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Dans "le débat du 7/10" mercredi 19 mars sur France Inter, regards croisés sur la création audiovisuelle, à l'occasion du festival Séries Mania, à Lille, du 21 au 28 mars. Laurence Herszberg, directrice générale du festival Séries Mania, et Anne Landois, scénariste de la nouvelle série “37 secondes” en compétition française au festival, étaient les invités.

Retrouvez « Le débat du 7/10 » sur France Inter et sur : https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/le-debat-du-7-10

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00:00Débat ce matin sur les séries télé, alors qu'ouvre vendredi et pour huit jours le festival
00:07international « Cérimania ». C'est le plus grand événement de ce type en Europe,
00:11cent mille visiteurs l'année dernière, avec l'occasion de se pencher sur les tendances
00:17d'un genre ayant acquis ses lettres de noblesse tout en restant populaire.
00:22On va en parler avec Laurence Herzberg, bonjour, vous êtes la directrice générale de Cérimania,
00:29depuis 2010, autrefois directrice du Forum des images, également avec nous au micro
00:36d'Inter, Anne Landoy, bonjour, scénariste notamment de la série culte en grenage sur
00:43Canal+, vous présentez au festival Cérimania 37 secondes, qui sera diffusé sur Arte les
00:50jeudis 3 et 10 avril à 20h55, disponible à partir du 26 mars sur arte.tv.
00:59Bienvenue dans ce studio, à Cérimania, cette année, pardon, pour avoir 48 séries venues
01:07de 19 pays différents, alors Laurence Herzberg, exercice de géographie, quels pays sont
01:14là en force ? Quels pays émergent ? Quelle est la géographie fine des séries en 2025 ?
01:21Quelle belle question de commencer par une question géopolitique.
01:26Voilà, géopolitique des séries.
01:28Pour montrer que les séries, c'est un phénomène international.
01:32On connaît bien sûr tous la grande force des séries américaines et on en aura plusieurs
01:39à Cérimania avec des stars, Amanda Seyfried sur Long Bright River, Christina Hendricks
01:45avec Small Town, Big Lies, une série aussi indépendante américaine, Alan Harper.
01:51Autour de ça, l'Europe n'est pas en reste, l'Europe est aussi un continent des séries,
01:58bien évidemment on parle des séries anglaises.
02:01Cette année, c'est la force de l'Espagne qui, avec pas moins de 5 séries, arrive absolument
02:09à Cérimania, bien évidemment des séries françaises.
02:11C'est un pays émergent dans l'univers des séries ?
02:13C'est un pays dont l'écosystème économique a permis une grande créativité.
02:18Et puis on a aussi des pays qui arrivent, on a le Brésil qui arrive, on a le retour
02:23des Iraniens pour la deuxième fois, on connaît leur cinéma, Golshifteh, votre invité, en
02:28parlera après, et on découvre l'univers des séries iraniennes, le Brésil, la Corée
02:35bien sûr.
02:36Donc c'est vraiment un festival mondial, l'an dernier on avait eu la joie d'avoir
02:41une série Letton qui avait gagné d'ailleurs un prix d'interprétation, donc c'est vraiment
02:47un phénomène mondial.
02:48Les Etats-Unis restent un mastodonte, ils sont toujours aussi créatifs, les choses
02:54ont évolué ces derniers temps ?
02:55Alors on est entre nous, un large entre nous, mais il y a peut-être parfois un petit peu
03:01moins de créativité, c'est vrai, il y a une course absolument extrêmement importante
03:06entre toutes les plateformes américaines, donc elles essaient souvent de brasser très
03:12large, d'avoir le plus grand nombre de spectateurs, et nous à l'autre bout de la chaîne quand
03:18on en regarde, on en regarde au moins 400, on a l'impression parfois d'une perte de
03:21créativité, et que la créativité elle est peut-être un petit peu à trouver ailleurs.
03:25Alors c'est un petit peu général, mais c'est peut-être pas aussi créatif qu'ailleurs.
03:29Et la France alors ?
03:30Alors la France, elle a fait des bons énormes, grâce à des gens aussi talentueux qu'Anne
03:37Landoy, la France a été l'un des derniers pays en Europe à avoir sa fiction qui vienne
03:43au premier rang des œuvres regardées par le public, je le situe à peu près en 2013-2014,
03:49parce que les gens regardaient surtout des fictions américaines.
03:51Maintenant, la France regarde ses propres fictions, les spectateurs regardent ses propres
03:56fictions, et en France on commence à regarder un peu tous les genres, et à ouvrir un peu
04:01notre spectre.
04:02On commence des séries géopolitiques, on pourra peut-être parler de Kaboul à un moment,
04:07il y a toujours bien évidemment le genre du thriller, il y a ces enquêtes dont Anne Landoy
04:12avec 37 secondes a fait vraiment une œuvre extrêmement fine, il y a des séries drôles,
04:18moi j'adore la série Cannibale, La Famille Rose, la série de Disney+, Ghost, et aussi
04:26quelque chose à regarder.
04:28Enfin voilà, il y a une grande créativité française.
04:31Dernière question sur un pays qui est ou a été, c'est ça la question que je vous
04:36pose, une terre de séries, c'est Israël, qu'en est-il ?
04:41Alors Israël, l'an dernier, moi j'avais eu un petit creux de séries, je peux en parler
04:45parce que je connais très bien la production de ce pays, vu que c'est Série Mania qui
04:48a fait rentrer un peu les séries israéliennes dans le creuset mondial des séries, et l'an
04:54dernier je n'en avais pas sélectionné parce qu'elles avaient été moins fortes.
04:57Cette année, c'est de nouveau les séries israéliennes en force, j'en ai reçu presque
05:01une vingtaine, j'en ai sélectionné une, The German, ça me permet de dire que je n'ai
05:07pas pu sélectionner tout parce que cette année, la sélection de Série Mania a été
05:11extrêmement difficile, non pas parce que nous n'avions pas assez de bonnes séries,
05:16mais au contraire parce que nous en avions trop, nous aurions pu faire peut-être deux
05:20sélections.
05:21Donc Israël est en forme, sur le plan de la créativité, il y a toujours un problème
05:26de moyens, on va voir ce qui va se passer à présent, parce que vous savez que moi
05:30j'accueille des séries qui ont peut-être été décidées il y a un an et demi, deux
05:33ans.
05:34Comment représenter ce qui s'est passé ?
05:38Alors, comment représenter ? Pour l'instant, on est encore dans des représentations un
05:43peu du passé, mais qui touchent beaucoup Israël.
05:45J'ai eu une série sur l'attaque de l'ambassade israélienne d'Argentine, qui était un des
05:51premiers attentats dans les années 90.
05:53Il y en a eu une sur Ossilin, un fait réel, sur la place Tahrir en Égypte où l'ambassade
06:01israélienne était assiégée.
06:04Il n'y en a pas encore sur le 7 octobre, à mon avis, j'attends la sélection de l'an
06:09prochain.
06:10Anne Landoy, vous aviez écrit en grenage une autre série judiciaire, culte, je l'ai
06:16dit, dont les premiers épisodes remontent à 2005, il y a 20 ans, 20 ans après c'est
06:24plus facile, plus difficile d'écrire une série, le métier a profondément changé
06:29ou pas ?
06:31Oui, le métier a profondément changé, ça c'est sûr, plus facile je ne sais pas, j'ai
06:36envie de dire qu'on se met à chaque fois la barre de plus en plus haute, d'abord parce
06:40qu'on a appris à écrire les séries, j'ai l'impression qu'on s'entraîne tous à faire
06:46des séries de plus en plus complexes, avec des enjeux narratifs de plus en plus forts,
06:54des formats aussi extrêmement différents, il y a une richesse qui est absolument incroyable
07:00entre les formats de 10 minutes, les 26, tous les genres sont explorés et c'est vrai
07:07que mon univers c'est plutôt le polar et le judiciaire, mais même à l'intérieur
07:14de ce genre-là, on voit toute l'innovation qu'on est capable d'apporter, à la fois
07:19nous les auteurs, mais aussi parce qu'on sent qu'on a une liberté quand même totale
07:25pour raconter les histoires comme on a envie de les raconter.
07:28Ça c'est quand même un gain, ça c'est très nouveau et c'est très plaisant quand
07:32on est scénariste.
07:33Oui j'imagine, alors parlons donc de, vous êtes en compétition, je ne voudrais pas
07:42casser l'ambiance, mais parlons de 37 secondes, série Arte, 6 x 52 épisodes, enquête judiciaire
07:52librement inspirée de l'affaire du Bugalède-Braise, le naufrage du chalutier breton et de ses
08:01cinq pêcheurs au large des côtes anglaises, qu'est-ce qui vous a stimulé dans cette
08:10histoire qui reste un mystère ?
08:12Alors en effet, c'est une histoire qui reste un mystère, alors qu'est-ce qui nous a stimulé
08:19Sophie Coves-Brin ? C'est d'abord la dimension humaine de ce drame, qui repose à la fois
08:27sur un combat, le combat des familles, si toute cette enquête a eu lieu, c'est vraiment
08:34grâce à la persévérance et à la volonté des familles d'affronter la vérité.
08:40Et ces familles ont vraiment totalement driveé une énergie incroyable, d'abord l'énergie
08:48de toute une région, qui a été aussi portée à la fois par l'avocat des familles que
08:53nous avons rencontré, Christian Bergotte, également par un juge d'instruction très
08:59très volontariste, nous on s'est beaucoup inspiré de l'affaire, des faits réels,
09:08et on a vu que cette affaire qui demeurait aujourd'hui en effet toujours un mystère,
09:15on a pu rentrer dans la complexité du réel aussi, parce qu'à chaque étape, à chaque
09:20volonté de faire émerger la vérité, il y en avait une nouvelle qui apparaissait.
09:24Et c'est ce qui nous a paru complètement surréaliste avec Sophie, ma co-autrice, en
09:30fait quand on avance dans une enquête, en général les choses s'éclaircissent, avec
09:35le Bugalède-Brest c'est le contraire, plus on avance et plus le mystère s'épaissit.
09:38Et comment s'est articulé le travail entre la fiction qui est nécessaire à la création
09:44d'une série et la dimension « documentaire » puisque vous avez fait le travail que vous
09:51venez de décrire, travail auprès des sources judiciaires notamment, les familles, etc.
09:57Exactement, alors les faits sont vraiment les faits réels, en revanche tout ce qu'on
10:04constate sur les familles, sur les enjeux humains, émotionnels qui se passent entre
10:11eux, ça vient vraiment de notre imagination.
10:13On a fait le choix délibéré dès le départ de ne pas impliquer les familles dans cette
10:17histoire.
10:18Pourquoi ? Parce que je pense qu'il y a une partie des familles qui auraient peut-être
10:23accepté de nous parler, une autre partie qui n'aurait pas accepté et si les familles
10:29avaient accepté de nous parler, elles auraient pu nous confier des choses extrêmement intimes,
10:35un chagrin et on ne peut plus faire de fiction dessus, la trahison elle est là.
10:38Donc on a vraiment décidé de se focaliser sur les faits réels et tout le reste on l'a
10:43inventé.
10:44Parce que les familles c'est très large en fait, quand on dit les familles c'est
10:48surtout les partis civils, il y a énormément de personnes qui se sont constituées partis
10:53civils dans ce dossier mais nous ce qui nous a vraiment intéressé c'est de se concentrer
10:58sur un petit groupe d'entre elles et de montrer comment leur combat pour la vérité
11:04est aussi un combat intime avec évidemment le personnage de Nina Meurice qui en plus
11:10est aussi en quête de rédemption et qui va rajouter une couche à tout ce qui apparaît
11:17comme un combat pour la vérité et qui est vraiment le combat d'une femme.
11:20Et puis vous nous remettez sous les yeux une affaire, je ne sais plus où vous l'avez
11:25dit, mais une affaire dont tout le monde s'est foutu à un moment, à la vie des
11:31pêcheurs, n'intéressait personne.
11:34Alors en effet c'est une région, si la région a été très très concernée par
11:38ce drame et on le comprend, il faut quand même savoir que les pêcheurs c'est d'abord
11:46une population qui est très peu représentée dans les fictions.
11:48En général d'ailleurs les classes populaires sont très peu représentées et c'est aussi
11:54ce qui nous a intéressés, c'est ce traitement du monde de la pêche qu'on ne connaît pas,
11:59qu'on connaît mal, nous on s'en est beaucoup imprégnés.
12:02Et cinq pêcheurs qui meurent en mer, ma foi, est-ce que ce n'est pas la fatalité ? Et
12:08est-ce que ce n'est pas un peu le lot de tous les pêcheurs ?
12:11La faute à pas de chance.
12:12C'est la faute à pas de chance.
12:13Et c'est parce que les circonstances du naufrage ont quand même suscité une forte
12:17interrogation que plusieurs personnes se sont agrégées en disant mais nous on veut la
12:23vérité.
12:24Et vraiment je trouve que c'est rendre hommage à ces familles, de se rendre compte que si
12:30le bateau a été renfloué c'est quand même grâce à elles, ce qui est quand même incroyable.
12:34C'est en fait la force, à travers 37 secondes, on voit ce qu'est la force des séries et
12:41avec le talent des scénaristes, c'est-à-dire qu'on prend un fait réel, on va regarder
12:46à l'intérieur, on va trouver des explications et on reste très ancré dans les personnages.
12:52Et vous verrez, les personnages de ces familles dans cette région de Bretagne sont extrêmement
12:58forts et vous émeuvent très profondément tout en posant une question essentielle.
13:02Est-ce qu'il y a eu quelque chose d'autre que simplement un naufrage ?
13:06Est-ce que je pourrais juste ajouter quelque chose de plus général Nicolas ?
13:11Je sais qu'en fait vous êtes un très grand fan de séries.
13:14Et donc à l'antenne, je vais me permettre de vous inviter officiellement à venir l'an
13:20prochain à la prochaine édition de Série Mania, partagez avec les spectateurs, avec
13:26le public, vos séries préférées et pourquoi ce sont vos séries préférées.
13:31C'est un exercice redoutablement difficile.
13:34Je n'en doute pas.
13:36Parce qu'expliquer ce qu'on aime est terrible.
13:41Écoutez, merci à toutes les deux et invitation acceptée.
13:45Merci à toutes les deux, Laurence Herzberg, directrice générale de Série Mania qui ouvre
13:50donc vendredi pour huit jours, merci Anne Landoy et bon courage pour votre série 37
13:58secondes qui est en compétition française et qui sera diffusée sur Arte.

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