Écoutez l'interview de la Directrice Centrale des Compagnies Républicaines de Sécurité.
Regardez L'invité de RTL du 31 mars 2023 avec Amandine Bégot.
Regardez L'invité de RTL du 31 mars 2023 avec Amandine Bégot.
Category
🗞
NewsTranscription
00:00 Vous êtes sur RTL.
00:02 RTL matin
00:06 RTL il est 7h45, excellente journée à vous tous qui nous écoutez, Amandine Bégaud. Vous recevez donc ce matin Pascal Régnaud Dubois,
00:13 directrice centrale des compagnies républicaines de sécurité nos CRS.
00:16 Pascal Régnaud Dubois, vous dirigez donc les quelques 11 000 CRS que compte notre pays. Des CRS qui, je le disais, sont en première ligne
00:23 dans ces manifestations contre la réforme des retraites.
00:26 Depuis le 19 janvier et la première journée de mobilisation, plus de 600 d'entre eux ont été blessés.
00:31 Ça fait près de 6% de vos effectifs, c'est énorme !
00:35 Oui, effectivement, nous sommes, comme vous l'avez souligné, fortement mobilisés depuis le début des manifestations
00:42 liées à la réforme des retraites. Nous déplorons 600 blessés, alors blessés légers,
00:49 fort heureusement d'ailleurs. Ça veut dire quoi un blessé léger ? Alors blessé léger chez nous c'est en fait le policier qui est contusionné, qui a reçu
00:56 très souvent d'ailleurs des projectiles,
00:58 qui ne s'arrête pas, qui continue donc sa mission et on le comptabilise quand même en blessés légers puisque bien évidemment c'est important d'une part
01:06 parce que la blessure peut évoluer et il est important pour nous parce que c'est un vrai indicateur
01:10 du niveau de violence et manifestations. Donc on le comptabilise et puis au delà des 600 blessés légers nous déplorons
01:18 23 blessés plus graves, dont le plus grave qui a 45 jours d'arrêt de travail.
01:23 Donc voilà, cela montre aussi le niveau de violence des manifestations.
01:26 J'imagine que ça pèse, ça, sur le moral des troupes si j'ose dire ?
01:31 Oui, bien évidemment, parce que derrière le casque il y a l'humain, alors bien sûr que ça pèse, mais en même temps
01:40 les compagnies républicaines de sécurité sont les professionnels du maintien de l'ordre.
01:45 Donc aujourd'hui, depuis début janvier, elles sont employées, j'ai envie de dire, sur leur cœur de métier.
01:49 Elles sont formées au maintien de l'ordre, elles sont formées à la résilience parce que ça demande beaucoup de résilience de faire du maintien de l'ordre
01:55 et aujourd'hui le moral reste quand même bon parmi les CRS.
02:02 Hier je suis allée voir la CRS 22 à Perigueux qui a dénombré une trentaine de blessés lors d'une seule
02:09 manifestation à Nantes
02:12 et j'ai pu constater que le moral restait particulièrement bon et ça c'est important et c'est à nous d'y veiller également, la hiérarchie d'y veiller.
02:20 Ce qui pèse aussi sans doute ce sont ces polémiques justement autour du maintien de l'ordre, ce que certains appellent des violences policières.
02:25 D'ailleurs est-ce que vous condamnez le terme de violences policières ?
02:28 Je condamne le terme de violences policières. Pour moi
02:31 c'est une expression que je ne comprends pas.
02:35 Ça voudrait laisser
02:37 imaginer que la police est violente. Non, la police n'est pas violente.
02:41 Je rappelle que l'emploi de la force
02:43 lors des manifestations
02:46 doit s'inscrire dans un cadre extrêmement strict qui a été rappelé dans le cadre du schéma national du maintien de l'ordre.
02:52 La force utilisée par les policiers est une force légitime.
02:56 C'est une force légitime parce que bien évidemment elle doit répondre à deux principes fondamentaux.
03:01 Le premier c'est que la force n'est utilisée que lorsqu'elle est nécessaire
03:06 et ensuite lorsqu'elle est utilisée, elle est utilisée bien sûr dans un cadre proportionné.
03:11 Donc voilà, à partir du moment où vous avez une manifestation
03:14 qui dégénère avec des groupes de casseurs qui s'en prennent au commerce,
03:19 qui s'en prennent aux forces de l'ordre, les forces de l'ordre sont tout à fait légitimes à répliquer par l'usage de la force.
03:25 Sauf que Pascal Régnon-Dubois, on a aussi vu quand même des images de ces manifestants frappés à coup de matraque.
03:31 Je pense notamment à ce qui s'était passé Place Vauban à Paris après le retour au 49.3.
03:36 Des manifestants qui a priori, et je dis bien a priori, ne semblaient pas présenter une menace.
03:40 Est-ce que vous diriez qu'il y a eu quelques dérapages au cours de ces dernières semaines ?
03:45 Quelques gestes inacceptables en manque de sang-froid ?
03:48 J'imagine que quand vous voyez ces images, ça vous choque vous aussi.
03:51 Bien sûr, bien sûr.
03:52 Mais ce qu'il faut savoir c'est qu'à partir du moment où il n'y a pas un usage de la force qui rentre dans le cadre légitime,
04:00 les policiers, et ils le savent, font l'objet d'une procédure.
04:04 À chaque fois, nous ne fermons pas les yeux, la hiérarchie ne ferme pas les yeux sur les images.
04:09 Il y a 17 enquêtes ouvertes par l'IGPL, la police des polices, il y en a qui concernent des CRS ?
04:13 Non, actuellement il n'y a pas d'enquête qui concerne les CRS, parce que je le rappelle,
04:19 nous sommes aussi formés pour ça et nous faisons attention, bien évidemment, dans le cadre de ces formations à l'usage de la force.
04:25 Mais peu importe.
04:27 Une image, moi je comprends qu'elle puisse choquer, qu'elle puisse choquer n'importe quel citoyen,
04:31 puisque nous-mêmes nous sommes choqués quand nous voyons ces images.
04:33 Mais je crois qu'il faut prendre un peu de hauteur par rapport à l'image.
04:36 Quand on voit une image qui passe en boucle régulièrement,
04:39 on ne sait pas ce qui s'est passé avant et on ne sait pas ce qui va se passer après.
04:42 Donc je pense qu'il est important aussi que nos citoyens comprennent
04:46 que de toute façon, quand il y a un geste malheureux, déplacé, non conforme en tout cas à la déontologie,
04:53 il y a derrière à chaque fois une enquête.
04:55 Jamais vous ne laissez passer quoi que ce soit, vous nous le dites ce matin sur RTL.
04:58 J'imagine que tout ça, ça a changé aussi avec les réseaux sociaux ?
05:01 Alors justement, ça a changé et vous parliez tout à l'heure du moral des troupes.
05:06 Et je crois que ça joue aussi, ça par contre, sur le moral de nos troupes.
05:10 Parce que vous savez, quand en boucle, les images que vous venez de citer passent,
05:16 les collègues ne comprennent pas pourquoi ils sont sans arrêt comme ça mis en cause.
05:22 Et je pense que ça peut avoir un effet aussi très difficile à prendre en considération pour nos effectifs.
05:30 On a entendu en début de semaine sur RTL le témoignage d'un policier qui avait été blessé à Marseille.
05:34 Je précise que ce n'est pas un CRS, mais il expliquait aujourd'hui que les manifestants
05:39 étaient beaucoup plus organisés qu'avant et beaucoup plus déterminés pour certains.
05:44 Quand on entend "certains sont là pour casser du flic, pour tuer du flic", c'est vraiment ça ?
05:49 Bien sûr, malheureusement oui. Malheureusement c'est ça.
05:52 Pour avoir discuté hier encore avec les collègues qui ont été blessés,
05:56 ils me rapportaient le niveau de violence en face.
05:59 Il suffit de regarder les projectiles qui aujourd'hui sont lancés sur les forces de l'ordre.
06:03 Des boules de pétanque remplies d'acide, des pavés, mais quand on parle de pavés, c'est de véritables pavés.
06:08 On a devant nous des gens qui malheureusement veulent s'en prendre physiquement aux forces de l'ordre.
06:13 Ce n'était pas le cas avant ? Et pendant l'époque des gilets jaunes, vous étiez à la tête des CRS, mais vous étiez numéro 2 ?
06:18 On a connu ça également pendant la période des gilets jaunes,
06:22 mais malheureusement ce phénomène s'accentue, le niveau de violence est de plus en plus élevé.
06:27 Vous êtes la première femme, Pascale Rignot-Dubois, à la tête des CRS depuis leur création en 1944.
06:32 Je crois que vous n'aimez pas trop qu'on dise ça, mais c'est une réalité.
06:36 Est-ce que ça change quelque chose ? Est-ce qu'une femme dirige différemment ?
06:40 11 000 CRS, je le rappelle, ce n'est pas une petite entreprise.
06:44 Oui, 11 000 CRS, auquel il faut ajouter le personnel administratif, donc en tout 13 500.
06:49 Alors, est-ce que ça change ? Je ne sais pas, il faudrait poser la question aux effectifs que je dirige.
06:54 En tout cas, moi je mets rarement en avant le fait que je sois la première femme chez les CRS.
07:00 Je pense que c'est un signe quand même positif pour toutes les femmes,
07:04 de savoir qu'une femme peut diriger un corps essentiellement composé d'hommes.
07:08 Il y a très peu de femmes, moins de 400 ?
07:10 Alors, moins de 4%.
07:13 Il y a 450 femmes à peu près chez les CRS.
07:18 Dont la moitié quand même en compagnie de maintien de l'ordre.
07:21 Qui sont donc sur le terrain.
07:23 Qui sont sur le terrain, qui sont effectivement sur le terrain à faire du maintien de l'ordre.
07:28 Elles font un travail remarquable.
07:30 Moi je comprends qu'il n'y ait pas beaucoup de femmes chez les CRS,
07:32 tout simplement parce que c'est une vie un peu particulière.
07:34 Alors, outre la mission qui est effectivement physique, mais ça les femmes savent le faire,
07:38 mais c'est une vie en déplacement.
07:40 C'est 220 jours de déplacement par an, et quand on est une femme, il faut pouvoir le faire,
07:44 et vivre en collectivité toute la journée avec ses collègues.
07:48 Donc voilà, mais en tout cas, moi je sais que...
07:51 Il n'y a pas eu de petite grimace quand vous êtes arrivée ?
07:54 C'est quand même plus macho que dans d'autres secteurs de la police.
07:57 Bien sûr, et sans doute qu'il y a eu des grimaces, mais je le prends avec beaucoup de recul.
08:01 J'assume pleinement, je pense que j'ai dans ma carrière occupé à chaque fois des postes importants.
08:07 Franchement oui, je prends beaucoup de recul par rapport à ça.
08:12 Merci beaucoup en tout cas d'avoir été ce matin notre invitée.
08:15 Je crois que c'est la première fois que vous preniez la parole en radio depuis votre nomination.
08:18 Tout à fait.
08:19 Merci beaucoup.
08:20 Merci à vous.
08:21 La force utilisée par la police est une force légitime, vient de nous dire notamment Pascal Regnaud Dubois.
08:24 Alors ça n'est pas terminé.
08:25 - Merci.
08:26 [SILENCE]