L’Ukraine peut-elle échapper à de nouveaux accords de Munich entre Trump et Poutine ?

Sud Radio

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Avec Général Dominique Trinquand, Ancien chef de la mission militaire française auprès de l’ONU et auteur du livre “Ce qui nous attend” aux éditions Robert Laffont

On décrypte le monde, tous les samedi matin à 8h16.

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##ON_DECRYPTE_LE_MONDE-2025-02-15##

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00:00On décrypte le monde et le sort de l'Ukraine avec notre invité de Général Trinquant.

00:07Bonjour Dominique Trinquant.

00:08Bonjour.

00:09Vous êtes l'ancien chef de l'émission militaire française auprès de l'Organisation des Nations Unies.

00:13Auteur de ce livre, Ce qui nous attend, publié aux éditions Robert Laffont.

00:19Qu'est-ce qui attend l'Ukraine ? Vaste question alors que Volodymyr Zelensky a eu une longue réunion hier à Munich.

00:27Quel symbole avec le vice-président américain J.D. Vance.

00:31Au sortir de cette réunion dont peu d'éléments ont filtré, Volodymyr Zelensky a assuré que c'était une bonne réunion.

00:38Le vice-président américain lui a assuré qu'il voulait, je cite,

00:42« avancer vers une paix durable et non vers le risque d'une guerre qui reprendrait dans quelques années en Europe de l'Est ».

00:47Qu'est-ce qu'on doit conclure de ces premiers éléments, Dominique Trinquant ?

00:52Alors des premiers éléments, d'abord il faut retenir le décalage qui existe entre les déclarations de M. Trump

00:58et la réalité de ce qui se passe actuellement à Munich.

01:02Le président Trump a jeté sur la table des éléments de négociation qui ne sont pas des éléments de négociation.

01:07En fait, il a repris tous les éléments que le président Poutine avançait.

01:12Pas d'OTAN, cession de tous les territoires à la Russie et enfin contestation de la légitimité du président Zelensky.

01:22Alors M. Trump qui prétend être un bon négociateur me paraît un petit peu à côté de la plaque pour commencer la négociation.

01:29Je dis bien pour commencer. On en est aux prémices.

01:33Deuxième point, la réunion de Munich, normalement ce n'est pas une réunion où on négocie.

01:38C'est un forum dans lequel on discute un peu des problèmes de sécurité.

01:44Au passage, on oublie le forum de 2007 dans lequel le président Poutine avait été très clair,

01:49avait dit qu'il voulait la fin de l'unilatéralisme américain.

01:53Les Américains ont choisi d'entamer la négociation par le biais du vice-président Vance hier.

02:00Alors M. Zelensky est effectivement dans une position très difficile puisqu'on annonce en entrée de jeu

02:06que les Américains acceptent toutes les conditions de M. Poutine.

02:10Donc évidemment, je n'ai pas été dans l'entretien entre Vance et Zelensky, mais je pense que ça va être extrêmement difficile.

02:19Encore une fois, M. Poutine a gagné quelque chose d'essentiel, c'est qu'il discute directement avec les États-Unis.

02:25Donc ça se passe par-dessus la tête de l'Ukraine et des Européens.

02:30Et ensuite, on va discuter avec M. Zelensky pour lui faire accepter ce qui a déjà été convenu entre M. Trump et Poutine.

02:38Donc ça me paraît une négociation très compliquée.

02:41Et l'objectif final, ce qui est annoncé, n'est pas d'obtenir un cessez-le-feu,

02:46mais une paix sur le long terme me paraît très compromis.

02:49— Mais comment peut-on obtenir une paix dans la mesure où il faudrait que les deux pays en guerre,

02:55à savoir l'Ukraine et la Russie, se mettent d'accord sur une frontière ? C'est pas possible.

03:01— Oui, vous avez raison. Ça n'est pas possible. Et puis je double ça du fait que M. Poutine a dit depuis le début

03:08qu'il voulait pas parler avec M. Zelensky. Il a dit qu'on discutera avec l'Ukraine d'une façon ou d'une autre,

03:13en éloignant le problème de Zelensky, qu'il déteste par-dessus tout, puisqu'il a osé lui résister pendant 3 ans.

03:20Donc ça me paraît très très problématique d'obtenir une paix. Donc je pense qu'on peut arriver à un cessez-le-feu – ça, oui –

03:27pour arrêter ce massacre, parce que très objectivement, sur le terrain aujourd'hui, les Russes ne progressent pas beaucoup.

03:34Je regarde ça tous les jours. Et au prix de 1 200 morts par jour...

03:39— 1 200 morts par jour ? Mais perdus. Morts, blessés et capturés. — Voilà, exactement.

03:45Les Ukrainiens, à peu près 600. C'est les chiffres qu'on m'a donnés hier, validés. Donc c'est un massacre pour les deux camps,

03:53un peu moins pour les Ukrainiens. Mais les Ukrainiens, c'est un plus petit pays. Donc proportionnellement, c'est plus important.

03:58— Bien qu'en Ukraine, il n'y ait pas les mêmes réserves. Alors justement, on va revenir sur l'état du front, parce que vous avez raison

04:04de noter que ça fait plus d'une semaine que les Russes ne parviennent plus à avancer, malgré les assauts souvent suicidaires, d'ailleurs,

04:09qui sont menés sur les lignes ukrainiennes. C'est une surprise. On s'attendait clairement il y a quelques semaines ou quelques mois

04:15à voir le front ukrainien non pas s'effondrer mais reculer sérieusement dans le Donbass. Ce n'est plus le cas. Malgré tout,

04:21et là, pour le coup, Donald Trump a raison, l'Ukraine résiste grâce à l'aide massive américaine. Cette aide ne pouvait pas être éternelle.

04:29Si demain, les Américains arrêtent de fournir l'Ukraine en argent et en armes, effectivement, l'Ukraine peut s'effondrer.

04:36On est d'accord, Dominique Trinquant ? — Alors premier point. Je voudrais rappeler simplement que les chiffres donnés par les Américains

04:43sont faux. L'UE a donné beaucoup plus de moyens que les Américains. Ceci étant, le cumul des deux, évidemment, est nécessaire à l'Ukraine.

04:52Mais les Européens ont fourni plus d'aides à l'Ukraine que les Américains. Il faut le répéter. Deuxième point. L'aide américaine qui est fournie aux Ukrainiens

05:03est dans l'intérêt américain, puisqu'ils fournissent de l'argent pour acheter de l'armement américain. Donc il ne faut pas être complètement naïf

05:11sur la manœuvre américaine. Ceci étant, si l'aide américaine s'arrêtait dans les mois qui viennent, puisqu'il y a une partie qui a déjà été votée...

05:19Alors il pourrait toujours y avoir un décret américain qui règle tout ça. Mais si l'aide américaine s'arrêtait, il faudrait que les Européens

05:27prennent le relais. Et ça ne permettrait pas, en tout état de cause, on est bien clair, même si les Américains continuaient, de reconquérir le territoire

05:36occupé par les Russes. Donc c'est la clé. Si vous voulez, les Russes occupent un territoire, ont beaucoup de mal à continuer à progresser.

05:43Mais les Ukrainiens, de toute façon, ne pourront pas reconquérir le territoire. Donc il y a bien un moment où il faut arrêter le massacre, s'arrêter et commencer

05:51à discuter. Et je pense pas que ça se fasse en 48 heures à Munich. Je pense que ça va prendre plus de temps que ça. Mais il faut espérer d'abord qu'il y ait

05:59un cessez-le-feu. — En revanche, et ça, vous pouvez le confirmer, Dominique Trinquant, on est arrivé au moment où l'Ukraine doit malgré tout

06:05décider de renoncer, au moins temporairement, à sa propre Alsace-Lorraine. — Oui, tout à fait. Vous avez raison de souligner l'Alsace-Lorraine.

06:14C'est ce que je dis malheureusement aux Ukrainiens. Je leur dis « Écoutez, nous, on a perdu l'Alsace-Lorraine pendant 50 ans. On l'a retrouvée ».

06:20Donc que se passera-t-il dans 50 ans entre la Russie et l'Ukraine, je n'en sais rien. Mais en tout état de cause, physiquement, j'allais dire, l'Ukraine n'a pas

06:27les moyens de reconquérir ce territoire. Si elle voulait reconquérir le territoire, il lui faudrait beaucoup plus d'hommes, beaucoup plus de munitions,

06:35beaucoup plus d'armements globalement. Et elle n'arriverait pas à avancer, ce que les Russes n'arrivent pas à faire aujourd'hui.

06:42On citait les morts tout à l'heure. Mais ils avancent, comme vous dites, des massacres. Pourquoi ? Parce qu'ils avancent beaucoup plus à pied,

06:48tout simplement parce que les véhicules blindés... Aujourd'hui, il y a des drones absolument partout. Et dès que vous avez un véhicule blindé

06:55qui avance, il se fait siffler par des drones kamikazes. Et donc, grande difficulté pour essayer de progresser.

07:04— Et c'est la raison pour laquelle cette guerre, quoi qu'il arrive, est un massacre. Un massacre depuis près de 3 ans. Massacre voulu par Vladimir Poutine

07:11lorsqu'il a ordonné l'invasion de l'Ukraine. Lui qui pensait prendre Kiev en 3 jours. Merci, Dominique Tracan.

07:17— Merci. — On parlera des négociations de paix avec vous, évidemment. 6 négociations de paix, il y a. On en reparlera.

07:24Je rappelle votre livre « Ce qui nous attend », livre prophétique en quelque sorte. C'est publié chez Robert Laffont.