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L'animateur, ex-star des jeux-télés à succès de TF1 au début des années 2000, retrace le fil de sa vie dans "Je m'appelais Franck" (XO éditions). Il est l'Invité de 9H10.

Retrouvez "L'invité de Sonia Devillers" sur
https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-invite-de-9h10

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Transcription
00:00 Sonia De Villers, votre invitée ce matin a été confiée bébé à l'assistance publique.
00:04 Confiée. Moi j'avais écrit abandonné. Lui, il a écrit abandonné.
00:09 Mais finalement, non, ce sera confié.
00:11 Bonjour Vincent Lagaffe.
00:12 Bonjour.
00:12 Pourquoi confier ?
00:14 Parce qu'on abandonne un chien, on abandonne un cheval, on abandonne quelqu'un,
00:19 on abandonne quelqu'un à son sort.
00:22 Mais là, dans mon cas, je pense que Lucienne, ma mère, ma mère génétique,
00:28 ma mère biologique, elle ne m'a pas abandonné.
00:31 Elle m'a aimé cette femme.
00:32 Elle m'a terriblement aimé et elle s'est rendu compte qu'elle ne pourrait pas subvenir à mes besoins.
00:36 Donc, plutôt que de me pourrir la vie et de m'emmener dans une chute inexorable,
00:42 elle a pris son courage à deux mains et elle m'a confié à l'assistance.
00:46 L'homme qui a été votre géniteur, ce super sale con, comme vous l'écrivez.
00:51 Sale con, oui.
00:52 Vous-même.
00:53 C'est un peu injuste parce qu'elle, elle ne le traite pas de con.
00:56 Je me suis permis de le traiter de sale con parce que quand on est marié,
01:00 quand on a déjà deux enfants, on ne part pas dans une galère comme ça.
01:02 On ne part pas dans une galère comme ça.
01:03 Il a tout fait pour la faire avorter.
01:06 Et vous vous êtes accroché.
01:07 Vous êtes né en 1959, Vincent Lagaffe.
01:10 Vous vous appeliez Franck.
01:12 Je m'appelais Franck.
01:14 C'est le nom de votre autobiographie qui paraît chez Ixoédition.
01:19 C'est un récit absolument passionnant parce que c'est une plongée dans les entrailles
01:25 d'une France populaire où on va de galère en galère jusqu'à arriver au sunlight.
01:31 Et la question, c'est est-ce que sous les sunlight, les blessures sont encore là ?
01:34 Oui, quand on lit votre livre, oui, les blessures, elles sont encore là.
01:38 Vous avez été adopté par une famille d'accueil.
01:42 Pas une famille d'accueil.
01:45 J'ai été adopté par une famille.
01:46 C'est très long. Ça a pris plus de deux ans.
01:48 Oui, c'est ça.
01:50 Et vous n'avez pas que des mots tendres pour cette famille.
01:52 Vous avez eu une enfance difficile, brimée, avec un père sévère, très sévère.
01:58 Oui, j'ai eu un père sévère.
01:59 Je n'ai pas été un enfant battu.
02:01 Je n'ai pas été un enfant martyrisé.
02:03 J'avais un père qui n'avait pas grande patience et qui expliquait avec ses mains.
02:08 Maintenant, je n'ai pas eu l'enfance de tirer mes carreaux du tout.
02:14 Je n'ai pas été avoiné juste pour être avoiné.
02:18 Oui, j'avais un père qui était assez spécial, comme je le décris.
02:24 Si tu ne penses pas comme lui, tu es un con.
02:26 Si tu ne gagnes pas tant que lui, tu es un raté.
02:28 Si tu gagnes plus que lui, tu es un tricheur.
02:30 Voilà, donc c'est un exemple que je n'ai pas suivi et que je n'ai surtout pas donné à mon fils.
02:35 Avec un éternel manque d'affection, quelque chose qu'on ne retrouve jamais, en fait, depuis l'enfance.
02:41 Mais c'est des cicatrices, tout ça, qui ne se referment pas.
02:45 Alors, Nathalie, ma compagne, m'a dit "écris-le, ça te fera un bien fou".
02:48 Oui, ça m'a fait un bien fou, mais je m'aperçois qu'il n'y a aucune cicatrice qui soit vraiment réellement refermée.
02:54 Et là, aujourd'hui, je vous parle, peut-être ça s'entend dans ma voix, mais c'est dur.
03:00 Et c'est dur alors que vous êtes le mec qui a fait marrer et danser toute la France.
03:06 On s'en souvient quand même.
03:07 Beau le Lavabo.
03:08 Ça aussi, c'est une histoire le Lavabo.
03:12 Ce n'est pas un truc que j'ai écrit comme ça pour le plaisir de l'écrire.
03:15 C'est après avoir rencontré Gérard Louvain, qui m'a expliqué que pour passer dans Sacré Soirée,
03:20 c'était compliqué de laisser l'antenne en direct.
03:23 C'était un des grands producteurs de téléphones.
03:24 C'est l'empereur de la variété.
03:27 Maintenant, je pense que c'est Hervé Hubert l'empereur, parce que c'est lui qui en a fait le plus.
03:31 Mais Gérard a été notre très, très grand secours et d'une très grande aide.
03:35 Et c'est lui qui m'a dit "fais un tube et je te prends dans l'émission".
03:39 Et ça a été un énorme tube.
03:42 Mais moi, ce que je trouve assez fascinant dans cette histoire,
03:46 c'est que avant d'en arriver au carton du top 50, il y a eu des petits boulots, en pagaille.
03:52 Il y a eu Club Med.
03:53 Et le Club Med, en fait, c'est là où vous vous êtes formé.
03:57 C'est là où vous vous êtes formé.
03:58 C'est là où vous avez osé assumer les vannes, l'envie d'être sur la scène,
04:03 l'envie de faire rire, l'envie d'être applaudi.
04:05 C'est le Club Med.
04:06 - Oui, c'est le Club Med.
04:08 Ça m'a ouvert des portes, mais quelque part, ça m'a aidé parce que ça m'a appris le métier.
04:15 Mais quand on passe huit ans habillé en paréo à vivre dans le sable
04:20 et n'avoir absolument aucun souci matériel de la vie,
04:25 quand vous arrivez du jour au lendemain à Paris et que vous êtes lâché dans ce monde de crabe, de requin,
04:31 vous vous dites "attends, je ne comprends pas, j'étais au paradis et je me retrouve d'un coup en enfer".
04:35 Parce que c'est un peu une métaphore énorme.
04:38 - D'ailleurs, les premiers couperats, les premiers producteurs, rien ne va.
04:41 - Non, mais il n'y a rien qui va, que dalle.
04:43 Je me casse la gueule surtout.
04:45 Je trouve un mec que je retrouve dans les chiottes ivre mort.
04:49 Oui, c'est très compliqué.
04:50 Je me dis "attends, je ne comprends pas, il me manque un truc, il me manque une transition".
04:54 Et c'est vrai que j'aurais dû quitter le club, peut-être faire un peu de théâtre,
05:00 prendre quelques cours, m'acclimater à la vie parisienne.
05:03 - Mais qu'est-ce qu'on... Parce qu'il y a quand même eu un tilt,
05:06 il y a quand même eu un déclic au club, quand vous montez sur scène,
05:09 que vous faites marrer une salle entière pendant 40 minutes sans vous arrêter,
05:13 et là vous vous dites "je tiens à un truc".
05:15 Et en fait, est-ce que vous tenez un truc qui est lié à cette naissance, à cette enfance, à cet abandon ?
05:22 Est-ce qu'il y a quelque chose de "on me regarde, je fais rire, on m'applaudit".
05:28 Est-ce qu'on récupère quelque chose à ce moment-là ?
05:30 - Oui, évidemment. Je fais rire, donc on me regarde.
05:34 Si on me regarde, c'est que j'intéresse. Si j'intéresse, peut-être qu'on m'aime.
05:38 Mais c'était surtout cette devise que j'ai au fond de moi depuis toujours,
05:44 que j'ai fini par tatouer sur mon meulet, qui est le "R.A.B.Q.Q.A".
05:48 J'en ai rien à branler, quoi qu'il arrive. Je fais mon truc.
05:52 Je ne dois rien, mais rien à personne.
05:56 Si je me plante, je me plante. Mais si je réussis, au moins je réessayais.
06:00 - Oui. Alors ça, c'est le big deal.
06:02 - La chouette de soeur, la tortue du frère, l'escargot de la mère.
06:07 Pour la beauté du jeu, j'éliminerai la mère, moi.
06:09 - Tu ne sais pas où elle est, la voiture ?
06:11 - Si ! - Non !
06:13 - Ah, bien sûr que si ! - Allez, le frère !
06:15 - C'est une bêtise.
06:16 - C'est le big deal. C'est des soirées sur TF1, c'est des audiences à 7 millions de téléspectateurs.
06:21 Ça rend dingue ? - Oui.
06:22 - Ça rend dingue ?
06:23 - Oui. Ce n'est pas que ça rend dingue. C'est qu'il y a un moment où tu peux tout te permettre.
06:28 Parce que tu fais une telle recette publicitaire que de toute façon, on va te pardonner tous tes excès.
06:33 Donc, tente. T'en as rien à foutre.
06:35 On va te dire oui ou on te dira non, mais on va te le dire avec le sourire.
06:38 Tant que ça marche.
06:40 Parce que le jour où ça s'arrête, on te le dit avec le même sourire.
06:44 Et tu sens bien que le sourire, il y a un gros foutage de gueule derrière.
06:47 - Et dans l'idée de cette France qui se met à vous applaudir, cette France qui se met à vous aimer,
06:52 qui est en manque d'affection depuis toujours. - C'est génial.
06:55 - Oui, c'est génial. Après, vous le racontez aussi, il y a un moment où on ne s'appartient plus.
06:59 - Il y a un moment c'est trop.
07:01 Il y a un moment où, quand les gens se permettent de faire le pied de grue devant chez vous,
07:07 quand les gens vous interpellent dans la rue, quand vous rentrez dans un cinéma et qu'au milieu du film,
07:10 tu entends "Oui, les boules de lavabo".
07:13 Il y a un moment où tu te dis "Les mecs, c'est bon, à la télé, je suis drôle, mais chez moi, lâchez-moi la grappe".
07:18 Mais non, tu appartiens au public.
07:20 Tu appartiens aux gens, donc tu te dois de te donner aux gens.
07:23 Et les gens qui viennent te voir dans la rue viennent te donner chacun leur tour de l'amour.
07:28 Et ils ne savent pas qu'ils sont le 40ème de la journée.
07:31 Et tu es obligé de faire avec.
07:32 Maintenant, comme disait Coluche, j'aime bien ce métier, je n'aime pas le service après-vente, mais tu ne passes pas à travers.
07:40 - Vous avez grandi dans ce métier avec les Palmades, avec les Bigard.
07:44 Tout ça, c'était la bande de Guilux, en fait. C'était la classe.
07:48 Michel Larocque, Anne Roumanoff, on a été un paquet à passer par chez Guilux.
07:53 - Et c'est intéressant parce que Palmades, il s'est cramé complètement, complètement au feu des Sunlight.
07:59 Ça a mis le doigt sur toutes ces failles, sur toutes ces addictions.
08:02 Et on ne va pas refaire l'affaire qui est en ce moment.
08:05 Mais Bigard aussi, d'une certaine manière.
08:08 - Oui, c'est vrai qu'il faut être très, très, très bien entouré.
08:12 Et moi, j'avais la chance d'être entouré non pas par des gens du métier, mais par les gens de ma famille.
08:17 - Allons bons ! - Oui, il y avait Véronique, ma femme.
08:22 - La famille que vous, vous êtes reconstruite.
08:23 - Oui, absolument. Qui est la mère de Robin, qui a été mon producteur, ma secrétaire, mon manager, mon impresario.
08:32 Ensuite, il y a eu Fred, mon beau-frère, qui a été mon directeur artistique, mon garde du corps, mon régisseur.
08:39 Et puis, j'avais des amis très proches et très sincères.
08:43 Et puis, j'avais une équipe qui ne venait pas de la télé, qui venait pas du show business, qui venait que du rock'n'roll.
08:48 Et un et un chez deux, ça fait deux. Ça fait pas "oui, on verra ce que ça peut faire". Non. C'était toujours très clair.
08:54 - Et Bigard, qui aujourd'hui s'est fait le porte-parole d'une certaine France populaire,
09:02 qu'il estime pas assez écoutée, méprisée, écrasée.
09:06 Vous n'avez jamais eu cette tentation-là ? Parce que vous souleviez les foules à l'époque.
09:11 Vous souleviez les foules. Et il y a beaucoup de gens qui vous ont vu comme un porte-voix,
09:15 comme quelqu'un qui leur ressemblait à la télévision.
09:18 - Oui, mais moi, je revendique le fait de faire partie de la France d'en bas.
09:22 Moi, j'ai quitté l'école vachement tôt. Pour moi, le bac, c'est un bateau.
09:29 Mais oui, j'ai jamais revendiqué... - Pour moi, le bac, c'est un bateau.
09:34 - Mais j'ai jamais revendiqué le fait de pouvoir être vecteur de quoi que ce soit.
09:41 Loin de moi, l'idée de passer des messages, je ne suis pas là.
09:43 Alors, il y a des gens qui disent que quand on est une personne publique
09:46 et qu'on a accès aux grands médias, on se doit de faire passer des messages.
09:50 Non, je ne suis pas là pour faire passer un message, pour dire ce qui est bien ou pas bien.
09:53 Je suis là pour faire marrer les gens et pour les sortir un petit peu de leur ennui.
09:57 - Oui, oui. Pinot d'Anjou, parce que quand même, on est vendredi et qu'on va danser ce week-end.
10:02 Il est 9h19, vous êtes sur France Inter et vous écoutez Vincent Lagaffe,
10:06 qui s'appelait Franck à la naissance.
10:11 On va raconter que cette mère biologique, un jour, vous l'avez retrouvée.
10:15 Et que... Bon, on va raconter, parce que l'histoire est folle.
10:20 - Je chante parce que je vais pleurer dans deux minutes.
10:23 ...
10:45 ...
11:14 ...
11:25 ...
11:41 ...
12:10 ...
12:12 Pinot d'Anjou, quoi l'idée ! Elle est bien, elle est bien.
12:16 Alors, Béatrice Bessières, Maria Pesquet à la réalisation, Redouane Tella, Grégoire Nicolet à la programmation,
12:22 Elisabeth Rouvet qui ira loin dans la vie, cette petite, c'est moi qui vous le dis.
12:27 Et la musique est signée JB Audibert.
12:30 Nous tous, on vous souhaite beaucoup, beaucoup de variété italienne ce week-end.
12:35 - Quelle idée !
12:41 - Mon invité, c'est Vincent Lagaffe, méga star des années 90 et du début des années 2000,
12:48 méga star au Top 50 et à la télévision.
12:51 Il publie son autobiographie "Je m'appelais Franck".
12:55 Un jour, vous avez retrouvé votre mère biologique.
12:58 - J'ai cherché. - Vous l'avez cherché, ouais.
13:02 - C'est rare d'ailleurs de pouvoir la retrouver. - Aussi facilement, oui, c'est très rare.
13:06 Mais j'ai eu la chance de tomber sur un procureur de la République à Rouen qui allait à la retraite.
13:11 Et ça aussi, c'est une histoire incroyable.
13:13 C'est que quand je suis rentré dans le bureau du procureur qui allait partir à la retraite,
13:18 il m'a dit en gros "je savais que vous alliez venir" et il m'a tendu une enveloppe.
13:23 Je n'ai rien demandé. - Et il y avait tout.
13:25 - Il y avait tout, il y avait mon acte de naissance, il y avait le bulletin de santé,
13:29 il y avait mon suivi médical et puis il m'a dit "demain matin, repassez, j'ai quelque chose pour vous".
13:37 Mais c'est totalement... Je n'ai pas le droit de vous le donner.
13:39 Et je suis repassé le lendemain matin et sous le manteau, il m'a filé l'adresse de ma mère biologique.
13:45 - De Lucienne. Elle ne vous a pas du tout accueilli les bras ouverts et ça, c'était extrêmement violent.
13:51 - Ah j'ai pleuré. - Elle vous a chassé.
13:53 - Ah ouais, ouais, ouais. Je suis arrivé devant le portail.
13:55 Elle sortait de sa maison et je lui ai dit "vous êtes Lucienne ?"
13:58 Elle me l'a dit "oui, je sais tout à fait qui vous êtes, je vais vous demander de partir, monsieur".
14:02 Je lui ai dit "attendez, j'ai fait mille bornes pour venir vous voir".
14:04 "Je ne veux pas savoir, monsieur, vous partez".
14:07 Là, tu te fais abandonner une deuxième fois. - Vraiment.
14:12 - Et là... - Pas confié, abandonné, chassé.
14:13 - Et là, je retourne dans la voiture où Nathalie m'attendait avec les chiens
14:18 et je fends l'arme, je meurs, je meurs.
14:21 Voilà, deux fois de suite, la même personne.
14:25 Donc elle me dit "attends, on n'a pas fait mille bornes comme dirait Bigard,
14:28 j'ai pas fait mille bornes pour caler à trois mètres du bol de sangria".
14:31 Google est mon amie, on cherche son téléphone, je trouve son téléphone,
14:34 j'appelle en disant "pourvu que ce soit elle qui décroche et pas lui".
14:37 Je l'appelle, je lui dis "écoutez, vous venez de me jeter,
14:41 je suis la personne que vous avez vue devant votre portail.
14:43 Avant de vous raccrocher, je vais vous dire, je m'appelais Franck
14:46 et je suis né le 30 octobre 59".
14:48 Là, il y a un silence.
14:51 Et elle me dit "retrouvez-moi cet après-midi sur le parking de la piscine,
14:56 j'ai besoin de vous parler, j'ai besoin de vous parler".
14:59 Et moi, donc.
15:00 - Six heures. - Six heures.
15:01 - Six heures. - J'ai pas dit un mot.
15:03 - Elle a tout déballé.
15:04 - Elle a tout, mais tout lâché, comme ça.
15:07 Mais avec une simplicité, une clarté, une mémoire.
15:12 C'était incroyable, j'avais l'impression qu'elle lisait un truc.
15:15 C'était d'une fluidité.
15:18 Et là, vous racontez une histoire que pas un scénariste
15:21 n'aurait osé mettre dans un film de cinéma,
15:24 que pas un scénariste n'aurait osé mettre dans une série.
15:29 Cette femme Lucienne,
15:31 elle a eu une deuxième histoire très malheureuse.
15:35 Elle a été encore la femme clandestine d'un homme marié.
15:39 Elle a été encore engrossée par un homme qui ne voulait pas d'elle
15:42 et qui ne voulait pas des enfants.
15:43 Elle a eu des jumeaux qu'on l'a obligée à abandonner.
15:47 Qu'on a volés, on les lui a volés.
15:50 Oui, on l'a forcée à les abandonner.
15:54 On s'est dit qu'il y avait des amis de cette bourgeoisie...
15:59 - Des notables.
16:00 - Des notables de ce village qui étaient prêts à les accueillir.
16:03 Mais c'est pas qu'ils étaient prêts à les accueillir,
16:04 c'est que tous les papiers étaient déjà faits.
16:07 Il fallait qu'elle signe, donc ils l'ont obligée à signer.
16:10 Ils lui ont volé ses enfants.
16:11 Et ensuite, le patron de l'auberge dans laquelle elle travaillait
16:15 a fait ses bagages dans un sac, a jeté le sac sur le trottoir,
16:19 l'a mis sur le trottoir en disant "maintenant on veut plus de toi, va-t'en".
16:23 - Il y a des jumeaux.
16:25 Ses enfants, c'était des jumeaux.
16:26 Et il y en a un des deux qu'elle a appelé Franck.
16:29 Franck, comme vous vous appeliez, ce premier enfant
16:32 qu'elle a été obligée de confier à l'assistance publique.
16:36 Et puis des années après, elle rencontre un homme qu'elle va épouser.
16:39 Et puis elle a à nouveau deux enfants.
16:41 Et parmi ces deux enfants...
16:44 - Le garçon s'appelle Franck.
16:46 - Le garçon s'appelle Franck.
16:47 Trois Franck.
16:50 Quand je dis que là, il n'y a pas un scénariste qui aurait osé...
16:54 - Ça prouve qu'elle m'a aimé.
16:57 Ça prouve que je suis resté dans son cœur.
17:00 Ça prouve que toute sa vie, elle a pensé à moi.
17:03 Et que, ben ouais, elle a appelé ses gamins en fonction de son premier drame.
17:12 Je suis resté là jusqu'au bout et je suis toujours là.
17:14 - Puisqu'elle est toujours vivante.
17:16 - Vous n'avez plus aucune relation avec elle.
17:18 - Non, on n'en cherche pas. On a pu se dire les vérités.
17:20 Et à vrai dire, j'avais surtout besoin d'entendre
17:24 que je n'étais pas un enfant issu d'un viol ou d'un inceste.
17:27 Voilà, ça, ça m'a fait le plus grand bien.
17:29 Parce que je sais pertinemment que j'aurais foutu ma vie en l'air
17:31 si j'avais appris que mon père était mon grand-père.
17:33 Je pense que j'aurais buté quelqu'un à ce jour-là.
17:38 - Le deuxième Franck, celui des deux jumeaux,
17:41 a tout fait pour essayer de la retrouver.
17:43 Il a même participé.
17:46 - Il a fait appel à l'émission "Il n'y a que la vérité qui compte"
17:49 qui a été une catastrophe pour cette femme.
17:52 Alors, je ne peux même pas en vouloir à Bataillé-Fontaine
17:54 parce qu'il ne se rendait pas compte du mal qu'ils ont fait à cette femme.
17:58 Je préfère le penser.
18:00 Je préfère me dire que c'était dans les lumières du show business.
18:04 On ne regarde pas derrière, on regarde devant.
18:07 Mais c'est dramatique ce qui s'est passé dans cette émission
18:09 parce qu'elle y a été avec son époux
18:12 qui n'était pas au courant du tout de sa vie
18:15 et qui l'a découvert en direct.
18:17 Et du coup, il a fait un AVC.
18:18 - Ils ont quand même abusé de la crédulité de cette femme
18:21 qu'ils ont attirée sur un plateau de télévision.
18:23 Basta, ça a été fait comme ça.
18:26 Moi, ce que je vois dans ce bouquin, Vincent Lagaffe,
18:28 c'est que vous êtes le plus gros casse-cou du PAF.
18:30 Vous avez fait toutes les combines, toutes les pirouettes, toutes les cascades.
18:35 Vous avez été un maboule de jet-ski.
18:37 Vous avez été jusqu'à passer le cap-horne à jet-ski.
18:41 Vous faites du raid-aventure et tout ça.
18:43 Et là, vous arrivez à France Inter avec deux béquilles.
18:46 - C'est la suite logique d'un casse-cou qui a fait le con pendant 40 ans et qui paye.
18:52 Parce que si aujourd'hui, à 63 ans,
18:55 ma tête me dit "putain, la vague est belle, vas-y saute là",
18:58 mon corps me dit "oh, c'est bon, t'en as suffisamment sauté".
19:01 Donc, maintenant, j'apprends à me calmer.
19:03 J'apprends à faire la différence entre mon corps et mon esprit.
19:06 - C'est ça.
19:07 Mais est-ce qu'il y avait quelque chose de ce bébé qui n'aurait pas dû naître,
19:10 qui toute sa vie a mis son corps à rude épreuve, a failli crever ?
19:15 Vous avez failli crever combien de fois, Lagaffe ?
19:17 C'est combien de fois dans ce livre ?
19:18 - Je suis mort, je suis déclaré mort deux fois.
19:23 Mais oui, je ne sais pas, je ne peux pas analyser.
19:29 Je vais vous dire que...
19:30 - C'est-à-dire, vous n'avez pas fait comme Bigard, vous n'avez pas fait comme Palmat,
19:33 vous, vous n'êtes pas cramé totalement au feu des Sunlight
19:36 et vous n'avez pas perdu votre âme et vous n'êtes pas déglingué, etc.
19:39 - Non, non, j'ai profité de la vie.
19:41 - Oui, profité de la vie, mais vous avez poussé loin la vie.
19:44 - Oui, j'ai été vachement loin, j'ai été jusqu'à la mort.
19:47 Non pas que je suis casse-cou, mais je pense que tu fais ou tu ne fais pas,
19:53 c'est on, off, ça roule ou c'est sur la remorque.
19:56 Pourquoi faire un truc à demi ? Non, fais-le à fond, on verra bien.
19:59 Fais-le, vas-y, avance, tu peux être le premier, mais à fond.
20:03 Alors c'est vrai que je prends une métaphore que j'aime beaucoup,
20:06 c'est au début de ma carrière, je me disais "Où tu vas pas, tu vois pas".
20:09 Où tu vois pas, tu vas pas.
20:11 Mais après c'est vrai que j'ai été, comme disait Jean-Louis Schlesser,
20:14 "Reste à fond, c'est peut-être plat derrière la bosse".
20:17 - Vincent Lagaffe, je m'appelais Franck, Ixo, édition.
20:21 Sacrée histoire, sacrée histoire, vraiment.
20:24 - Merci Sonia De Villers, merci à tous les deux.

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