53:35 sur la mémoire,
00:53:37 la récitation, la rédaction,
00:53:39 sur ce genre de choses.
00:53:41 Beaucoup, à l'heure actuelle.
00:53:43 - Des choses qui vont être datées très vite.
00:53:45 - Ces choses-là, elles sont datées.
00:53:47 Comment on réinvente le système éducatif
00:53:49 tout entier à l'aune de cette nouveauté ?
00:53:51 C'est un débat qu'on n'a quasiment pas.
00:53:53 Je vous prends un autre exemple.
00:53:55 Il y a un certain nombre de tâches administratives
00:53:57 pour lesquelles, dans le public mais aussi dans le privé,
00:53:59 on ne va plus avoir besoin d'un certain nombre
00:54:01 de, comme disait l'auteur...
00:54:03 - Que disait Clermetieu.
00:54:05 - Par exemple, je ne peux pas vous citer
00:54:07 un domaine d'activité humaine dans lequel
00:54:09 il n'y ait pas au moins un ou deux trucs très importants
00:54:11 qui ne seraient pas faisables par des intelligences
00:54:13 artificielles, entendez-moi bien, spécialisées.
00:54:15 Et qui ne vont toujours pas
00:54:17 prendre des initiatives, nous dominer.
00:54:19 Non, c'est des conneries.
00:54:21 Et ça, c'est dommage
00:54:23 qu'on ne s'y prépare pas assez
00:54:25 parce qu'en fait, c'est comme la machine à vapeur
00:54:27 inventée il y a trois plombes,
00:54:29 ça ne va pas arriver tout seul, ça ne tombe pas du ciel
00:54:31 les grandes révolutions technologiques et industrielles
00:54:33 et sociétales. A un moment donné,
00:54:35 il faut s'y mettre. Et les pays, les sociétés,
00:54:37 les entreprises qui seront les premières
00:54:39 à se dire "Tiens, si j'appliquais
00:54:41 ces intelligences artificielles spécialisées dans tel domaine",
00:54:43 vont permettre à l'humanité de progresser
00:54:45 en réalité. Et donc, je trouve que c'est dommage
00:54:47 qu'on n'ait pas davantage ces conversations-là
00:54:49 plutôt que "Est-ce que
00:54:51 la gigantesque intelligence artificielle
00:54:53 divine et tentaculaire va tous nous dominer ?"
00:54:55 Ce qui, pour moi, est une vue de l'esprit.
00:54:57 Dernier mot, une minute chacun,
00:54:59 une minute pour Laurent-Alexandre.
00:55:01 Je suis tout à fait d'accord
00:55:03 avec Thomas Hedgé-Nolet. Il est dramatique
00:55:05 que la société française ne s'occupe pas
00:55:07 des problèmes d'adaptation à l'intelligence
00:55:09 artificielle spécialisée et
00:55:11 que le ministère de l'Éducation
00:55:13 ne s'occupe toujours pas d'adapter
00:55:15 l'éducation nationale
00:55:17 à nos gamins face à HGPT.
00:55:19 Mais sur les problèmes d'attachement
00:55:21 à l'intelligence artificielle dont parlait
00:55:23 Raphaël Dohan tout à l'heure,
00:55:25 je pense qu'il faut y penser très sérieusement.
00:55:27 En tant que médecin, je suis un peu
00:55:29 affolé qu'un de mes amis,
00:55:31 qui est l'un des meilleurs astrophysiciens
00:55:33 français, me disait
00:55:35 récemment, "Tu sais,
00:55:37 je préfère parler à GPT-4
00:55:39 qu'à mes amis."
00:55:41 Oui, il va y avoir des attachements pathologiques
00:55:43 à l'intelligence artificielle,
00:55:45 ça risque d'occuper les psychiatres,
00:55:47 et il faut qu'on réfléchisse aux relations
00:55:49 humaines entre l'intelligence artificielle
00:55:51 et les hommes, parce que
00:55:53 l'intelligence artificielle fait des progrès
00:55:55 extraordinaires,
00:55:57 les patients trouvent qu'elle est plus empathique
00:55:59 que les médecins, cela veut dire
00:56:01 que demain, il y a beaucoup de gens
00:56:03 qui vont préférer les robots
00:56:05 aux humains, et ça c'est un
00:56:07 problème social, au-delà même du problème
00:56:09 psychiatrique. - Merci Laurent.
00:56:11 Laetitia Pliken,
00:56:13 dernier mot.
00:56:15 - C'est une bonne transition,
00:56:17 ce qui vient d'être dit,
00:56:19 pour ce que j'avais envie
00:56:21 de dire en mode de conclusion.
00:56:23 On va tous être des addicts, je pense,
00:56:27 je pense qu'il va falloir
00:56:29 qu'on se prémunisse contre l'addiction,
00:56:31 et je pense qu'il est
00:56:33 très important, et ça c'est
00:56:35 toujours ma perspective éthique,
00:56:37 de réfléchir, et de
00:56:39 garder en ligne de mire ce qui nous
00:56:41 différencie de la machine, et en d'autres
00:56:43 termes, que dire
00:56:45 de l'homme, qu'est-ce qui nous différencie,
00:56:47 qu'est-ce qui fait de nous ce que
00:56:49 nous sommes. Donc là,
00:56:51 la dignité des robots, dont tu avais parlé à Zimov,
00:56:53 qui a essayé de mettre sur le papier
00:56:55 Alain Bensoussan avec son
00:56:57 association de défense des robots, etc.,
00:56:59 l'avènement éventuellement des IA
00:57:01 généralisées ou IA fortes, tout ça,
00:57:03 ça doit être mis à l'aune
00:57:05 de qu'est-ce que ça signifie d'être
00:57:07 une personne humaine, quelles sont les relations
00:57:09 qu'on veut favoriser,
00:57:11 et comment se
00:57:13 dresser, j'allais dire s'auto-dresser,
00:57:15 comment faire en sorte que nos enfants aient
00:57:17 cette capacité, cette analyse critique
00:57:19 de prendre
00:57:21 cette distance nécessaire.
00:57:23 Merci à tous les deux. Dernier mot
00:57:25 très rapide de Raphaël Dohen.
00:57:27 Finalement, le principal risque de l'IA,
00:57:29 ce serait qu'on la dédaigne un peu bêtement,
00:57:31 alors qu'en fait, je pense qu'il faut que tout le monde s'en saisisse,
00:57:33 tout le monde la pratique, pour que
00:57:35 chacun sache comment ça marche, chacun sache l'utiliser
00:57:37 à bon escient, parce que ça va devenir assez
00:57:39 omniprésent, au fond, et que le seul
00:57:41 danger, ce serait de mal la comprendre, de mal l'utiliser,
00:57:43 ou de laisser les autres l'utiliser,
00:57:45 soit à notre place, soit contre nous.
00:57:47 Merci, je vous libère,
00:57:49 Raphaël, je libère également
00:57:51 Laetitia Poulikène et
00:57:53 Laurent Alexandre. C'est le
00:57:55 rappel des titres, Mickaël Dos Santos,
00:57:57 et après on va s'intéresser à la
00:57:59 NUPES qui fête son premier
00:58:01 anniversaire.
00:58:03 Manifestation contre un projet
00:58:07 autoroutier à Rouen, un millier de
00:58:09 personnes s'étaient donné rendez-vous pour protester
00:58:11 contre ce chantier qui a pour but de
00:58:13 contourner la partie Est de la ville Normande.
00:58:15 L'événement a été organisé par
00:58:17 les Soulèvements de la Terre, association dont
00:58:19 le gouvernement envisage la dissolution
00:58:21 après les affrontements de Sainte-Sauline.
00:58:23 À la France, réagit au
00:58:25 couronnement de Charles III. Sur Twitter,
00:58:27 Emmanuel Macron a félicité le roi
00:58:29 britannique et la reine Camilla, et
00:58:31 salué des amis de la France.
00:58:33 Jean-Luc Mélenchon, lui, s'est montré plus critique.
00:58:35 Depuis Marseille, le leader des
00:58:37 insoumis a regretté les sirops dégoûtants
00:58:39 de la monarchie, alors que tant de
00:58:41 monde vit dans la misère.
00:58:43 Et puis, l'hymne national britannique,
00:58:45 désormais intitulé "God Save the King",
00:58:47 déjà sifflé. Lors d'une rencontre
00:58:49 du championnat anglais, des supporters de
00:58:51 Liverpool ont copieusement hué lors de la
00:58:53 rencontre face à Brentford.
00:58:55 Cela est toujours le cas, les Reds de
00:58:57 Liverpool n'ont jamais pardonné à la couronne.
00:58:59 La répression des mineurs et la gestion
00:59:01 de la catastrophe dans le stade d'Hillborough,
00:59:03 survenue dans les années 80.
00:59:05 (musique)
00:59:07 (musique)
00:59:09 (musique)
00:59:11 Bienvenue, si vous nous rejoignez maintenant,
00:59:13 les visiteurs du soir, c'est jusqu'à
00:59:15 minuit, Serge Bellu
00:59:17 va arriver,
00:59:19 il sort un beau livre,
00:59:21 illustré, consacré à la 4L,
00:59:23 ça a été une page glorieuse de l'histoire
00:59:25 de l'automobile en France, la 4L.
00:59:27 Il va nous raconter pourquoi,
00:59:29 à 23h30,
00:59:31 l'amitié l'informaticienne Claire Mathieu
00:59:33 nous accompagne depuis le début
00:59:35 de l'émission, vous êtes membre de l'académie
00:59:37 des sciences, vous avez occupé la chaire
00:59:39 informatique et sciences numériques au
00:59:41 collège de France,
00:59:43 le politologue Thomas Guénolé
00:59:45 aussi est là depuis le début, vous êtes
00:59:47 l'auteur de "La fin des haricots" en
00:59:49 2017, vous avez rallié la France
00:59:51 insoumise, le parti de Jean-Luc Mélenchon,
00:59:53 vous avez claqué la porte au bout de deux
00:59:55 ans, je donne tous ces détails parce que l'on
00:59:57 va parler de la NUPES, qui
00:59:59 fête son premier anniversaire, et de Jean-Luc
01:00:01 Mélenchon, alors j'attends Gérard Filoche
01:00:03 qui devrait être déjà sur ce
01:00:05 studio, à côté de nous
01:00:07 dans ce studio,
01:00:09 la gauche il la connaît bien,
01:00:11 Gérard Filoche,
01:00:13 parce qu'il y milite depuis toujours, au parti
01:00:15 communiste d'abord, venez
01:00:17 asseyez-vous Gérard,
01:00:19 entrez,
01:00:21 asseyez-vous,
01:00:23 le deuxième siège, voilà, et Serge Bellu,
01:00:25 vous allez vous mettre là,
01:00:27 donc j'étais en train de
01:00:29 vous présenter, je disais Serge Bellu,
01:00:31 asseyez-vous, Gérard, j'étais
01:00:33 en train de dire que la gauche, vous la connaissez bien,
01:00:35 puisqu'on va parler de l'union de la gauche, vous avez
01:00:37 été au parti communiste
01:00:39 quand vous étiez jeune,
01:00:41 à la LCR pendant 25 ans
01:00:43 ensuite, quand vous étiez Trotskiste, puis vous avez été au
01:00:45 bureau national du parti socialiste pendant
01:00:47 5 ans, 5 ans avant de fonder
01:00:49 la gauche démocratique et sociale,
01:00:51 15 ans au parti socialiste à la direction,
01:00:53 je suis rentré en 1994 et je suis parti
01:00:55 en 2018, ah oui, bien plus que je croyais,
01:00:57 ma première carte CGT est en 1963,
01:00:59 voilà, donc vous connaissez toutes
01:01:01 les branches, qu'ai-je dit, de la NUP, dont vous faites
01:01:03 partie maintenant avec la gauche démocratique et sociale,
01:01:05 vous appartenez au bloc de la
01:01:07 France insoumise, dont la NUP est ce qui est né
01:01:09 il y a un an exactement, c'est
01:01:11 Jean-Luc Mélenchon, fort de ses 22%
01:01:13 de voix au premier tour de l'élection présidentielle,
01:01:15 qui a réuni autour de la France insoumise
01:01:17 les écologistes, le parti communiste
01:01:19 et le parti socialiste en vue des
01:01:21 législatives, ce qui a permis à l'union de la gauche
01:01:23 d'obtenir 151 sièges
01:01:25 à l'Assemblée nationale, mais aujourd'hui,
01:01:27 un an après, Jean-Luc Mélenchon semble
01:01:29 irrité de plus en plus
01:01:31 ses alliés
01:01:33 qu'il accuse pour un certain nombre d'entre eux
01:01:35 d'être un boulet, alors est-ce que vous pouvez nous
01:01:37 expliquer pourquoi, vous qui êtes de gauche,
01:01:39 je n'ai pas invité de gens de droite
01:01:41 pour en débattre, parce que
01:01:43 ce sont les électeurs de gauche que ça concerne,
01:01:45 ceux qui voudraient que la gauche arrive au pouvoir
01:01:47 en 2027, alors c'est quoi le
01:01:49 problème avec Jean-Luc Mélenchon,
01:01:51 Thomas Guénolé ?
01:01:53 Je m'empresse de préciser pour les gens qui nous regardent
01:01:55 et qui seraient des sympathisants à l'FI et qui
01:01:57 se diraient "qu'est-ce que c'est que ce scandale de le faire parler lui
01:01:59 alors qu'il a eu des
01:02:01 conflits avec Jean-Luc Mélenchon
01:02:03 et avec son premier cercle,
01:02:05 alors je vous parle, moi je n'ai plus de conflits
01:02:07 du tout avec Jean-Luc Mélenchon,
01:02:09 on a eu un échange de SMS à ce sujet
01:02:11 encore il y a deux semaines, donc on n'est pas
01:02:13 dans ce registre-là, de l'animosité ou quoi que ce soit.
01:02:15 Donc,
01:02:17 Jean-Luc Mélenchon, si on considère
01:02:19 l'électorat de gauche, encore aujourd'hui, on a
01:02:21 des gens qui sont de gauche antisystème,
01:02:23 ils veulent changer le système
01:02:25 actuel, le remplacer par autre chose, et puis on a
01:02:27 des gens qui sont démodérés, donc c'est,
01:02:29 en d'autres termes, c'est la vieille distinction entre les révolutionnaires
01:02:31 et les réformistes. Aujourd'hui, on dirait
01:02:33 plutôt les antisystèmes et les
01:02:35 modérés, mais c'est la même chose. Et donc,
01:02:37 Jean-Luc Mélenchon, il est excellent, vraiment excellent
01:02:39 pour unifier l'électorat de gauche antisystème,
01:02:41 mais
01:02:43 quand il essaie de faire
01:02:45 le plein des modérés grâce au phénomène de vote
01:02:47 utile, le problème qui se pose, c'est qu'il
01:02:49 n'arrive pas à faire complètement le plein
01:02:51 parce que c'est quelqu'un qui
01:02:53 conflictualise et antagonise
01:02:55 beaucoup, attention, à l'intérieur
01:02:57 de la gauche. Qu'il conflictualise
01:02:59 avec la droite, le patronat, qui vous voulez,
01:03:01 les cibles habituelles pour l'électorat de gauche,
01:03:03 ça ne pose pas de problème, mais il
01:03:05 antagonise beaucoup, en fait,
01:03:07 tous azimuts, et donc y compris
01:03:09 vis-à-vis de cibles de gauche.
01:03:11 Il a eu des relations conflictuelles avec beaucoup
01:03:13 de sensibilité de gauche. Mais il est quand même arrivé à les réunir
01:03:15 tous autour de lui. Oui, mais à leur
01:03:17 corps défendant, déjà, premier point, et ensuite,
01:03:19 à chaque fois, il lui manque pas grand-chose,
01:03:21 et ce pas grand-chose qui manque, c'est
01:03:23 "oui, j'aimerais bien voter utile à gauche,
01:03:25 mais Jean-Luc Mélenchon, en gros, il est trop conflictuel
01:03:27 pour moi". C'est cette branche-là qui
01:03:29 n'est pas là, et donc, à mon avis,
01:03:31 puisque votre question, c'est l'avenir de la lupesse...
01:03:33 D'abord, c'est quoi le problème avec Jean-Luc Mélenchon ?
01:03:35 Voilà, il me semble que le problème qui est
01:03:37 posé par Jean-Luc Mélenchon, c'est pas du tout
01:03:39 que ce soit un croque-mitaines ou
01:03:41 quoi que ce soit, c'est juste la dernière marche.
01:03:43 Ce qui pose problème, c'est
01:03:45 aller chercher les derniers plus modérés
01:03:47 dans un contexte où...
01:03:49 J'ai noté,
01:03:51 ces stables de 81 à
01:03:53 2012, en gros, la gauche,
01:03:55 les grands candidats de gauche, ensemble, font
01:03:57 à peu près 40%, même en 2002,
01:03:59 tous ensemble, ça fait 40%.
01:04:01 Et au premier tour de 2017,
01:04:03 Mélenchon + Samon, ça fait 26%. Qu'est-ce qui s'est passé ?
01:04:05 Il s'est passé qu'il y a 15 points
01:04:07 de gauche modérée, la plus
01:04:09 modérée, qui se sont barrés
01:04:11 vers le centre, et ça a donné Macron.
01:04:13 Et donc, c'est vraiment une
01:04:15 hémorragie d'électorat modéré, qui
01:04:17 explique que la gauche, qui historiquement pesait 40
01:04:19 depuis 40 ans,
01:04:21 s'est retrouvée à peser plus que 26.
01:04:23 Ce qui a pour conséquence, d'ailleurs, qu'elle doit être
01:04:25 unie, pour espérer être au second tour. Quand vous faites
01:04:27 26, il n'y a pas d'autre moyen.
01:04:29 Alors, l'avis de Gérard Filoche ?
01:04:31 Euh... Il n'y a pas de problème,
01:04:33 Mélenchon.
01:04:35 Il y a un problème d'unité de la gauche,
01:04:37 comme dans toute son histoire, comme en
01:04:39 36, comme en 45, comme
01:04:41 après 68, comme en 81.
01:04:43 Moi, je ne pars pas des
01:04:45 bons hommes, si je peux me permettre. Je vous en prie.
01:04:47 Je pars de la classe sociale qu'ils sont censés
01:04:49 représenter.
01:04:51 En 36, le salariat, c'était
01:04:53 quoi ? Il était minoritaire.
01:04:55 9 millions de salariés.
01:04:57 Aujourd'hui, le salariat, c'est 30 millions
01:04:59 de salariés. 90%
01:05:01 des actifs.
01:05:03 C'est ce qui explique le mouvement qu'on a
01:05:05 depuis janvier. Parce que si on a des
01:05:07 millions de manifestants, c'est parce que le salariat
01:05:09 s'est développé. D'ailleurs,
01:05:11 ça explique les luttes contre la loi El Khomri,
01:05:13 ça explique les luttes pour la défense de
01:05:15 la SNCF, ça explique celles pour la défense
01:05:17 du Code du Travail, ça explique aussi les Gilets jaunes.
01:05:19 C'est la partie peut-être basse, c'est pas insultant
01:05:21 de ce que je dis, du salariat, mais
01:05:23 elle a bougé, elle a même poussé le reste.
01:05:25 Et la gauche,
01:05:27 c'est l'expression du salariat.
01:05:29 Avec ses nuances, il est
01:05:31 plus réaliste. Donc la nuance,
01:05:33 elle est fière de sa place, le Parti
01:05:35 socialiste, à sa place, le Parti
01:05:37 communiste, là encore. Et puis
01:05:39 il y a les Verts, qui n'existent
01:05:41 pas quand ils sont pas à gauche.
01:05:43 Alors, est-ce qu'il y a
01:05:45 réformistes et révolutionnaires ? Moi je suis de
01:05:47 cette école qu'ils ne les opposent pas.
01:05:49 – Je n'ai pas dit qu'ils étaient opposés, ce sont deux
01:05:51 tempéraments différents. – Je ne cherche pas le débat.
01:05:53 – Compli, je vous en prie. – Je n'ai pas de compli.
01:05:55 Non, non, je dis que
01:05:57 réformisme et révolution, ça ne s'oppose pas, contrairement
01:05:59 à ce qu'on croit très souvent. – Non, c'est complémentaire.
01:06:01 – On dit, il y a des syndicats réformistes, il y a des syndicats
01:06:03 révolutionnaires, il y a des syndicats qui ne viendront jamais.
01:06:05 Ben si, par exemple, la CDT… – C'est comme gentil flic, méchant flic.
01:06:07 – Oui, la CDT est venue dans le mouvement
01:06:09 et l'intersyndical est un exemple
01:06:11 de la force du salariat actuel.
01:06:13 Et il y a des gens qui sont
01:06:15 très révolutionnaires mais qui, dans ces circonstances,
01:06:17 se révèlent très réformistes.
01:06:19 Puis il y a des gens qu'on croit réformistes, ils se révèlent très révolutionnaires.
01:06:21 En fait, c'est la force du mouvement
01:06:23 social qui en décide.
01:06:25 Et donc, ce mouvement
01:06:27 social, il traverse tout. La LFI,
01:06:29 vous avez des gens très divers.
01:06:31 – Oui.
01:06:33 – Le PC, je suis assisté à son congrès,
01:06:35 il y a au moins 4-5 positions.
01:06:37 C'est très divers aussi,
01:06:39 contrairement à ce que souvent on croit.
01:06:41 Et puis, le PS,
01:06:43 alors, j'en suis… comment vous dire ?
01:06:45 Je suis mieux avec le premier secrétaire
01:06:47 du Parti Socialiste aujourd'hui
01:06:49 que ce que j'ai été pendant 25 ans au PS
01:06:51 avec les secrétaires de l'époque.
01:06:53 Il y avait un débat dans le PS aussi, bien sûr.
01:06:55 Moi, j'ai participé,
01:06:57 j'ai représenté la gauche socialiste,
01:06:59 on a atteint jusqu'à 30%.
01:07:01 Et comme ils trichaient un peu sur les votes, c'était sûrement plus.
01:07:03 – À peine si peu.
01:07:05 – C'était sûrement plus. Mais dans le PS,
01:07:07 il y a toujours aussi une gauche radicale
01:07:09 qu'on ne pouvait pas classer comme réformiste.
01:07:11 – Tout à fait.
01:07:13 – Et celle-ci, quelque part, après,
01:07:15 je vais dire un grand mot,
01:07:17 mais c'est le seul qui correspond à la situation,
01:07:19 après la trahison de Hollande,
01:07:21 parce que le quinquennat maudit
01:07:23 en 100 ans de PS,
01:07:25 c'est Hollande-Valls-Caseneuve.
01:07:27 Ils arrivent quand même à faire
01:07:29 le CICE, la déchéance de nationalité,
01:07:31 la loi El Khomri,
01:07:33 la hausse de la TVA,
01:07:35 la loi Touraine contre les retraites.
01:07:37 Enfin, c'est un festival de trahison.
01:07:39 – Hollande a été fidèle à ses convictions,
01:07:41 il disait déjà qu'il fallait faire ça dans les années 80.
01:07:43 – Vous voulez dire que c'est là
01:07:45 que le parti socialiste a dégringolé
01:07:47 dans les intentions de vote ?
01:07:49 – Hollande, il est encore derrière les voix d'Hidalgo,
01:07:51 à 1,70%,
01:07:53 et Caseneuve qui veut faire une force nouvelle,
01:07:55 il fait à peine la moitié des 1,70%.
01:07:57 – Mais vous voyez bien qu'aujourd'hui,
01:07:59 on est à une autre époque,
01:08:01 Gérard Filoche,
01:08:03 et l'époque aujourd'hui, c'est qu'il y a un homme
01:08:05 qui a fait 22% lui,
01:08:07 aux dernières élections présidentielles,
01:08:09 et qui a réussi à rassembler autour de lui toutes les…
01:08:11 – Oui mais c'est ce que je… – Il a fait l'union de la gauche
01:08:13 qu'on n'avait pas fait depuis… – Vous anticipez
01:08:15 tout ce que j'essayais de dire sur la façon de la NUPES.
01:08:17 Moi j'étais pour la NUPES avant la NUPES.
01:08:19 – Mais il y en a plein qui étaient pour la NUPES avant la NUPES,
01:08:21 mais ils ne voulaient pas que ce soit Mélenchon le chef.
01:08:23 – Mais moi je n'avais pas de soucis,
01:08:25 même Olivier Faure n'avait pas de soucis avec ce sujet.
01:08:27 En 2019 à Blois, Olivier Faure dit,
01:08:29 ça peut être Mélenchon le candidat s'il est unitaire.
01:08:35 Il proposait même d'avoir une plateforme commune,
01:08:37 ce qui s'est fait avec le programme de la NUPES l'année dernière.
01:08:39 – Oui, ça n'est pas un programme commun.
01:08:41 – Bien sûr, et il disait que ce programme
01:08:43 pourrait être soumis à des débats populaires.
01:08:45 – Aujourd'hui, ils ont des doutes sur le fait qu'il soit unitaire.
01:08:47 On l'entend dire beaucoup chez ses alliés,
01:08:49 ils pensent qu'à lui, au fond, il ne veut pas faire de compromis.
01:08:53 – Mais ce n'est pas une histoire de compromis,
01:08:55 puisque le programme de la NUPES, c'est vraiment un excellent programme.
01:08:59 Vous avez dedans la retraite à 60 ans,
01:09:01 vous n'avez pas plus de 5% de non-CDI par entreprise.
01:09:05 – L'augmentation du SMIC aussi.
01:09:07 – L'augmentation du SMIC, elle est à 600 euros net et 2000 brut.
01:09:09 – Donc là vous êtes en train de nous dire qu'il n'y a aucun problème, tout roule.
01:09:12 – Non, ce n'est pas ça.
01:09:14 Je vous décris pourquoi il y a une force puissante du salariat qui pousse,
01:09:18 et là il faut y répondre.
01:09:20 Franchement, l'intersyndical a donné un exemple tellement exemplaire quelque part.
01:09:25 On se demande pourquoi la NUPES, en ce moment,
01:09:27 ne réunit pas des foules à Bercy ou sur le Parc des Princes.
01:09:31 Parce qu'en vérité, ça devrait être la traduction politique
01:09:35 du mouvement social qu'on vient d'avoir, et ça ne l'est pas.
01:09:38 Et j'ai eu l'occasion, en mettant un meeting avec nos amis de génération,
01:09:42 de dire qu'il faut arrêter les bisbilles.
01:09:45 Parce que le fond, c'est les bisbilles.
01:09:48 Tantôt, c'est le porte-parole du PC, tantôt c'est Mélenchon,
01:09:54 tantôt c'est les Verts, et en ce moment pas le PS.
01:09:58 Mais à l'intérieur du PS, il y a des opposants qui se font entendre durement.
01:10:02 Et qu'est-ce qu'il y a besoin ? Il y a besoin d'une unité dynamique.
01:10:06 Il faut arrêter les bisbilles.
01:10:08 Il faut faire qu'il y ait des agora partout, dans tous les départements,
01:10:12 que les gens se rendent compte à la hauteur de l'événement.
01:10:14 Parce que si on va, si le calendrier va jusqu'en 26 et 27, 24, 26, 27,
01:10:21 calendrier électoral j'entends, il faut s'y préparer maintenant.
01:10:25 Et sinon c'est l'Open.
01:10:27 – Et bien voilà, c'est la phase 2, normalement de la NUPES,
01:10:30 qui devrait là préparer les élections européennes, dans trois ans.
01:10:35 – Et il n'y aura pas de NUPES, enfin il n'y aura pas de liste unique.
01:10:38 – Je ne suis pas d'accord.
01:10:40 – Je ne dis pas que… Vous n'êtes pas d'accord avec le constat
01:10:44 ou vous trouvez qu'il faudrait faire différemment ?
01:10:46 – Les deux.
01:10:47 – Parce que les Verts ont déjà dit…
01:10:49 – Les Verts ont déjà dit non.
01:10:51 – Les Verts pensent qu'ils feront 12, 15 tout seuls.
01:10:54 – Juste.
01:10:55 – Les Verts pensent qu'ils feront 12, 15 tout seuls.
01:10:57 – C'est leur élection, les Verts.
01:10:58 – Comme d'habitude.
01:10:59 – Voilà.
01:11:00 Leur calcul c'est qu'ils auront plus d'élus tout seuls
01:11:02 que dans une liste d'Union de la gauche.
01:11:04 Là je ne vous parle pas de grands idéaux,
01:11:05 là je vous parle de Popol franchement crade, mais c'est comme ça.
01:11:08 Et donc ils auraient même une possibilité d'être encore une fois
01:11:12 en tête des listes de gauche, pas en tête des listes tout court,
01:11:15 mais en tête des listes de gauche aux européennes.
01:11:17 Et dans la façon de raisonner de ces gens-là,
01:11:20 c'est des politiciens professionnels,
01:11:23 dans la façon de raisonner de ces gens-là,
01:11:25 ça vous met en position de force pour négocier les listes d'Union de la gauche
01:11:29 au municipal de 2026.
01:11:31 C'est ce genre de calcul tout à fait boutiquier
01:11:34 dont les partis politiques professionnalisés sont absolument coutumiers.
01:11:38 Et donc les Verts partent dans ce calcul-là,
01:11:40 et donc non il n'y aura pas de listes d'Union de la NUPES aux européennes.
01:11:44 Et derrière il y aura peut-être des listes d'Union au municipal.
01:11:47 – Mais les sondages de la gauche disent
01:11:49 76% des électeurs de gauche sont pour une liste unique.
01:11:52 – Ah je ne le conteste pas, mais c'était déjà le cas aux européennes d'avant
01:11:55 et aux européennes d'avant et aux européennes d'avant.
01:11:57 – C'est pour ça que j'étais pour la NUPES avant la NUPES,
01:11:59 c'est ce que Jean-Luc Mélenchon, il avait les filles,
01:12:01 il aurait pu faire la unité dès 2017.
01:12:03 Il ne fallait pas dire qu'il y avait deux gauches, c'est réconciliable,
01:12:06 ça n'a jamais été le cas, c'est toujours réconciliable,
01:12:09 même entre marchés, Mitterrand ça l'était.
01:12:11 Et on a vu des choses encore plus pires dans le passé
01:12:14 où le PC, qu'on disait lié à Moscou,
01:12:17 a fait l'alliance avec le PS qu'on disait Atlantique, ça s'est fait.
01:12:20 Donc les divergences actuelles en fait dans la NUPES…
01:12:22 – Mais je ne vous ai pas parlé de fond là,
01:12:24 moi je vous parle uniquement d'intérêt boutiquier, électoraliste,
01:12:27 qui est un moteur assez puissant d'explication des phénomènes de la NUPE.
01:12:30 – Je vous interromps parce que je voudrais poser la question à Claire Mathieu,
01:12:33 en tant qu'électrice de gauche, je ne sais pas où vous vous situez,
01:12:36 mais je sais que vous êtes une électrice de gauche, à priori.
01:12:39 Est-ce que tout ça aujourd'hui vous préoccupe,
01:12:42 à savoir le fait que Jean-Luc Mélenchon a l'air de poser problème
01:12:47 à certains nombres de ses alliés,
01:12:49 à savoir s'il y aura une liste unique à la présidentielle,
01:12:53 enfin d'abord à l'européenne, et surtout un candidat unique à la présidentielle
01:12:58 qui serait, à priori on se dit, le seul moyen d'arriver au deuxième tour
01:13:02 face à Marine Le Pen et éventuellement de l'abattre ?
01:13:06 – Oui, moi à vrai dire je ne fais pas de politique,
01:13:10 moi je me contente de suivre, donc le moment venu je voterai
01:13:13 pour le candidat de gauche ou la candidate de gauche
01:13:16 qui aura le plus de chances de l'emporter, peu importe laquelle.
01:13:20 – Voilà, que ce soit Jean-Luc Mélenchon ou Poggi de Mélenchon c'est pareil.
01:13:23 – N'importe, en fait je pense par ma classe sociale,
01:13:25 on a parlé de ça tout à l'heure, je devrais être plutôt de droite,
01:13:27 mais en fait je suis de gauche en tant qu'humaniste,
01:13:31 disons parce que je mets…
01:13:33 – On dirait une chercheuse au CNRS aussi, il paraît qu'il y a beaucoup de gens de gauche.
01:13:36 – Parce que je mets, disons, je trouve que l'être humain est plus important que l'argent,
01:13:40 donc je voudrais que tous les programmes soient pensés d'abord en fonction des humains
01:13:44 et qu'ensuite on réfléchisse aux problèmes de budget.
01:13:47 Bon, donc les idées c'est ça qui m'intéresse plus que les personnes,
01:13:50 donc Mélenchon ou un autre, peu importe.
01:13:52 – Peu importe, la gauche est surreprésentée sur les sujets d'enjeu.
01:13:54 – Ce qui est proposé pour les européennes, c'est une tête de liste verte,
01:13:59 Manuel Bonpart le propose, Olivier Faure pour le Parti Socialiste y est favorable,
01:14:05 et je ne comprendrai pas, c'est pour ça que je pense que les choses vont changer,
01:14:09 on est dans un an, alors moi je suis contre le,
01:14:12 comment l'avait dit Marine Tandelier, contre les forceurs,
01:14:16 moi je suis pour la conviction, je ne suis pas pour forcer, mais les verts eux-mêmes…
01:14:20 – L'expression est discutable parce que vu le domaine auquel elle s'applique,
01:14:23 normalement ce n'est pas très correct de l'employer de là de sa paragraphie.
01:14:27 – J'écarte le mot pour ça, et je dis qu'on peut convaincre,
01:14:30 parce que si les verts sont tête de liste, je vous le dis tout de suite,
01:14:34 s'il y a une grande liste, ce sera entre 35 et 45%,
01:14:39 on sera en tête, largement devant le Rassemblement National,
01:14:43 et ça marquera pour les choses suivantes,
01:14:45 parce qu'après il faut faire des printemps marseillais partout pour les municipales,
01:14:49 et après il faut avoir un candidat commun,
01:14:51 si le calendrier encore une fois est celui-ci, parce qu'il peut être perturbé,
01:14:55 mais dans la situation actuelle, avoir une liste commune,
01:14:58 c'est confirmer la nupèce avec la dynamique,
01:15:01 de quoi remplir Bercy et pas une petite salle à la Belle-Villoise ?
01:15:05 Et donc le fonds de proposer les verts, je pense qu'ils vont y réfléchir,
01:15:10 parce qu'après ils disent parfois, oui mais au Parlement européen,
01:15:13 après on a nos gros perspectives, c'est déjà le cas à l'Assemblée Nationale,
01:15:17 ils vont chacun dans leurs gros perspectives au Parlement européen,
01:15:20 il peut y avoir un intergroupe, ça peut exister,
01:15:23 et s'il y a une liste commune, chaque parti,
01:15:27 parce que quand vous parlez des trucs boutiqués, vous avez raison,
01:15:30 mais chaque parti aura plus d'élus sur une liste commune,
01:15:34 que sur des listes séparées, c'est très matériel,
01:15:38 et s'il y a des listes séparées, 4 ou 5 listes,
01:15:41 pour être boutiqués aussi, mais il y en aura 2 ou 3 qui seront éliminées,
01:15:46 ce qui a été le cas la dernière fois en 2019,
01:15:51 et si ces listes sont éliminées, ça donne quoi ?
01:15:53 Des sièges qui sont répartis entre le RN et Renaissance,
01:16:00 j'ai du mal à croire que ces gens-là peuvent s'appeler Renaissance,
01:16:04 mais bon, il y aura des postes répartis pour eux.
01:16:08 – Mais n'oubliez pas que les écologistes, depuis maintenant des décennies,
01:16:12 triomphent à chaque fois, enfin en tout cas font leur meilleur score
01:16:15 aux élections européennes.
01:16:16 – C'est ce que je dis avec la tête de liste des Verts,
01:16:18 ils ont la tête de liste de l'Anupeste,
01:16:22 et en plus on dit parfois le partage des sièges,
01:16:25 j'ai écouté quand même Manuel Bonpart, il dit "mais nous ne tiendrons pas compte
01:16:29 que de 22, nous tiendrons compte aussi de 19",
01:16:33 ce qui veut dire avantager évidemment dans l'accord qui est possible
01:16:37 pour partager les sièges, parce que c'est à peu près un siège
01:16:40 pour 1% des voix, si vous avez à peu près 35 à 45%,
01:16:44 ce que j'espère dans une dynamique, vous avez presque le double de députés,
01:16:49 vous vous rendez compte que le PC a été éliminé la dernière fois,
01:16:53 vous vous rendez compte que Hamon avec Génération ont été éliminés,
01:16:58 si tout le monde se retrouve là, tout le monde gagnera du point de vue concret,
01:17:02 du point de vue de son parti, son groupe, mais surtout c'est la dynamique,
01:17:07 parce que si on a encore 4 listes séparées, rendez-vous compte,
01:17:11 derrière Le Pen et l'EREM, les autres batailles, Marine Tendelé a dit
01:17:15 "oui mais d'accord pour 27", mais si on est d'accord pour 27,
01:17:18 il faut l'être en 24, et je ne parle même pas des municipales de 26.
01:17:22 – Pas si on raisonne du point de vue de l'appareil du parti, les Verts.
01:17:26 – C'est toujours les masses qui l'emportent sur les appareils.
01:17:29 – Carme et Thieu voulaient intervenir.
01:17:31 – Vous avez les listes malheureusement, mais je… voilà.
01:17:34 Il y a eu quelques manifs depuis 3 mois, j'en ai fait la plupart,
01:17:38 j'ai beaucoup aimé l'ambiance au fil des manifs, un certain optimisme,
01:17:43 une conscience politique qui se formait, et des jeunes.
01:17:46 Et je me dis, s'il y a des jeunes qui nous écoutent ce soir, ça donne pas envie.
01:17:51 – Ben non. – Pourquoi ?
01:17:53 – Pourquoi ? Parce que on parle de décompte,
01:17:58 mais c'est pas ça qu'on veut quand on a 20 ans, et qu'on va dans une manif,
01:18:03 on veut une société différente, on veut un peu de rêve, un peu d'aller de l'avant,
01:18:09 et on veut pas parler de ces histoires de 4 parties, 5 parties, 1 partie, 2 parties,
01:18:15 combien on aura d'eux ? – Absolument.
01:18:17 C'est écœurant, n'est-ce pas ? Non mais je vous le dis, moi je suis très à l'aise là-dessus,
01:18:20 parce que c'est un univers que j'ai fréquenté en long, en large, en travers, en diagonale,
01:18:25 comme vous voulez, pendant à peu près 10 ans,
01:18:27 et j'en sors avec la nausée, l'envie de vomir, et un écœurement profond.
01:18:31 – Non je ne sais pas, mais j'ai vu ces jeunes qui, dans la conscience politique, s'éveillent.
01:18:35 On a l'impression que d'un coup, peut-être qu'ils vont avoir envie de s'inscrire pour voter,
01:18:39 peut-être qu'ils auront, ils espéreront que ça fera une différence, mais pourquoi ?
01:18:43 – Mais ils seront enthousiastes s'il y a une liste unique, s'il y a l'unité,
01:18:47 c'est-à-dire s'il n'y a pas 4 parties, si on leur propose 4 listes différentes,
01:18:51 il va y avoir une grande sanction et beaucoup d'abstention.
01:18:54 Tandis que s'il y a une liste unique, c'est-à-dire que les appareils se dépassent
01:18:58 dans leur bisbille actuelle, alors elles sont là et on peut parler Europe sur le fond,
01:19:03 parce qu'il s'agit de transformer… – Sur le fond ?
01:19:05 – Oui, bien sûr, il n'y a pas de divergence.
01:19:08 Vous avez vu la lettre de Manon Aubry quand elle répond à Marine Tendelier ?
01:19:12 Elle le fait avec un ton à la fois respectueux et à la fois fraternel.
01:19:18 Elle dit "sur quel point avons-nous sérieusement de divergence ? Listez-les."
01:19:22 Parce que je vois des tweets qui passent sur "ouais, c'est pas possible avec NFI",
01:19:25 mais qu'est-ce qu'ils disent ? Sur quoi ? Sur quelle question ?
01:19:29 Personne ne veut sortir de l'Europe. La question c'est…
01:19:32 – La question, bon, ok, on comprend bien.
01:19:34 – La question c'est si la gauche arrivait au pouvoir en France…
01:19:36 – La question c'est la désobéissance ou pas aux traités européens.
01:19:38 – Mais c'est même pas ça, parce que désobéir à quoi ?
01:19:41 Mais les traités aujourd'hui, tous les États désobéissent aux critères…
01:19:44 – Je ne vous parle pas de la faisabilité, je vous parle d'être d'accord ou pas
01:19:46 avec l'idée de désobéir aux traités européens.
01:19:48 – Mais je signale…
01:19:49 – L'Europe écologie-les Verts, ils sont contre et les filles, ils sont pour.
01:19:51 – Mais c'est un exemple parmi d'autres de désaccords sur le fond.
01:19:53 – Non, s'il vous plaît, ne dites pas ça.
01:19:55 – Mais ça n'a pas d'importance puisque de toute façon,
01:19:57 les campagnes européennes ne se font pas sur l'enjeu européen.
01:19:59 – Oui, ça je suis d'accord par ailleurs.
01:20:01 Mais pour prendre votre argument, tous les pays désobéissent aujourd'hui aux traités.
01:20:06 Il n'y a pas un pays en Europe qui respecte le 1,5% d'abstention.
01:20:09 – Je vous arrête parce que je trouve qu'on s'écarte du vrai…
01:20:12 je sens que vous n'avez pas envie d'y aller sur le vrai problème aujourd'hui
01:20:15 qui semble être pour certains Jean-Luc Mélenchon.
01:20:18 C'est-à-dire qu'on sait bien que les élections européennes,
01:20:21 ça ne se joue pas sur une personnalité particulière,
01:20:24 surtout si vous arrivez à faire une liste unique,
01:20:26 ce sera la liste de la gauche, évidemment ça va tout rassembler.
01:20:29 Mais les présidentielles autour desquelles tourne entièrement notre système politique,
01:20:35 c'est une autre paire de manches et là, il faut quelqu'un.
01:20:38 Et on sait bien que… enfin je me mets dans la tête de Jean-Luc Mélenchon
01:20:42 qui a eu par deux fois l'impression que c'était à sa portée d'être au deuxième tour.
01:20:48 J'imagine qu'il peut caresser l'envie d'être encore là la prochaine fois,
01:20:52 d'autant plus que personne d'autre pour l'instant ne semble capable de prendre sa place.
01:20:56 – Est-ce que je peux tenter une réponse là-dessus ?
01:20:58 Parce que s'il y a un candidat qui est celui de l'unité de toutes les forces de la gauche,
01:21:03 je parle bien des Verts, du PS, du PC et puis d'autres petites forces autour,
01:21:08 je vais les citer parce que sinon je vais me faire ensemble et d'autres groupes
01:21:11 comme la gauche démocratique et sociale, nous voulons y participer.
01:21:14 Mais s'il y a un candidat qui est ça, il fera un score supérieur à Mélenchon,
01:21:19 rien que parce qu'il est pour l'unité.
01:21:21 Et quelqu'un qu'on croit aujourd'hui, du point de vue médiatique,
01:21:24 ne pas avoir l'aura de Jean-Luc Mélenchon,
01:21:27 dès qu'il est le candidat de l'unité, il la dépassera.
01:21:30 Je ne pense pas à François Ruffin, si François Ruffin était validé
01:21:35 par l'ensemble des acteurs de la NUPES, il enfonce les sondages.
01:21:41 Et donc ce n'est pas fatal.
01:21:43 Et je suppose que Jean-Luc Mélenchon le comprend aussi à sa façon.
01:21:47 C'est pour ça qu'il ne s'est pas représenté.
01:21:49 – Il n'est pas représenté aux législatives.
01:21:51 – Oui mais voilà, s'il ne s'est pas représenté,
01:21:54 il n'aurait pas le même rôle s'il était député.
01:21:56 Donc quelque part, il y a un appel au remplacement.
01:21:59 L'appel au remplacement aujourd'hui, il paraît bizarre si on dit,
01:22:02 voilà ça va être Clémentine Autain, ça va être Alexis Corbière,
01:22:06 ça va être François Ruffin ou bien Fabien Roussel,
01:22:10 ou bien quelqu'un de chez les Verts, même si…
01:22:13 On peut imaginer ça, mais la clé, la réponse, c'est si c'est un candidat unitaire.
01:22:19 Ça change son visage, sa forme, son rapport avec les gens,
01:22:22 avec des millions de gens.
01:22:23 Dès que vous avez l'unité, une vraie, pas de bisbille,
01:22:26 alors la dynamique arrive.
01:22:28 C'est ce qui manque tout de suite dans la NUPES un an après.
01:22:31 – Et vous voulez dire que si demain c'est Jean-Luc Mélenchon
01:22:34 qui est le candidat de cette unité, il n'y aura plus de problème ?
01:22:36 – Il n'y aura pas de problème.
01:22:37 – Il fera un gros slot ? – Voilà.
01:22:39 – Vous êtes d'accord ?
01:22:40 – Alors non, mais uniquement pour la raison que je donnais
01:22:43 en ouverture de la conversation, c'est-à-dire que la candidature
01:22:47 de Jean-Luc Mélenchon, elle a l'énorme avantage de fédérer immédiatement
01:22:50 tout l'électorat de gauche anti-système,
01:22:52 mais de ne pas faire complètement le plein des modérés
01:22:54 pour les raisons que j'ai déjà expliquées tout à l'heure.
01:22:56 – Et ce ne serait pas le même problème pour François Ruffin par exemple ?
01:23:00 – Justement non, c'est-à-dire que je pense effectivement
01:23:02 que le meilleur candidat disponible pour la prochaine élection présidentielle
01:23:05 pour la gauche, c'est François Ruffin.
01:23:07 Déjà, il a déjà uni la gauche à l'échelle de sa circonscription
01:23:12 dès 2017 au premier tour, il a le cas particulier d'être candidat
01:23:16 d'union de toute la gauche dans sa circonscription.
01:23:18 Donc il a déjà fait ça en modèle réduit.
01:23:20 Ça fait des années qu'il dit et répète que lui ce qu'il veut
01:23:23 c'est la stratégie de type front populaire, c'est-à-dire union de la gauche
01:23:27 et à travers ça, union entre les classes populaires et les classes moyennes.
01:23:30 Donc on est sur quelque chose de déjà d'une démarche unitaire.
01:23:34 Par ailleurs, c'est quelqu'un, et c'est la grosse différence
01:23:37 avec Jean-Luc Mélenchon, c'est quelqu'un qui n'est fâché
01:23:40 avec personne ou presque à gauche.
01:23:42 C'est très frappant, c'est-à-dire que, autant il a pu avoir des mots
01:23:45 ou des positions dures vis-à-vis d'adversaires habituels,
01:23:48 de cibles habituelles de la gauche, autant vous ne pouvez pas trouver…
01:23:51 – Notamment le président de la République.
01:23:53 – Voilà, mais vous ne pouvez pas trouver, vous pouvez chercher si vous voulez,
01:23:56 vous ne pouvez pas trouver de propos négatifs par François Ruffin
01:24:00 ou de tacles ou de confrontations, etc. vis-à-vis de l'appareil actuel
01:24:04 de la gauche dans toute sa diversité.
01:24:06 Donc ça c'est un énorme avantage aussi.
01:24:08 En plus, vous ajoutez à ça qu'il n'a pas de problème de notoriété,
01:24:11 c'est quelqu'un dont tout le monde connaît le nom, c'est quelqu'un qui est…
01:24:14 – Oui. – Oui, quand même.
01:24:16 C'est moins que Jean-Luc Mélenchon, mais quand même.
01:24:18 C'est quelqu'un qui est très populaire, c'est quelqu'un qui a une réputation
01:24:21 de sincérité dans ses convictions, donc c'est plutôt un très bon candidat.
01:24:24 Si on rajoute à ça que le programme commun il existe déjà,
01:24:27 puisque la NUPES s'est passée inaperçue à négocier un programme commun
01:24:30 de l'Union de la gauche pour la première fois depuis je ne sais même plus quand,
01:24:33 et donc si vous ajoutez à ça que le programme commun il existe déjà,
01:24:37 en fait oui, ça se présente très bien si c'est Ruffin.
01:24:40 – Et alors, je veux juste… – Oui, pardon, juste sur ce point-là,
01:24:43 quand on sait que Jean-Luc Mélenchon, malgré les problèmes de conflictualité
01:24:46 qu'il peut poser pour l'électorat modéré, est passé la dernière fois,
01:24:50 vraiment à ça, de la qualification au second tour, moi je pense que
01:24:53 pour François Ruffin, comparativement, c'est tout à fait tentable.
01:24:56 – Alors moi j'ai une autre possibilité, c'est François Hollande,
01:25:01 il n'a jamais été aussi populaire… – Depuis qu'il a arrêté la politique,
01:25:06 vous voyez pas le lien que vous avez fait ?
01:25:08 – Eh oui, mais je le remets, de même que Nicolas Sarkozy d'ailleurs,
01:25:11 vous avez raison, il n'a jamais été aussi populaire.
01:25:13 – Depuis qu'il a arrêté la politique…
01:25:15 – Et François Hollande pourrait très bien se présenter…
01:25:18 – Vous avez vu ce qui lui est arrivé à Tulle ?
01:25:20 Il a fait campagne pour deux candidats qu'il a propulsés lui-même,
01:25:24 contre le dirigeant principal du département qui était socialiste,
01:25:27 contre celui de la région, il a eu beaucoup moins que la nuppes.
01:25:31 – Oui, bon là c'était pas lui qui se présentait.
01:25:34 – Il était tous les jours à côté des candidats.
01:25:37 – Je pose la question à Claire Mathieu, vous avez dit n'importe qui,
01:25:40 du moins que c'est de gauche, François Hollande c'est bon.
01:25:42 – Et qui lui est le mieux placé ?
01:25:44 – Il y avait un gros…
01:25:45 – Si c'est celui-là le candidat, je voterai pour lui, ma foi.
01:25:49 – Voilà, il n'y a pas de problème avec les modérés.
01:25:51 – J'aimerais bien un jeune, un nouveau, un jeune, un espèce de…
01:25:55 un Macron de la gauche, quelqu'un qui surgisse comme ça,
01:25:58 et qui donne un souffle, un nouveau.
01:26:02 – La gauche c'est une longue histoire, une longue construction,
01:26:07 les syndicats aussi, les associations aussi.
01:26:10 – Je voterai pour celui qui sortira…
01:26:12 – Vous savez il y a une différence par exemple avec le Fonds populaire, Thomas,
01:26:16 c'est que dans le Fonds populaire, comme j'ai dit,
01:26:18 le salariat à l'époque était minoritaire, il y avait le PS, le PC,
01:26:21 mais il y avait un grand parti bourgeois, qui était le parti radical,
01:26:24 qui dirigeait la 3ème République.
01:26:26 – Qui a fini comme le PS avant le PS d'ailleurs.
01:26:28 – Voilà, mais justement ce n'est pas le cas aujourd'hui,
01:26:30 on n'a pas besoin d'alliance avec un parti bourgeois,
01:26:33 on peut gagner avec les forces du salariat et les partis qui l'expriment,
01:26:37 c'est une grande différence, tous les partis dans la NUPES sont de gauche,
01:26:42 il n'y a pas l'équivalent d'une force…
01:26:44 – Il faut prendre en compte l'élection présidentielle sous la 5ème République,
01:26:47 qui écrase tout le reste et qui en fait passe avant les considérations…
01:26:50 – Oui, mais on verra, si on fait l'accord, comme à Marseille,
01:26:53 dans toutes les municipalités pour les prochaines élections,
01:26:55 parce qu'on ne parle pas des municipalités, mais c'est très important,
01:26:58 c'est quand même ce qui est décisif avant une présidentielle,
01:27:01 c'est l'ancrage territorial, c'est l'unité à la base,
01:27:04 c'est ce qui peut permettre d'avoir des agora, des rencontres, des assemblées…
01:27:08 – C'est un autre débat…
01:27:09 – Oui mais il est lié, il est lié.
01:27:11 – Ce sera en tout cas la fin de celui-ci, mais je suis sûr qu'on en aura d'autres d'ici là.
01:27:17 On va retrouver Michael Dos Santos pour un rappel des titres
01:27:21 et après on va parler d'une voiture,
01:27:23 qui a peut-être été une voiture de gauche d'ailleurs, vous le direz Serge Bellu,
01:27:27 juste après la 4L.
01:27:30 [Musique]
01:27:33 Charles III sacré en grande pompe à Londres, à l'abbaye de Westminster,
01:27:37 l'ancien prince de Galles a reçu la couronne certi dorée de rubis.
01:27:40 Après avoir quitté les lieux en carrosse,
01:27:42 le roi et la reine ont rejoint le balcon de Buckingham Palace pour saluer leur sujet,
01:27:46 des britanniques qui s'étaient massés par milliers malgré la pluie
01:27:49 et quelques manifestations anti-monarchie.
01:27:52 Le groupe Wagner va céder ses positions au Tchétchène en Ukraine.
01:27:56 Le chef du groupe paramilitaire a indiqué qu'il allait quitter la ville de Bakhmout
01:27:59 pour protester contre le manque de munitions.
01:28:02 Selon lui, seuls 32% des munitions demandées à Moscou
01:28:05 ont été reçues depuis octobre dernier.
01:28:08 Et puis enfin, victoire en or pour le RC Lens.
01:28:11 Les Nordies se sont imposés 2-1 face à l'Olympique de Marseille.
01:28:14 Des buts signés Seko Fofana et Openda.
01:28:17 Dimitri Payet a réduit la marque en toute fin de rencontre côté Fossey 1.
01:28:21 Après 16 ans d'absence, les 100 et Or sont de retour sur la scène européenne.
01:28:25 Dauphins du PSG à 4 journées de la fin,
01:28:27 ils peuvent même encore rêver du titre de Ligue 1.
01:28:30 (Générique)
01:28:41 Serge Bellu, journaliste spécialisé dans l'automobile,
01:28:45 vous avez eu la bonne idée de consacrer tout un beau livre
01:28:49 richement illustré à la 4L.
01:28:52 C'est vrai que cette voiture a été pendant 30 ans un véritable phénomène en France.
01:28:56 Pourquoi ? Qu'est-ce qu'elle avait de nouveau en 1961
01:28:59 quand elle est sortie par rapport à la 4C commercialisée par Renault
01:29:04 juste après la Seconde Guerre mondiale par exemple ?
01:29:07 Justement pour faire le trait du lion avec la discussion que nous avons eue,
01:29:11 que vous avez eue tout à l'heure,
01:29:13 c'est une voiture de gauche en ce sens que c'est l'une des premières décisions
01:29:18 qui a été prise par Pierre Dreyfus quand il a pris la direction de la régie Renault.
01:29:23 Et il y avait vraiment une démarche totalement opposée facilement à celle de la 4C.
01:29:31 La 4C, c'est la voiture qui est sortie juste après la Seconde Guerre mondiale,
01:29:35 qui représentait le début des 30 Glorieuses,
01:29:39 une petite voiture coquette pour les familles.
01:29:42 On va l'avoir, la 4C.
01:29:44 Qui n'était pas très fonctionnelle.
01:29:46 Et la Renault 4, c'est quelque chose de totalement opposé,
01:29:51 qui n'a absolument aucun souci de séduction,
01:29:55 qui est une voiture avant tout fonctionnelle, sérieuse, rustique, frugale.
01:30:01 Donc elle marque vraiment une rupture avec la voiture qu'elle a remplacée.
01:30:07 La vraie rupture, et là on vient de voir la 4C,
01:30:11 et quand on voit la 4L juste après, c'est sa forme cubique et ses lignes droites.
01:30:16 Ça tranche complètement à cette époque-là.
01:30:21 Ça tranche complètement pour ces raisons-là.
01:30:23 La 4C n'était pas faite par des designers.
01:30:27 Le seul but de cette voiture était de séduire la clientèle,
01:30:33 d'en faire quelque chose de mignon, qu'on pouvait s'approprier.
01:30:39 Alors que la Renault 4 avait vraiment une fonction,
01:30:42 elle est beaucoup plus pratique.
01:30:44 Et ces formes cubiques sont liées à ça.
01:30:47 C'est une voiture qui était à la fois berline et break.
01:30:51 Il y a un ion à l'arrière.
01:30:53 C'est une voiture qui est faite avant tout pour les campagnes,
01:30:57 dans le cahier des charges initiales.
01:31:01 - Il y a une modernité de la 4L,
01:31:03 et là aussi ça tranche avec la 4C,
01:31:05 qui est un peu une voiture d'avant-guerre,
01:31:07 dans ses lignes un peu rondes.
01:31:09 On imagine toutes les grosses américaines de l'époque,
01:31:12 avec des 4 chevaux, mais en très gros.
01:31:14 La 4L, il n'y a rien avant.
01:31:16 Aucune voiture qu'il avait précédée ne lui ressemble.
01:31:20 Ses lignes droites, ce côté cubique, c'est une première, me semble-t-il.
01:31:26 - Effectivement, la 4C, c'est une voiture d'avant-guerre.
01:31:30 Elle a été développée pendant la Seconde Guerre mondiale,
01:31:33 et les ingénieurs à l'époque se sont inspirés de la Volkswagen,
01:31:38 de la Coxsinel, qui était sortie juste avant.
01:31:41 - La 4L, ce n'est pas tout à fait vrai.
01:31:45 En fait, c'est une 2 chevaux moderne.
01:31:48 - Oui.
01:31:50 - Elle reprend le même principe qu'avait adopté la 2 chevaux en 1948.
01:31:57 C'était une voiture qui se moquait éperdument de plaire par son esthétique.
01:32:03 - Raymond Leouis, le grand designer,
01:32:05 avait dit que c'était l'enfant naturel d'une poubelle et d'un store.
01:32:08 - Oui, il disait qu'il allait le recevoir mal.
01:32:10 - Il avait tort, parce que la Renault 4 est devenue la voiture la plus vendue.
01:32:15 - Non, je parle de la 2 chevaux.
01:32:17 - Oui, mais il repensait la même chose pour la 4L.
01:32:20 - Non, il n'y a pas le côté store, le côté poubelle,
01:32:23 qui avait été franchement dans la 2 chevaux.
01:32:25 Mais regardez, par rapport à la 2 chevaux, puisque vous en parlez,
01:32:28 la 4L est douce et confortable.
01:32:32 Elle est cool avant la lettre.
01:32:34 La 2 chevaux n'était pas douce et confortable.
01:32:37 - Elle avait son charme, mais on ne peut pas dire qu'elle était confortable
01:32:40 et encore moins qu'elle était douce.
01:32:42 - Non, c'est le même concept, mais transposée,
01:32:44 il y a quand même pas mal d'années entre les deux.
01:32:47 Il y a plus de 10 ans d'écart.
01:32:49 C'est une voiture qui est beaucoup plus utilisable,
01:32:52 avec laquelle on peut faire de la route, beaucoup plus polyvalente.
01:32:55 D'ailleurs, elle va se vendre aussi en ville,
01:32:58 et pas seulement à la campagne.
01:33:00 - Elle est économique et facile à entretenir,
01:33:03 dites-vous dans votre livre, la 4L.
01:33:06 - Oui, c'est ce qu'on demande à une voiture
01:33:09 qui doit devenir complètement populaire.
01:33:12 Il ne faut pas s'embêter avec.
01:33:14 - Elle est stable aussi.
01:33:16 Ça, ça joue beaucoup.
01:33:17 C'est l'image qu'on s'en fait.
01:33:18 On la voit grimper, on la voit descendre,
01:33:20 on la voit tourner.
01:33:22 Stable.
01:33:23 - Oui, comme c'est une voiture rurale au départ,
01:33:26 elle est faite pour pouvoir emprunter des pistes,
01:33:31 pas seulement de rouler sur l'asphalte.
01:33:33 - Et puis, elle est spacieuse.
01:33:35 - Et ça, c'est quand même...
01:33:36 On peut transporter des trucs,
01:33:38 et aussi bien en ville qu'à la campagne, d'ailleurs.
01:33:40 Et on ne va pas s'en priver.
01:33:42 - On peut transporter des familles.
01:33:44 Il y a quatre places à peu près confortables.
01:33:46 Et on peut retirer les sièges
01:33:48 et transformer ça en fourgonnette.
01:33:51 - Je suis sûr que vous avez eu une 4L à un moment dans votre vie, Gérard Filoche.
01:33:55 - On peut enlever les sièges de derrière de la 2CV aussi.
01:33:57 On peut y dormir.
01:33:58 Je l'ai fait.
01:33:59 - Vous n'étiez pas un type à 4L ?
01:34:01 - 2CV.
01:34:02 - 2CV.
01:34:03 - Ah oui.
01:34:04 - La première voiture qu'elle a eue, elle avait 20 ans.
01:34:06 Donc, on est au tout début des années 80.
01:34:08 Elle a roulé en 4L, oui.
01:34:10 Qui était une vieille 4L qui datait encore d'avant.
01:34:12 Mais donc, moi, tout enfant, vraiment tout petit,
01:34:15 je me suis retrouvé dans une 4L, oui.
01:34:17 - Il y avait un côté "les femmes aimaient les 4L".
01:34:19 Non ?
01:34:21 - Les femmes ont fini par aimer les 4L.
01:34:23 Mais Renaud avait eu...
01:34:25 Enfin, Pierre Dreyfus, aujourd'hui,
01:34:27 avait eu la brillante idée de faire une opération publicitaire
01:34:31 avec le magazine Elle, à l'époque.
01:34:33 Ils avaient confié des 4L qui étaient très coquettes,
01:34:40 bien décorées, avec des flancs cannés sur un fond noir.
01:34:45 C'était très élégant.
01:34:47 Ou un décor écossais.
01:34:49 Et les femmes, et les citadines,
01:34:54 pas seulement les femmes des campagnes,
01:34:56 ont fini par adopter cette voiture
01:34:58 qui n'était pas faite a priori pour elles.
01:35:00 - Non, certes.
01:35:02 Mais sa fiabilité, dites-vous,
01:35:06 va en faire une voiture qui va avoir une vie très longue
01:35:10 dans les pays en voie de développement.
01:35:12 Et en Europe de l'Est, qui était communiste à l'époque.
01:35:15 - Oui, plus dans les pays en voie de développement,
01:35:18 comme elle s'est beaucoup vendue en Afrique,
01:35:20 mais parce que la France coloniale était encore là.
01:35:23 - Mais parce qu'elle était aussi parfaitement adaptée.
01:35:26 - Elle était très simple à entretenir.
01:35:28 Il n'y avait pas besoin de...
01:35:30 Il n'y avait pas...
01:35:32 Pratiquement pas de voiture qu'il y en avait à l'époque.
01:35:34 Il n'y avait pas d'électronique.
01:35:36 C'était vraiment un objet qu'on pouvait réparer
01:35:40 au coin de la rue.
01:35:42 - Et en tant qu'utilitaire,
01:35:44 elle va longtemps peupler les routes de France.
01:35:46 Il faut se rappeler que dans "Les Visiteurs",
01:35:48 quand Christian Clavier arrive au début des années 90,
01:35:52 venant de son Moyen-Âge,
01:35:54 il tombe sur une quatre-aile de la Poste...
01:35:56 - Et en s'arrasant, du coup.
01:35:57 - Il va essayer de réduire à coups de bâton,
01:36:00 mais c'est une quatre-aile.
01:36:01 On est en 93, elle est encore là.
01:36:04 - C'était la voiture de la Poste.
01:36:06 C'était aussi la voiture de la gendarmerie.
01:36:09 C'est une voiture, on s'en souvient moins,
01:36:12 qui a été utilisée par Jacques Tati dans "Trafic".
01:36:16 - Pour filmer les embouteillages.
01:36:19 - C'était une Rodo 4 bricolée
01:36:24 qu'il avait essayé de vendre au Pima.
01:36:28 - D'où vient cette image ?
01:36:30 J'imagine la publicité,
01:36:32 est-ce que c'est comme ça que Renaud voulait la vendre ?
01:36:34 Elle a une image de rebelle, la 4L.
01:36:37 - Non, je pense que c'est avec le recul,
01:36:40 comme la 2CV.
01:36:41 La 2CV, c'est vraiment une provocation.
01:36:43 À une époque où les constructeurs
01:36:47 s'inspiraient du style italien
01:36:51 ou du design américain,
01:36:56 c'était une provocation de lancer cette voiture-là,
01:36:59 même dans la catégorie des voitures populaires.
01:37:01 Pareil dans les années 60.
01:37:04 Quand la Renault 4 sort en 61,
01:37:08 il y a déjà la Mini, qui est une voiture charmante,
01:37:11 très compacte,
01:37:13 elle vraiment destinée à séduire les femmes.
01:37:16 - Comme la Fiat 500 aussi.
01:37:19 On est finalement dans la même zone de prix.
01:37:24 - C'est assez frappant quand on lit votre livre
01:37:27 et qu'on voit les photos qu'on est en train de regarder,
01:37:29 en même temps que vous parlez, bien entendu.
01:37:31 On voit bien que cette image rebelle,
01:37:34 elle séduit les jeunes,
01:37:35 elle séduit les hippies,
01:37:37 elle séduit les femmes aussi,
01:37:39 elle va séduire les explorateurs
01:37:42 et elle va séduire aussi les pilotes de rallye.
01:37:47 - Tout à coup, on va voir des 4L dans les rallyes.
01:37:50 - La compétition, c'est un peu marginal dans sa vie,
01:37:54 mais elle a séduit les marginaux.
01:37:58 C'est un peu le propre de ces voitures populaires,
01:38:04 c'est en fin de vie.
01:38:05 Au début, elle n'était pas du tout faite pour eux.
01:38:08 Après 68, c'était une voiture qui montrait
01:38:13 qu'on était contre la société de consommation,
01:38:16 on était obligés d'avoir une bagnole,
01:38:18 donc on achetait une 4L.
01:38:19 Elle est moche, mais on n'est pas obligés d'avoir une voiture,
01:38:24 donc on achète une 4L.
01:38:26 C'était vraiment un engagement un peu politique.
01:38:31 - Vous la trouvez moche, vous ?
01:38:33 - Je ne sais pas, m'impressionner dans le style de l'époque.
01:38:40 - C'est vrai que vous avez fait beaucoup de livres
01:38:42 plutôt sur des voitures, des Porsche, des Ferrari, etc.
01:38:45 - Tout à coup, vous faites la 4L ?
01:38:48 - Non, il n'y a pas que des Porsche et des Ferrari dans la ville.
01:38:51 La France avait inventé la DS quelques années avant,
01:38:54 c'était une très belle voiture.
01:38:56 - Plus de droite, non ?
01:38:58 La DS, c'était plutôt la voiture de droite.
01:39:00 - C'était la voiture de gauche, non ?
01:39:02 - Elle a un côté, si on devait classer un peu bêtement,
01:39:07 on pourrait se dire que si la 4L est de gauche,
01:39:09 peut-être que la DS est de droite.
01:39:11 Mais c'est une pure spéculation, évidemment.
01:39:15 Vous avez une idée là-dessus, Gérard Filoche ?
01:39:18 - Non, pas vraiment.
01:39:20 - C'est sans doute stupide de ma part.
01:39:22 - En tout cas, du point de vue de l'argent,
01:39:24 ce n'est pas le même prix.
01:39:26 - Vous savez bien qu'il y avait des gens de gauche
01:39:27 qui avaient de l'argent et des gens de droite qui n'en avaient pas.
01:39:29 Ce n'est pas aussi simple que ça non plus.
01:39:32 Ce qui était étonnant dans le destin de cette voiture populaire,
01:39:37 qui avait une vocation populaire dès le départ,
01:39:40 elle est devenue chic à un moment.
01:39:43 On voit bien, on faisait allusion à ce cannelage qu'elle avait,
01:39:47 on le voit sur la photo.
01:39:49 Tout à coup, on la rend chic, la 4L, et ça marche.
01:39:51 Elle a une période où elle est chic,
01:39:53 où tout à coup la mode va s'emparer de la 4L
01:39:56 et va en faire, aujourd'hui on dit, quelque chose d'iconique.
01:40:01 Mais tout simplement, c'est la 4L, mais un peu stylisée.
01:40:05 - Oui, oui, pour se dire des nouvelles clientèles,
01:40:07 des jeunes ou une clientèle plus citadine, plus féminine,
01:40:13 il y a eu énormément de séries spéciales avec des couleurs sympas.
01:40:17 - Et ça a marché ?
01:40:19 - Pardon ?
01:40:20 - Et ça a marché ?
01:40:21 - Ça a vendu ?
01:40:22 - Ça vendait bien, oui.
01:40:23 Les séries spéciales, c'est un peu le destin de la vie des modèles.
01:40:30 À la fin de leur carrière, on lance des séries spéciales
01:40:33 qui relancent l'intérêt pour la voiture.
01:40:37 - Est-ce qu'elle a été ressortie très récemment ?
01:40:39 Parce qu'il me semble me souvenir que,
01:40:41 peut-être que je me trompe et que je confonds avec autre chose,
01:40:43 mais ils n'ont pas ressorti la 4L à un moment,
01:40:45 genre il y a 20 ans, quelque chose de très proche ?
01:40:48 Essayez de la remettre sur le marché.
01:40:50 - Il y a un projet, mais qui est tellement éloigné de l'esprit de la 4L,
01:40:56 qui justement a été une voiture simple, économique.
01:41:01 Renault a présenté un concept-car qui, théoriquement, évoque la 4L.
01:41:07 Mais ce n'est pas du tout, c'est un SUV.
01:41:09 Déjà, c'est une aberration, un SUV,
01:41:12 et qui n'a rien à voir avec l'esprit de la 4L.
01:41:17 Je ne pense pas que quelque chose de semblable sorte vraiment en grande série.
01:41:23 En revanche, la Renault 5, qui est plus transposable dans nos préoccupations d'aujourd'hui,
01:41:32 va ressortir, enfin sous une forme moderne, mais son esprit va ressortir.
01:41:38 - C'est bizarre quand même que ces marques automobiles,
01:41:41 qui étaient si inventives autrefois,
01:41:43 aujourd'hui se contentent toutes de produire quasiment la même voiture,
01:41:47 à part le sigle de la marque qui fait juste la différence.
01:41:52 D'ailleurs, ils ont été obligés de le grossir, vous avez remarqué, depuis quelques années.
01:41:56 Non mais c'est vrai, sinon on les confond.
01:41:58 La 4L, elle était unique.
01:42:00 À côté, la 4 chevaux, elle était unique.
01:42:02 La 2 chevaux était unique.
01:42:03 La 404 n'avait rien à voir avec la DS.
01:42:05 Aujourd'hui, c'est toutes les mêmes.
01:42:06 Et donc, ils ont soin de recycler les vieux noms des voitures d'autrefois.
01:42:11 - Plus que les vieux noms.
01:42:14 Une marque comme Fiat a été sauvée en relançant la Fiat 500.
01:42:19 La marque Mini est réapparue chez BMW.
01:42:26 - Oui, donc en fait, en recyclant carrément le vieux modèle.
01:42:29 C'est-à-dire que les nouveaux modèles nous laissent à peu près indifférents,
01:42:32 donc on ressort des vieux modèles.
01:42:33 - En se posant plus ou moins fidèlement ce qu'était le modèle original.
01:42:38 - Comment expliquez-vous que les voitures se ressemblent toutes ?
01:42:40 Vous qui êtes un voyageur journaliste spécialisé,
01:42:42 c'est parce que c'est le même ordinateur qui les dessine ?
01:42:44 - Non, heureusement, il n'y a encore ni les ordinateurs,
01:42:48 ni les designers qui utilisent encore des stylos.
01:42:52 C'est dingue, vu tout à l'heure.
01:42:55 Non, ce n'est pas encore l'IA qui s'occupe du dessin des voitures, pas complètement.
01:43:00 L'une des raisons, c'est que le marché est beaucoup plus international.
01:43:06 Il y a moins de nécessité de produire des styles très spécifiques en fonction des pays.
01:43:17 Et puis, tous les designers sortent des mêmes écoles de design dans le monde.
01:43:23 - Et peut-être obéissent aux mêmes règles d'ergonomie, d'économie d'énergie et de sécurité, j'imagine.
01:43:30 Et à la fin, ça donne tous la même voiture.
01:43:33 - Ça doit être sévère.
01:43:35 - Franchement, à moins de s'y intéresser vraiment,
01:43:38 si vous regardez toutes les voitures qui passent, c'est les mêmes.
01:43:41 Et en plus, et bien pire, elles sont toutes grises, blanches ou noires.
01:43:45 En France, particulièrement.
01:43:47 - Du temps de la 4L, il y avait des voitures vertes, des voitures oranges.
01:43:50 La 4L était très souvent orange, d'ailleurs, dans mon souvenir d'enfant.
01:43:54 - Ou jaune, un peu, jaune pâle.
01:43:56 - Oui, enfin, il y avait toutes les couleurs pastelles.
01:43:59 Aujourd'hui, j'imagine qu'on peut les faire et que personne ne les demande.
01:44:02 - Non, parce qu'aujourd'hui, à niveler le marché, c'est le développement des SUV.
01:44:06 Là, effectivement, ils sont tous pareils, ils sont tous aussi aberrants.
01:44:11 - Vous n'aimez pas les SUV, j'ai l'impression.
01:44:13 - Vous n'aimez pas les SUV.
01:44:16 - J'aime un petit peu l'automobile, quand même.
01:44:18 - Bien sûr.
01:44:19 - Et je pense que la vogue des SUV a fait détester l'automobile,
01:44:24 qui maintenant est quand même quelque chose de très contesté.
01:44:27 - C'est des trucs à roulettes, c'est ça ?
01:44:29 - Pardon ?
01:44:30 - Oui, rappelez-nous ce que c'est qu'un SUV.
01:44:32 - Un SUV, ça veut dire "Sport Utility Vehicle" en américain.
01:44:38 Les Canadiens les appellent les VUS, les véhicules utilitaires sportifs.
01:44:46 - C'est ça, c'est des gros tanks.
01:44:49 - C'est un 4x4.
01:44:50 - Oui, c'est ça, c'est un 4x4.
01:44:52 - Initialement, il reste un tout petit créneau de voitures qui sont utiles,
01:45:01 qui servent dans certains pays, qui servent dans certaines conditions.
01:45:06 Des vrais tout-terrains.
01:45:09 Mais la plupart, c'est vraiment des voitures de frimes pour rouler dans le parc.
01:45:14 Quand on voit les publicités qui sont basées sur la notion de crossover urbain,
01:45:19 crossover, c'est encore une autre manière de parler de SUV,
01:45:23 c'est complètement idiot.
01:45:24 Alors qu'on devrait chercher, pour avoir une vraie alternative au vélo,
01:45:30 des voitures compactes, on propose ça comme véhicule urbain.
01:45:35 - C'est une façon peut-être de dominer un peu la route,
01:45:38 d'être un peu en hauteur et de se sentir plus en sécurité peut-être aussi, non ?
01:45:43 - Oui, mais c'est ce qu'écrivait déjà Sénèque il y a quelques siècles.
01:45:47 - Je suis content, merci.
01:45:49 - Il y avait une partie des...
01:45:51 - C'est mon philosophe préféré, je suis très content.
01:45:54 - Il citait les Romains qui préféraient les chars
01:45:59 dans lesquels ils pouvaient s'installer en hauteur pour dominer le parc.
01:46:04 - Le SUV de l'époque, donc.
01:46:06 - Aujourd'hui, l'époque est très différente de l'époque où régnaient les 4L sur le paysage.
01:46:13 Qu'est-ce qui motive les gens quand ils achètent une voiture, à votre avis, Serge Bellu ?
01:46:18 Est-ce que c'est la même chose qu'à l'époque ?
01:46:21 - Alors, certainement pas en ce qui concerne le style,
01:46:25 parce que la 4L était très particulière, elle était la seule,
01:46:30 elle n'avait pas de concurrents.
01:46:32 - Non, bien sûr.
01:46:34 Mais à l'époque, on aimait une voiture singulière, par exemple,
01:46:37 ce qui n'est plus le cas aujourd'hui, par exemple.
01:46:39 - Non, aujourd'hui, c'est le style, c'est même pas le prix,
01:46:44 ni la qualité routière, ni la sécurité,
01:46:48 parce que toutes les voitures sont à peu près nivelées sur le plan de la qualité.
01:46:53 - C'est comme les vêtements, c'est le style qui fait la différence.
01:46:57 Et est-ce qu'en 2035, vous pensez vraiment qu'on ne pourra plus vendre de voitures thermiques ?
01:47:04 - Je ne comprends pas pourquoi on ne parle pas plus des biocarburants
01:47:09 qui sont en cours de développement, qui sont utilisés dans le sport automobile,
01:47:15 qui, a priori, est un secteur d'innovation et de recherche.
01:47:22 Et non, je ne pense pas que ce soit définitivement perdu.
01:47:27 Les constructeurs allemands qui ont quelques moteurs thermiques en réserve
01:47:32 commencent un peu à râler aussi concernant la décision européenne.
01:47:39 Donc non, on a le temps de voir des revirements.
01:47:43 - Et parmi les voitures électriques, vous pensez que ça va susciter les mêmes engouements
01:47:49 qu'autrefois les voitures comme la 4L ?
01:47:54 - Pour l'instant, il y a un engouement pour la Tesla, qui est pourtant une voiture chère.
01:48:00 Mais là aussi, il arrivera un moment où on va se rendre compte
01:48:09 que la voiture électrique a des quantités de défauts sur le plan écologique.
01:48:14 - Oui, on le sait déjà.
01:48:16 - Comparé à la voiture à moteur thermique, il n'y a vraiment pas photo.
01:48:21 Dans l'absolu, ça pose des problèmes, comme n'importe quelle activité humaine quasiment.
01:48:26 Mais comparé à la voiture thermique, la voiture électrique la bat systématiquement sur le plan écologique.
01:48:31 Ça pose d'autres problèmes. L'autonomie notamment est un gros souci.
01:48:36 - Et les batteries aussi. La façon de les fabriquer.
01:48:40 - Oui, tout à fait. Mais ce que je veux dire, c'est que c'est pourquoi on jugerait la voiture électrique
01:48:45 dans l'absolu écologiquement, alors que ça n'a du sens qu'en la comparant à la voiture thermique.
01:48:49 Et comparer à la voiture thermique, c'est vraiment beaucoup mieux.
01:48:52 - Mais elles sont moches, je suis d'accord.
01:48:54 - Non, elles ne sont pas plus moches.
01:48:56 - Les voitures électriques actuelles ne sont pas jolies du point de vue design.
01:49:00 Peut-être que vous êtes d'accord avec moi là-dessus sur les voitures en général.
01:49:02 - Non, je ne suis pas d'accord avec vous.
01:49:04 Il y a beaucoup de voitures qui donnent le choix entre un moteur thermique et un moteur électrique.
01:49:08 Si elle est moche, elle n'est pas plus belle ou plus moche selon le moyen d'être.
01:49:14 Mais l'un des gros problèmes de la voiture électrique, c'est d'imaginer que toutes les voitures soient électriques.
01:49:23 La production d'électricité dans un pays comme la Chine est très en avance sur la production de voitures électriques.
01:49:29 Manque de chance, la Chine utilise du charbon.
01:49:33 - Ça ne va pas nous arranger.
01:49:35 - Les centrales nucléaires sont très écolo.
01:49:37 - Comment ?
01:49:38 - Il faut faire des centrales nucléaires ? Dans ce cas-là, c'est très écolo.
01:49:40 - Oui, mais ce n'est pas ce que font les Allemands.
01:49:45 - Lasse.
01:49:47 - Et pas non plus les Chinois.
01:49:49 - Serge Bellu, est-ce que la jeune génération s'intéresse encore aux voitures ?
01:49:54 C'était quelque chose qui était très présent autrefois et notamment dans les jeunes générations.
01:49:59 Il y a des décennies pendant lesquelles les films parlant des jeunes montraient systématiquement des jeunes en voiture.
01:50:07 Aujourd'hui, ça semble fini.
01:50:09 - Non, je pense que l'intérêt pour l'automobile est en perte de vitesse depuis les années 1970.
01:50:17 - Si longtemps que ça.
01:50:19 - Oui, parce qu'à cette époque-là, les années 1970-1980, c'est aussi les premiers mouvements écologiques.
01:50:26 C'est les premières constatations du danger que représentait l'automobile.
01:50:34 - Et de l'ennui, parce qu'il y a tous les grands films sur les embouteillages, par exemple, vous parliez de trafic,
01:50:40 mais il y en a plein d'autres au même moment, "Weekend de Côte d'Ivoire", "Le grand embouteillage de Côte d'Ivoire",
01:50:45 ils sortent tous dans les années 1970.
01:50:47 Mais à ce moment-là, il y a une mythologie de la voiture qui est très puissante.
01:50:52 - Vous avez encore "Fast and Furious" aujourd'hui, c'est une série de films destinée à un public jeune.
01:50:56 Je crois qu'ils ont dépassé 10 films, ça a cartonné.
01:50:59 Des belles voitures et qui vont vite, il y a encore un public jeune, plutôt masculin.
01:51:04 - Vous le sentez, ça, dans la presse automobile, que des films comme "Fast and Furious" s'accrèlent ?
01:51:09 - C'est un succès mondial, je suis tellement à la presse automobile, parce qu'elle est pratiquement réduite à Internet aujourd'hui.
01:51:17 Non, je pense qu'il y a vraiment un désintérêt des jeunes générations.
01:51:23 Les enfants ne se sont jamais passionnés pour l'automobile, et leurs copains non plus.
01:51:28 - Vous leur montrerez votre livre sur les 4 L, c'était une époque où les jeunes s'intéressaient encore aux voitures.
01:51:34 Merci Serge Bellu d'être passé par "Les Visiteurs du Soir", merci tous les deux.
01:51:40 Merci de nous avoir suivis, rendez-vous demain pour un prochain numéro à 22h, "Les Visiteurs du Soir".
01:51:48 Je vous souhaite une très bonne nuit.
01:51:50 Merci à tous !