Justine Marcotte (Ville de Lège Cap-Ferret) et Nicolas Maddine (IRIS Conseil) nous expliquent comment ils ont repensé l’espace public entre ville et plage : désimperméabilisation, aménagement durable, et une modélisation inédite du trait de côte.
Justine Marcotte, directrice générale adjointe Développement territorial, Ville de Lège Cap-Ferret
Justine Marcotte, directrice générale adjointe Développement territorial, Ville de Lège Cap-Ferret
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00:00On se pose la question tout de suite dans Smartimo, comment lutter contre l'érosion du littoral ?
00:09On part du côté de Lège-Cap-Ferret.
00:11On va étudier le cas justement de cette ville avec une spécialiste, c'est Justine Marcotte.
00:16Bonjour Justine.
00:17Bonjour.
00:18Vous êtes Directrice Générale Adjointe Développement Territorial dans cette ville, Lège-Cap-Ferret,
00:21et vous êtes venue en compagnie de Nicolas Madine.
00:23Bonjour Nicolas.
00:24Bonjour.
00:25Vous êtes ingénieur en aménagement urbain et paysagiste de Iris Conseil.
00:29Iris Conseil qui conseille justement sur cette épineuse question du retrait de côte.
00:34Est-ce que vous pouvez nous dire déjà un mot de Iris Conseil ?
00:37Alors Iris Conseil, c'est un bureau d'études d'ingénierie généraliste.
00:45On est 140 collaborateurs sur 7 sites en France, Metz, Lille, Saint-Quentin, Chartres, Bordeaux, Marseille.
00:51Il y a une agence à Rabat également.
00:53140 collaborateurs, 12 millions de chiffres d'affaires.
00:58Et 5 activités sur lesquelles nous travaillons.
01:00Les infrastructures de transport, l'aménagement urbain, le paysage, l'environnement et la mobilité douce.
01:10Très bien.
01:11Et justement, vous avez été sollicité par l'agglomération.
01:14Quel était le projet ?
01:16Alors le projet, on a répondu à un appel d'offre.
01:19Le projet qui consistait à répondre face au recul du retrait de côte,
01:26c'était la relocalisation des équipements sur la dune et le réaménagement de l'avenue de l'Océan.
01:33C'était travailler sur un trait d'union entre cette plage et la ville pour réaménager l'accès à la plage
01:41et relocaliser ces équipements qui allaient être grignotés par la mer qui avançait de manière inéluctable sur la dune.
01:51Justine Marcotte, c'est vrai qu'on voit ce problème du trait de côte qui évolue.
01:56L'océan qui grignote du terrain, c'est une préoccupation.
02:00Depuis quand vous avez lancé ce grand projet ?
02:03En fait, on a lancé en 2014.
02:06On a adhéré à une stratégie locale de gestion du trait de côte qui englobe d'ailleurs plusieurs communes,
02:11dont la nôtre et qui finalement aide à la préservation des biens et des personnes sur les communes littorales concernées par le risque d'érosion.
02:21La relocalisation faisait partie des actions potentielles de cette stratégie locale.
02:29Le fait de commencer par la plage de l'Horizon, qui est une plage surveillée au Cap-Ferret,
02:34très fréquentée et pour laquelle il existait des équipements publics touristiques qui nécessitaient une relocalisation,
02:41c'est plutôt une évidence.
02:43On a commencé à y réfléchir il y a six ans à peu près et l'idée d'englober la partie urbaine avec est arrivée un ou deux ans après.
02:55Sur votre commune, c'est vrai qu'il y a deux aménagements en un.
02:58On explique, il y a côté plage et côté ville.
03:00Exactement.
03:01Puisqu'en fait, lorsqu'on s'est intéressé à ce sujet de relocalisation,
03:07on s'est rendu compte que c'était la plage la plus fréquentée du Cap-Ferret puisque plage surveillée
03:14et que l'accès à cette plage était complètement dépassé, plus du tout adapté à l'usage qui en était fait.
03:20On avait énormément de vélos qui stationnaient de manière un peu anarchique partout.
03:24L'espace était partagé entre le stationnement, la voirie où les véhicules circulaient au milieu des vélos.
03:32Les piétons se débrouillaient à se trouver une place là-dedans.
03:34On s'est dit quitte à relocaliser et à réménager tout cet espace dunaire,
03:38pourquoi ne pas en profiter pour aussi s'occuper de la partie urbaine qui finalement amène jusqu'à cette plage
03:43avec l'idée de presque faire descendre la plage sur la partie urbaine
03:47pour envisager les choses en désimperméabilisant cet espace-là
03:52et créer du liant entre l'espace dunaire et l'espace urbain.
03:55Alors désimperméabiliser à 80%, vous avez souhaité le faire, c'était très ambitieux ?
04:00C'était très ambitieux, c'était une vraie volonté politique de l'équipe municipale en place.
04:04La volonté, c'était leur slogan et qu'il est toujours, c'est ville nature.
04:09Donc voilà, cette idée de désimperméabiliser à tout prix, de retrouver cette place-là de la nature
04:17et sous la forme d'un laboratoire où on allait tester des revêtements différents.
04:23Quel type de revêtements ? Parce qu'on se dit, pour enlever 80% de routes de béton finalement,
04:29qu'est-ce qu'on met à la place ?
04:31Sur la technicité, je passerai plutôt la parole à Nicolas.
04:34Mais tous ces revêtements, l'idée c'était d'avoir des choses qui soient très perméables,
04:40un mélange de sable, de terre, de grépein, de tout ce qu'on avait chez nous
04:44et après des revêtements effectivement plus durs pour la voirie et la circulation des véhicules.
04:48Mais je crois que Nicolas en parlera bien mieux que moi.
04:50Alors justement, chez RIS Conseil, vous n'êtes pas à votre coup d'essai sur cette thématique.
04:55Vous avez déjà travaillé sur d'autres plages, notamment Andaï-Sous-Lac-Mémisans.
05:00Comment ça s'est organisé pour ce projet à l'Âge Cap-Ferré ?
05:06C'est vrai qu'on avait une expérience sur l'aménagement de fronts de mer,
05:10soit dans les sites urbains comme au Sable d'Olonne.
05:12Mais effectivement, comme vous le citiez, sur Andaï, sur Mémisans, c'est l'aménagement d'une place.
05:16Évidemment, le contexte n'est pas exactement similaire.
05:20Mais en tout cas, on a pu, avec cette expérience-là dans Sablemont,
05:24savoir comment on pouvait rendre un espace résilient.
05:27Et sur d'autres exemples d'aménagements urbains,
05:31où aujourd'hui c'est les grands enjeux de désinformabiliser,
05:36on a pu théoriser un peu toute cette expérience-là
05:40et proposer dans cet aménagement-là des matériaux spécifiques et locaux
05:46pour essayer de coller le plus possible au territoire.
05:49Parce que bien sûr, on le disait à l'instant, il ne faut pas que ça empêche la mobilité.
05:52Il y a des flux énormes, notamment en été, bien évidemment.
05:54Ça a été un des enjeux de ce projet.
05:56C'est-à-dire qu'en fonction des différentes contraintes,
05:59maintenir une circulation tout en la contrôlant l'été
06:03pour éviter qu'il y ait un afflux massif de véhicules,
06:06maintenir un accès et favoriser les circulations douces,
06:11notamment les vélos, les piétons,
06:13puisqu'avec la pression touristique, on voit qu'il y a énormément de monde
06:16qui vient sur cette plage l'été.
06:18Maintenir évidemment les infrastructures ferroviaires,
06:21ce train touristique qui part du bassin et qui monte sur la dune.
06:27Donc évidemment, c'est très normé tout ça.
06:30Il faut absolument respecter tout ça.
06:32On a proposé avec notre partenaire un nouveau type d'aménagement
06:36avec une commande de la ville qui était surtout ne nous faites pas une rue.
06:40L'innovation a été de créer un aménagement
06:44qui ne ressemble pas à un aménagement qu'on a l'habitude de voir d'habitude.
06:47Donc on évite les bordures, on évite tous les éléments
06:51qui peuvent faire penser à une rue classique.
06:53Très bien. Dans ce genre de projet, Justine Mercotte,
06:55c'est vrai que la vie bien sûr des habitants est très importante.
06:58Est-ce que vous avez travaillé en concertation, en co-construction ?
07:01Vous avez tenu les habitants au courant des phases du projet ?
07:04Alors oui, d'abord l'avantage, c'est que les résidents à l'année,
07:07ils sont là tout le temps et nous, on avait une facilité
07:10de discuter avec eux, en tout cas les élus.
07:12Ensuite, on a aussi fait des réunions d'informations évidemment
07:15et de discussions avec eux parce qu'il y a eu un enjeu de stationnement.
07:18C'était des gens qui stationnaient dans la rue finalement
07:21parce que le Cap Ferré, c'est beaucoup de monde l'été,
07:24mais l'hiver, ce n'est vraiment pas grand monde.
07:26Donc il est très facile de stationner devant chez soi
07:28plutôt que de rentrer son véhicule chez lui.
07:30Donc il y avait toute cette acculturation à avoir
07:32en expliquant qu'ils n'allaient plus pouvoir se stationner
07:35en dehors de chez eux.
07:37Et on avait quand même aussi deux commerçants,
07:39un à l'entrée de l'avenue de l'Océan
07:41et un autre plutôt côté d'Une,
07:43avec qui on a essayé de trouver des accords
07:48pour qu'ils puissent faire perdurer leur activité au mieux
07:52pendant la période des travaux.
07:53Oui, on explique.
07:54C'est vrai qu'au niveau des commerçants, c'est contre-intuitif,
07:57mais souvent le commerçant se dit
07:59s'il n'y a plus le flux de véhicules qui passent devant mon magasin,
08:02peut-être je vais faire moins de business.
08:03Or, on s'aperçoit qu'une rue piétonne,
08:05finalement, ça fait autant, voire plus de business au final.
08:08Alors ça, vous leur demanderez.
08:09Mais en tout cas, ce qui est sûr, c'est que je crois
08:11qu'après un été de vie de cet aménagement,
08:14tout le monde est très content. Vraiment.
08:16La mission est plutôt remplie.
08:18Quels sont les freins, les obstacles principaux du côté d'Iris
08:21que vous avez observés peut-être ?
08:23On n'a pas constaté vraiment de frein.
08:25En fait, c'était plutôt prendre en compte l'ensemble des paramètres
08:30et des différentes contraintes pour composer un espace
08:33qui puisse être fonctionnel, amène
08:35et qui puisse être pérenne également.
08:38L'idée, c'était de proposer un aménagement
08:41qui puisse durer dans le temps.
08:43Évidemment, c'est un aménagement qui est quelque part,
08:46un aménagement qui est mal conçu.
08:47Il vit mal et il devient très rapidement obsolète.
08:50Donc, la contrainte, mis à part les différentes contraintes
08:54que j'évoquais tout à l'heure,
08:55qui sont des contraintes très techniques,
08:57mais qui sont néanmoins importantes.
08:58La gestion d'une eau pluviale, si elle est mal gérée,
09:02ça peut créer vraiment de gros désordres
09:05et voire même gêner tous les riverains, les habitants.
09:08Donc, à part toutes ces différentes contraintes techniques,
09:10qu'on a l'habitude de travailler,
09:11mais qu'on a dû adapter au contexte local.
09:14En tant qu'ingénieur, c'est un peu notre quotidien.
09:17Est-ce qu'il y aura une phase 2 au projet ?
09:19Ou quels sont les prochains développements sur votre commune ?
09:22L'idée des élus, c'était que cet aménagement-là
09:26soit le début d'autres,
09:28avec cette idée de réversibilité.
09:32C'est-à-dire que ce sont des aménagements
09:33qui, parce qu'ils sont très fréquentés l'été,
09:34doivent vivre très bien l'été,
09:36mais doivent aussi vivre très bien l'hiver
09:38et pour les habitants à l'année.
09:40Donc, on a en fait cet espace urbain-là
09:43qui arrive jusqu'à la dune,
09:45et le prolongement d'une artère un peu principale
09:48qui va directement jusqu'au bassin.
09:51Ce sera peut-être l'occasion de la prolonger, effectivement.
09:53En tout cas, ça donne envie d'aller voir ces aménagements,
09:56d'aller voir la transformation de la ville.
09:59Bien évidemment, du côté d'Iris,
10:01on a encore engrangé de l'expérience avec un tel projet.
10:03Est-ce qu'il y a d'autres communes qui sont face
10:06à cette problématique du retrait du trait de côte
10:08et qui vous sollicitent en ce moment ?
10:11Pour l'instant, il n'y a pas d'appel d'offres
10:13qui sortent avec cette problématique-là.
10:17On sait qu'il y a différentes communes
10:19qui font face à ce recul du trait de côte
10:22et à des risques de submersion.
10:24C'est un des enjeux qui vont arriver dans ces prochaines années.
10:29Avec cette expérience-là, on est prêt à répondre
10:32à tous les appels d'offres possibles.
10:35C'est un enjeu colossal, parce que c'est vrai
10:37que ce sont des habitations qui peuvent disparaître,
10:39ce sont des commerces.
10:41Il y a un enjeu de sécurité aussi.
10:43Exactement, et je voulais ajouter que dans notre malheur
10:47en commune littorale, on a une chance inouïe,
10:49c'est qu'on est beaucoup accompagnés par le GIP littoral,
10:52qui est un groupement d'intérêts publics
10:53et qui nous aiguille énormément, notamment dans les appels d'offres,
10:56notamment dans la définition et l'écriture même des marchés.
11:00C'est un partenaire essentiel pour nous,
11:02pareil sur la recherche de financement,
11:03parce que c'est quand même des travaux très ambitieux,
11:07souvent très onéreux, et pour une petite commune comme la nôtre,
11:10c'est une chance de pouvoir être accompagnés par le GIP littoral.
11:14Il y a l'argent, puis il y a l'ingénierie aussi qu'il faut,
11:16c'est-à-dire être bien accompagnés,
11:18pouvoir faire le projet dans les différentes phases.
11:21Tiens, un petit clin d'œil Média,
11:23puisque vous avez été suivi dans cette aventure
11:26par une équipe, nos confrères de TF1,
11:28je crois qu'on verra le sujet bientôt.
11:31C'était quelque chose de travailler sous l'œil des caméras,
11:34ça vous a motivé chez Iris Conseil ?
11:36Alors, pour être très clair,
11:37moi je n'ai pas participé à ce tournage-là,
11:40puisqu'il y a eu quelques jours de tournage qui ont été faits.
11:42Un de mes responsables, Xavier Filiatre, a pu y participer.
11:46Je vais dire qu'on travaille sous l'œil d'une caméra,
11:50ça ne nous change pas grand-chose.
11:52Ce qu'on essaie de faire, de toute façon,
11:53c'est de l'excellence, quelle que soit la pression retenue.
11:56Le premier regard, c'est un peu celui du mat' d'ouvrage,
11:59c'est celui qu'on a envie de satisfaire, évidemment.
12:01Donc, pas vraiment, on va dire, pas vraiment une contrainte.
12:04D'accord. Et pour vous, il y aurait au moins une trace
12:06de ces travaux ambitieux ?
12:08Évidemment, en tout cas, c'est des images, évidemment.
12:11C'est le mandataire du marché,
12:13aussi l'atelier du Periscope avec qui Iris a travaillé,
12:16qui vont pouvoir représenter quand même l'enjeu pharaonique
12:20que peut-être la relocalisation de ces équipements.
12:23Voilà, en tout cas, à découvrir très bientôt
12:26chez nos confrères de la première chaîne nationale.
12:28En tout cas, un grand merci.
12:29On en sait un petit peu plus sur cette lutte
12:31contre l'érosion du littoral
12:33et les outils pour y remédier.
12:36Merci à Justine Marcotte, je rappelle que vous êtes
12:38Directrice Générale Adjointe Développement Territorial
12:40Ville de Lèges-Cap-Ferré.
12:42Merci à vous et merci également à Nicolas Madine,
12:44ingénieur en aménagement urbain et paysagiste chez Iris.
12:47Conseil, merci à vous et à très bientôt sur Bismarck.